La pétition des jeunes prêtres |
31 octobre 2006 - Article de L'Est Républicain |
La pétition des jeunes prêtres Une cinquantaine d'entre eux ont déjà signé un texte, qui circule par internet, adressé aux évêques et au nonce apostolique. NANCY Ils ont tous moins de quinze ans de prêtrise. Donc moins de quarante ans. Ils représentent l'avenir et un avenir où le nombre de clercs aura fondu. De la messe Pie V, ils ne veulent pas et ils l'ont fait savoir dans un court document daté du 18 octobre et adressé « à nos évêques, au président de la Conférence épiscopale de France et au Nonce apostolique à Paris ». « Nous affirmons notre attachement au rituel de Paul VI. Depuis notre baptême, il nous accompagne dans notre progression de foi et dans notre quête de Dieu », écrivent des dizaines de signataires de la France entière, dont les rangs grossissent chaque jour grâce à internet. Ils poursuivent : « A l'aise avec l'esprit de notre temps, nous avons choisi d'être des témoins d'Evangile en tant que prêtres et nous avons reconnu dans la vie de l'Eglise un équilibre entre la fidélité au Christ et l'actualité du monde. Prendre le risque de rompre cet équilibre par la décision symbolique de proposer un retour à un ancien rite est de nature à nous déstabiliser et à menacer l'unité du groupe de jeunes prêtres aux sensibilités déjà bien diverses ». Ils concluent sévèrement à l'égard du pape : « Nous ressentons comme un besoin plus urgent de recevoir de Benoît XVI des signes d'encouragement à nous insérer dans le monde tel qu'il est pour y porter le témoignage d'une vie authentiquement chrétienne plutôt qu'à nous replonger dans une vie liturgique d'un autre âge ». Soutien de l'archevêque Pour Pierre Guerigen de Thionville (Moselle) « à Rome, on n'a pas mesuré que derrière la question liturgique, il y a la volonté de tirer un trait sur le concile Vatican II. Notre texte reflète le trouble sans être une pétition revendicative». Alors que Michel Sebald de Toul (Meurthe-et-Moselle) s'en tient à la lettre sans autre commentaire, le Bisontin Eric Brocard, qui a reçu le soutien de son archevêque, Mgr André Lacrampe, estime que « ce souhait de Benoît XVI de se raccommoder avec les intégristes risque de provoquer une scission non une réconciliation ». Pour lui, le bi-ritualisme est « dangereux », parce que « derrière la liturgie se cache une théologie : se retrouver face au tabernacle, réceptacle de Dieu, a une autre signification que de retrouver face au peuple ». Ce jeune prêtre aime « l'esprit du concile » et se refuse à « devenir adepte d'une théologie de l'expiation », préférant « une théologie du don de soi ». Pour Eric Brocard, à l'évidence, « la liturgie, ce n'est pas seulement une guerre de sensibilité ». P.P |
Le trouble des évêques de l'Est Ils font part de leur inquiétude face à la main tendue du pape aux prêtres intégristes. BESANÇON. La création récente dans l'archidiocèse de Bordeaux de l'institut pontifical du Bon Pasteur inquiète visiblement nombre de fidèles, prêtres et évêques de France. On le sait, cet institut doit recevoir des prêtres intégristes à qui le pape Benoît XVI a récemment tendu la main pour les faire revenir dans le giron de l'Eglise. « Ces prêtres ne peuvent venir dans un diocèse sans l'accord de l'évêque des lieux, il n'est pas dans mon intention d'en accueilir, on ne peut rayer d'un trait le concile Vatican II », confiait récemment Mgr André Lacrampe, archevêque de Besançon. Cette inquiétude, les six évêques de la province ecclesiastique de Besançon et les évêques des diocèses concordataires de Strasbourg et Metz ont décidé de la relayer à Lons-le-Saunier et d'en faire part directement au Saint-Siège. Face à « l'éventualité de la publication d'un Motu proprio du pape généralisant l'usage du rite tridentin pour la célébration de la messe », les évêques réagissent donc. Ensemble, les évêques, Mgrs Lacrampe de Besançon, Claude Schockert de Belfort-Montbéliard, Jean-Louis Papin de Nancy et Toul, Jean Legrez de Saint-Claude, Jean-Paul Mathieu Saint-Dié, François Maupu de Verdun, Joseph Doré, Christian Kratz et Jean-Pierre Grallet administrateur apostolique et évêques auxiliaires de Strasbourg, Pierre Raffin de Metz, se disent d'autant plus « soucieux du bien commun et de l'unité de l'Eglise » que beaucoup de fidèles, diacres et prêtres de leurs diocèses respectifs sont troublés. Ensemble, ils affirment : « Estimant que la liturgie est l'expression de la théologie de l'Eglise, les évêques redoutent que la généralisation de l'usage du missel romain de 1962 ne relativise les orientations du concile Vatican II. Une telle décision risquerait aussi de mettre à mal l'unité entre les prêtres autant qu'entre les fidèles ». Groupe Jonas Par ailleurs, le groupe de réflexion Jonas du diocèse de Besançon composé de prêtres et laïcs avec des responsabilités ecclésiales, réagit aussi. Il a adressé un point de vue au président de la conférence des évêques de France et au Nonce apostolique à Paris. Pour lui, une restauration du rite Saint-Pie V (messe en latin) serait une remise en cause de Vatican II : « Il faut accueillir avec charité ces prêtres traditionnalistes, nous dit-on. Pendant 40 ans, ces prêtres ont combattu avec des méthodes discutables les textes de Vatican II et les évêques, prêtres et fidèles qui ont accueilli ces textes. Il s'agirait donc d'accueillir ces prêtres alors qu'ils proclament haut et fort n'avoir fait aucune concession et ne vouloir en faire aucune ». Bref, les signataires attendent au moins une volonté réciproque de réconciliation. Ils rappellent que les tradis refusent bien des pans de Vatican II, ainsi « la liberté religieuse, l'engagement oecuménique, le dialogue inter-religieux ». Enfin, pour eux, « demander au président de la conférence épiscopale de France d'appliquer la décision unilatérale de Rome semble une marque de mépris voire de négation de la collégialité » justement affirmée par Vatican II. Y.A. |