4 février 2009





Le cardinal Christoph Schönborn : « Il y a eu faute au Vatican »
04.02.09 - Jean Mercier - lavie.fr
Il est l'un des plus proches de Benoît XVI. Dans les années 1980, le cardinal Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, avait confié à ce brillant théologien la rédaction du Catéchisme de l'Eglise catholique. Aujourd'hui, face à la crise, le cardinal-archevêque de Vienne (Autriche) sort de sa réserve. Comme d'autres évêques (Mgr Simon, de Clermont; Mgr Pican, de Bayeux), il met explicitement en cause la politique de communication du Saint-Siège, et la « faute » de ceux qui, à la Curie, ont instruit le dossier des lefebvristes sans mener une enquête suffisamment approfondie sur les quatre évêques concernés.

Extraits de l'interview diffusée le jeudi 29 janvier 2009 sur la chaîne de télévision autrichienne ORF :
A propos de la levée controversée des excommunications, notamment celle de Richard Williamson, pensez-vous que c'est une bonne chose ?
Je crois qu'il faut faire la distinction entre deux choses. L'une est l'intention du pape, l'autre est la politique d'information du Vatican. L'intention du pape est claire : il veut une réconciliation avec ce groupe qui s'est séparé de l'Eglise catholique il y a 20 ans, et qui vit depuis dans la séparation et dans le schisme. Ce qui a eu lieu est simplement une main tendue. Que cette main soit désormais saisie ou qu'elle ne le soit pas, l'avenir nous le dira. Et c'est là qu'il y a eu faute dans la politique de communication du Vatican. On doit le dire de façon franche. Les quatre évêques n'ont pas été réhabilités. L'excommunication a été levée comme suite d'une démarche unilatérale en leur faveur. Mais ils ne sont pas revenus en fonction. Ils doivent encore montrer de façon claire qu'ils vont saisir la main tendue du pape. Les annonces qui sont venues d'eux jusqu'ici sont insuffisantes. Aussi longtemps que ces quatre évêques ne disent pas de façon très claire qu'ils reconnaissent le Concile, il n'y aura sûrement pas de pleine réconciliation.
Nous arrivons au thème du Concile et aussi à ce qui touche le judaïsme, à savoir que l'un des quatre évêques nie l'Holocauste. Est ce à dire que l'Eglise, en se rapprochant de cette personne, prend un risque à l'égard du dialogue ?
Il est pour moi difficilement compréhensible qu'on n'ait pas eu connaissance de ce fait, et j'ai du mal à m'imaginer qu'on ne savait pas. De façon évidente, une faute est survenue. Il faut le reconnaître. Voilà ce qui est clair pour moi, et aussi pour beaucoup d'autres évêques, et aussi pour le pape qui l'a dit hier très clairement : quelqu'un qui nie l'Holocauste, la Shoah, ne peut pas être réhabilité dans une fonction ecclésiastique, il n'y a absolument aucun doute là-dessus. Et l'on doit ici adresser une critique certaine aux collaborateurs du Vatican qui dans ce cas, de manière évidente, n'ont pas regardé la chose de suffisamment près ou qui n'ont pas creusé l'information avec assez d'égards. Mais la mise au point que le pape a faite hier est totalement sans équivoque : il est très clair que ces quatre évêques, s'ils veulent engager une totale réconciliation avec l'Eglise, ce qui est très souhaitable, doivent, de façon claire, reconnaître le Concile sans réserves.
Dès la levée des excommunications, ils ont dit leurs réserves contre le Concile. Et il y a eu aussi la décision du pape de permettre à nouveau la messe en latin qui avait été supprimée avec le Concile Vatican II. N'est ce pas un signal pour les croyants que l'on retourne en arrière, avant le Concile ?
Alors là, il faut dire, quand on connaît mieux le Concile, que le latin n'a jamais été supprimé. Il a été mis de côté, c'est sûr, et la langue maternelle a été mise en avant et c'est très bien ainsi. Mais le latin est la langue maternelle de l'Eglise, et ici à Vienne il y a toujours eu des messes pour ceux qui préfèrent l'avoir en latin, ce qui est totalement légitime. Que le pape aille à la rencontre de ces groupes est un signe de tolérance.
Mais que dites-vous de la critique selon laquelle on retourne en arrière ?
Je ne peux pas accepter de dire que l'Eglise retourne en arrière. Et d'ailleurs le latin appartient à la grande tradition de l'Eglise...

traduction : Jean Mercier