29 janvier 2018

[FSSPX Actualités] France : bientôt une nouvelle traduction du Credo

SOURCE - FSSPX Actualités - 29 janvier 2018

La traduction française du nouveau missel, attendue depuis 2002, est en cours de finalisation. Parmi les changements envisagés, celui du Credo qui devrait voir réapparaître la formule «consubstantiel au Père», plus fidèle au latin... et à la foi catholique.

Lors de la publication du missel de Paul VI en langue vernaculaire, en 1970, c’est la traduction « de même nature que  le Père » qui avait été choisie pour traduire «consubstantialem Patri», au risque d’une ambiguïté dénoncée dès l’origine.

Dans la foi catholique en effet, le Père et le Fils ne se contentent pas de partager une même nature divine. En latin, comme en grec, le concile de Nicée (325) proclame qu’ils sont de la même substance - homousios - et que le Fils est donc consubstantiel au Père.

La nouvelle version française - précise Marie Malzac dans La Croix - sera probablement présentée à Lourdes au printemps 2018 lors de l’assemblée plénière de la Conférence des évêques. Elle sera ensuite soumise à la «confirmatio» romaine prévue par le motu proprio Magnum principium.

Il n’y a donc pas encore de date prévue à ce stade pour la publication du nouveau missel en français, mais celle-ci pourrait intervenir en 2019. Soit après cinquante années durant lesquelles le peuple fidèle aura prié sur une traduction fautive et erronée. Les responsables feront-ils leur mea culpa?

28 janvier 2018

[Peregrinus] La liturgie en Révolution (6) : La liturgie en français, rigorisme, pastorale et sentiment

SOURCE - Peregrinus - 28 janvier 2018

Parmi les promoteurs les plus actifs de la traduction de la liturgie en français après la Terreur, on trouve Jean-Charles-Augustin Clément, peut-être l’une des figures les plus marquantes de la seconde Eglise constitutionnelle. Né en 1717, Clément est avant tout un vétéran des luttes jansénistes non seulement françaises, mais aussi européennes. Devenu chanoine et trésorier de la cathédrale d’Auxerre grâce à la protection de Mgr de Caylus, qui fait de son chapitre un repaire de jansénistes, il mène en 1757 la lutte des chanoines contre le nouvel évêque Mgr de Condorcet et les prédicateurs jésuites invités par celui-ci, assiste au concile de l’Eglise d’Utrecht et voyage dans l’Europe entière pour défendre les intérêts du parti janséniste. En 1790, l’abbé Clément adhère avec quelques autres chanoines auxerrois aux réformes de la Constituante, dans lesquelles il voit l’occasion d’un premier pas vers le retour aux usages de l’Eglise primitive. Après la Terreur, alors que le chanoine Moreau, dont il est initialement très proche, rétracte son serment et demande sa réconciliation au clergé fidèle, Clément, quant à lui, joue un rôle essentiel auprès des « évêques réunis » qui organisent à Paris la reprise du culte.

Elu en 1796 à la tête du diocèse de Versailles, Clément devient alors le plus notable défenseur, au sein de l’épiscopat constitutionnel, d’une ligne résolument janséniste, collégialiste, rigoriste, intransigeante à l’égard des réfractaires comme à l’égard des « traditeurs ».

On reviendra ultérieurement sur la manière dont le débat sur la liturgie en langue vulgaire s’est déroulé dans l’Eglise constitutionnelle de 1795 à 1801. En effet, il convient tout d’abord de donner un aperçu des conceptions liturgiques de Clément.

L’intérêt de l’évêque intrus pour la liturgie n’est pas nouveau. Chanoine d’Auxerre, l’abbé Clément, nourri du traité de l’abbé Duguet sur la prière publique, a défendu contre les curés du diocèse la dignité de l’office célébré par le chapitre de la cathédrale. Ainsi évoque-t-il en 1780 la « majesté des Offices, qui à la paix de l’Eglise pénétroit encore de respect & de saisissement les Empereurs convertis & toute leur Cour (1) ». A la fin de l’Ancien Régime, il dénonce également l’ultramontanisme qu’il découvre dans le Rituel de Paris (2). Il est très probable qu’il partage alors, comme le chanoine Moreau, son confrère dans le chapitre d’Auxerre, l’opinion assez répandue dans les milieux jansénistes sur la liturgie en langue vulgaire : celle-ci est associée aux idylliques « beaux jours de l’Eglise » où le peuple entier s’associait pleinement à la prière du clergé ; sa disparition est regrettable, mais son retour ne paraît guère envisageable à court ou même à moyen terme.

Comme on l’a vu, tout change avec la Révolution, l’expérience de la rupture avec Rome, puis celle de la persécution terroriste, perçues comme l’occasion providentielle d’un retour aux premiers temps du christianisme. Pour Clément, depuis que le latin a cessé d’être une langue vulgaire, les fidèles « ont porté le fléau d’une Langue étrangère, par une sévère permission de Dieu sur eux (3) ». Le prélat constitutionnel applique ainsi à la liturgie le thème, classique dans les milieux jansénistes, de l’obscurcissement de la vérité dans l’Eglise. Louis-François Ponsignon, vicaire épiscopal de Clément et l’un des plus ardents défenseurs de la liturgie en français, ne s’exprime pas autrement :
L’usage de la langue vulgaire n’a commencé à être inoui que dans des siècles de ténèbres et de barbarie. […] Il eût été inoui, au contraire, dans les beaux siècles de la religion, qu’on administrât les choses saintes aux Fidèles dans une langue inintelligible pour eux (4).
En effet, la promotion par Clément de la liturgie en langue vulgaire porte le sceau de son primitivisme rigoriste. C’est au nom d’une « exacte théologie » que l’évêque intrus se prononce en faveur des cérémonies en français. Le principe de cette théologie des sacrements est clairement formulé : « Les Sacremens n’opèrent pas sur un homme qui n’y prend point de part. » Certes, Clément ne nie pas que les sacrements agissent ex opere operato, mais, dit-il encore, « l’intelligence et l’adhésion de celui qui les reçoit, tiennent à cet effet même du Sacrement (5) ». Pour le prélat, il manque quelque chose au sacrement lui-même lorsqu’il est administré à un fidèle qui n’en comprend pas les cérémonies. Seul vit vraiment de la grâce des sacrements le petit nombre de chrétiens capables d’en saisir pleinement les formules. La réforme liturgique voulue par Clément s’inscrit dans une vision de l’Eglise selon laquelle la majorité des chrétiens, même fidèles, ne le sont que de nom.

De cette « exacte théologie », adossée en réalité à des conceptions rigoristes, découle une pastorale des sacrements qui prend également prétexte de la déchristianisation révolutionnaire pour imposer le passage au français : la liturgie en français est vantée au nom de son efficacité apostolique. Cet aspect apparaît surtout chez l’abbé Ponsignon. Il ne sert à rien, estime le collaborateur de l’évêque intrus, de multiplier les instructions sur les sacrements pour pallier l’ignorance du peuple chrétien ; en effet, écrit-il, les « fidèles les plus assidus et les plus avides d’instruction sont ceux à qui elles sont le moins nécessaires ».
Que diront-ils [les prêtres] à ce grand nombre de chrétiens qui par le malheur des tems sont devenus comme étrangers à la religion, et que des circonstances cependant amènent encore quelquefois dans nos temples ou auprès de malades qui les intéressent, pour y être témoins de l’administration des Sacremens ? Voilà ceux qu’il importe d’éclairer, de toucher, de frapper par des objets présens et sensibles.
Ponsignon donne donc aux prêtres le conseil suivant :
Rendez-vous donc intelligible ; que vos cérémonies s’expliquent d’elles-mêmes ; que vos prières soient touchantes (6).
La pastorale liturgique proposée par Ponsignon est en effet, en même temps qu’une pastorale que l’on pourrait qualifier de rationaliste, fondée sur la compréhension littérale de tous les textes prononcés, une pastorale du sentiment, où semble percer parfois le goût des larmes du XVIIIe siècle finissant. Pour Ponsignon, instruction et sentiment sont indissociables :
Si vous récitez du latin devant eux [les fidèles peu instruits], vous ne leur procurez aucune instruction ; vous n’excitez en eux aucun sentiment ; ils ne savent ni ce que vous dites ni ce que vous faites (7).
Au « défenseur du Latin », pour qui « ce ne sont pas les paroles qui en imposent à la multitude ; mais la majesté de nos cérémonies, la gravité du ministre, son attention scrupuleuse à observer tous les points marqués dans le Rituel », Ponsignon répond qu’il ne voit pas là « de quoi répandre l’instruction et exciter la piété : quand on n’a que de pareils moyens à proposer, ne feroit-on pas mieux de garder le silence (8) ? » La compréhension littérale des textes, seule susceptible de provoquer l’adhésion sentimentale du fidèle, est la seule solution aux difficultés pastorales où se débat l’Eglise de France. Ainsi Ponsignon n’hésite-t-il pas à appuyer son opinion par des considérations arithmétiques. Si l’on confère huit cents baptêmes dans le cours d’une année, ces célébrations entraînent logiquement la présence de deux mille quatre cents témoins, sans compter les assistants, soit peut-être deux mille chrétiens peu instruits, voire très détachés, que certainement la célébration des sacrements en français édifiera.

Telles sont donc les principales raisons qu’invoquent les prêtres de la seconde Eglise constitutionnelle en faveur de la liturgie en français : dans un contexte de séparation de l’Eglise et de l’Etat, où la reprise du culte demeure extrêmement précaire, il ne s’agit plus de seconder les efforts des autorités civiles pour diffuser l’esprit républicain, mais de revenir aux usages supposés des « beaux siècles de la religion ». Primitivisme, rigorisme, rationalisme et sentimentalisme concourent ainsi à présenter le passage au français comme une nécessité tant doctrinale que pastorale.

