SOURCE - Denis Crouan - Pro Liturgia - 11 janvier 2009
Notre clergé français nous a longtemps demandé, à nous fidèles laïcs, d'être des chrétiens "adultes", "responsables", qui "osent une parole forte". Mais quand nous, simples fidèles laïcs, au nom de l'exercice de notre responsabilité et de notre liberté de parole, nous nous sommes parfois autorisés à déclarer que la crise que traverse aujourd'hui l'Eglise, en France, est en grande partie imputable au clergé - et plus précisément aux évêques -, ça a dérangé. Brutalement, on n'a plus voulu de chrétiens "adultes": on a préféré des fidèles bêlants et l'on a accusé ceux qui osaient parler de manquer de charité ou de semer la division. Comme si le manque de charité n'avait pas d'abord été le fait de ceux qui ont refusé aux fidèles la liturgie et la catéchèse que l'Eglise voulait leur garantir; comme si la division n'était pas née de l'éclatement de la liturgie et, par la suite, de l'effondrement des paroisses puis de la division des paroissiens; comme si le clergé local, victime de l'absence de formation solide et atteint du syndrome anti-romain, n'avait pas eu sa part dans la crise actuelle.
Nos propos dérangent essentiellement un certain "clergé hexagonal" qui tente depuis des années de faire croire que tout a toujours été fait - et vraiment bien fait - pour que les enseignements de Vatican II soient appliqués partout, dans toutes les paroisses, à toutes les messes, à tous les niveaux des diocèses. En réalité, il faut bien, au nom de la vérité, dire que non seulement les enseignements du Concile n'ont pas été appliqué en France, mais qu'en plus - ce qui est au fond bien plus grave - les fidèles qui voulaient les appliquer ont été réduits au silence, montrés du doigt, expulsés - oui, proprement expulsés - des paroisses, au motif qu'ils n'étaient plus dans la mouvance de la pastorale qui devait s'y faire pour, disait-on, "bâtir l'Eglise de demain".
Propos exagérés, diront certains? En aucune façon, hélas. Nous avons sous les yeux de très nombreux documents qui prouvent l'exactitude des faits avancés. De plus, des ouvrages commencent à être publiés dont l'objectivité ne saurait être mise en cause: tous font état d'un véritable laisser-aller que, dans les années 1960-80, les évêques de France, dans leur grande majorité, ont laissé s'installer ou même ont encouragé. Et s'il fallait encore donner un exemple du silence coupable et malheureusement encore très actuel de l'épiscopat français, il suffirait de rappeler qu'aujourd'hui encore, aucun des récents documents magistériels concernant la liturgie n'a donné lieu à des corrections de ce qui se fait partout de travers dans les églises, ni conduit à des applications fidèles de ce qui doit se faire. C'est un signe qui ne saurait tromper personne.
Et si nous prenons ici la liberté de reprendre - respectueusement mais avec opiniâtreté - nos pasteurs, et d'abord les évêques diocésains, c'est parce que nous, fidèles qu'on dit être "de la base", sommes très lassés de recevoir d'eux des serpents quand nous leur demandons du pain. C'est parce que nous, simples fidèles, sommes découragés d'être, depuis plus de 40 ans, traités pour ainsi dire comme des "sans-papiers" obligés de chercher un havre de paix liturgique et catéchétique dans la rare paroisse où un prêtre courageux aura su, souvent contre vents et marées et sans aucun soutien de la part de sa hiérarchie, mettre véritablement en oeuvre la liturgie de l'Eglise.
Venons-en à la liturgie et à la pastorale qui s'y rapporte. A la suite de Vatican II, le Missel romain actuel rappelle, sans la moindre ambiguïté, que personne, même prêtre, n'a le droit d'ajouter, de retrancher ou de modifier quoi que ce soit dans la liturgie. Où voit-on cette règle être respectée? Nulle part. Même nos évêques ne la respectent pas, préférant le plus souvent s'adapter aux habitudes liturgiques de la communauté paroissiale locale qui les accueille, au lieu d'habituer la communauté en question à accueillir l'authentique liturgie de l'Eglise.
Oui, force nous est de constater que la liturgie romaine célébrée par un pasteur diocésain français est toujours plus ou moins transformée en autre chose que ce que doit être la liturgie romaine. A quelques rares exceptions près. De façon générale, il y a donc eu, à la suite de Vativan II, et il y a encore, dans nos paroisses, ce qu'on est bien obligé d'appeler une vaste "imposture liturgique". N'est-ce pas là ce qui, paradoxalement, a incité certains fidèles à se dire davantage attentifs aux enseignements du Souverain Pontife que ne le sont parfois certains pasteurs de France?
Les enseignements du Concile n'ont pas été appliqué en France, disions-nous. Et pour étayer cette affirmation, pour comprendre les raisons de cette "trahison" du Concile, il suffit de rappeler ici ce qui s'est fait aussitôt après Vatican II: non pas en quelques endroits, comme on a voulu le faire croire, mais bien dans la totalité des paroisses et des séminaires de France. Oui, dans la totalité des paroisses et des séminaires! Ce qui prouve bien que la chute des vocations et de la pratique religieuse était sinon voulue, du moins programmée.
