SOURCE - Abbé Marc Guelfucci - Le Forum Catholique - 28 novembre 2005
Depuis l’élection de Benoît XVI, le monde traditionaliste est en émoi. Il est porté par un certain espoir. Les positions fermes du nouveau souverain pontife, ses écrits sur la messe tridentine ne peuvent en effet laisser indifférent. L’optimisme béat finit-il par s’insinuer dans le cœur des catholiques traditionalistes fatigués d’attendre ?
Des prêtres s’inquiètent de ce sourd enthousiasme et s’empressent de prévenir les âmes de ne pas baisser la garde. Ils appellent les fidèles à se méfier plus que jamais : Vatican II n’est pas condamné mais loué, la nouvelle messe est toujours présente avec ou sans ses abus.
Au sein de communautés traditionnelles Ecclesia Dei, les critiques publiques ont été réduites. Une prudente réserve a été choisie pour obtenir la bienveillance des évêques et si possible des concessions pastorales.
Parmi eux, certains ont accepté la concélébration en assumant les risques de contacts paroissiaux plus osés avec leurs confrères dans le sacerdoce. Ils militent pour le plus large retour possible à la liturgie traditionnelle, et souhaitent obtenir des paroisses qui donneront nous seulement la messe tridentine mais son catéchisme. Cette association aux diocèses comporte certes le risque d’une relativisation des pratiques modernes voisines plus ou moins fortes, et de rester en silence devant des initiatives oecuménistes marquées qui n’encouragent pas à embrasser la foi catholique.
D’ailleurs, l’autorité diocésaine va préférer confier la célébration à un prêtre diocésain qui aura appris la messe tridentine. Le problème est en effet plus profond que celui de la liturgie, c’est toute une spiritualité. Le retour de l’habit religieux, la ferveur eucharistique, la pratique de la confession, ne se font pas uniformément. De nombreux îlots progressistes hostiles aux directives romaines sont encore bien vivants. Des équipes pastorales bien installées veulent garder la main mise sur les « célébrations ». Le dialogue inter religieux écarte le prosélytisme et l’appel à la conversion à l’Eglise catholique.
A l’occasion de la messe du 27 novembre 2005 en l'église Sainte-Marie des Fontenelles de Nanterre, un prêtre, probablement pas en clergyman, a bien dit les choses « C'est rétrograde au possible et ce n'est pas une affaire religieuse mais plutôt une manière de concevoir la société ».
Restera donc la difficulté de la demande des familles d’une vie de foi avec la célébration de tous les sacrements selon la forme traditionnelle, et le problème du choix des livres de catéchisme. « … si cela devait aboutir à une scission de l'Eglise, nous ne poursuivrions pas l'expérience » précise le Père Yvon Aybram, vicaire épiscopal de Nanterre.
Pour ces raisons de fond, d’esprit liturgique et d’enseignement chrétien, au sein des communautés traditionnelles Ecclesia Dei, plus nombreux sont ceux qui ne souhaitent vraiment pas « concélébrer ». Ils sont plus insistants. Ils souhaitent bien sûr des paroisses mais avec un espace de liberté plus affirmé pour la liturgie traditionnelle et une vie paroissiale plus autonome. Ils considèrent que, si proche du but, il ne faudrait pas négliger une si bonne influence pour l’Eglise. Cette fermeté permettrait de continuer à remettre en cause la faiblesse de la nouvelle liturgie et des catéchismes diocésains progressistes quelque peu éloignés des derniers catéchismes romains ... Le Pape Benoît XVI semble représenter d’ailleurs un ferme appui.
Cette dernière position n’est pas si éloignée de celle de la Fraternité Saint Pie X. C’est peut-être même cette dernière qui la tient avec le plus de force et le plus de clarté. Son côté franc-tireur depuis des années a maintenu une constante pression traditionnelle. En ouvrant des centres de messe en présumant audacieusement que l’autorisation diocésaine aurait été accordée avant la crise progressiste, la Fraternité Saint Pie X a posé la question traditionnelle avec vigueur. Les communautés Ecclesia Dei, et les initiatives comme celle de Nanterre n’auraient pas pu naître sans cette résistance commencée dans les années 70 et 80. Cette Fraternité conserve donc la volonté d’une reconnaissance encore moins discrète et plus officielle. Elle craint même un nouvel indult plus large mais toujours limité, proche du ghetto pour nostalgiques.
Voilà … voilà donc le paysage actuel de la Tradition.
L’avenir est entre les mains de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de sa sainte Mère … et de ses serviteurs, instruments, plus ou moins puissants, plus ou moins dociles : Benoît XVI, les cardinaux de la Curie, les évêques, les prêtres sans oublier la pression des baptisés …
Mais concrètement, comment envisager cet avenir ?
Une seule réponse : d’abord la paix entre traditionalistes.
Vous me direz :
- « Mais cela fait des années qu’elle ne vient pas. C’est une utopie libérale ! Le combat est dure et il faut rester ferme sans compromis. La Fraternité Saint Pierre elle-même va avoir des élections qui vont probablement aboutir à une scission entre signataires plus ou moins bi ritualistes et non signataires ».
- « C’est bien jolie mais si Benoît XVI fait un geste pour la liturgie traditionnelle, cela va provoquer des repositionnements et des remous. La paix ne sera donc pas pour tout de suite ».
Je vous répondrais : la paix quand même et surtout.
Car si Benoît XVI fait un geste, il faudra l’accueillir dans un désir d’union, et non pas avec la volonté de garder ses troupes et ses quêtes.