(A suivre)

Peregrinus
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(1) Augustin Clément, Mémoire sur le rang que tiennent les chapitres de cathédrale dans l’ordre hiérarchique, contre les principes de trois Lettres publiées à Auxerre en 1779, s. n., Auxerre, 1780, p. 9.
(2) Augustin Clément, Lettre à l’auteur des observations sur le rituel de Paris, s. n., 1787, p. 1-2.
(3) Mémoires du révérend évêque de Versailles au clergé de France, Imprimerie de Jacob, Versailles, 1800, p. 15.
(4) Louis-François Ponsignon, Apologie de l’usage de la langue française dans l’administration des sacremens, Imprimerie-Librairie Chrétienne, Paris, 1800, p. 27.
(5) Mémoires du révérend évêque de Versaillesop. cit., p. 18-19.
(6) Louis-François Ponsignon, op. cit., p. 51.
(7) Ibid., p. 52.
(8) Ibid., p. 53.

27 janvier 2018

[Mgr Williamson - Initiative St Marcel] Mozart à Broadstairs

SOURCE - Mgr Williamson - Initiative St Marcel - 27 janvier 2018

Dans ce monde bancal, de dissonante tristesse,
L’âme accueille Mozart, sa joie et sa sagesse.

Du vendredi soir 23 février, 18 heures, au dimanche 25 février midi, se tiendra à la Queen of Martyrs House, à Broadstairs, un modeste week-end musical entièrement consacré à la musique du célèbre compositeur autrichien de la fin du XVIIIe siècle, Wolfgang Amadeus Mozart (1756–1791). Pourquoi la musique, alors qu’on pourrait employer ces instants à quelque chose de plus directement religieux? Et pourquoi choisir Mozart en particulier?

Pourquoi la musique? Parce que la musique est un don que Dieu a fait au monde, et qui exprime l’harmonie qu’il a implanté au centre de Son univers, harmonie à laquelle correspondent tous les êtres vivants, non seulement les anges et les hommes mais aussi, à leur manière, les plantes et les animaux. Prenons l’exemple des plantes. Des chercheurs du Colorado, aux États-Unis, ont mis des plantes dans quatre boîtes remplies de lumière, air, humidité et terre identiques. Dans trois d’entre elles, ils ont diffusé du chant grégorien ou de la musique classique ou du rock, tandis que dans la quatrième ils ont laissé le silence. Avec la musique rock, la plante a poussé mais a fané ; avec le chant grégorien, elle a fleuri ; tandis qu’avec la musique classique et le silence, le résultat était entre les deux. Pour ce qui est des animaux, il y a des éleveurs de vaches qui diffusent de la musique douce dans l’étable au moment de la traite pour augmenter la production du lait, tout comme les supermarchés diffusent de la musique pour augmenter le volume d’achats de la clientèle humaine. Faut-il en être surpris? C’est Dieu qui nous a créés et non pas nous-mêmes (Ps. IC, 3), nous sommes Ses créatures telles qu’Il nous a conçues pour que nous prenions notre part à l’harmonie de Son univers tout entier.

Pour les êtres humains, la musique est ce langage supérieur donné par Dieu qui permet d’accéder à l’harmonie divine, même si, comme Brahms, on ne croit pas en Dieu. La musique est donc naturelle aux êtres humains ; elle exerce sur eux une énorme influence morale, pour le meilleur ou pour le pire. Comme notre mère l’Église a recours au chant grégorien et à la polyphonie pour élever les âmes vers le Ciel, de même le Diable utilise le rock et toutes sortes de musiques modernes pour pousser les âmes vers l’enfer. “Dis-moi quelle est ta musique, et je te dirai qui tu es”, ainsi va le dicton. D’après Shakespeare tout homme, ou presque, a de la musique en lui, et malheur à lui si ce n’est pas le cas:
“Un homme qui n’a pas de musique en lui-même
Est propre aux trahisons, aux complots, aux rapines . . .
Méfiez-vous de lui . . . . Écoutez la musique ! “(Merchant of Venice, V, 1)
Et s’il faut plutôt se méfier de l’homme qui n’ait pas de musique en lui, n’est-ce pas parce qu’il n’est pas sur la longueur d’ondes du Bon Dieu?

Voilà le cas du monde moderne. C’est pourquoi ce qui, aujourd’hui, tient souvent lieu de musique n’est en fait qu’une misérable cacophonie. Mais la musique est si naturelle à l’homme, si profondément enracinée dans l’âme humaine que, malgré tout, les gens aiment ça. Ce bruit affreux stagne dans l’âme d’innombrables personnes autour de nous, si bien qu’à travers elles, il déteint sur nous-mêmes et nous éloigne de Dieu, si nous n’y prenons garde. Au fond, il y va de Dieu et de la religion. En effet tout ce qui est profondément humain se rapporte à Dieu, et la musique est assurément profondément humaine.

D’autre part, Mozart venait d’un monde bien plus sain que le nôtre. Sa musique correspond à un moment particulier de l’histoire, moment fait d’harmonie et d’équilibre entre l’ordre ancien et l’émotivité moderne. Mozart est le musicien des musiciens. Voici quelques témoignages de musiciens célèbres – Tchaïkovski confiait : “Je trouve repos et consolation dans la musique de Mozart. Elle exprime cette joie de vivre propre à sa nature saine et pleine d’entrain.” Schubert affirmait : “ C’est l’image d’un monde meilleur que vous nous avez donnée, O Mozart ! “ Gounod déclarait : “ Mozart, le Ciel dans sa munificence vous a tout donné : grâce et force, abondance et modération, équilibre parfait. “ De son côté, Brahms disait :” C’est un réel plaisir d’entendre une musique si brillante et si spontanée, exprimée avec tant d’aisance et de grâce.“

Mozart a écrit toutes sortes de musique, mais ses opéras et ses concertos pour piano sont exceptionnels. Dans notre maison de Broadstairs, il ne nous est pas possible de reproduire les opéras. En revanche, John Sullivan, qui en 2016 a osé jouer ici en 42 heures la moitié des sonates pour piano de Beethoven, pourra facilement réaliser un exploit simila ire en interprétant des sonates et des concertos pour piano de Mozart. Faites-nous savoir si vous voulez venir, afin que nous puissions avoir une idée du nombre de personnes à prévoir. Pas de billets à acheter. Mozart n’a pas de prix.

Kyrie eleison.

26 janvier 2018

[Youtube] La Tradition Catholique à Rome : reportage sur la Messe Tridentine au coeur du Panthéon

SOURCE - Youtube - 26 janvier 2018

Panthéon de Rome - Messe organisée par le groupe d'étudiants "Tridentini" et célébrée par l'abbé Mathieu Raffray de l'Institut du Bon Pasteur (IBP Rome)

24 janvier 2018

[Abbé Jean-Michel Gleize, fsspx - Courrier de Rome] Une question de principe

SOURCE - Abbé Jean-Michel Gleize, fsspx - Courrier de Rome - janvier 2018

1. L’Exhortation post-synodale Amoris lætitia n’a laissé personne indifférent. Mais voici que, de l’avis du Pape lui-même, la seule interprétation possible du chapitre VIII de ce document est celle qu’en ont donnée les évêques de la région de Buenos Aires en Argentine, en affirmant ouvertement que l’accès aux sacrements peut-être autorisé pour certains couples de divorcés remariés. « L’écrit est très bon et il explicite parfaitement le sens du chapitre VIII d’Amoris lætitia, il n’y a pas d’autre interprétation », affirme le Pape dans une lettre datant de septembre 2016. Et voici qu’en juin dernier, la Secrétairerie d’État du Vatican reconnaît le statut de « Magistère authentique » à cette affirmation.
 
2. Voilà qui ne manquera pas d’agiter à nouveau une question pourtant déjà étudiée depuis longtemps [1]. Étant admis que les autorités de la hiérarchie ecclésiastique restent en possession de leur pouvoir de Magistère, on peut se demander quelle valeur attribuer aux actes d’enseignements dispensés par ces autorités en place dans l’Église, le Pape et les évêques, depuis le concile Vatican II ? Faut-il y voir comme jusqu’ici l’exercice d’un véritable Magistère, quand bien même, en tout ou en partie, ces enseignements s’écarteraient de la Tradition de l’Église ? La position de la Fraternité Saint-Pie X [2] tient qu’à Vatican II et depuis a sévi et sévi encore dans la sainte Église « un nouveau type de magistère, imbu des principes modernistes, viciant la nature, le contenu, le rôle et l’exercice du Magistère ecclésiastique ».
 
3. Cette position a retenu toute l’attention d’un repré- sentant attitré du Souverain Pontife, le Secrétaire de la Commission Pontificale Ecclesia Dei, Mgr Guido Pozzo, et lui a inspiré la problématique fondamentale de tout son discours [3] , dans la ligne de celui du pape Benoît XVI. Le but de cette problématique est d’accréditer aux yeux de la Fraternité la valeur proprement magistérielle des enseignements conciliaires, avant de les lui faire accepter. Car il lui faut les accepter. Dès avant les discussions doctrinales de 2009-2011, Benoît XVI avait clairement annoncé cette intention : « Les problèmes à traiter maintenant sont essentiellement de nature doctrinale, en particulier ceux concernant l’acceptation du concile Vatican II et le magistère postconciliaire des Papes. [...] On ne peut pas geler l’autorité du magistère de l’Église en 1962 et – cela doit être très clair pour la Fraternité [4] . » C’est dire toute l’urgence encore actuelle de cette question cruciale, qui est une question de principe. Nous la réexaminerons ici sous la forme synthétique d’une question disputée, en faisant valoir les différents arguments pour ou contre, afin de remettre en évidence le bien-fondé de la position défendue jusqu’ici par la Fraternité.
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  1. La réflexion menée à l’intérieur de la Fraternité depuis plus de dix ans aboutit à circonscrire de mieux en mieux les problèmes. Cf. par exemple : MGR LEFEBVRE, « Vatican II. L’autorité d’un concile en question », INSTITUT UNIVERSITAIRE SAINT-PIE X, Vu de haut n° 13, 2 006 ; Autorité et réception du concile Vatican II. Études théologiques. Quatrième symposium de Paris (6-7 au 8 octobre 2005), Vu de haut hors série, 2 006 ; FRATERNITÉ SACERDOTALE SAINT-PIE X, Magistère de soufre. Études théologiques sur le concile Vatican II, Iris, 2009 ; ABBÉ JEAN-MICHEL GLEIZE : « Magistère et foi », Courrier de Rome n° 346 (536) de juillet-août 2011 ; « Une question cruciale », Courrier de Rome n° 350 (540) de décembre 2011 ; « Magistère ou Tradition vivante », Courrier de Rome n° 352 (542) de février 2012 ; « À propos d’un article récent », Courrier de Rome n° 358 (548) de septembre 2012 ; « Pour un Magistère synodal ? », Courrier de Rome n° 390 (581) d’octobre 2015.
     