Dans les paroisses, ce sont des tables de communion, des confessionnaux, des autels qui ont été démolis (on a connu des tabernacles de chapelles baroques transformés en niches à chiens!); ce sont des prie-Dieu ou des agenouilloirs qui ont été supprimés; ce sont des objets liturgiques qui ont été donnés aux araignées des placards de sacristies ou même jetés et brûlés, ou encore vendus à des antiquaires: calices, ciboires, burettes, chasubles, encensoirs, ostensoirs, missels, antiphonaires... etc.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Encore dans les paroisses, c'est la messe en latin qui fut interdite; c'est le chant grégorien qui fut déclaré inchantable, puis incompréhensible, et enfin illicite; ce sont des organistes qui furent remplacés par un magnétophone posé sur l'autel; ce sont des choristes qui furent mis à la porte et remplacés par des fidèles usurpateurs d'une responsabilité en liturgie pour laquelle ils n'avaient généralement aucune compétence... etc.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Toujours dans les paroisses, il a fallu faire des rondes autour de l'autel, taper des mains durant les chants, se donner une poignée de main, remplacer tous les chants traditionnels et aimés des fidèles par des refrains inconsistants, sans cesse nouveau et inchantables (bien que composés par des "spécialistes" autoproclamés de la pastorale liturgique); il a fallu participer aux absolutions collectives, aux messes anticipées du samedi soir, aux "messes de jeunes" animées par un orchestre bruyant (et parfois désaccordé); il a fallu accepté que les messes soient remplacées par des A.D.A.P. alors même qu'un prêtre était présent... etc.
Pourtant le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Résultat: des prêtres âgés qui ne faisaient que ce que l'Eglise leur demandait de faire et qui se refusaient à suivre des directives pastorales qui leur semblaient contraire au Concile ont été lâchés par les évêques et proprement harcelés par des vicaires épiscopaux qui pourtant n'avaient que le mot "charité" en bouche. Certains de ces vieux prêtres ont été contraints de prendre une retraite anticipée, ont été sommés de s'isoler, et ont même été interdits de célébrer la messe en public. Quant aux fidèles qui demandaient une stricte application des directives conciliaires qu'on leur refusait, ils ont par la force des choses formé la masse des "silencieux de l'Eglise", masse rapidement prise en otage par une poignée d'autres fidèles sortis d'on ne sait où pour former un véritable "politburo" ayant ses ramifications dans toutes les instances diocésaines. Parmi ces "silencieux de l'Eglise", quelques uns ont fini par s'habituer tant bien que mal à la dévastation liturgique à laquelle ils assistaient, mais beaucoup d'autres, lassés, abattus, ont décidé de quitter les lieux sur la pointe des pieds. D'autres encore sont allés grossir les rangs de ceux qui pensaient, à tort, que la pagaille à laquelle ils assistaient était le fruit véritable du Concile. Ces départs massifs n'ont d'ailleurs pas gêné les instances diocésaines puisque, d'une part, ils laissaient une plus grande liberté de manoeuvre aux démolisseurs déjà en place, et d'autre part ils permettaient de lancer un grand slogan: "Aux messes dominicales, nous n'avons plus le nombre, mais nous avons gagné en qualité et en ferveur". En d'autres termes, la méthode Coué servant à s'enfoncer volontairement dans le marasme.
Dans les grands séminaires diocésains (devenus par la suite interdiocésains en raison d'une baisse des vocations que l'on a mis du temps à reconnaître), on n'a admis que des jeunes au caractère assez faible pour pouvoir être manipulés par des Supérieurs déjà totalement gagnés aux idées de la pastorale nouvelle. Les séminaires se sont alors transformés en sortes de colonies de vacances pour jeunes en mal d'identité et en lieux de formatage des esprits, le but étant de faire en sorte que le futur clergé des diocèses de France devienne hostile à tout ce qui vient de Rome. Une hostilité qu'il fallait entretenir au nom du fonctionnement de la "pastorale de demain", laquelle était assurée - disait-on - de porter des fruits à la seule condition de jeter par-dessus bord tout ce qui s'était fait jusqu'ici.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ainsi.
