SOURCE - Paix Liturgique - lettre 431 - 18 mars 2014
Le 27 février dernier, le pape François rencontrait une soixantaine d’évêques du monde entier liés au mouvement des Focolari. Cette rencontre s’est déroulée pendant leur session annuelle dont le thème était « la réciprocité de l’amour entre les disciples du Christ ».
Le 27 février dernier, le pape François rencontrait une soixantaine d’évêques du monde entier liés au mouvement des Focolari. Cette rencontre s’est déroulée pendant leur session annuelle dont le thème était « la réciprocité de l’amour entre les disciples du Christ ».
À cette occasion le Saint-Père a pu revenir sur des thèmes simples qui lui sont chers, tels que la communion et l’unité de l’Église.
I – LA DÉPÊCHE DE ZENIT
ROME, 27 février 2014 (Zenit.org) – « La société d’aujourd’hui a besoin du témoignage d’un style de vie où transparaît la nouveauté donnée par le Seigneur Jésus : des frères qui s’aiment malgré les différences de caractère, de provenance, d’âge… », souligne le pape François.
Le Pape a rencontré les évêques amis du mouvement des « Focolari », ce matin, 27 février 2014, au Vatican.
Saluant le thème de leur congrès annuel – « La réciprocité de l’amour entre les disciples du Christ » – qui « rappelle le commandement nouveau donné par Jésus à ses disciples », le Pape s’est réjoui de « cette occasion de partage fraternel des expériences spirituelles et pastorales dans la perspective du charisme de l’unité ».
« La société d’aujourd’hui a grand besoin du témoignage d’un style de vie où transparaît la nouveauté donnée par le Seigneur Jésus : des frères qui s’aiment malgré les différences de caractère, de provenance, d’âge… Ce témoignage fait naître le désir d’être impliqués dans la grande parabole de communion qu’est l’Église », a-t-il ajouté.
En effet, a poursuivi le Pape, « quand une personne ressent que “la réciprocité de l’amour entre les disciples du Christ” est possible et est capable de transformer la qualité des relations interpersonnelles, elle se sent appelée à découvrir ou à redécouvrir le Christ, elle s’ouvre à la rencontre avec Lui, vivant et à l’œuvre, elle est encouragée à sortir d’elle-même pour aller vers les autres et répandre l’espérance qu’elle a reçue en don».
Citant Jean-Paul II dans sa Lettre apostolique Novo millennio ineunte, le pape François a donné pour mission de « faire de l'Église la maison et l'école de la communion » (n. 43) : cela est « fondamental pour l’efficacité de tout engagement dans l’évangélisation », a-t-il insisté.
« Faire de l'Église la maison et l'école de la communion » révèle « le désir profond du Père que tous ses enfants vivent en frères ; la volonté du Cœur du Christ que "tous soient un" (Jn 17,21) ; le dynamisme de l’Esprit-Saint, sa force d’attraction libre et libératrice ».
« Cultiver la spiritualité de communion rend capable de vivre le chemin œcuménique et le dialogue interreligieux », a estimé le Pape.
Les remerciant de leur visite, il a souhaité, avant de les bénir, que ce congrès soit « une occasion de grandir dans l’esprit de la collégialité, et de tirer de l’amour réciproque un motif d’encouragement et d’espérance renouvelée ».
Comme évêques, leur a-t-il rappelé, « vous êtes appelés à apporter à ces rencontres le large souffle de l’Église, et à faire bénéficier toute l’Église de ce que vous recevez ».
II – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) « Des frères qui s’aiment malgré les différences de caractère, de provenance, d’âge… », voilà le témoignage auquel le pape François invitait son auditoire d’évêques amis des Focolari. Il est clair que cette invitation s’adresse à chacun d’entre nous, en raison du propos lui-même, par-delà les différences. Plus qu’une simple invitation, c’est un mode de vie à épouser, une véritable conversion à laquelle le Pape nous exhorte à tous les niveaux de l’Église.
« Des frères qui s’aiment malgré les différences de caractère, de provenance, d’âge… », n’est-ce pas une particularité qui devrait caractériser chacun de nos diocèses et, plus encore, chacune de nos paroisses ? Quels que soient son âge, son parcours personnel, sa sensibilité, tout baptisé ne devrait-il pas se sentir aimé, accueilli dans sa propre paroisse ?