  2. MGR LEFEBVRE, « Lettre du 20 décembre 1966 adressée au cardinal Ottaviani » in J’accuse le Concile, Éd. Saint Gabriel, Martigny, 1976, p. 107-111 ; MGR FELLAY, « Déclaration à l’occasion du 25e anniversaire des sacres épiscopaux, le 27 juin 2013 », n° 4 dans Cor unum, n° 106, p. 36 ; ABBÉ JEAN-MICHEL GLEIZE, Vatican II en débat, 2e partie, chapitre XI, n° 19, Courrier de Rome, 2012, p. 196.
     
  3. Les idées maîtresse en sont synthétisées dans la conférence donnée le vendredi 4 avril 2014 à l’adresse des membres de l’Institut du Bon pasteur, et publiée sur le site internet Catholicae Disputationes : « Le concile Vatican II : renouveau dans la continuité avec la Tradition ». Ce propos a été analysé et réfuté en détail dans les deux articles « 40 ans plus tard », et « 40 ans passés autour du Concile », Courrier de Rome n° 382 (572) de décembre 2014.
     
  4. BENOÎT XVI, « Lettre du 10 mars 2009 aux évêques de l’Église catholique » dans La Documentation catholique (DC) n° 2421, p. 319-320.

[Soeurs franciscaines du Guatemala] Présentation de la communauté

SOURCE - Soeurs franciscaines du Guatemala - Paz y Bien - version française par La Porte Latine (FSSPX France) - janvier 2018

Nos débuts

Chaque famille religieuse, suscitée par Dieu, occupe une place et une mission au Coeur de l'Eglise pour l'aider dans les moments critiques de son histoire, et servir aux besoins des âmes.

Tout est grâce par la volonté de Dieu. Nous sommes très reconnaissantes à Notre Seigneur pour notre vocation religieuse, surtout pour le cadeau de participer à la vie religieuse dans la Tradition. Nous étions heureuses de notre vocation et nous exprimons notre gratitude à la Congrégation des Sœurs Franciscaines de l'Assomption mais, béni soit Dieu de nous avoir envoyé cette lumière qui nous a fait découvrir qu'il y avait quelque chose de mieux et, nous soumettant à la Divine Providence, nous avons choisi de nous mettre sous la protection de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X. Nous avons commencé le 30 novembre 2012 au Guatemala, essayant de former de futures religieuses, avec la foi et la doctrine que notre Sainte Mère l’Eglise a toujours enseigné.

Notre spiritualité

Notre esprit est franciscain, du troisième ordre régulier. Suivant les pas de notre Père saint François, nous sommes appelées à la prière et à la pénitence, le centre de notre vie religieuse étant la Sainte Messe, célébrée selon le rite traditionnel.

Notre apostolat

Notre apostolat nous fait être missionnaires parce que ce que nous avons commencé avec la prière et avec le sacrifice, nous devons le continuer par le travail. Devant tant de besoins et de façons de servir dans l'Église nous avons choisi de nous occuper des enfants handicapés physiques, d’aider et de soutenir les prêtres, d’enseigner le catéchisme, de propager et de défendre la foi à travers la bonne presse, d’organiser des camps et de visiter les malades. Chacune des sœurs selon leurs capacités personnelles , se dévoue à la tâche qui lui est confiée parce que bien que, même la plus simple, est très grande aux yeux de Dieu.

«Maître, où habitez-vous?» ... C'était la question qu’ont posée à Notre Seigneur les deux disciples de saint Jean-Baptiste. Et l'Évangile poursuit: "Venez et voyez", leur dit le Sauveur-. «Ils y allèrent, virent où il demeurait et sont restés avec Lui à compter de ce jour ». Le Maître Divin murmure au coeur de tout âme ces mots: "Venez et voyez" invitant à partager Son intimité dans la vie consacrée. Mais cet appel est personnel et délicat; c'est toujours un appel d'amour: "Dieu est charité", appel qu'il faut savoir écouter et auquel il est nécessaire de savoir répondre.

[Yves Daoudal - Le Forum Catholique] Mariawald

SOURCE - Yves Daoudal - Le Forum Catholique - 24 janvier 2018

Candidus l’avait évoqué, Luc Perrin y a fait allusion. Désormais c’est officiel : l’abbaye trappiste de Mariawald est fermée sur ordre de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée.

C’était la seule abbaye trappiste en Allemagne, la seule aussi (au monde) qui avait choisi la « forme extraordinaire », en application de l'article 3 de Summorum Pontificum.

L’arrière-garde post-conciliaire s’était rebellée, parce que ces cisterciens « de stricte observance » étaient aussi, en même temps, revenus à la… stricte observance, et l’on trouvait que c’était trop fatigant de se lever à 3 heures du matin.

Donc il y a eu une « visite régulière », en 2016, de deux pères abbés qui ont entendu les doléances. Résultat : la « démission » de l’abbé de Mariawald, dom Josef Vollberg. Deux mois plus tard, en décembre 2016, le visiteur en chef, dom Bernardus Peeters, écrivait une longue lettre aux moines de Mariawald. Il disait tout son amour de cette abbaye, il soulignait très lourdement que dom Josef avait démissionné de lui-même librement de son plein gré sans y avoir été contraint par personne, et que le but des mesures prises (à savoir… la démission de dom Josef et la reprise en mains de l’abbaye par dom Bernardus) était de « renforcer Mariawald et d’assurer l’avenir de la seule maison de notre Ordre en Allemagne ».

Or voici que le même dom Bernardus, un an plus tard, était le « commissaire apostolique » chargé de fermer l’abbaye. Avec un argument tout nouveau, jamais utilisé jusque-là et en pleine contradiction avec son propos de décembre 2016 : il n’y a plus que 10 moines, dont beaucoup sont âgés, et de ce fait le monastère n’est plus viable.

Alors on pouvait ajouter à l’hypocrisie ecclésiastique un bel accent de cynisme : on espérait que le choix de l’ancienne liturgie allait apporter un sang neuf au monastère, mais hélas ce n’a pas été le cas…

Bref, après les Franciscains de l’Immaculée, après le séminaire de Ciudad del Este et le diocèse d’Imperia, François continue la destruction de ce qui est favorable à la liturgie traditionnelle en dehors de la réserve Ecclesia Dei. Son travail de sape de Summorum Pontificum.

23 janvier 2018

[Paix Liturgique] Désordre liturgique ordinaire à Arcachon

SOURCE - Paix Liturgique - lettre 629 - 23 janvier 2018

«Merci pour votre lettre du 10 janvier 2018, dans laquelle vous formulez le vœu que nous ayons toujours plus de pasteurs soucieux d’aimer sans exception, de réfléchir librement, de répondre à nos attentes et d’unir nos communautés sans toutefois les uniformiser. Hélas, comme vous le comprendrez à la lecture du document ci-joint, il est difficile pour nous, paroissiens d’Arcachon, de partager votre optimisme.» (Un lecteur du Bassin d'Arcachon)

I –«DEPUIS QUELQUES MOIS, LE SACRÉ A DISPARU» - EXTRAITS DE LA LETTRE DE DÉMISSION DE L’ORGANISTE DE LA BASILIQUE NOTRE-DAME D’ARCACHON  

Le document joint par notre lecteur à son message est la lettre ouverte par laquelle Victor Lavedan, organiste titulaire de la basilique Notre-Dame d’Arcachon, a présenté fin décembre sa démission au curé, le père Jean Thomas. En voici quelques extraits qui, parce qu’ils pourraient s’appliquer à bien d’autres paroisses restées en panne sur le chemin de la paix et de la réconciliation, nourrissent nos réflexions de la semaine.

« En ce Troisième Dimanche de l’Avent, vous avez cru devoir expliquer à l’assemblée que, dorénavant, on prendrait de temps en temps quelques chants en latin (croyant, à tort, pouvoir ainsi anesthésier les demandeurs de plus en plus nombreux du rite selon la forme extraordinaire). […] Tour à tour vous avez indiqué que les chants traditionnels, dont ceux en latin, sont une richesse séculaire pour, juste après, “rassurer” vos paroissiens en leur demandant “de ne pas s’inquiéter”, et que vous ne diriez jamais la messe en latin. »

« En près de cinquante ans de carrière d’organiste, j’ai toujours mis mes compétences professionnelles, qui sont avant tout un don de Dieu, humblement au service de la Sainte Liturgie et du culte divin, essayant de maintenir du sacré et de la spiritualité là où il y en a de moins en moins, pour ne pas dire plus du tout. Cela a été le combat de toute ma vie. »

« Depuis quelques années on déplore à Arcachon des liturgies sans âme ni piété, médiocres, avec des acteurs tout aussi médiocres et incultes, les personnes faisant preuve de compétences étant soigneusement écartées par quelques cuistres. […] J’ai supporté cela difficilement, mais courageusement, me disant que chacun doit avoir sa part de la Croix, et pensant que mon maintien serait un maigre frein à cette dégradation inéluctable. »

« Aujourd’hui, il ne s’agit même plus de médiocrité technique ou musicale. Depuis quelques mois le sacré a totalement disparu. Deux minutes avant la messe, la Basilique ressemble à un hall de gare : “C’est normal, ai-je entendu, les gens sont tellement heureux de se retrouver !” Il ne manque plus que des chansons à boire et quelques ballons pour occuper les enfants qui viendraient à s’ennuyer pendant la messe... »

« Ce qui me fait le plus souffrir en tant que catholique, c’est d’avoir le sentiment d’être moi-même caution de ces sacrilèges. »

II – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE 

1) L’organiste accuse le curé d’avoir voulu anesthésier les demandeurs de la messe traditionnelle en leur concédant un peu de latin, tout en affirmant qu’il ne dirait jamais la « messe en latin ». Nous aurons l’occasion de revenir sur la demande d’application du motu proprio Summorum Pontificum à Arcachon où la célébration de la forme extraordinaire du rite romain n’est que saisonnière, accordée le temps des vacances d’été lorsque la population locale est décuplée, passant de 12 000 personnes en basse saison à plus de 120 000. Observons toutefois que ce n’est pas le motu proprio qui est l’objet de la discorde entre M. Lavedan et son curé mais bien la célébration même de la forme ordinaire.