Encore dans les séminaires, il fallait que les futurs prêtres soient formés par des professeurs totalement opposés à la liturgie et à toute forme de dévotion: vouloir ou même simplement participer à une messe célébrée selon le Missel romain était un critère de non-vocation. Souhaiter un minimum de chant grégorien était un symptôme d'intégrisme dangereux. Simplement évoquer les enseignements du pape déclenchait des rires sarcastiques. Etre issu d'une paroisse réputée classique devenait suspect. Refuser d'inventer des prières eucharistiques et de chambouler l'ordonnancement de la liturgie eucharistique était rédhibitoire. Refuser de participer à des célébrations eucharistiques où prêtres et pasteurs protestants "concélébraient" pour des raisons d' "ouverture à l'autre" ou d' "oecuménisme" était passible d'exclusion. Étaient strictement interdits: l'agenouillement au cours des messes, la récitation du chapelet, l'adoration eucharistique, le port des vêtements liturgiques prescrits, la communion dans la bouche... Autant de pratiques ou de signes caractéristiques d'une religion passéiste dont il fallait au plus vite se débarrasser. Était fortement conseillée la lecture de "Témoignage Chrétien" ou l'adhésion à un mouvement d'Action Catholique ayant des connivences avec le socialo-communisme et permettant d'organiser des réunions au cours desquelles il était possible de célébrer une Eucharistie sur la table de cuisine de deux ou trois religieuses vivant "en communauté de base" dans une H.L.M. Étaient interdites: la fréquentation d'abbayes réputées "conservatrices" (Solesmes, Kergonan, Saint-Wandrille... ) et la lecture de "L'Homme Nouveau" ou de "L'Ami du Clergé", publications jugées trop attachées aux enseignements de Rome.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ainsi.
Toujours dans les séminaires diocésains, les études se limitaient à toucher un peu à tout sans véritablement approfondir quoi que ce soit. En sorte que les candidats au sacerdoce finissaient par avoir sur toutes les questions des opinions élaborées à partir d'une connaissance très superficielle et souvent fragmentaire des problèmes. Celui qui avait lu deux pages d'une revue qui contestait l'enseignement magistériel se prenait ipso facto pour un grand théologien, tout comme celui qui savait gratter quelques notes sur une guitare se voyait élevé au rang de spécialiste du chant liturgique. Par contre, les séminaristes semblaient soigneusement éviter les conférences d'un niveau élevé, sur tel ou tel sujet; probablement avaient-ils la crainte d'être dépassés ou de paraître ignorants. Ce qu'ils étaient assez souvent. La seule discipline qui avait alors le vent en poupe était l'exégèse biblique. Mais pas n'importe laquelle: uniquement celle élaborée par une certaine "intelligentsia" qui, à la suite de Bultmann et du mouvement de "démythologisation", en venait à enseigner que le Christ, le Messie, le Fils de Dieu annoncé et adoré par l'Eglise n'était qu'une construction tardive ayant peu ou rien à voir avec le "Jésus de l'histoire". A partir d'un tel enseignement, tout pouvait être librement remis en question, à commencer par tout ce qu'enseignait l'Eglise elle-même depuis ses origines.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé qu'il en soit ainsi.
Résultat: dans les séminaires diocésains de France, de très nombreux jeunes, pour des raisons souvent fallacieuses, ont été découragés d'aller jusqu'au terme de leur vocation. Ceux qui étaient considérés comme trop "traditionnels" tout simplement parce qu'ils se montraient ouvertement attachés à l'enseignement de l'Eglise, du pape, du Concile, furent exclus. Exclus? Non, pas vraiment. On se contentait de différer sans cesse l'année de leur ordination, en souhaitant qu'ils finissent ainsi par comprendre qu'ils feraient mieux de quitter les lieux d'eux-mêmes. Ainsi pouvait-on dire en haut-lieu que personne n'a jamais été exclu d'un séminaire: les candidats à la prêtrise étaient simplement partis d'eux-mêmes, librement, après avoir réfléchi et compris que leur place n'était pas dans l'Eglise telle que souhaitée par l'autorité diocésaine. La chute des vocations devenait ainsi la faute à pas de chance. Jusqu'où l'hypocrisie ne serait-elle pas ainsi allée pour sauvegarder des apparences! Ne sont alors restés dans les séminaires de France - comme le reconnaît aujourd'hui Mgr Gaidon - que des jeunes au caractère faible, au tempérament mou, à la culture mal assurée, à la spiritualité inconsistante, et parfois même aux orientations affectives mal stabilisées. Certes, ces candidats au sacerdoce faisaient tous montre d'une extraordinaire générosité: celle des adolescents prêts à s'enthousiasmer pour les grandes causes humanitaires. Mais cette louable générosité devait-elle le seul critère permettant d'accéder au sacerdoce? Pour beaucoup, les grandes désillusions ne sont venues qu'après les ordinations, au contact des réalités paroissiales et spirituelles qui se situent à un niveau très différent de celui des interminables adolescences d'un certain clergé.
C'est l'enchevêtrement de ces faits qui explique en grande partie que nous ayons actuellement, en France, un clergé atone donnant souvent l'impression d'être dépassé par les événements, d'être incapable de comprendre pourquoi les fidèles désertent les messes paroissiales désarticulées et désacralisées soi-disant faites pour eux, alors qu'ils se pressent pour participer à une messe célébrée par un pape qui souhaite remettre de la dignité, du silence, de la beauté, de l'adoration... et même du latin dans la liturgie. Ce clergé-là, qu'il soit paroissial ou épiscopal, semble même incapable de comprendre pourquoi les jeunes générations se passionnent pour une expression liturgique de la foi que les générations précédentes ont voulu à tout prix démolir en prétendant même qu'il fallait en passer par une telle dévastation pour retrouver le vrai visage de l'Eglise.