Pas d’insulte : libéral, traître … Ces signataires, même si l’on ne suit pas leur choix, restent des traditionalistes attaqués violemment par les progressistes. S’il doit y avoir une séparation, qu’elle se fasse dans la simplicité et sans insulte.
La Tradition se meurt non pas de ses branches mais de ses mépris internes.
Contre le traditionnellement correct, j’ai le bonheur de me réjouir profondément de la réussite de Paix liturgique 92. Même si ce n’est pas une paroisse totalement « tradi », c’est une joie.
Et pourquoi cette démangeaison d’écrire cela ?
1) Parce que même si cela va paraître niais et déjà vu, un jeune prêtre peut profiter d’un forum pour le confier. Cela peut aider certains fidèles.
2) Parce que j’ai été expulsé de la Fraternité Saint Pie X dans une atmosphère de haine : « Obéissance, ou vagus et vagabond, ou rallié ».
Pour la petite histoire, des prêtres de la Fraternité Saint Pie X au franc parler assez connu, se sont retrouvés expulsés. Cela alors même que leurs positions doctrinales sont clairement critiques des nouveautés qui ont vidé les églises et les séminaires.
Le jeune prêtre qui a malencontreusement trop défendu ses confrères et qui a fait partie de ces expulsions, en a été particulièrement douché. Cela lui a permis de méditer sur la charité des prêtres entre eux, sur les exigences de la raison d’état …
Mais donc la vraie question que ce jeune prêtre traditionaliste se pose et qu’il vous soumet sous sa seule responsabilité est …
Etant donné les espoirs actuels, une certaine paix entre traditionalistes est-elle possible ?
Cette paix est-elle possible ou doivent-ils encore se considérer les uns les autres comme des hérétiques à éviter, des traîtres mutuels avec refus de célébrer la messe tridentine chez les uns et chez les autres ? Fraternité Saint Pie X officielle, ses rejetés, Fraternité Saint Pierre, signataires ou non pour la concélébration, Institut du Christ Roi, Barroux, Riaumont, Fontgonbault, …
Est-ce la question d’un naïf, d’un jeune qui ne connaît pas la dureté du monde des adultes, de la vie ecclésiastique, de la complexité de la politique … Peut-être …
Mais voici ma réponse : ce sera la réponse à cette autre question :
Pour quelles raisons, dans la Tradition de l’Eglise, une personne est-elle excommuniée « vitandus » : à éviter ?
Pour schisme ou hérésie formelle : volontaire, réaffirmée, sans regret.
Or tel n’est pas le cas.
Donc la paix.
Entre traditionalistes au moins et même, bien sûr, vis-à-vis de nombreux autres prêtres diocésains, nous n’avons pas le droit de nous comporter avec la méfiance propre au danger de perdre son âme. C’est délirant.
Voici pourquoi :
I. L’origine d’une querelle : le danger pour la foi.
Connaissez-vous l’origine d’un froid entre chrétiens ? Pourquoi des chrétiens ne prient-ils plus ensemble ? Quelle est l’origine d’une excommunication, d’une condamnation ?
Le but du Pape, des évêques, des prêtres, des religieux et religieuses, des chrétiens et chrétiennes, c’est la gloire de Dieu et le salut des âmes.
Le problème sera de connaître le plus exactement possible les moyens de salut.
Dieu les a révélés aux hommes par la bouche de saintes personnes, de prophètes, et en créant un corps sacerdotal chargé de faire connaître ses paroles exactes. Il a fondé la Synagogue puis l’Eglise catholique.
Mais la contestation de la mission des prêtres, d’Aaron dans le désert du Sinaï à Benoît XVI, et la mise en cause de l’interprétation des enseignements oraux et écrits sont fréquentes. Ce sont les hérésies, du grec « choix ». Les hérétiques retiennent ce qu’ils veulent de l’intégrité des vérités révélées qui mènent avec sûreté au salut.
Le Bon Pasteur éloigne alors les hérétiques des brebis, il éloigne le mauvais esprit et la confusion. C’est l’excommunication, le rejet de la société chrétienne du pécheur qui s’obstine à troubler la communauté. L’Eglise catholique a toujours usé de ce pouvoir avec sagesse et prudence pour ne pas éteindre la mèche qui fume encore. Toutefois, qui aime bien, châtie bien, même si cela entraîne des tentions et des peines.
De1907 à 2005, tel un serpent de mer, l’hérésie a bien sûr continué à saper les fondements de la foi. Saint Pie X va devoir condamner le subjectivisme, la religion personnelle ressentie du modernisme, rencontre de la liberté de pensée protestante et des droits absolus de l’homme. Les hommes contemporains, sorte de demi-dieux autonomes, se vexent que la vérité vienne de l’extérieur, qu’ils aient un « maître d’école », en fait un Père plus intelligent qu’eux.
Mais ces combats sont usants. Ils sont à l’image d’une querelle de famille car les hérétiques étaient initialement des enfants de l’Eglise. La querelle a commencé, la réconciliation n’a pu se faire, et il a fallu chasser des fils de la maison pour sauvegarder le reste de la famille, le bien commun, le dépôt révélé, les connaissances qui peuvent sauver.
Or, il y une profonde aspiration chrétienne à la paix, à la concorde, à la charité. Lorsque ce désir oublie les dures réalités du péché et des dangers pour l’ensemble du troupeau, la paix se fera pour ne pas blesser tel ou tel en mettant en danger le bien commun. C’est « l’irénisme », la paix à tout prix. Au concile Vatican II, le pape Jean XXIII va publiquement souhaiter que l’Eglise soit moins sévère et recoure moins souvent aux condamnations. Mais cet optimisme s’est avéré désarmant face à des ennemis de l’Eglise qui n’avaient jamais été aussi puissants, aidé par l’attrait d’un monde à la liberté absolue.