Tel n’est hélas que rarement le cas aujourd’hui, tant bon nombre de paroisses s’identifient notamment par « l’étiquette liturgique », c’est-à-dire la sensibilité liturgique non seulement du clergé paroissial mais surtout (!) de l’équipe d’animation pastorale. La conséquence d’une telle dérive est que ceux qui ne partagent pas cette sensibilité liturgique sont au mieux tolérés dès lors qu’ils restent discrets, mais au pire exclus de leurs propres paroisses. « Fichez le camp ! », « Retournez chez Lefebvre ! » : combien de fois des familles, qui demandaient la mise en œuvre du Motu Proprio dans leur paroisse mais aussi, plus simplement, la permission de célébrer des funérailles ou un mariage selon la liturgie traditionnelle, n’ont-elles pas entendu – y compris dans la bouche de leur propre curé – de tels propos d’exclusion ?
Le curé de paroisse garant de l’unité de son troupeau, prêtre de toutes ses ouailles au-delà des différences légitimes, voilà le seul modèle pastoral crédible pour que se réalise « le désir profond du Père que tous ses enfants vivent en frères » et que soit accomplie « la volonté du Cœur du Christ que "tous soient un" ».
2) «Faire de l'Église la maison et l'école de la communion », dit le Pape en citant le paragraphe 43 de Novo millennio ineunte. Nous l’avons répété un certain nombre de fois : les débats de l’après-Concile, spécialement liturgiques, ont été l’occasion de confrontations parfois très acerbes. Ces débats au sujet de la lex orandi, comme ceux au sujet de la lex credendi, comportent de tels enjeux qu’il est légitime de les soutenir avec cette vigueur nécessaire aux choses du Royaume de Dieu dont parle l'évangéliste (Matthieu 11, 12). Mais cela n’exclut pas la charité, l’attention et la sollicitude pour autrui, bien au contraire. Qui défend la vérité, œuvre par définition pour la charité. Il doit le faire avec les moyens adéquats, qui sont proportionnés au but poursuivi, autrement dit des moyens de charité.
Les défenseurs de la liturgie traditionnelle, c’est vrai, ont pu parfois l’oublier. Mais si cela a été, on peut leur accorder qu’ils n’étaient pas en « position dominante ». Car la défense de la charité entre tous, de la paix commune et, plus globalement, du bien commun qui est toujours le bien de la paix et de la charité, relève d’abord du devoir des pasteurs. Il faut insister : la diffusion et l’exemple donné de la charité, la paix des cœurs dans l’Église, spécialement la paix liturgique, est d’abord l’œuvre des pasteurs.
3) Une « occasion de partage fraternel des expériences spirituelles et pastorales dans la perspective du charisme de l’unité ». Quel magnifique diocèse serait celui qui ferait siennes ces belles paroles pleines de sagesse ! L’unité n’est pas l’uniformité et l’on regrette souvent de voir, ici et là, tel ou tel prêtre rejeté par les siens, mis au banc du diocèse, en raison de son attachement à la liturgie traditionnelle de l’Église. On regrette de voir des familles "menées en bateau", humiliées, mal considérées, voire dénigrées en raison de leur volonté de vivre leur foi au rythme de la forme extraordinaire du rite romain. Il ne suffit pas de faire de vibrantes prières universelles pour vivre et bâtir l’unité : le bon sens commande de balayer devant sa porte et de commencer à accueillir l’ensemble des sensibilités liturgiques dans chaque diocèse et dans chaque paroisse. Ce n’est qu’à ce prix que nos communautés chrétiennes sauront sortir d’elles-mêmes pour aller vers les autres et répandre l’espérance qu’elles ont reçue en don.
4) « Ce témoignage fait naître le désir d’être impliqués dans la grande parabole de communion qu’est l’Église ». Nos communautés doivent en effet sortir d’elles-mêmes, pour reprendre un autre thème du pape François ! Nous le rappelions à l’occasion de nos vœux : la diffusion externe de l’Évangile a pour moteur la charité et la miséricorde envers les âmes, mais elle doit aussi nécessairement se manifester à l’intérieur. « Jour après jour, disent les Actes des Apôtres au sujet de la première communauté chrétienne, d’un seul cœur, ils fréquentaient assidûment le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec allégresse et simplicité de cœur. Ils louaient Dieu et avaient la faveur du peuple. Et chaque jour, le Seigneur adjoignait à la communauté ceux qui seraient sauvés » (Ac 2, 46). Parce qu’ils rayonnaient de la charité du Christ, ils agrégeaient d’autres hommes au Christ. La charité entre les membres de l’Église, aussi divers qu’ils soient, est la première prédication de l’Évangile de charité : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13, 35).
La liturgie traditionnelle est l'un des creusets de formation de familles solides dans la foi, zélées dans sa transmission, fécondes en vocations religieuses et sensibles au respect des lois du mariage. Pourquoi mépriser a priori ceux qui relèvent de cette sensibilité au point de souvent les traiter comme marginaux ? Pourquoi ne pas donner sa chance à la charité?