2) Il peut sembler paradoxal qu’un organiste attaché à la dimension sacrée de la « Sainte Liturgie » tire sa révérence alors que son curé propose d’introduire le chant du Credo en grégorien dans la liturgie dominicale... En vérité, en vertu du contexte local, cette concession du Credo n'est qu’un cache-misère que l'organiste a perçu comme tel, finissant par céder à l’exaspération accumulée au fil des ans et des à-peu-près liturgiques endurés. Cette exaspération est bien connue de tous les fidèles déboussolés par les bouleversements liturgiques, pastoraux et doctrinaux de ces dernières décennies. Des fidèles d'ordinaire silencieux mais qui, parfois, finissent par craquer.

3) Une grande part de la mission de Paix Liturgique est de donner la parole à ces silencieux qui, par refus d’être cause de scandale, par humilité, par obéissance, par souci de sauver ce qui pouvait l’être ou en esprit de pénitence, ont préféré le silence à l’expression publique de leur mécontentement. Une attitude que Victor Lavedan exprime parfaitement : « J’ai supporté cela difficilement, mais courageusement, me disant que chacun doit avoir sa part de la Croix, et pensant que mon maintien serait un maigre frein à cette dégradation inéluctable. » Des années 60 à nos jours, nombreux sont les fidèles qui, comme M. Lavedan, ont continué à participer à la vie de leur paroisse en dépit de leur insatisfaction ou de leur malaise, se refusant à abandonner « leur » église au milieu de la tempête et voyant bien, en outre, que ceux qui prenaient la parole – des « cuistres », dit l’organiste exaspéré ! – les marginalisaient systématiquement.

4) Le refus de prendre en compte le désarroi de cette foule de silencieux, au point de nier l’existence même de ce désarroi, restera comme l’une des fautes majeures de nos pasteurs au cours des dernières décennies. Même si, fort heureusement, de plus en plus d’ecclésiastiques manifestent aujourd'hui un souci sincère d’ouvrir leur cœur et leur porte à tous leurs fidèles, à l'image du nouvel archevêque de Paris, Mgr Aupetit, la démission de l’organiste de la basilique Notre-Dame d’Arcachon nous rappelle qu’il reste encore bien des pasteurs sourds aux aspirations de leurs ouailles.

5) La motivation principale du ras-le-bol de l’organiste, c’est son sentiment d’être « caution » de la disparition du sacré dans les célébrations liturgiques de la paroisse et des « sacrilèges » que celle-ci engendre inévitablement. Même si la situation liturgique d’un certain nombre de paroisses de France s’est un peu améliorée, une partie du jeune clergé œuvrant de son mieux à une certaine restauration du sacré – dans la mesure où la liturgie ordinaire le permet –, nombreux sont encore les lieux où la liturgie demeure réduite à une fête ou à un spectacle, à une autocélébration du célébrant ou de la communauté, à cette danse vide autour du Veau d’or si souvent condamnée par le pape Benoît XVI. En outre, dans le cas d’Arcachon, ce que condamne l'organiste, c’est l’instrumentalisation maladroite de la liturgie par le curé : un peu de latin pour « anesthésier les demandeurs de plus en plus nombreux » de la forme extraordinaire tout en se complaisant dans la trivialité, expliquant par exemple se dépêcher pour bénir l’assemblée à la fin de la messe « car l’apéro n’attend pas » (épisode cité dans un autre passage de sa lettre ouverte) !

6) À Arcachon comme ailleurs, la solution existe pourtant : une saine et paisible émulation entre la forme ordinaire et la forme extraordinaire. N'est-ce pas là, d'ailleurs, comme il l'expliquait dans sa Lettre aux évêques du 7 juillet 2007, la raison positive pour laquelle Benoît XVI avait promulgué le motu proprio Summorum Pontificum : que le motu proprio puisse aider à « parvenir à une réconciliation interne » au sein de la paroisse ? (*)
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(*) « En regardant le passé, les divisions qui ont lacéré le corps du Christ au cours des siècles, on a continuellement l’impression qu’aux moments critiques où la division commençait à naître, les responsables de l’Église n’ont pas fait suffisamment pour conserver ou conquérir la réconciliation et l’unité; on a l’impression que les omissions dans l’Église ont eu leur part de culpabilité dans le fait que ces divisions aient réussi à se consolider. Ce regard vers le passé nous impose aujourd’hui une obligation: faire tous les efforts afin que tous ceux qui désirent réellement l’unité aient la possibilité de rester dans cette unité ou de la retrouver à nouveau. »

20 janvier 2018

[Mgr Williamson - Initiative St Marcel] Survivre au Goulag

SOURCE - Mgr Williamson - Initiative St Marcel - 20 janvier 2018

Avez-vous peur de l’enfer que préparent les mondialistes ?
Que votre château intérieur, rempli de Dieu, leur résiste.
    
Alexandre Soljenitsyne (1918–2008) est l’un des rares écrivains du XXe siècle vraiment éminents qui ne soit pas mécréant. Car il est revenu à Dieu, grâce sans doute aux souffrances qu’il a endurées sous la tyrannie du régime totalitaire de la Russie soviétique qui a sévi de 1917 à 1989. Dans son principal ouvrage, l’Archipel du Goulag, en trois volumes, il s’est surtout appuyé sur l’expérience qu’il a vécue de 1945 à 1953 au sein de cet archipel communiste fait de camps de prisonniers répartis dans toute la Russie. Il a pu survivre à cette expérience, et ses écrits comportent des indications ou des conseils sérieux pour rester en vie dans ces prisons totalitaires modernes. Il paraît que les mondialistes ont déjà préparé des prisons un peu partout aux États-Unis afin de pouvoir faire taire les ennemis de l’État mondialiste. Celles-ci retiendront certainement dans leur fers barbelés des chrétiens convaincus. Voici, tirée de l’Archipel Goulag, une recette de survie en sept points, présentée l’année dernière en France.
  • Lors de l’interrogatoire préliminaire, n’essayez pas de tromper ou de rouler ceux qui vous interrogent, alors que, pendant une semaine, vous n’aurez reçu que le minimum de nourriture et pu dormir juste ce qu’il faut pour ne pas mourir. Essayez plutôt de faire l’idiot, du début à la fin, par ex : “Je ne sais pas”, “je ne me souviens pas”. En tout cas, ne vous y trompez pas : ce sont les interrogateurs qui rédigent le procès-verbal de l’interrogatoire. Le Parti leur sert de conscience et ils ne veulent pas perdre leur emploi.
        
  • Une fois en prison, ayez une vie de l’esprit suffisamment intense pour que, quelles que soient vos souffrances, votre équilibre mental ne soit pas détruit.
      
  • Mettez-vous dans le crâne, aussi vite que possible, que votre passé est à jamais révolu, voire votre vie elle-même. Ainsi, lorsque vous n’aurez plus rien à perdre et que vous en serez intimement convaincu, vous prendrez la résolution de tenir coûte que coûte une ligne de conduite que vous vous serez tracée. Et dès ce moment-là, vous ne les craindrez plus. Vous saurez spontanément quoi répondre et comment répondre ; ils ne pourront plus vous en imposer, et si vous devez mourir, ce sera avec dignité et avec la conscience tranquille. C’est de cette force morale qu’ils ont peur. Ils feront tout pour la briser, en faisant miroiter de fausses espérances : celle d’être gracié, par exemple.
      
  • Ne possédez rien, soyez détaché de tout et vous aurez le calme et la liberté d’esprit nécessaire pour juger sereinement les gens et les circonstances. La connaissance que vous avez de l’homme et de la nature humaine doit se fonder uniquement sur le souvenir de votre expérience.
      
  • Abandonnez jusqu’à l’idée d’organiser votre propre vie afin de préserver votre tranquillité d’esprit.
      
  • Ne croyez personne, méfiez-vous de tout le monde : au goulag, personne ne fait rien pour rien.
      
  • Enfin, rapprochez-vous des prisonniers qui sont honnêtes contre les méchants et les mouchards, allant jusqu’à faire justice vous-même, s’il le faut. Car en effet, l’une des découvertes les plus étonnantes de votre voyage à travers cet univers infernal, c’est que vos pires ennemis ne sont pas les gardiens, mais . . . vos compagnons de prison. La loi de cette jungle s’énonce ainsi : aujourd’hui, c’est à toi de crever ; demain ce sera mon tour. Tout ce que vous pouvez faire, c’est de frapper le premier, quitte à recevoir un coup de couteau en retour . . . . Bref, faites-vous respecter si vous ne voulez pas qu’on vous exploite.
Selon l’enseignement de l’Église, l’utilisation de la force physique, en cas de légitime défense, doit être proportionnée à la menace de l’attaque. Mais là n’est pas l’essentiel. Ce que relève surtout Soljenitsyne, c’est la renonciation à tout espoir terrestre, le détachement de tous biens, la tranquillité d’esprit, la conscience en paix ; bref, cette force morale intérieure qui transfère à ses adversaires la peur qu’on a d’abord pour soi-même. Ici, les catholiques sont universellement reconnus gagnants, car une vie de prière les garde près de Dieu. “La victoire qui a vaincu le monde, c’est notre foi” (I Jean V, 4).

Kyrie eleison.

[Riposte Catholique] L’Abbaye cistercienne Mariawald va fermer

SOURCE - Riposte Catholique - 20 janvier 2018

Nous avons évoqué à plusieurs reprises l’abbaye cistercienne de Mariawald. L’abbaye avait obtenu de Rome en 2009 de reprendre la forme traditionnelle de la liturgie trappiste. Si cette forme liturgique lui a valu un regain de vocations, il apparaît qu’elle avait entraîné un certain nombre de dissensions au sein de la communauté, notamment avec les moines les plus âgés. Une visite canonique avait été diligentée pour aider les moines à retrouver leur sérénité… et le Père Abbé de l’Abbaye avait remis sa démission fin 2016. Toutefois, les premiers fruits avaient permis des ordinations il y a 2 ans.