La triste méfiance devait être écartée pour mieux s’ouvrir. Toutes les religions ont du bon, se dit-il alors. Mais ce « bon » (comme l’existence d’un seul dieu) est noyé dans un tout. Les fausses religions sont des tous organisés foncièrement mauvais qui écartent de la Révélation du Christ, et donc du salut. L’homme est bon et il trouve la vérité par ses recherches consciencieuses, se dit-il encore, alors qu’il est blessé par un désordre intellectuel et moral qui n’est soigné que par la grâce du Christ. Le collège épiscopal est bon et démocratique, dit-on aussi, alors que l’inspiration du Saint Esprit est promise à Pierre qui confirme ses frères.
La liturgie devait être plus participative, plus vivante, moins mystérieuse, dit-on aussi. Le protestantisme refuse le Sacrifice de la Messe qui rend présent et diffuse réellement les grâces de l’unique Sacrifice sanglant. Il refuse la présence réelle du Christ, la grâce appliquée aux âmes, qui inonde les âmes et les justifie.
Alors, « pour faire la paix », il est imposé un nouveau rite qui va s’éloigner profondément de la perfection atteinte par la messe tridentine. Au nom de la compréhension, du retrait de répétition, la notion de sacrifice va être très atténuée. Les marques d’adoration sont fortement limitées, le prêtre se retrouve à parler à voix haute dans ce qui peut malheureusement ressembler à un simple récit, un moment de mémoire et de partage de la charité du Christ même dans l’édition typique latine bien célébrée .... Toutefois, l’intention de l’Eglise d’offrir le Sacrifice, de renouveler les paroles puissantes du Christ qui opèrent la transsubstantiation, la double consécration, est présente. La Messe est valide. Mais en lui-même, le nouvel Ordo constitue un tel recul qu’il ne pouvait pas laisser indifférents les catholiques attachés à l’expression profonde des mystères sacramentels.
De plus, la pratique fut particulièrement abusive. Autel nécessairement retourné, prêtre parlant beaucoup trop aux hommes, communion debout, donnée par tout le monde et reçue dans la main, tabernacle écarté, chants et musiques pauvres, liturgie inventée, sermons soixante-huitards … Ces abus n’ont fait qu’accentuer les reculs d’un nouvel Ordo même « bien célébré ».
De nombreux catholiques agressés par les tentations du monde, par la « liberté » morale et par des loisirs supérieurs au devoir dominical auraient certes déserté les églises. Mais se sont ajoutés des chrétiens qui n’ont plus retrouvé l’adoration et le respect. Combien de millions ? Combien de vocations aussi car les jeunes ne sont pas aussi légers que l’on croit. Il faut de la profondeur et de la beauté.
D’où la réaction des traditionalistes : abbés Coache, Serralda, Mgr Ducaud-Bourget et tant d’autres de l’Association Noël Pinault du Père André …, de nombreux laïques. Et surtout un évêque, Mgr Lefebvre, qui, au concile Vatican II, avait fait partie de l’opposition épiscopale aux progressistes … Pour aller vite, cet évêque va créer en 1970 un séminaire en Suisse à Ecône, un institut clérical pour accueillir les prêtres formés : la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, approuvée par le diocèse. Il demande au pape Paul VI de faire l’expérience de la Tradition, réclame la liberté de la messe tridentine et met en cause les textes pastoraux du Concile sur la liberté religieuse, l’œcuménisme et la collégialité.
En 1976, il est interdit à Mgr Lefebvre d’ordonner ses diacres. Il passe outre au nom du salut des âmes, du bien commun de l’Eglise. La situation en France est assez grave : la liturgie tourne à la pure création … Mais cette désobéissance est jugée un grave danger pour le bien commun de l’Eglise : il est suspens a divinis : il ne peut donner les sacrements ni célébrer la Messe. La Fraternité est dissoute par l’évêque du lieu au lieu de Rome. Mgr Lefebvre conteste.
Donc, au nom du salut des âmes : début de séparation. Les prêtres traditionalistes ne parviennent que difficilement à accueillir pour célébrer une messe multiséculaire …
Des prêtres « conciliaires » interdisent aux fidèles d’assister à la messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X. Les prêtres de la Fraternité Saint Pie X sont interdits de dire la messe tridentine dans les paroisses.
Et pourtant : où est le schisme, où est l’hérésie ?
Il y a eu là, et dès 1969, un manque de charité sacerdotale profond.
II. Une excommunication généralisée : le mépris mutuel jusqu’aux traditionalistes entre eux.
En 1976, peu quitte Mgr Lefebvre . Il est suivi par ses amis et ses prêtres. La peine ecclésiastique de Paul VI n’effraie pas beaucoup. Il est vrai qu’en France, la liturgie, le catéchisme et les sermons atteignent un degré d’invention jamais égalé.
Les discussions reprennent avec Jean-Paul II et le Cardinal Ratzinger au début des années quatre-vingt… Mais la cérémonie d’Assises de 1986 jette un froid.