Il reste un dernier point à éclaircir: ces faits étaient-ils limités à quelques paroisses et séminaires ou étaient-ils généralisés? Force nous est de répondre que la situation décrite ici correspond à ce qui fut fait dans l'ensemble des diocèses et des paroisses de France. Ce qui prouve bien qu'il y avait d'une part, un mot d'ordre visant à faire en sorte que l'enseignement conciliaire soit systématiquement détourné, bafoué, et qu'il y avait d'autre part, un épiscopat inefficace qui s'était comme résigné à laisser les choses aller leur train, c'est-à-dire aller vers une crise qui allait s'avérer longue et ruineuse.
Car régulièrement avertis de ce qui se faisait dans les paroisses et les séminaires, les évêques n'ont jamais réagi: si l'on cherche les déclarations des évêques diocésains de cette époque post-conciliaire, on ne trouve pas une seule ligne, pas un seul mot, pas un seul discours engageant les prêtres - directeurs de séminaires, curés de paroisses, vicaires épiscopaux, responsables diocésains... - à suivre fidèlement les enseignements de l'Eglise en matière doctrinale, liturgique, ou encore catéchétique. Rien: dans les diocèses, il ne règne alors qu'un assourdissant silence épiscopal, malgré les plaintes des fidèles qui s'ajoutent désormais à celles du Souverain Pontife.
Mais ne se passe-t-il vraiment rien? A vrai dire, ça et là des choses bougent timidement. En 1969, le Père Ladame rassemble quelques jeunes garçons ayant le désir du sacerdoce et fonde le séminaire de Paray-le-Monial. En 1974, le Père Guy-Marie Bagnard (qui deviendra par la suite évêque de Belley-Ars) reprend le flambeau, ce qui ne manquera pas de lui valoir quelques "ennuis" venant de l'épiscopat français, le séminaire de Paray n'étant pas jugé conforme au Droit canonique. En réalité, ce qui semble surtout gêner les évêques, c'est moins le Droit canonique que le fait de constater que beaucoup de jeunes gens qui fuient les séminaires diocésains ou inter-diocésains en raison du peu de sérieux de ce qui s'y fait, se retrouvent à Paray... Un ancien documentaire TV montre le Secrétaire de l'Episcopat français de l'époque en train de déclarer, à propos de ce séminaire de Paray-le-Monial, qu'il faudra bien que tôt ou tard le P. Bagnard accepte de se plier aux "normes" décidées par tous les évêques de France pour ce qui touche à la formation des futurs prêtres. Sous-entendu, il faudra bien qu'il comprenne que sa maison devra être fermée. Ce qui ne sera jamais fait grâce au soutien apporté par Jean-Paul II au P. Bagnard.
En 1976, l'Abbé Guérin, prêtre du diocèse de Tours, voyant la détresse des jeunes gens qui souhaitent devenir prêtres en affirmant une totale fidélité aux enseignements du Concile, envisage de fonder une communauté capable d'assurer elle-même la formation de ses futurs prêtres. Les difficultés pour une telle opération étant trop grandes en France, le P. Guérin est contraint de s'exiler en Italie et de demander le soutien du Cardinal Siri, alors Archevêque de Gênes. La Communauté Saint-Martin voit le jour en 1976, à Gênes-Voltri où elle restera jusqu'en 1984, année au cours de laquelle Mgr Madec, alors Evêque de Fréjus et Toulon fait appel à ses membres pour relancer une pastorale qui va rapidement s'avérer efficace.
Il y a enfin, au même moment, une série d'initiatives ponctuelles dont on parle peu. Ce sont celles prises, dans tous les séminaires de France, par des candidats au sacerdoce qui ne se résignent pas à se plier aux exigences d'une préparation à la prêtrise qui s'affiche largement anti-romaine et dévastatrice sur le plan tant sprirituel que pastoral. Ces initiatives consistent à tenir informé de ce qui se passe dans les séminaires et les paroisses un prélat allemand d'une haute envergure spirituelle et intellectuelle et d'une entière soumission à l'Eglise du Seigneur, que Jean-Paul II nomme, en novembre 1981, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Le Cardinal Ratzinger devient donc, au Vatican, l'homme le mieux informé sur l'origine et l'ampleur de la crise qui secoue les diocèses français, ainsi que sur les aspirations véritables des fidèles. Il partagera la peine de celles et de ceux qui veulent témoigner leur attachement à Pierre, constitutif de la foi catholique, et qui en sont souvent empêchés par ceux-mêmes qui devraient les soutenir d'une façon indéfectible.