Dans un article en langue anglaise sur le site GloriaTV, on y apprend la fermeture de l’abbaye :
L’ancienne abbaye trappiste de Mariawald, en Allemagne, va être fermée. Le Saint-Siège, l’ordre trappiste et le diocèse d’Aix-la-Chapelle sur le territoire duquel est l’abbaye, l’ont annoncé à Mariawald. 
Le monastère est occupé par les trappistes depuis 1909. Tous les employés (laïcs) vont perdre leur emploi. Les moines seront transférés dans d’autres monastères. 
Dans le courant de l’année, le monastère et tous ses biens seront remis au diocèse d’Aix-la-Chapelle. Le monastère et l’église de Mariawald resteront probablement fermés pour toujours. 
Dans une lettre datée du 21 novembre 2008, le Pape Benoît XVI avait donné au Monastère le privilège de revenir aux anciens usages de l’Ordre trappiste dans la liturgie et la vie monastique. C’est surtout un retour au vénérable Vieux Rite. Le pape a vu dans ce projet un “renouvellement de l’église dans l’esprit de la tradition”. Maintenant, cette tentative de renouveau est terminée avant qu’elle puisse porter tous ses fruits.
Comme pour les Franciscains de l’Immaculée avec des appuis romains, il apparaît qu’une poignée de prêtres âgés était prêt à sacrifier le monastère et 110 ans de vie religieuse en ces lieux plutôt que de permettre un renouveau. Le dogmatisme aveuglant est loin d’avoir disparu… et certains ont toujours comme devise “Tout sauf la Tradition !”. Ils ne veulent pas la paix liturgique !
  
Louons l’intelligence ‘pratique’ de certains évêques en France (peu nombreux malheureusement) qui ont permis par exemple la reprise de l’Abbaye Sainte-Marie de Lagrasse par les Chanoines Réguliers de la Mère de Dieu en 2004 ou encore l’abbaye Saint-Paul de Wisques par les moines de Fontgombault en 2013 (grâce à la médiation éclairée de Dom Dupont, abbé de Solesmes).

[FSSPX Actualités] Le Jour du Seigneur fête son 70e anniversaire en 2018

SOURCE - FSSPX Actualités - 20 janvier 2018

Lancée pour la fête de Noël en 1948, l’émission de télévision Le Jour du Seigneur, diffusée sur France Télévisions, fête cette année son 70e anniversaire. C’est le père Raymond Pichard (1913-1992), dominicain, qui est à l’origine d'un projet alors novateur puisqu’à l’époque la France ne comptait que 300 téléviseurs.

Produit dès ses débuts par le Comité français de radio-télévision (CFRT), une association de loi de 1901, Le Jour du Seigneur est aujourd’hui la plus ancienne émission télévisée d’Europe toujours diffusée. Le P. Philippe Jaillot, producteur actuel de l’émission, raconte la genèse du programme dans Le Figaro du 7 janvier 2018 : « Le P. Pichard travaillait pour la messe radiodiffusée. Visitant un studio télé rue Cognacq-Jay, il a eu l’intuition que cette diffusion alors confidentielle serait une chaire extraordinaire pour faire entendre la parole de Dieu. » Il se dit même que c’est lui qui convainquit Pie XII de la puissance apostolique de l’image cinématographique.

La Messe de minuit du 24 décembre 1948 sera donc la première du genre et une première mondiale. Elle sera suivie en 1949 par la création de L’Émission dominicale, devenue Le Jour du Seigneur en 1954. Pour l’anecdote, c’est François Mitterrand, futur président socialiste de la France, et alors jeune secrétaire d’Etat à l’information, qui donna l'autorisation de la diffusion chaque dimanche.

Depuis ses débuts, le concept est simple et n’a pas bougé : 1h30 d’émission composée d’une messe et de plusieurs reportages, tous les dimanches de 10h30 à 12h. C’est-à-dire un temps d’antenne suffisamment important pour diffuser un message et des idées... nouvelles ! Le site internet lejourduseigneur.com, qui retrace l’histoire de l’émission, ne s’en cache pas : « Avec le concile Vatican II, dans les années 60, l’émission entame une nouvelle période. Ses liturgies évoluent. Une équipe-film se forme avec la volonté de mettre en images les idées du Concile, en étant au plus près des croyants et des réalités humaines ». Au total, de 1965 à 1986, 155 films sont réalisés.

Puis viennent les années 90, « le développement de programmes avec les protestants, la création d’une matinée avec les producteurs des autres confessions ». Quant au XXIe siècle, il « s’ouvre avec une nouvelle quête de spiritualité et l’émission tente d’y répondre par ses programmes qui mêlent témoignages et enseignements ». On peut craindre le pire... ou espérer le meilleur avec, par exemple, la diffusion de la messe traditionnelle en direct depuis Saint-Nicolas-du-Chardonnet!

[Peregrinus] La liturgie en Révolution (5) : Jansénisme, Révolution et liturgie en langue vulgaire

SOURCE - Peregrinus - 20 janvier 2018

Tout d’abord Eglise établie, soutenue par les autorités civiles, l’Eglise constitutionnelle sort profondément ébranlée de la persécution terroriste qui frappe son clergé à partir de l’automne 1793. En 1795, lorsque s’amorce la reprise du culte, la Constitution civile du clergé a été abrogée par la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Environ vingt mille prêtres, soit plus de la moitié du clergé assermenté, ont abdiqué leurs fonctions sacerdotales ; quatre à six mille se sont mariés. Parmi ceux qui n’ont pas abandonné l’état ecclésiastique, nombreux sont ceux qui rétractent leurs serments et demandent leur réconciliation au clergé réfractaire.

Un immense effort de réorganisation s’impose donc au clergé schismatique. Il est porté tout d’abord par un net infléchissement doctrinal et spirituel. Malgré ses réminiscences richéristes, la Constitution civile du clergé répondait avant tout aux aspirations de légistes imprégnés de philosophisme (1). L’expérience de la persécution et la séparation de l’Eglise et de l’Etat donnent cependant une vigueur nouvelle, au sein du clergé constitutionnel, aux courants jansénisants, gallicans et rigoristes qui espèrent un retour providentiel à la primitive Eglise. Défections et apostasies favorisent une telle lecture des événements. En effet, elles ont séparé du clergé constitutionnel la plupart de ses éléments mondains ou scandaleux. Les prêtres qui ont tenu bon sont ainsi enclins à se considérer comme le petit reste, éprouvé comme les confesseurs de la foi du temps de Dèce ou de Dioclétien : significativement, les ecclésiastiques qui ont remis aux autorités leurs lettres de prêtrise sont dénoncés comme « traditeurs ». 

C’est à la lumière de ce nouvel état d’esprit primitiviste, mais très hostile à la philosophie, que doivent se comprendre les expériences liturgiques menées de 1795 à la liquidation de l’Eglise constitutionnelle en 1801. La liturgie en langue vulgaire est alors, avec la réconciliation des traditeurs, les relations entre évêques et prêtres et les rapports avec Rome et le clergé fidèle, l’une des principales questions qui divisent l’ancien clergé assermenté. 
En effet, malgré l’effondrement de ses effectifs et l’impulsion nouvelle que tentent de lui donner les « Evêques réunis », l’Eglise constitutionnelle (2) demeure parcourue de profondes divisions théologiques et pastorales. Lorsque Henri Reymond, évêque intrus de l’Isère, propose, pour favoriser la réunion aux protestants, la messe en français, la suppression des messes basses et des autels latéraux (3), ses propositions doivent bien plus à son richérisme syndical ouvert à l’influence des Lumières qu’à un jansénisme auquel il est foncièrement étranger. La plupart des tentatives d’introduire l’usage de la langue vulgaire dans la liturgie n’en émanent pas moins de la frange jansénisante du clergé constitutionnel. 

En effet, dans les dernières décennies de l’Ancien Régime, les prêtres favorables à la liturgie en vernaculaire se recrutent surtout parmi les jansénistes (4). On en trouve un exemple à la veille de la Révolution sous la plume d’Edme Moreau, chanoine de la cathédrale d’Auxerre. « Les Laïcs dans les premiers siecles de l’Eglise, explique le chanoine Moreau, n’étoient pas moins zélés que les Prêtres, ni moins assidus à la priere à toutes les heures. […] St. Chrysostome rétablit à Constantinople l’office de la nuit. Il invite les fideles à s’y rendre, & leurs femmes à prier dans leur maison. » Cette prière continuelle de l’Eglise entière lui obtenait de Dieu toutes les grâces dont il la comblait. Cependant, ajoute le chanoine, « cette dévotion a cessé, lorsque la langue latine ne fut plus entendue par le peuple (5). »

A la disparition du latin comme langue vulgaire, l’abbé Moreau associe donc la fin de l’unanimité surnaturelle de la prière de l’ensemble du peuple chrétien. Cependant, il faut noter que le chanoine, qui ne dissimule pas plus ses revendications richéristes que ses convictions jansénistes, se garde alors de demander la traduction des offices. Comme l’a justement noté dom Guéranger (6), Jacques Jubé, curé d’Asnières, qui a peut-être porté le plus loin les expérimentations liturgiques d’une partie du milieu janséniste au XVIIIe siècle, n’est jamais allé jusqu’à passer à la langue vulgaire dans la liturgie. On trouve la même réserve hors de France, chez les jansénistes toscans, dont le synode, réuni en 1786 par l’évêque de Pistoie Scipione de Ricci, a un grand retentissement bien au-delà de l’Italie. Le synode plaide tout d’abord sans équivoque en faveur de la liturgie en langue vulgaire :
La Liturgie est une action commune au Prêtre & au peuple. Convaincu de ces principes, le S. Synode desireroit la suppression de ce qui a contribué a en faire oublier une partie, en rappellant la Liturgie à une plus grande simplicité dans ses Ceremonies ; en l’exprimant en langue vulgaire, & en la prononçant d’une voix élevée.
Les pères synodaux s’empressent cependant d’ajouter : 
Mais comme les circonstances ne lui permettent pas de satisfaire ses desirs sur ces Articles, il se borne à renouveller la loi du Concile de Trente, qui ordonne aux Pasteurs d’expliquer quelque partie de la Liturgie, dans toutes les Instructions qu’ils font pendant la Messe les jours de Fête ; & il les exhorte à distribuer aux fideles des Livres, où l’Ordinaire de la Messe se trouve traduit en langue vulgaire (7).
On le voit, il s’agit alors d’aspirations qui ne sont pas jugées réalisables : même pour des jansénistes qui font de la primitive Eglise un modèle opératoire, la liturgie en langue vulgaire relève du passé idéalisé des « beaux jours de l’Eglise » et non des réformes qu’il est possible d’entreprendre.
        