Mgr Lefebvre n’a pas confiance : comment ses sujets vont-ils être ordonnés ? Un accord est adopté mais il revient dessus le lendemain : il n’a pas confiance. Le 30 juin 1988, il sacre quatre évêques sans mission apostolique, mais pour donner les ordinations. Il est excommunié par Jean-Paul II, acte sévère et rare. Canoniquement, seuls Mgr Lefebvre et les évêques sacrés sont seuls excommuniés. Les prêtres ordonnés par eux sont suspens a divinis (ils ne devraient pas célébrer les sacrements). Les prêtres comme les fidèles ne doivent pas avoir d’intention schismatique.
Mgr Lefebvre conteste cette décision d’autant qu’avant les sacres chinois des années cinquante, un sacre sans mandat pontifical était puni de la seule suspens a divinis.
Des prêtres vont quitter alors Mgr Lefebvre pour créer la Fraternité Saint Pierre dans le cadre de la Commission Pontificale Ecclesia Dei chargée d’accueillir les membres de l’Eglise attachés au rite tridentin.
Dès cette date, c’est l’insulte : « schismatiques » ou « ralliés aux progressistes ». Cela par rapport à la reconnaissance canonique pour célébrer la messe et les ministères accordés au compte goutte par les évêques …
Au nom du salut des âmes en danger,
- des prêtres « conciliaires » et des prêtres « Ecclesia Dei » :
interdisent aux fidèles d’assister à la messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X
- Les prêtres de la Fraternité Saint Pie X sont interdits de dire la messe tridentine dans les paroisses, et même dans les communautés Ecclesia Dei.
Au nom du salut des âmes en danger,
- certains prêtres de la Fraternité Saint Pie X interdisent aux fidèles d’assister même à la messe de prêtres « Ecclésia Dei » : danger de relativisation des réformes liturgiques et des enseignements contestés de Vatican II.
- La Fraternité Saint Pie X
interdit les prêtres « Ecclesia dei » de célébrer la messe tridentine dans ses prieurés.
Toutefois, les prêtres les plus spirituels, individuellement, accueillent les prêtres de chaque « camp ». Les prêtres « conciliaires » les plus spirituels accueillent les prêtres traditionnels. Ces gestes sont scrutés par les fidèles : tel curé, tel évêque est accueillant.
Pourtant, une excommunication lancée contre un prêtre de la Fraternité Saint Pie X en Asie sera annulée par Rome.
Pourtant, le cardinal Médina répondra par écrit que l’on peut assister à une messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X.
De toute façon , comme le dit le Cardinal Hoyos en novembre 2005 à TV canal 5 : « Nous ne sommes pas face à une hérésie. On ne peut pas dire en termes corrects, exacts, précis qu’il y ait un schisme. Il y a, dans le fait de consacrer des évêques sans le mandat pontifical, une attitude schismatique. Ils sont à l’intérieur de l’Eglise ».
Mais reste encore cette distinction bien complexe et bien vague de la pleine communion : « Il y a seulement ce fait qu’il manque une pleine, une plus parfaite – comme cela a été dit durant la rencontre avec Mgr Fellay – une plus pleine communion, parce la communion existe."
Mais où est concrètement le schisme, où est l’hérésie ?
Il a eu surenchère mutuelle. La Fraternité Saint Pie X n’aurait pas dû répondre à l’insulte de « schismatique » par celle de rallié. Notre Seigneur a plutôt dit : « Si j’ai bien parlé, pourquoi me frappe-tu ? ».
Certes les insultes sont blessantes, mais je, petit jeune prêtre qui donne son avis, je pense que ce fut tomber dans le piège. De victime, la Fraternité Saint Pie X est devenue agresseur. Et ce manque de charité généralisé contre elle et par elle nous a mis dans cet étrange état de dureté et d’intransigeance dont beaucoup de fidèles et de prêtres aimeraient sortir.
Pourquoi ces considérations et cette naïveté ? Parce que je subis cette dureté alors que je suis un prêtre traditionaliste, que je n’accepte pas le silence sur les causes liturgiques et doctrinales qui ont vidé des églises et des séminaires, parce que l’insulte de rallié est lancé alors même que ce serait l’insulte de prêtre illicite, vagabond et vagus qui serait mise en réserve si je n’avais pas sollicité un celebret de Rome.
III. Rompre le cercle vicieux : réconciliation par le courage contre le traditionnellement correct.
Ces interdits au moins entre traditionalistes relèvent de l’excommunication « vitandus » : ne plus avoir de communication avec un individu dangereux.
Or, les reproches mutuels n’atteignent pas un danger réel de perdre la foi catholique : c’est faux.
Par exemple, il est triste que l’initiative de Paix liturgique 92 soit critiquée par une partie des traditionalistes alors que c’est objectivement une conquête traditionnelle, tout bien considéré, même avec ses limites.
Heureusement les fidèles bravent très souvent ces interdits et vont aux messes tridentines qu’ils peuvent trouver.
Que nos fidèles montrent l’exemple de la charité : forcer les autorités de chaque « camps » à une certaine paix en refusant leur raidissement mutuel.
Les critiques doctrinales (que nous n’abandonnerons pas) ne doivent pas nous empêcher de nous reconnaître catholiques. Revenons à un esprit plus pastoral, voir plus théologique : nous n’avons pas le pouvoir de nous excommunier.
Voilà, voilà, c’est bien parce que je n’appartiens pas à tel ou tel camp que j’ai pu écrire tout cela. J’en profite encore un peu sur ce forum avant d’être rappelé à l’ordre par mes anciens vers le traditionnellement correct et ses impératifs politiques …
Udp.
Ce texte est purement personnel et sans doute trop sincère pour être sans pseudo. Mais justement, il a sa place dans ce forum de discussion si cher à cette possibilité d’être sincère.
