12 octobre 2006




« On ne peut rayer d'un trait Vatican II »
12 octobre 2006 - L'Est Républicain
« On ne peut rayer d'un trait Vatican II » L'archevêque de Besançon, Mgr André Lacrampe, refuse avec force d'accueillir ces prêtres intégristes à qui le pape vient de tendre la main.
BESANÇON. Archevêque de Besançon, Mgr André Lacrampe n'assurera plus la présidence du conseil national de la solidarité au sein des évêques de France. Ses ennuis cardiaques l'ont amené à prendre cette décision dont il fera part officiellement lors de l'assemblée plénière des évêques en novembre prochain. Pour son intervention publique de rentrée, l'archevêque n'a pas manqué de rappeler que l'Eglise ne repose plus, comme naguère, sur les prêtres mais sur l'ensemble des baptisés et que les laïcs engagés, 400 dans le diocèse pour 170 prêtres en exercice, la font vivre au quotidien.
On le sait, le temps où chaque village avait un curé dans sa paroisse est révolu, place aux 67 unités pastorales souvent animées par des laïcs. L'Eglise a découvert les vertus de l'intercommunalité par la force des choses. Bref, face au nombre de prêtres en chute libre, face aux difficultés de l'Eglise à affronter un monde où prévalent, pêle-mêle, replis et réflexes identitaires, destruction des comportements moraux traditionnels, brassage des moeurs, découvertes génétiques, Mgr Lacrampe et les acteurs de l'Eglise semblent faire bon coeur chrétien contre mauvaise fortune historique.
« On n'est quand même pas dans le désert spirituel. On a un nouveau projet global de catéchèse s'adressant à la fois aux enfants et aux adultes qui viennent à la foi chrétienne », souligne Mgr Lacrampe. Ce dernier sait trop bien que la transmission de la foi et des valeurs chrétiennes ne se fait plus, que des générations ont poussé et poussent sans culture religieuse ni d'ailleurs laïque, à un point tel que l'évêque Hippolyte Simon avait parlé, voilà des années déjà, d'un retour du paganisme. « Oui, les jeunes ont des tas de sollicitations. On vit dans une société en mouvement, il nous faut vivre la foi dans le monde d'aujourd'hui », dit l'archevêque, reconnaissant implicitement l'effacement continu de la mémoire du christianisme en ces terres de la vieille Europe qu'il a modelées et où l'on va bientôt vendre Noël sans dire la naissance du Christ.
Bref, le recours aux diacres et aux laïcs en mission ecclésiale est la solution pour continuer « à fonder et à faire grandir des communautés chrétiennes qui vivent et annoncent le Christ ».
Trois lieux traditionalistes
Par ailleurs, Mgr Lacrampe se refuse catégoriquement à accueillir des prêtres intégristes à qui le pape Benoît XVI a récemment tendu la main pour les faire revenir dans le giron de l'Eglise, il en a fait part à Rome. « L'institut pontifical du Bon Pasteur créé à Bordeaux doit en recevoir. Il y a la charité, la main tendue mais il y a à être vrai. Ces prêtres ne peuvent venir dans un diocèse sans l'accord de l'évêque des lieux, il n'est pas dans mon intention d'en accueillir, on ne peut rayer d'un trait le concile Vatican II », dit avec force l'archevêque.
Pour lui qui est patron de la province ecclésiastique de Besançon regroupant les évêchés de Verdun, Nancy, Belfort-Montbéliard, Saint-Dié et Saint-Claude, cette ouverture ne se résume pas à la liturgie, en gros à la messe en latin : « Vatican II, c'est aussi la tradition, je ne veux pas faire l'économie de ce texte et je n'oublie pas la joie des prêtres vivant leur magistère dans son élan ».
Dans le diocèse, des prêtres célèbrent des offices, selon la liturgie du missel de 1962 dit de Saint-Pie V, en trois endroits. A Mouthier-Hautepierre dans un prieuré privé, à Besançon dans un lieu créé dans une usine désaffectée et où ont déjà été célébrées des messes en souvenir de la mort de Louis XVI, et à Faverney en Haute-Saône.
Yves ANDRIKIAN