La Révolution constitue à cet égard une rupture incontestable. Ce qui n’était qu’un vœu sans véritable conséquence devient un programme d’action pour des ecclésiastiques convaincus de revivre les premiers temps du christianisme, libérés de la tutelle de Rome et des anciens évêques comme de celle de l’Etat. La Révolution, et plus particulièrement la réorganisation de 1795, est ainsi l’occasion d’un passage à l’acte pour certains jansénistes constitutionnels. 

Il faut se garder, dans l’examen des rapports entre jansénisme et expériences liturgiques, de toute simplification excessive : comme on l’a vu, le janséniste anticonstitutionnel Maultrot était hostile à la liturgie en langue vulgaire, et parmi les constitutionnels jansénistes, les adversaires des traductions n’ont pas manqué. Il n’en reste pas moins que les expériences vernaculaires de 1795-1801, bien plus que celles d’avant la Terreur, doivent beaucoup à un petit groupe très actif d’ecclésiastiques jansénisants et rigoristes, tels les abbés Clément et Brugière, dont on reparlera.

(A suivre)

Peregrinus 
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(1) Edmond Préclin, Les Jansénistes du XVIIIe siècle et la Constitution civile du Clergé. Le développement du richérisme. Sa propagation dans le Bas Clergé (1713-1791), Librairie Universitaire J. Gamber, Paris, 1928, p. 472-473. 
(2) Faute d’expression plus adéquate, on continuera ici à appeler malgré l’abrogation de la Constitution civile l’Eglise schismatique Eglise constitutionnelle. Les Réunis ont certes parlé d’ « Eglise gallicane », mais une telle appellation n’est pas satisfaisante : l’Eglise gallicane ne signifie rien d’autre que l’Eglise de France, à laquelle les prêtres fidèles appartenaient bien plus que les schismatiques et les intrus. 
(3) Jean Godel, La reconstruction concordataire dans le diocèse de Grenoble après la Révolution (1802-1809), chez l’auteur, Grenoble, 1968, p. 33-34.
(4) Cf. Ferdinand Brunot, « Le culte catholique en français sous la Révolution », Annales historiques de la Révolution française, t. II, 1925, p. 209.
(5) Edme Moreau, Fonctions et droits du clergé des églises cathédrales, s. n., Amsterdam, 1784, p. 18-19. 
(6) Prosper Guéranger, Les Institutions liturgiques, t. II, Fleuriot, Le Mans, 1841, p. 251.
(7) Actes et décrets du concile diocésain de Pistoie de l’an MDCCLXXXVI, traduits de l’italien, Bracali, Pistoie, 1788, p. 351.

19 janvier 2018

[Riposte Catholique] Le Nonce en Suisse aime la forme extraordinaire

SOURCE - Riposte Catholique - 19 janvier 2018

Nous avons déjà évoqué différentes célébrations de messes dans la forme extraordinaire par Mgr Thomas Gullickson, nonce apostolique en Suisse. Sur son blog personnel, Mgr Gullickson évoque les 3 messes qu’il a célébré en forme extraordinaire en Suisse en 2017:
En 2017 en Suisse il m’a été donné trois occasions, toutes mariales, de célébrer la Messe latine traditionnelle : à Fischingen, une grande messe pontificale à l’occasion d’un pèlerinage pour le centenaire de Fatima, une messe prélatice à Sankt Pelagiberg pour le Saint Nom de Marie, et maintenant pour l’Immaculée Conception une grand-messe pontificale dans la Basilique Notre Dame de Fribourg. Ces trois moments ont eu un impact positif, réchauffant et rassurant sur mon cœur. Il ne fait aucun doute qu’une personne doit faire quelque chose pour préparer son cœur à les recevoir de cette manière, mais en tout cas, la Tradition, ou devrais-je dire que la Sainte Mère a gagné mon cœur de la manière la plus délicate.  
Sans être en chaire, je voudrais dire ex cathedra, que l’ancien Ordo est la façon dont un évêque est destiné à célébrer le Saint Sacrifice de la messe. Dans toute sa solennité, la messe latine traditionnelle porte vraiment l’évêque. […] Avec le nouvel Ordo, on nous enseignait au séminaire à être vifs ou proactifs pour la messe ou l’homélie… dans l’ancien Ordo, la liturgie, avec le Christ Souverain Sacrificateur, Marie avec tous les anges et les saints, me porte de la manière la plus attentive et me défie de me laisser changer, transformer, vraiment transformer en Christ Jésus. La liturgie porte le vieil homme en moi et fait de moi une icône de quelque chose dont je ne suis pas digne et pour laquelle, du début à la fin, je répète mon « Domine, non sum dignus » … et mon « miserere nobis ! » C’est tellement juste et donc adapté à l’âge!

[FSSPX Actualités] L’apostolat au Nigeria, où en sommes-nous ?

SOURCE - FSSPX Actualités - 19 janvier 2018

FSSPX.Actualités vous propose le témoignage d'un prêtre missionnaire de la Fraternité Saint-Pie X qui fait le point sur son apostolat au Nigéria. 

Voilà 5 ans que la Fraternité Saint-Pie X s’est installée au Nigeria. "Installée" est un bien grand mot pour l’instant mais depuis août 2012, en louant une maison à Enugu, l’apostolat a pu se développer. Désormais, même s’il nous manque une base solide tant que nous n’aurons pas construit le prieuré et son église, on peut dire que le ministère est en place et commence à bien s’organiser. 

Que ce soit au prieuré ou dans les quatre chapelles desservies régulièrement dans le pays, à chaque fois une équipe solide seconde activement le prêtre desservant. Sous la responsabilité du coordinateur local, plusieurs fidèles se mobilisent pour assurer le catéchisme, un service de messe de qualité, la chorale, la sacristie, sachant que bien souvent il faut tout apporter, tout monter puis tout démonter, même au prieuré où la messe est toujours célèbrée dehors. Il faut également se charger de la diffusion du bulletin, le prêt de livres, la vente d'articles religieux, le transport et l'hébergement du prêtre. C'est tout une organisation qu'il a fallu mettre en place et qui porte ses fruits maintenant. 

A l'exception d'une ville, où les catholiques sont proportionnellement moins nombreux, partout le nombre et la conviction des fidèles augmentent. Port-Harcourt en est un bon exemple. Dans cette ville côtière du sud, trois jeunes gens motivés, encouragés par leur retraite de Saint Ignace, ont décidé d’inviter leurs amis étudiants. Les prêtres sont venus une fois de temps en temps pour dire la messe pour huit d’entre eux, mais à la rentrée dernière, ils étaient plus de quarante. Et Dieu sait la dose de courage qu’il faut pour trouver l’argent du transport, pour passer deux ou trois heures dans des bus hors d’âge et arriver pour les confessions à sept heures le dimanche parce que le prêtre doit célébrer la messe de bonne heure pour se rendre ensuite vers une autre chapelle. 

Cette mobilisation des fidèles et l’arrivée des nouveaux nous encouragent et montrent que la Providence bénit nos efforts. Maintenant, il faut durer et pour durer, il faut s’installer un peu mieux. Le terrain pour la Mission à Enugu est acquis, il reste à construire. Les plans ont bien avancé. Les Supérieurs ont décidé de construire par étapes. 

Le prieuré d’abord, puis l’église et enfin l’école. Mais pour aménager au mieux, il faut tenir compte de l’ensemble du projet et donc faire tous les plans, ce qui prend du temps. Ce temps n’est pas de trop pour essayer de récupérer notre partie de terrain squattée. La corruption ne touche pas que les sommets du pays. Elle est partout. Heureusement, grâce à un avocat excellent (c’est un ami proche du Gouverneur), les choses progressent. 

Enfin il nous reste à trouver un conducteur de travaux digne de confiance qui accepterait de venir ici pour superviser la construction pour un salaire raisonnable. 

C'est une attention de prières importante. Mais nous ne doutons pas qu'avec votre aide spirituelle et matérielle, la grâce de Dieu ne nous fera pas défaut. Comptez sur nos prières ferventes et celles de Nigérians! 
Faire un don à SOS AFRICA

Aidez-nous à construire la Mission pour assurer l’apostolat à Enugu grâce à L’OPÉRATION 10€/MOIS
La construction de l’église et du prieuré et de l’école nécessite un emprunt auprès des banques qui demandent à la mission de lui apporter la preuve de sa solvabilité. Compte tenu du faible niveau de vie des paroissiens qui ne peuvent contribuer à plus de 25% du budget de la mission, il est crucial que les revenus en provenance des bienfaiteurs puissent être réguliers. C’est la raison pour laquelle nous vous sollicitons pour la mise en place d’un don mensuel qui permettra d’en démultiplier l’effet.

Chaque don mensualisé permet à la mission d’emprunter davantage à la banque.
Un reçu fiscal global vous sera attribué une fois par an. Si vous êtes imposable, votre don mensuel de 10€ ne vous coûtera ainsi que 3€.
Faites un don : en envoyant un chèque à l’ordre de « Missions de la Fraternité Saint Pie X », ou en faisant un virement ayant pour mention « pour le Nigeria ».