Depuis l’élection de Benoît XVI, le monde traditionaliste est en émoi. Il est porté par un certain espoir. Les positions fermes du nouveau souverain pontife, ses écrits sur la messe tridentine ne peuvent en effet laisser indifférent. L’optimisme béat finit-il par s’insinuer dans le cœur des catholiques traditionalistes fatigués d’attendre ?
Des prêtres s’inquiètent de ce sourd enthousiasme et s’empressent de prévenir les âmes de ne pas baisser la garde. Ils appellent les fidèles à se méfier plus que jamais : Vatican II n’est pas condamné mais loué, la nouvelle messe est toujours présente avec ou sans ses abus.
Au sein de communautés traditionnelles Ecclesia Dei, les critiques publiques ont été réduites. Une prudente réserve a été choisie pour obtenir la bienveillance des évêques et si possible des concessions pastorales.
Parmi eux, certains ont accepté la concélébration en assumant les risques de contacts paroissiaux plus osés avec leurs confrères dans le sacerdoce. Ils militent pour le plus large retour possible à la liturgie traditionnelle, et souhaitent obtenir des paroisses qui donneront nous seulement la messe tridentine mais son catéchisme. Cette association aux diocèses comporte certes le risque d’une relativisation des pratiques modernes voisines plus ou moins fortes, et de rester en silence devant des initiatives oecuménistes marquées qui n’encouragent pas à embrasser la foi catholique.
D’ailleurs, l’autorité diocésaine va préférer confier la célébration à un prêtre diocésain qui aura appris la messe tridentine. Le problème est en effet plus profond que celui de la liturgie, c’est toute une spiritualité. Le retour de l’habit religieux, la ferveur eucharistique, la pratique de la confession, ne se font pas uniformément. De nombreux îlots progressistes hostiles aux directives romaines sont encore bien vivants. Des équipes pastorales bien installées veulent garder la main mise sur les « célébrations ». Le dialogue inter religieux écarte le prosélytisme et l’appel à la conversion à l’Eglise catholique.
A l’occasion de la messe du 27 novembre 2005 en l'église Sainte-Marie des Fontenelles de Nanterre, un prêtre, probablement pas en clergyman, a bien dit les choses « C'est rétrograde au possible et ce n'est pas une affaire religieuse mais plutôt une manière de concevoir la société ».
Restera donc la difficulté de la demande des familles d’une vie de foi avec la célébration de tous les sacrements selon la forme traditionnelle, et le problème du choix des livres de catéchisme. « … si cela devait aboutir à une scission de l'Eglise, nous ne poursuivrions pas l'expérience » précise le Père Yvon Aybram, vicaire épiscopal de Nanterre.
Pour ces raisons de fond, d’esprit liturgique et d’enseignement chrétien, au sein des communautés traditionnelles Ecclesia Dei, plus nombreux sont ceux qui ne souhaitent vraiment pas « concélébrer ». Ils sont plus insistants. Ils souhaitent bien sûr des paroisses mais avec un espace de liberté plus affirmé pour la liturgie traditionnelle et une vie paroissiale plus autonome. Ils considèrent que, si proche du but, il ne faudrait pas négliger une si bonne influence pour l’Eglise. Cette fermeté permettrait de continuer à remettre en cause la faiblesse de la nouvelle liturgie et des catéchismes diocésains progressistes quelque peu éloignés des derniers catéchismes romains ... Le Pape Benoît XVI semble représenter d’ailleurs un ferme appui.
Cette dernière position n’est pas si éloignée de celle de la Fraternité Saint Pie X. C’est peut-être même cette dernière qui la tient avec le plus de force et le plus de clarté. Son côté franc-tireur depuis des années a maintenu une constante pression traditionnelle. En ouvrant des centres de messe en présumant audacieusement que l’autorisation diocésaine aurait été accordée avant la crise progressiste, la Fraternité Saint Pie X a posé la question traditionnelle avec vigueur. Les communautés Ecclesia Dei, et les initiatives comme celle de Nanterre n’auraient pas pu naître sans cette résistance commencée dans les années 70 et 80. Cette Fraternité conserve donc la volonté d’une reconnaissance encore moins discrète et plus officielle. Elle craint même un nouvel indult plus large mais toujours limité, proche du ghetto pour nostalgiques.
Voilà … voilà donc le paysage actuel de la Tradition.
L’avenir est entre les mains de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de sa sainte Mère … et de ses serviteurs, instruments, plus ou moins puissants, plus ou moins dociles : Benoît XVI, les cardinaux de la Curie, les évêques, les prêtres sans oublier la pression des baptisés …
Mais concrètement, comment envisager cet avenir ?
Une seule réponse : d’abord la paix entre traditionalistes.
Vous me direz :
- « Mais cela fait des années qu’elle ne vient pas. C’est une utopie libérale ! Le combat est dure et il faut rester ferme sans compromis. La Fraternité Saint Pierre elle-même va avoir des élections qui vont probablement aboutir à une scission entre signataires plus ou moins bi ritualistes et non signataires ».
- « C’est bien jolie mais si Benoît XVI fait un geste pour la liturgie traditionnelle, cela va provoquer des repositionnements et des remous. La paix ne sera donc pas pour tout de suite ».
Je vous répondrais : la paix quand même et surtout.
Car si Benoît XVI fait un geste, il faudra l’accueillir dans un désir d’union, et non pas avec la volonté de garder ses troupes et ses quêtes.