De ce bref récit, certainement incomplet, on peut tirer deux enseignements: premièrement, la crise que traverse l'Eglise en France est très largement imputable aux évêques qui, au lendemain du Concile, ont tout laissé se déliter dans les paroisses, les diocèses et les séminaires. Deuxièmement, que le pape Benoît XVI est la personne qui est la plus au fait des problèmes franco-français. Il sait donc l'urgence qu'il y a à nommer, partout où la crise s'est faite sentir, des évêques capables de progressivement restructurer les diocèses et de donner une formation solide aux jeunes qui seront les pasteurs de demain.
Nos propos dérangent essentiellement un certain "clergé hexagonal" qui tente depuis des années de faire croire que tout a toujours été fait - et vraiment bien fait - pour que les enseignements de Vatican II soient appliqués partout, dans toutes les paroisses, à toutes les messes, à tous les niveaux des diocèses. En réalité, il faut bien, au nom de la vérité, dire que non seulement les enseignements du Concile n'ont pas été appliqué en France, mais qu'en plus - ce qui est au fond bien plus grave - les fidèles qui voulaient les appliquer ont été réduits au silence, montrés du doigt, expulsés - oui, proprement expulsés - des paroisses, au motif qu'ils n'étaient plus dans la mouvance de la pastorale qui devait s'y faire pour, disait-on, "bâtir l'Eglise de demain".
Propos exagérés, diront certains? En aucune façon, hélas. Nous avons sous les yeux de très nombreux documents qui prouvent l'exactitude des faits avancés. De plus, des ouvrages commencent à être publiés dont l'objectivité ne saurait être mise en cause: tous font état d'un véritable laisser-aller que, dans les années 1960-80, les évêques de France, dans leur grande majorité, ont laissé s'installer ou même ont encouragé. Et s'il fallait encore donner un exemple du silence coupable et malheureusement encore très actuel de l'épiscopat français, il suffirait de rappeler qu'aujourd'hui encore, aucun des récents documents magistériels concernant la liturgie n'a donné lieu à des corrections de ce qui se fait partout de travers dans les églises, ni conduit à des applications fidèles de ce qui doit se faire. C'est un signe qui ne saurait tromper personne.
Et si nous prenons ici la liberté de reprendre - respectueusement mais avec opiniâtreté - nos pasteurs, et d'abord les évêques diocésains, c'est parce que nous, fidèles qu'on dit être "de la base", sommes très lassés de recevoir d'eux des serpents quand nous leur demandons du pain. C'est parce que nous, simples fidèles, sommes découragés d'être, depuis plus de 40 ans, traités pour ainsi dire comme des "sans-papiers" obligés de chercher un havre de paix liturgique et catéchétique dans la rare paroisse où un prêtre courageux aura su, souvent contre vents et marées et sans aucun soutien de la part de sa hiérarchie, mettre véritablement en oeuvre la liturgie de l'Eglise.
Venons-en à la liturgie et à la pastorale qui s'y rapporte. A la suite de Vatican II, le Missel romain actuel rappelle, sans la moindre ambiguïté, que personne, même prêtre, n'a le droit d'ajouter, de retrancher ou de modifier quoi que ce soit dans la liturgie. Où voit-on cette règle être respectée? Nulle part. Même nos évêques ne la respectent pas, préférant le plus souvent s'adapter aux habitudes liturgiques de la communauté paroissiale locale qui les accueille, au lieu d'habituer la communauté en question à accueillir l'authentique liturgie de l'Eglise.
Oui, force nous est de constater que la liturgie romaine célébrée par un pasteur diocésain français est toujours plus ou moins transformée en autre chose que ce que doit être la liturgie romaine. A quelques rares exceptions près. De façon générale, il y a donc eu, à la suite de Vativan II, et il y a encore, dans nos paroisses, ce qu'on est bien obligé d'appeler une vaste "imposture liturgique". N'est-ce pas là ce qui, paradoxalement, a incité certains fidèles à se dire davantage attentifs aux enseignements du Souverain Pontife que ne le sont parfois certains pasteurs de France?
Les enseignements du Concile n'ont pas été appliqué en France, disions-nous. Et pour étayer cette affirmation, pour comprendre les raisons de cette "trahison" du Concile, il suffit de rappeler ici ce qui s'est fait aussitôt après Vatican II: non pas en quelques endroits, comme on a voulu le faire croire, mais bien dans la totalité des paroisses et des séminaires de France. Oui, dans la totalité des paroisses et des séminaires! Ce qui prouve bien que la chute des vocations et de la pratique religieuse était sinon voulue, du moins programmée.
