21 octobre 2006

Benoît XVI devrait publier un motu proprio sur la messe tridentine
21/10/2006 - dici.org
Résumé : Le pape est « en train de préparer » un document en vue de libéraliser « l’expression traditionnelle » du rite catholique romain...

Le pape est « en train de préparer » un document en vue de libéraliser « l’expression traditionnelle » du rite catholique romain, c’est-à-dire l’usage de la messe saint Pie V, selon des sources vaticanes qui en ont informé l’agence I.Media, au cours du mois d’octobre 2006.
 La date de publication n’est pas fixée, car la décision du pape est controversée au sein de la curie romaine. Le pape « attend une occasion favorable » pour promulguer ce document . « Le texte est rédigé » et est « en train d’être relu » par différentes Congrégations vaticanes. Selon ces mêmes sources, « la colonne vertébrale » de ce document s’articulerait autour du principe « qu’il n’y a qu’un rite latin, avec deux formes : ordinaire (Paul VI) et extraordinaire (Saint Pie V) » et que « ces deux formes ont égalité de droit ».   
Au Vatican, la libéralisation de la messe saint Pie V suscite des oppositions. C’est le cas au sein de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. « Il faut laisser mûrir, ne pas précipiter » les choses, y confie-t-on.
D’après La Croix du 11 octobre, « il s’agirait d’un indult, sous forme de motu proprio supprimant celui publié en 1988 par Jean-Paul II (Ecclesia Dei adflicta), qui soumettait la célébration du rite préconciliaire à une autorisation expresse de l’évêque du lieu, mais qui était appliqué de façon très restrictive. Avec ce nouveau texte, un prêtre, à son initiative, pourrait librement choisir de célébrer la messe selon l’ancien rite, sauf si l’évêque le lui interdit formellement par écrit.
« Le motu proprio donnerait ainsi au rite tridentin le statut inédit de ‘rite universel extraordinaire’, aux côtés du ‘rite ordinaire’ qu’est la messe dite ‘de Paul VI’. Cette réforme ne concernerait pas seulement la messe elle-même, mais plus largement ‘les rapports avec les traditionalistes’ indique-t-on de même source. Il ne s’agirait pas, en soi, d’un retour à l’ancien rite, mais plutôt de la fin de sa marginalisation.
 « L’information n’est pas une surprise. On savait, depuis plus d’un an, que Benoît XVI réfléchissait à une telle réforme, qui lui tient à cœur. Le sujet avait été évoqué lors du synode d’octobre 2005 sur l’Eucharistie, puis en mars par le pape lors du consistoire. Benoît XVI a aussi consulté les cardinaux de la curie, l’hiver dernier sur ce thème. C’est le cardinal Dario Castrillon Hoyos, président de la commission Ecclesia Dei, qui a été chargé d’élaborer le texte. L’objectif poursuivi est en effet la réintégration dans l’Église des lefebvristes, qui ont fait de la libéralisation du rite tridentin une des conditions de leur retour. (…)
 « Cette libéralisation du rite tridentin rencontre des résistances vives au sein de la curie, jusque dans la Congrégation pour le culte divin où, consultés, certains responsables affirment avoir cherché à amender le texte du futur motu proprio. Plus largement, depuis un an, des cardinaux, et non des moindres, ont discrètement fait savoir au pape leur hostilité. Comme le confie l’un d’eux à La Croix, ‘nous sommes inquiets devant les risques que pourrait présenter pour l’unité de l’Église la reconnaissance de deux rites’.
 « Ces prélats font en effet valoir que ‘jamais il n’a existé en Occident deux rites en même temps, sauf dans des cas historiques hérités du premier millénaire et liés à des contextes géographiques particuliers : rite lyonnais, milanais, ou mozarabe par exemple’. Quant à la liturgie orientale, la reconnaissance de rites propres au sein de l’Église catholique est liée au statut juridique de ces Églises elles-mêmes, qui sont sui generis. Elles ont leur propre droit et traditions.
« ‘Une Église peut-elle avoir deux rites, en fonction  de deux appréciations différentes du Concile ?’, s’interroge tout haut un adversaire de la réforme en cours de préparation. Car le rite actuel, dit ‘de Paul VI’, est, selon lui, lié au concile Vatican II. La possibilité de dire la messe en rite tridentin serait alors la conséquence d’une acceptation partielle, et non totale de ce Concile, pourtant dit ‘œcuménique’. Or, jamais, dans le passé, ‘les conciles n’ont donné lieu à des interprétations différentes dans l’Église, celui de Trente, pas plus que celui de Vatican I’, fait-il remarquer.
 « Enfin, certains cardinaux expriment leur crainte que le clergé et l’évêque, sur le terrain, soient désormais soumis à des pressions en faveur d’un rite contre un autre. Ils continuent donc de plaider pour modifier le texte dans un sens beaucoup plus restrictif. La célébration de la messe en rite tridentin pourrait ainsi être soumise à une assistance minimale : 100 voire 30 fidèles. C’est dire que si la sortie du motu proprio est plus que probable, son contenu, lui, fait encore débat ».
Selon Le Figaro du 12 octobre, « le clergé français reste circonspect sur la libéralisation du rite tridentin. Dans une tribune publiée dans la dernière livraison de La Revue d’éthique et de théologie morale, Mgr Pierre Raffin, l’évêque de Metz, dit tout haut ce qu’une bonne partie de l’épiscopat pense tout bas. ‘Il va sans dire que nous suivrions la détermination de Benoît XVI, même si nous la regretterions et en redouterions les répercussions négatives dans le peuple chrétien majoritairement attaché, quoi qu’on en dise, à la messe dite de Paul VI’.
Et le prélat de s’interroger :  ‘Le sacré requiert-il que l’on dérobe la célébration des mystères en tenant les fidèles à distance de l’autel ?’ Pour ce dominicain, ‘la messe n’est pas un saint spectacle auquel assistent des fidèles recueillis’. L’évêque redoute aussi la coexistence de deux rites ‘à la fois très proches et très différents’ et qui ‘finirait par nuire à l’unité de l’Église catholique’ ».