Pas d’insulte : libéral, traître … Ces signataires, même si l’on ne suit pas leur choix, restent des traditionalistes attaqués violemment par les progressistes. S’il doit y avoir une séparation, qu’elle se fasse dans la simplicité et sans insulte.
La Tradition se meurt non pas de ses branches mais de ses mépris internes.
Contre le traditionnellement correct, j’ai le bonheur de me réjouir profondément de la réussite de Paix liturgique 92. Même si ce n’est pas une paroisse totalement « tradi », c’est une joie.
Et pourquoi cette démangeaison d’écrire cela ?
1) Parce que même si cela va paraître niais et déjà vu, un jeune prêtre peut profiter d’un forum pour le confier. Cela peut aider certains fidèles.
2) Parce que j’ai été expulsé de la Fraternité Saint Pie X dans une atmosphère de haine : « Obéissance, ou vagus et vagabond, ou rallié ».
Pour la petite histoire, des prêtres de la Fraternité Saint Pie X au franc parler assez connu, se sont retrouvés expulsés. Cela alors même que leurs positions doctrinales sont clairement critiques des nouveautés qui ont vidé les églises et les séminaires.
Le jeune prêtre qui a malencontreusement trop défendu ses confrères et qui a fait partie de ces expulsions, en a été particulièrement douché. Cela lui a permis de méditer sur la charité des prêtres entre eux, sur les exigences de la raison d’état …
Mais donc la vraie question que ce jeune prêtre traditionaliste se pose et qu’il vous soumet sous sa seule responsabilité est …
Etant donné les espoirs actuels, une certaine paix entre traditionalistes est-elle possible ?
Cette paix est-elle possible ou doivent-ils encore se considérer les uns les autres comme des hérétiques à éviter, des traîtres mutuels avec refus de célébrer la messe tridentine chez les uns et chez les autres ? Fraternité Saint Pie X officielle, ses rejetés, Fraternité Saint Pierre, signataires ou non pour la concélébration, Institut du Christ Roi, Barroux, Riaumont, Fontgonbault, …
Est-ce la question d’un naïf, d’un jeune qui ne connaît pas la dureté du monde des adultes, de la vie ecclésiastique, de la complexité de la politique … Peut-être …
Mais voici ma réponse : ce sera la réponse à cette autre question :
Pour quelles raisons, dans la Tradition de l’Eglise, une personne est-elle excommuniée « vitandus » : à éviter ?
Pour schisme ou hérésie formelle : volontaire, réaffirmée, sans regret.
Or tel n’est pas le cas.
Donc la paix.
Entre traditionalistes au moins et même, bien sûr, vis-à-vis de nombreux autres prêtres diocésains, nous n’avons pas le droit de nous comporter avec la méfiance propre au danger de perdre son âme. C’est délirant.
Voici pourquoi :
I. L’origine d’une querelle : le danger pour la foi.
Connaissez-vous l’origine d’un froid entre chrétiens ? Pourquoi des chrétiens ne prient-ils plus ensemble ? Quelle est l’origine d’une excommunication, d’une condamnation ?
Le but du Pape, des évêques, des prêtres, des religieux et religieuses, des chrétiens et chrétiennes, c’est la gloire de Dieu et le salut des âmes.
Le problème sera de connaître le plus exactement possible les moyens de salut.
Dieu les a révélés aux hommes par la bouche de saintes personnes, de prophètes, et en créant un corps sacerdotal chargé de faire connaître ses paroles exactes. Il a fondé la Synagogue puis l’Eglise catholique.
Mais la contestation de la mission des prêtres, d’Aaron dans le désert du Sinaï à Benoît XVI, et la mise en cause de l’interprétation des enseignements oraux et écrits sont fréquentes. Ce sont les hérésies, du grec « choix ». Les hérétiques retiennent ce qu’ils veulent de l’intégrité des vérités révélées qui mènent avec sûreté au salut.
Le Bon Pasteur éloigne alors les hérétiques des brebis, il éloigne le mauvais esprit et la confusion. C’est l’excommunication, le rejet de la société chrétienne du pécheur qui s’obstine à troubler la communauté. L’Eglise catholique a toujours usé de ce pouvoir avec sagesse et prudence pour ne pas éteindre la mèche qui fume encore. Toutefois, qui aime bien, châtie bien, même si cela entraîne des tentions et des peines.
De1907 à 2005, tel un serpent de mer, l’hérésie a bien sûr continué à saper les fondements de la foi. Saint Pie X va devoir condamner le subjectivisme, la religion personnelle ressentie du modernisme, rencontre de la liberté de pensée protestante et des droits absolus de l’homme. Les hommes contemporains, sorte de demi-dieux autonomes, se vexent que la vérité vienne de l’extérieur, qu’ils aient un « maître d’école », en fait un Père plus intelligent qu’eux.
Mais ces combats sont usants. Ils sont à l’image d’une querelle de famille car les hérétiques étaient initialement des enfants de l’Eglise. La querelle a commencé, la réconciliation n’a pu se faire, et il a fallu chasser des fils de la maison pour sauvegarder le reste de la famille, le bien commun, le dépôt révélé, les connaissances qui peuvent sauver.
Or, il y une profonde aspiration chrétienne à la paix, à la concorde, à la charité. Lorsque ce désir oublie les dures réalités du péché et des dangers pour l’ensemble du troupeau, la paix se fera pour ne pas blesser tel ou tel en mettant en danger le bien commun. C’est « l’irénisme », la paix à tout prix. Au concile Vatican II, le pape Jean XXIII va publiquement souhaiter que l’Eglise soit moins sévère et recoure moins souvent aux condamnations. Mais cet optimisme s’est avéré désarmant face à des ennemis de l’Eglise qui n’avaient jamais été aussi puissants, aidé par l’attrait d’un monde à la liberté absolue.