Dans les paroisses, ce sont des tables de communion, des confessionnaux, des autels qui ont été démolis (on a connu des tabernacles de chapelles baroques transformés en niches à chiens!); ce sont des prie-Dieu ou des agenouilloirs qui ont été supprimés; ce sont des objets liturgiques qui ont été donnés aux araignées des placards de sacristies ou même jetés et brûlés, ou encore vendus à des antiquaires: calices, ciboires, burettes, chasubles, encensoirs, ostensoirs, missels, antiphonaires... etc.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Encore dans les paroisses, c'est la messe en latin qui fut interdite; c'est le chant grégorien qui fut déclaré inchantable, puis incompréhensible, et enfin illicite; ce sont des organistes qui furent remplacés par un magnétophone posé sur l'autel; ce sont des choristes qui furent mis à la porte et remplacés par des fidèles usurpateurs d'une responsabilité en liturgie pour laquelle ils n'avaient généralement aucune compétence... etc.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Toujours dans les paroisses, il a fallu faire des rondes autour de l'autel, taper des mains durant les chants, se donner une poignée de main, remplacer tous les chants traditionnels et aimés des fidèles par des refrains inconsistants, sans cesse nouveau et inchantables (bien que composés par des "spécialistes" autoproclamés de la pastorale liturgique); il a fallu participer aux absolutions collectives, aux messes anticipées du samedi soir, aux "messes de jeunes" animées par un orchestre bruyant (et parfois désaccordé); il a fallu accepté que les messes soient remplacées par des A.D.A.P. alors même qu'un prêtre était présent... etc.
Pourtant le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ça.
Résultat: des prêtres âgés qui ne faisaient que ce que l'Eglise leur demandait de faire et qui se refusaient à suivre des directives pastorales qui leur semblaient contraire au Concile ont été lâchés par les évêques et proprement harcelés par des vicaires épiscopaux qui pourtant n'avaient que le mot "charité" en bouche. Certains de ces vieux prêtres ont été contraints de prendre une retraite anticipée, ont été sommés de s'isoler, et ont même été interdits de célébrer la messe en public. Quant aux fidèles qui demandaient une stricte application des directives conciliaires qu'on leur refusait, ils ont par la force des choses formé la masse des "silencieux de l'Eglise", masse rapidement prise en otage par une poignée d'autres fidèles sortis d'on ne sait où pour former un véritable "politburo" ayant ses ramifications dans toutes les instances diocésaines. Parmi ces "silencieux de l'Eglise", quelques uns ont fini par s'habituer tant bien que mal à la dévastation liturgique à laquelle ils assistaient, mais beaucoup d'autres, lassés, abattus, ont décidé de quitter les lieux sur la pointe des pieds. D'autres encore sont allés grossir les rangs de ceux qui pensaient, à tort, que la pagaille à laquelle ils assistaient était le fruit véritable du Concile. Ces départs massifs n'ont d'ailleurs pas gêné les instances diocésaines puisque, d'une part, ils laissaient une plus grande liberté de manoeuvre aux démolisseurs déjà en place, et d'autre part ils permettaient de lancer un grand slogan: "Aux messes dominicales, nous n'avons plus le nombre, mais nous avons gagné en qualité et en ferveur". En d'autres termes, la méthode Coué servant à s'enfoncer volontairement dans le marasme.
Dans les grands séminaires diocésains (devenus par la suite interdiocésains en raison d'une baisse des vocations que l'on a mis du temps à reconnaître), on n'a admis que des jeunes au caractère assez faible pour pouvoir être manipulés par des Supérieurs déjà totalement gagnés aux idées de la pastorale nouvelle. Les séminaires se sont alors transformés en sortes de colonies de vacances pour jeunes en mal d'identité et en lieux de formatage des esprits, le but étant de faire en sorte que le futur clergé des diocèses de France devienne hostile à tout ce qui vient de Rome. Une hostilité qu'il fallait entretenir au nom du fonctionnement de la "pastorale de demain", laquelle était assurée - disait-on - de porter des fruits à la seule condition de jeter par-dessus bord tout ce qui s'était fait jusqu'ici.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ainsi.
Encore dans les séminaires, il fallait que les futurs prêtres soient formés par des professeurs totalement opposés à la liturgie et à toute forme de dévotion: vouloir ou même simplement participer à une messe célébrée selon le Missel romain était un critère de non-vocation. Souhaiter un minimum de chant grégorien était un symptôme d'intégrisme dangereux. Simplement évoquer les enseignements du pape déclenchait des rires sarcastiques. Etre issu d'une paroisse réputée classique devenait suspect. Refuser d'inventer des prières eucharistiques et de chambouler l'ordonnancement de la liturgie eucharistique était rédhibitoire. Refuser de participer à des célébrations eucharistiques où prêtres et pasteurs protestants "concélébraient" pour des raisons d' "ouverture à l'autre" ou d' "oecuménisme" était passible d'exclusion. Étaient strictement interdits: l'agenouillement au cours des messes, la récitation du chapelet, l'adoration eucharistique, le port des vêtements liturgiques prescrits, la communion dans la bouche... Autant de pratiques ou de signes caractéristiques d'une religion passéiste dont il fallait au plus vite se débarrasser. Était fortement conseillée la lecture de "Témoignage Chrétien" ou l'adhésion à un mouvement d'Action Catholique ayant des connivences avec le socialo-communisme et permettant d'organiser des réunions au cours desquelles il était possible de célébrer une Eucharistie sur la table de cuisine de deux ou trois religieuses vivant "en communauté de base" dans une H.L.M. Étaient interdites: la fréquentation d'abbayes réputées "conservatrices" (Solesmes, Kergonan, Saint-Wandrille... ) et la lecture de "L'Homme Nouveau" ou de "L'Ami du Clergé", publications jugées trop attachées aux enseignements de Rome.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé que l'on fasse ainsi.