Vous pouvez aussi faire un don via le site internet de l’association

CONTACT :
SOS AFRICA
5, rue de la ceinture Bâtiment B8
78 000 VERSAILLES
contact@sosafrica@gmail.com

18 janvier 2018

[Abbé Francesco Ricossa - Institut Mater Boni Consilii] "Le Prêtre participe au Sacerdoce du Christ..." (éditorial)

SOURCE - Abbé Francesco Ricossa - Institut Mater Boni Consilii - éditorial du calendrier 2018 - janvier 2018

Tu es sacerdos in æternum… Le Prêtre participe au Sacerdoce du Christ, lequel demeure dans l'éternité. Si notre sacerdoce demeure aussi dans l'éternité, les pontifes et les prêtres passent eux aussi de ce monde à la Vie éternelle. Le temps sur cette terre passe, et peu à peu s'éteint donc cette première génération de prêtres qui ont connu l'Église en état d'ordre, avec toute sa beauté, et qui par la suite ont vécu douloureusement les terribles années de la crise conciliaire, en choisissant courageusement de rester fdèles au Saint Sacrifce de la Messe qui était banni et interdit dans toutes les églises du monde chrétien. Combien tristes, mais en même temps doux, sont les souvenirs de ces prêtres qui nous ont précédés (et certains, grâce à Dieu, nous accompagnent encore : ad multos annos!) et grâce à la Foi, le Sacrifce, les Sacrements, sont restés vivants parmi nous. Cette année, notre Institut commémore les trente ans (déjà !) de la mort d'un d'eux, Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers, évêque catholique et religieux dominicain. Qu'il me soit permis de partager avec vous un souvenir personnel.Je l'avais connu au séminaire d'Écône, ou il enseignait, le 8 décembre 1974 ; mais quand ensuite, j'entrais à mon tour dans ce séminaire, en octobre 1977, le Père Guérard, qui avait prêché la retraite de rentrée, venait d'être éloigné - pour toujours - d'Écône. Dès lors, dans le séminaire fondé par Mgr Lefebvre, on parlait avec crainte (crainte d'être exclus du séminaire, crainte de ne pouvoir recevoir l'ordination sacerdotale) des “guérardiens” et des “barbaristes”, les terribles “sédévacantistes” qui suivaient les thèses du Père Guérard des Lauriers pour les uns, du Père Barbara pour les autres… Les contradictions sans solution amenèrent quatre jeunes prêtres italiens à quitter la Fraternité Saint- Pie X et à fonder, à Turin, l'Institut Mater Boni Consilii : c'était le 18 décembre 1985. Nous savions que l'explication de la crise ouverte par Vatican II qui nous était donnée par la Fraternité, et à laquelle nous avions cru jusqu'alors, ne résistait pas à l'épreuve des faits et ne pouvait se concilier avec la doctrine de la Foi ; mais quelle autre explication trouver ? Cela, en effet, n'était absolument pas clair. J'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises : notre Institut est né à Turin en décembre 1985, mais ce n'est que le 24 septembre 1986, à Raveau, qu'il a trouvé sa véritable voie. Deux d'entre nous, au nom de tous les autres, se rendirent en effet à Raveau, près de Nevers, où vivait Mgr Guérard des Lauriers. Nous partîmes le 22 septembre, pour arriver à Raveau le 24, fête de Notre-Dame de la Merci. Là, je célébrai la Messe, et non sans étonnement et pour ma plus grande émotion, c'est Mgr Guérard lui-même qui me servit la Messe. Nous repartîmes le lendemain pour Chémére-le-Roi, où se trouvait le Père de Blignières, qui avait quitté le Père Guérard à cause de sa consécration épiscopale. Le 29 septembre (après un séjour à Paris) nous retournâmes à Raveau : Mgr Guérard ne croyait pas qu'il nous aurait revus, et ce fut avec une grande joie qu'il nous bénit le lendemain lorsque nous repartions pour Nichelino. La voie était prise, et cette voie l'Institut ne l'a plus jamais quittée.

“Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive”. Telle est la condition pour être de vrais disciples de Jésus-Christ, qui nous porte - à Son image - au sacrifce par amour. En reprenant la vie du Père Guérard des Lauriers, les moments saillants de son existence terrestre, nous voyons comment il sut être le vrai disciple de Jésus- Christ en renonçant à lui-même et en potant la croix à la suite du Maître. La première fois, à Rome, en 1926, en répondant à l'appel de la Vérité, qui appelait le jeune Michel à quitter le monde, sa chère famille, la perspective d'une brillante carrière scientifque, pour embrasser la vie religieuse comme fls de Saint Dominique. L'étudiant de vingt ans de l'École Normale Supérieure quittait tout pour devenir un humble et pauvre novice. La seconde fois, le Père Guérard embrassa la croix pour la défense du Sacrifce de la Messe : il rédigea, en 1969, le Bref Examen Critique du Novus Ordo Missæ qui lui valut l'année suivante - avec le Recteur Mgr Piolanti et d'autres enseignants - d'êter écarté de la chaire romaine de l'Université Pontifcale du Latran. Lui qui, quelques années auparavant, avait été l'un des théologiens qui soutinrent le Pape Pie XII (dont nous commémorerons aussi en 2018 les 60 ans de la mort) dans son intention de compléter les dogmes marials par la défnition de la Médiation et de la Co-Rédemption de Marie. Il ne pensa pas à la carrière, à la réputation, aux honneurs, comme à l'inverse frent tant d'autres, mail il embrassa la croix en témoignant publiquement de la foi dans le Saint-Sacrifce de la Messe. La troisième fois, à l'automne 1977, lorsqu'il fut congédié par Mgr Lefebvre et par leséminaire d'Écône. Cette fois, la croix embrassée le portait à rendre public le témoignage en faveur de la foi dans l'Églisse et dans la Papauté, en élaborant la thèse théologique dite par la suite de Cassiciacum, du nom des cahiers qui la publièrent pour la première fois. En 1979, la Lettre aux Amis et Bienfaiteurs n° 16 publia une lettre de Mgr Lefebvre à Jean-Paul II, dans laquelle l'évêque d'Écône proposait un accord honteux ; la réponse publique du Père Guérard des Lauriers, Monseigneur, nous ne voulons pas de cette paix, consuma la douloureuse fracture entre les deux. La quatrième fois, en 1981, quand il accepta l'épiscopat - plus une charge qu'un honneur - pour que puissent continuer le sacerdoce catholique et l'Oblation pure. Les jeunes prêtres qui l'avaient suivi jusqu'alors l'abandonnèrent, tandis que le frappaient les “censures canoniques” des modernistes qui énonçaient, pour une fois, une vérité : il ne peut y avoir de communion entre eux et nous. Ce fut ainsi que l'Institut rencontra Mgr Guérard des Lauriers, en 1986, lequel nous accueillit comme un père, et mit dans l'Institut ses ultimes espérances humaines. La dernière grande croix embrassée, le dernier renoncement, fut scellée par la mort, survenue à Cosne-sur-Loire le 27 février 1988. Malgré son âge avancé, Mgr Guérard des Lauriers ne regardait jamais le passé avec nostalgie, mais tournait son regard vers le futur, toujours jeune en Celui “qui réjouit ma jeunesse” . Il attendait avec impatience l'achat de la nouvelle maison de l'Institut (ce sera celle de Verrua) pour rejoindre les jeunes étudiants de théologie, et vivre avec nous, sans refuser, selon l'expression de saint Martin, le travail. Et en même temps, il était parfaitement prêt à tout quitter, et la vie même, si telle était la volonté du Seigneur.

Cher Monseigneur ! Comme nous voudrions vous avoir encore parmi nous, pouvoir avoir près de nous le Père que vous fûtes pour ceux qui vous connurent trop tard, et que vous auriez certainement été pour les jeunes qui suivent vos pas. Mais nous vous savons présent, guidés par la Foi qui a pour objet les choses qui ne se voient pas, et nous nous sentons unis à vous dans la communions des Saints. En attendant, par ce pieux hommage, nous rappelons aux catholiques votre fgure de religieux, de prêtre, de théologien et d'évêque catholique, oubliée par beaucoup, salie par d'autres, mais que nous, nous n'oublierons jamais.

Abbé Francesco Ricossa

[Wigratzbad (FSSP)] (Archives) La toute première ordination dans la FSSP

SOURCE - Wigratzbad (FSSP) - 18 janvier 2018

Alors que la Fraternité Saint-Pierre en est à sa trentième année d'existence, nous n'oublions pas de rendre grâce au Seigneur pour toutes les ordinations sacerdotales célébrées depuis 1988. Voici pour mémoire quelques images de la toute première ordination, qui fut conférée à Rome le 10 décembre 1988, en l'église Santa Maria dell'Anima. L'abbé Walthard Zimmer, Autrichien, devenait prêtre par les mains du Cardinal Augustin Mayer, premier président de la Commission pontificale Ecclesia Dei.

[Paix Liturgique] Laszlo Dobszay et sa défense originale de la liturgie romaine

SOURCE - Paix Liturgique - lettre n°628 - 18 janvier 2018

du Depuis le 1er janvier 2018, les fidèles de Budapest attachés à la forme extraordinaire du rite romain bénéficient officiellement d’un lieu de culte et d’un prêtre le desservant. L’église Saint-Michel, située au cœur du Vieux-Pest, a en effet été confiée par le cardinal Erdö, archevêque d’Esztergom-Budapest, aux chanoines prémontrés, avec pour mission particulière de répondre aux besoins de la communauté Summorum Pontificum locale. En soi, cela n'implique aucun changement logistique pour les fidèles puisque Saint-Michel était déjà leur lieu de culte depuis 2014 et que leur célébrant est d’ores et déjà un prémontré. Mais cela représente un important changement de statut puisque celui-ci relevait jusqu'ici plus du motu proprio Ecclesia Dei – donc d’une reconnaissance limitée par le bon-vouloir de l’autorité ecclésiastique – que du motu proprio Summorum Pontificum, donc d’une installation stable dans le contexte paroissial et diocésain. Nous aurons l’occasion de revenir dans une prochaine lettre sur l’histoire de ce groupe stable et l’œuvre du Capitulum Laicorum Sancti Michaelis Archangeli (CLSMA) qui le représente, mais il nous faut auparavant présenter la figure singulière de celui qui en a inspiré la création, le musicien Laszlo Dobszay (1935-2011). 
I – UN SPÉCIALISTE DE LA TRADITION LITURGIQUE ROMAINE FACE À LA RÉFORME DE PAUL VI 
C’est fort de sa science historique, liturgique et musicologique que Laszlo Dobszay condamnait la réforme Bugnini, la jugeant en rupture avec l’ensemble de la tradition liturgique romaine. Pour autant, et ce n’est pas le moindre aspect de sa personnalité singulière, si Dobszay est un champion de la tradition romaine c’est en spécialiste des usages liturgiques hongrois, à la manière de Mgr Klaus Gamber, spécialiste des sacramentaires ottoniens, ou de Mgr Juan Miguel Ferrer Grenesche, spécialiste des textes liturgiques wisigothiques.