La triste méfiance devait être écartée pour mieux s’ouvrir. Toutes les religions ont du bon, se dit-il alors. Mais ce « bon » (comme l’existence d’un seul dieu) est noyé dans un tout. Les fausses religions sont des tous organisés foncièrement mauvais qui écartent de la Révélation du Christ, et donc du salut. L’homme est bon et il trouve la vérité par ses recherches consciencieuses, se dit-il encore, alors qu’il est blessé par un désordre intellectuel et moral qui n’est soigné que par la grâce du Christ. Le collège épiscopal est bon et démocratique, dit-on aussi, alors que l’inspiration du Saint Esprit est promise à Pierre qui confirme ses frères.
La liturgie devait être plus participative, plus vivante, moins mystérieuse, dit-on aussi. Le protestantisme refuse le Sacrifice de la Messe qui rend présent et diffuse réellement les grâces de l’unique Sacrifice sanglant. Il refuse la présence réelle du Christ, la grâce appliquée aux âmes, qui inonde les âmes et les justifie.
Alors, « pour faire la paix », il est imposé un nouveau rite qui va s’éloigner profondément de la perfection atteinte par la messe tridentine. Au nom de la compréhension, du retrait de répétition, la notion de sacrifice va être très atténuée. Les marques d’adoration sont fortement limitées, le prêtre se retrouve à parler à voix haute dans ce qui peut malheureusement ressembler à un simple récit, un moment de mémoire et de partage de la charité du Christ même dans l’édition typique latine bien célébrée .... Toutefois, l’intention de l’Eglise d’offrir le Sacrifice, de renouveler les paroles puissantes du Christ qui opèrent la transsubstantiation, la double consécration, est présente. La Messe est valide. Mais en lui-même, le nouvel Ordo constitue un tel recul qu’il ne pouvait pas laisser indifférents les catholiques attachés à l’expression profonde des mystères sacramentels.
De plus, la pratique fut particulièrement abusive. Autel nécessairement retourné, prêtre parlant beaucoup trop aux hommes, communion debout, donnée par tout le monde et reçue dans la main, tabernacle écarté, chants et musiques pauvres, liturgie inventée, sermons soixante-huitards … Ces abus n’ont fait qu’accentuer les reculs d’un nouvel Ordo même « bien célébré ».
De nombreux catholiques agressés par les tentations du monde, par la « liberté » morale et par des loisirs supérieurs au devoir dominical auraient certes déserté les églises. Mais se sont ajoutés des chrétiens qui n’ont plus retrouvé l’adoration et le respect. Combien de millions ? Combien de vocations aussi car les jeunes ne sont pas aussi légers que l’on croit. Il faut de la profondeur et de la beauté.
D’où la réaction des traditionalistes : abbés Coache, Serralda, Mgr Ducaud-Bourget et tant d’autres de l’Association Noël Pinault du Père André …, de nombreux laïques. Et surtout un évêque, Mgr Lefebvre, qui, au concile Vatican II, avait fait partie de l’opposition épiscopale aux progressistes … Pour aller vite, cet évêque va créer en 1970 un séminaire en Suisse à Ecône, un institut clérical pour accueillir les prêtres formés : la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, approuvée par le diocèse. Il demande au pape Paul VI de faire l’expérience de la Tradition, réclame la liberté de la messe tridentine et met en cause les textes pastoraux du Concile sur la liberté religieuse, l’œcuménisme et la collégialité.
En 1976, il est interdit à Mgr Lefebvre d’ordonner ses diacres. Il passe outre au nom du salut des âmes, du bien commun de l’Eglise. La situation en France est assez grave : la liturgie tourne à la pure création … Mais cette désobéissance est jugée un grave danger pour le bien commun de l’Eglise : il est suspens a divinis : il ne peut donner les sacrements ni célébrer la Messe. La Fraternité est dissoute par l’évêque du lieu au lieu de Rome. Mgr Lefebvre conteste.
Donc, au nom du salut des âmes : début de séparation. Les prêtres traditionalistes ne parviennent que difficilement à accueillir pour célébrer une messe multiséculaire …
Des prêtres « conciliaires » interdisent aux fidèles d’assister à la messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X. Les prêtres de la Fraternité Saint Pie X sont interdits de dire la messe tridentine dans les paroisses.
Et pourtant : où est le schisme, où est l’hérésie ?
Il y a eu là, et dès 1969, un manque de charité sacerdotale profond.
II. Une excommunication généralisée : le mépris mutuel jusqu’aux traditionalistes entre eux.
En 1976, peu quitte Mgr Lefebvre . Il est suivi par ses amis et ses prêtres. La peine ecclésiastique de Paul VI n’effraie pas beaucoup. Il est vrai qu’en France, la liturgie, le catéchisme et les sermons atteignent un degré d’invention jamais égalé.
Les discussions reprennent avec Jean-Paul II et le Cardinal Ratzinger au début des années quatre-vingt… Mais la cérémonie d’Assises de 1986 jette un froid.
Mgr Lefebvre n’a pas confiance : comment ses sujets vont-ils être ordonnés ? Un accord est adopté mais il revient dessus le lendemain : il n’a pas confiance. Le 30 juin 1988, il sacre quatre évêques sans mission apostolique, mais pour donner les ordinations. Il est excommunié par Jean-Paul II, acte sévère et rare. Canoniquement, seuls Mgr Lefebvre et les évêques sacrés sont seuls excommuniés. Les prêtres ordonnés par eux sont suspens a divinis (ils ne devraient pas célébrer les sacrements). Les prêtres comme les fidèles ne doivent pas avoir d’intention schismatique.