Toujours dans les séminaires diocésains, les études se limitaient à toucher un peu à tout sans véritablement approfondir quoi que ce soit. En sorte que les candidats au sacerdoce finissaient par avoir sur toutes les questions des opinions élaborées à partir d'une connaissance très superficielle et souvent fragmentaire des problèmes. Celui qui avait lu deux pages d'une revue qui contestait l'enseignement magistériel se prenait ipso facto pour un grand théologien, tout comme celui qui savait gratter quelques notes sur une guitare se voyait élevé au rang de spécialiste du chant liturgique. Par contre, les séminaristes semblaient soigneusement éviter les conférences d'un niveau élevé, sur tel ou tel sujet; probablement avaient-ils la crainte d'être dépassés ou de paraître ignorants. Ce qu'ils étaient assez souvent. La seule discipline qui avait alors le vent en poupe était l'exégèse biblique. Mais pas n'importe laquelle: uniquement celle élaborée par une certaine "intelligentsia" qui, à la suite de Bultmann et du mouvement de "démythologisation", en venait à enseigner que le Christ, le Messie, le Fils de Dieu annoncé et adoré par l'Eglise n'était qu'une construction tardive ayant peu ou rien à voir avec le "Jésus de l'histoire". A partir d'un tel enseignement, tout pouvait être librement remis en question, à commencer par tout ce qu'enseignait l'Eglise elle-même depuis ses origines.
Pourtant, le Concile n'avait jamais demandé qu'il en soit ainsi.
Résultat: dans les séminaires diocésains de France, de très nombreux jeunes, pour des raisons souvent fallacieuses, ont été découragés d'aller jusqu'au terme de leur vocation. Ceux qui étaient considérés comme trop "traditionnels" tout simplement parce qu'ils se montraient ouvertement attachés à l'enseignement de l'Eglise, du pape, du Concile, furent exclus. Exclus? Non, pas vraiment. On se contentait de différer sans cesse l'année de leur ordination, en souhaitant qu'ils finissent ainsi par comprendre qu'ils feraient mieux de quitter les lieux d'eux-mêmes. Ainsi pouvait-on dire en haut-lieu que personne n'a jamais été exclu d'un séminaire: les candidats à la prêtrise étaient simplement partis d'eux-mêmes, librement, après avoir réfléchi et compris que leur place n'était pas dans l'Eglise telle que souhaitée par l'autorité diocésaine. La chute des vocations devenait ainsi la faute à pas de chance. Jusqu'où l'hypocrisie ne serait-elle pas ainsi allée pour sauvegarder des apparences! Ne sont alors restés dans les séminaires de France - comme le reconnaît aujourd'hui Mgr Gaidon - que des jeunes au caractère faible, au tempérament mou, à la culture mal assurée, à la spiritualité inconsistante, et parfois même aux orientations affectives mal stabilisées. Certes, ces candidats au sacerdoce faisaient tous montre d'une extraordinaire générosité: celle des adolescents prêts à s'enthousiasmer pour les grandes causes humanitaires. Mais cette louable générosité devait-elle le seul critère permettant d'accéder au sacerdoce? Pour beaucoup, les grandes désillusions ne sont venues qu'après les ordinations, au contact des réalités paroissiales et spirituelles qui se situent à un niveau très différent de celui des interminables adolescences d'un certain clergé.
C'est l'enchevêtrement de ces faits qui explique en grande partie que nous ayons actuellement, en France, un clergé atone donnant souvent l'impression d'être dépassé par les événements, d'être incapable de comprendre pourquoi les fidèles désertent les messes paroissiales désarticulées et désacralisées soi-disant faites pour eux, alors qu'ils se pressent pour participer à une messe célébrée par un pape qui souhaite remettre de la dignité, du silence, de la beauté, de l'adoration... et même du latin dans la liturgie. Ce clergé-là, qu'il soit paroissial ou épiscopal, semble même incapable de comprendre pourquoi les jeunes générations se passionnent pour une expression liturgique de la foi que les générations précédentes ont voulu à tout prix démolir en prétendant même qu'il fallait en passer par une telle dévastation pour retrouver le vrai visage de l'Eglise.