Mgr Lefebvre conteste cette décision d’autant qu’avant les sacres chinois des années cinquante, un sacre sans mandat pontifical était puni de la seule suspens a divinis.
Des prêtres vont quitter alors Mgr Lefebvre pour créer la Fraternité Saint Pierre dans le cadre de la Commission Pontificale Ecclesia Dei chargée d’accueillir les membres de l’Eglise attachés au rite tridentin.
Dès cette date, c’est l’insulte : « schismatiques » ou « ralliés aux progressistes ». Cela par rapport à la reconnaissance canonique pour célébrer la messe et les ministères accordés au compte goutte par les évêques …
Au nom du salut des âmes en danger,
- des prêtres « conciliaires » et des prêtres « Ecclesia Dei » :
interdisent aux fidèles d’assister à la messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X
- Les prêtres de la Fraternité Saint Pie X sont interdits de dire la messe tridentine dans les paroisses, et même dans les communautés Ecclesia Dei.
Au nom du salut des âmes en danger,
- certains prêtres de la Fraternité Saint Pie X interdisent aux fidèles d’assister même à la messe de prêtres « Ecclésia Dei » : danger de relativisation des réformes liturgiques et des enseignements contestés de Vatican II.
- La Fraternité Saint Pie X
interdit les prêtres « Ecclesia dei » de célébrer la messe tridentine dans ses prieurés.
Toutefois, les prêtres les plus spirituels, individuellement, accueillent les prêtres de chaque « camp ». Les prêtres « conciliaires » les plus spirituels accueillent les prêtres traditionnels. Ces gestes sont scrutés par les fidèles : tel curé, tel évêque est accueillant.
Pourtant, une excommunication lancée contre un prêtre de la Fraternité Saint Pie X en Asie sera annulée par Rome.
Pourtant, le cardinal Médina répondra par écrit que l’on peut assister à une messe célébrée par la Fraternité Saint Pie X.
De toute façon , comme le dit le Cardinal Hoyos en novembre 2005 à TV canal 5 : « Nous ne sommes pas face à une hérésie. On ne peut pas dire en termes corrects, exacts, précis qu’il y ait un schisme. Il y a, dans le fait de consacrer des évêques sans le mandat pontifical, une attitude schismatique. Ils sont à l’intérieur de l’Eglise ».
Mais reste encore cette distinction bien complexe et bien vague de la pleine communion : « Il y a seulement ce fait qu’il manque une pleine, une plus parfaite – comme cela a été dit durant la rencontre avec Mgr Fellay – une plus pleine communion, parce la communion existe."
Mais où est concrètement le schisme, où est l’hérésie ?
Il a eu surenchère mutuelle. La Fraternité Saint Pie X n’aurait pas dû répondre à l’insulte de « schismatique » par celle de rallié. Notre Seigneur a plutôt dit : « Si j’ai bien parlé, pourquoi me frappe-tu ? ».
Certes les insultes sont blessantes, mais je, petit jeune prêtre qui donne son avis, je pense que ce fut tomber dans le piège. De victime, la Fraternité Saint Pie X est devenue agresseur. Et ce manque de charité généralisé contre elle et par elle nous a mis dans cet étrange état de dureté et d’intransigeance dont beaucoup de fidèles et de prêtres aimeraient sortir.
Pourquoi ces considérations et cette naïveté ? Parce que je subis cette dureté alors que je suis un prêtre traditionaliste, que je n’accepte pas le silence sur les causes liturgiques et doctrinales qui ont vidé des églises et des séminaires, parce que l’insulte de rallié est lancé alors même que ce serait l’insulte de prêtre illicite, vagabond et vagus qui serait mise en réserve si je n’avais pas sollicité un celebret de Rome.
III. Rompre le cercle vicieux : réconciliation par le courage contre le traditionnellement correct.
Ces interdits au moins entre traditionalistes relèvent de l’excommunication « vitandus » : ne plus avoir de communication avec un individu dangereux.
Or, les reproches mutuels n’atteignent pas un danger réel de perdre la foi catholique : c’est faux.
Par exemple, il est triste que l’initiative de Paix liturgique 92 soit critiquée par une partie des traditionalistes alors que c’est objectivement une conquête traditionnelle, tout bien considéré, même avec ses limites.
Heureusement les fidèles bravent très souvent ces interdits et vont aux messes tridentines qu’ils peuvent trouver.
Que nos fidèles montrent l’exemple de la charité : forcer les autorités de chaque « camps » à une certaine paix en refusant leur raidissement mutuel.
Les critiques doctrinales (que nous n’abandonnerons pas) ne doivent pas nous empêcher de nous reconnaître catholiques. Revenons à un esprit plus pastoral, voir plus théologique : nous n’avons pas le pouvoir de nous excommunier.
Voilà, voilà, c’est bien parce que je n’appartiens pas à tel ou tel camp que j’ai pu écrire tout cela. J’en profite encore un peu sur ce forum avant d’être rappelé à l’ordre par mes anciens vers le traditionnellement correct et ses impératifs politiques …
Udp.
Ce texte est purement personnel et sans doute trop sincère pour être sans pseudo. Mais justement, il a sa place dans ce forum de discussion si cher à cette possibilité d’être sincère.