Il reste un dernier point à éclaircir: ces faits étaient-ils limités à quelques paroisses et séminaires ou étaient-ils généralisés? Force nous est de répondre que la situation décrite ici correspond à ce qui fut fait dans l'ensemble des diocèses et des paroisses de France. Ce qui prouve bien qu'il y avait d'une part, un mot d'ordre visant à faire en sorte que l'enseignement conciliaire soit systématiquement détourné, bafoué, et qu'il y avait d'autre part, un épiscopat inefficace qui s'était comme résigné à laisser les choses aller leur train, c'est-à-dire aller vers une crise qui allait s'avérer longue et ruineuse.
Car régulièrement avertis de ce qui se faisait dans les paroisses et les séminaires, les évêques n'ont jamais réagi: si l'on cherche les déclarations des évêques diocésains de cette époque post-conciliaire, on ne trouve pas une seule ligne, pas un seul mot, pas un seul discours engageant les prêtres - directeurs de séminaires, curés de paroisses, vicaires épiscopaux, responsables diocésains... - à suivre fidèlement les enseignements de l'Eglise en matière doctrinale, liturgique, ou encore catéchétique. Rien: dans les diocèses, il ne règne alors qu'un assourdissant silence épiscopal, malgré les plaintes des fidèles qui s'ajoutent désormais à celles du Souverain Pontife.
Mais ne se passe-t-il vraiment rien? A vrai dire, ça et là des choses bougent timidement. En 1969, le Père Ladame rassemble quelques jeunes garçons ayant le désir du sacerdoce et fonde le séminaire de Paray-le-Monial. En 1974, le Père Guy-Marie Bagnard (qui deviendra par la suite évêque de Belley-Ars) reprend le flambeau, ce qui ne manquera pas de lui valoir quelques "ennuis" venant de l'épiscopat français, le séminaire de Paray n'étant pas jugé conforme au Droit canonique. En réalité, ce qui semble surtout gêner les évêques, c'est moins le Droit canonique que le fait de constater que beaucoup de jeunes gens qui fuient les séminaires diocésains ou inter-diocésains en raison du peu de sérieux de ce qui s'y fait, se retrouvent à Paray... Un ancien documentaire TV montre le Secrétaire de l'Episcopat français de l'époque en train de déclarer, à propos de ce séminaire de Paray-le-Monial, qu'il faudra bien que tôt ou tard le P. Bagnard accepte de se plier aux "normes" décidées par tous les évêques de France pour ce qui touche à la formation des futurs prêtres. Sous-entendu, il faudra bien qu'il comprenne que sa maison devra être fermée. Ce qui ne sera jamais fait grâce au soutien apporté par Jean-Paul II au P. Bagnard.
En 1976, l'Abbé Guérin, prêtre du diocèse de Tours, voyant la détresse des jeunes gens qui souhaitent devenir prêtres en affirmant une totale fidélité aux enseignements du Concile, envisage de fonder une communauté capable d'assurer elle-même la formation de ses futurs prêtres. Les difficultés pour une telle opération étant trop grandes en France, le P. Guérin est contraint de s'exiler en Italie et de demander le soutien du Cardinal Siri, alors Archevêque de Gênes. La Communauté Saint-Martin voit le jour en 1976, à Gênes-Voltri où elle restera jusqu'en 1984, année au cours de laquelle Mgr Madec, alors Evêque de Fréjus et Toulon fait appel à ses membres pour relancer une pastorale qui va rapidement s'avérer efficace.
Il y a enfin, au même moment, une série d'initiatives ponctuelles dont on parle peu. Ce sont celles prises, dans tous les séminaires de France, par des candidats au sacerdoce qui ne se résignent pas à se plier aux exigences d'une préparation à la prêtrise qui s'affiche largement anti-romaine et dévastatrice sur le plan tant sprirituel que pastoral. Ces initiatives consistent à tenir informé de ce qui se passe dans les séminaires et les paroisses un prélat allemand d'une haute envergure spirituelle et intellectuelle et d'une entière soumission à l'Eglise du Seigneur, que Jean-Paul II nomme, en novembre 1981, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Le Cardinal Ratzinger devient donc, au Vatican, l'homme le mieux informé sur l'origine et l'ampleur de la crise qui secoue les diocèses français, ainsi que sur les aspirations véritables des fidèles. Il partagera la peine de celles et de ceux qui veulent témoigner leur attachement à Pierre, constitutif de la foi catholique, et qui en sont souvent empêchés par ceux-mêmes qui devraient les soutenir d'une façon indéfectible.
De ce bref récit, certainement incomplet, on peut tirer deux enseignements: premièrement, la crise que traverse l'Eglise en France est très largement imputable aux évêques qui, au lendemain du Concile, ont tout laissé se déliter dans les paroisses, les diocèses et les séminaires. Deuxièmement, que le pape Benoît XVI est la personne qui est la plus au fait des problèmes franco-français. Il sait donc l'urgence qu'il y a à nommer, partout où la crise s'est faite sentir, des évêques capables de progressivement restructurer les diocèses et de donner une formation solide aux jeunes qui seront les pasteurs de demain.