« Il n’y a aucun doute qu’une réforme liturgique était nécessaire mais il n’est guère évident que ce soit de cette réforme-ci que l’Église ait eu besoin. » Cette phrase, qui figure dans l’introduction de l’ouvrage de Laszlo Dobszay, The Bugnini-Liturgy and the Reform of the Reform [La liturgie de Bugnini et la réforme de la réforme] – publié en 2003 par la Church Music Association of America – représente bien la position de l’auteur quant à la réforme liturgique. Très différemment comprise selon les auteurs et les publics, cette notion de « réforme de la réforme » mérite d'être précisée car la visée de l’auteur n'est pas de réformer le Novus Ordo mais de repartir de la situation liturgique de 1962, en proposant son enrichissement par la remise à jour de trésors oubliés, notamment ceux de la liturgie latine hongroise.

Incontestablement, Dobszay s’inscrit dans la ligne du cardinal Ratzinger auquel l’ouvrage est dédicacé : ce n'est pas l'idée ni même le principe de la réforme qu'il rejette mais le caractère défectueux des innovations apportées par la réforme Bugnini. Du reste, Dobszay étaient de ceux qui estimaient, à tort ou à raison, que la réforme de Paul VI a été introduite « après, et non par, le Concile ». Musicien et musicologue de haut niveau, il a œuvré toute sa vie pour la redécouverte de textes et de musiques liturgiques anciens, spécialement issus du patrimoine hongrois. Son aversion pour le saccage accompli par l’équipe de Bugnini aux dépens de l'ultime version du missel romain, celle de 1962, est semblable à celle d’un autre spécialiste de même niveau, le liturgiste allemand Klaus Gamber.

« Laszlo Dobszay était un réformiste », explique Miklós Földvary, le fondateur du CLSMA.« Son idée, poursuit-il, était qu'il fallait recommencer la réforme à partir de la situation liturgique de 1962 et retrouver ainsi le chemin de la vraie réforme ». Il faut bien comprendre en effet que le sens du mot réforme n’avait rien à voir pour Dobszay avec celui de l'aggiornamento issu de Vatican II.

Méthodologiquement, Dobszay cantonne sa critique au point de vue « de la "vérité liturgique" particulière et non au point de vue théologique, même si, sur certains points (par exemple les rites des sacrements) la solution liturgique adoptée soulève la question d’une dogmatique problématique » (Introduction à The Bugnini Liturgy). En se coupant volontairement de la tradition liturgique romaine, dite tridentine parce que la Contre-Réforme l’avait canonisée, Bugnini a produit « un patchwork arbitraire » qui ne répond pas aux attentes de la constitution conciliaire sur la liturgie. « La liturgie nouvelle, précise-t-il dans son introduction, n'est pas une forme récente du rite romain, ni une nouvelle étape d'un développement organique, mais une invention fabriquée et volontariste, dans laquelle les idées et les ambitions individuelles ont joué un rôle dominant et décisif. Et ceci, même si le contenu avait reçu une approbation légale. »

L'originalité de la critique de Dobszay est d'embrasser tous les aspects de la réforme post-conciliaire, accordant autant d'importance au démantèlement de la Semaine Sainte et aux chamboulements du Bréviaire qu'à la réforme du Missel.

Par son travail, Dobszay a contribué à poser les jalons pour un retour, dans des temps futurs, à une vie organique du rite romain, stérilisé par la réforme Bugnini. En repartant de son état témoin de 1962, le rite romain pourrait revivre en renouant avec ses foisonnantes richesses. C’est ce qu’il écrira en 2005 en appuyant la demande du CLSMA de rejoindre la Fédération internationale Una Voce (FIUV) : « Si nous considérons nécessaire de revenir à la situation de 1962, c’est avec la volonté de préparer la réforme authentique, celle qui nous a été volée et qui ne consiste ni à détruire le rite romain traditionnel ni à l’enfermer dans une réserve mais à permettre de nouveau son développement organique, sans rupture, en le restaurant, avec la variété de ses formes légales, comme l’unique rite de l’Église catholique. »
II – L'EXEMPLE DE LA SCHOLA HUNGARICA
Musicien et médiéviste, Laszlo Dobszay a travaillé toute sa vie à redécouvrir et valoriser le patrimoine liturgique latin de Hongrie. Cela donne d’autant plus de poids à sa réfutation de l’argumentation des promoteurs de la liturgie réformée qui entendaient justifier la rupture avec la liturgie tridentine par un prétendu retour à la tradition liturgique romaine « des origines », en réalité pratiquement inconnue comme tel à l’état pur. Pour lui, loin d’être une simple parenthèse baroque dans l’histoire de l’Église, la liturgie tridentine, « comparée aux liturgies extérieures à la sphère romaine ou à la liturgie de Bugnini », est bel et bien l’une des expressions du rite romain, « alors que la liturgie de Bugnini n’appartient pas à la grande famille des liturgies romaines ».

« Si la liturgie "tridentine", dans son aspect essentiel, n’est rien d’autre que la liturgie romaine elle-même, elle ne saurait être rejetée sous prétexte qu’elle serait datée de la Renaissance ou de l’époque baroque ou "conditionnée par son temps" [Dobszay écrit "zeitbedingt"]. En conséquence, la vérité est que les innovations récentes n’ont pas simplement supplanté une coutume vieille de 300 ans, mais qu'elles ont, en fait, rompu avec toute la tradition de l’Église romaine telle qu'il nous est donné de la connaître. » (Chapitre 6 de The Bugnini-Liturgy)

Le jugement de Dobszay est d’autant plus significatif qu’il vient d’une personne qui fut associée à la traduction et à l’adaptation en hongrois des livres liturgiques réformés.Comme dans de nombreux pays communistes, il faut avoir à l’esprit que la mise en œuvre de la réforme liturgique fut souvent l’occasion pour le clergé et les fidèles de manifester leur insoumission au régime en collant aux nouveautés romaines.

Après avoir réalisé un recueil de chants à l’usage des paroisses, dont la hiérarchie ecclésiastique décida finalement de bloquer la diffusion (1), Dobszay se replia sur ses propres activités scientifiques et musicales, à commencer par le développement de la Schola Hungarica, créée en 1969 avec sa consœur Janka Szendrei.

La Schola Hungarica tient un grand rôle dans l’œuvre liturgique de Dobszay. Reconnue dans le monde musical pour son importante production artistique, la Schola Hungarica a permis à Dobszay de conduire un travail unique de redécouverte de la musique sacrée médiévale hongroise. Un travail, dont on peut noter ironiquement qu’il a été produit par Hungaroton, le label de disques officiel du régime communiste de l'époque, auprès duquel Dobszay et Szendrei avaient plaidé avec succès la cause de la remise à l'honneur de la musique populaire nationale...

« Ce travail d’ethnomusicologie mené par Laszlo Dobszay a aidé à préserver quelques pans de la liturgie traditionnelle dans la liturgie ordinaire des paroisses », souligne Miklós Földvary. En particulier en ce qui concerne la structure des vêpres (qui, en Hongrie, a conservé grosso modo celle de l’ancien bréviaire), certains rituels de la Semaine Sainte mais aussi la préservation de chants d’introït et de communion (malheureusement les offertoires sont passés au pilon bugninien). La vision liturgique de Dobszay est en effet profondément motivée par le désir de répondre à l’invitation faite par Pie X dans le motu proprio Tra le sollecitudine de 1903 : « Que l’on ait un soin tout particulier à rétablir l’usage du chant grégorien parmi le peuple, afin que de nouveau les fidèles prennent, comme autrefois, une part plus active dans la célébration des offices. »

« L’ambition de Laszlo Dobszay, explique Miklós Földvary, était de faire du chant des fidèles un chant liturgique et grégorien. Concrètement, si la liturgie doit être chantée comme le voulait saint Pie X et comme devait le permettre la réforme de la liturgie des heures, comment y parvenir ? Pour lui, la solution a consisté à se pénétrer de l’esprit de la composition grégorienne pour offrir aux fidèles la possibilité concrète de chanter l’Office, dans le triple respect du grégorien, du texte et de l’héritage hongrois. » En somme, la participation active par le chant grégorien ! Dobszay a en particulier joué un grand rôle dans l’exhumation de l’ancien rit d’Esztergom – le ritus Strigoniensis – dont les livres liturgiques ont été publiés sous la direction d’un de ses amis, le professeur Balázs Déri, directeur du département d’études latines de l’université de Budapest (ELTE).
III – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) Méconnue pour ne pas dire inconnue dans le monde francophone, l’œuvre liturgique de Laszlo Dobszay mérite d’être étudiée et diffusée. En particulier pour son souci constant d’assumer tout l’héritage liturgique romain et de le rendre accessible aux fidèles par le chant liturgique, un chant liturgique que Dobszay ne réduisait pas à la seule célébration eucharistique mais étendait au chant des laudes et des vêpres de l’Office. Si le recours de Dobszay au vernaculaire pourra choquer quelques puristes, le résultat – tel que nous avons pu l'entrevoir à Budapest – est édifiant. Au-delà de la qualité musicale et de la précision liturgique, la participation de l'assemblée au chant est d'une intensité rare. 

2) Le parcours de Dobszay est emblématique du gel et de la sclérose occasionnés par la réforme liturgique de Paul VI. Ostracisé par l'épiscopat hongrois, il n'eut longtemps pour seul appui que l’abbé Robert Skeris, prêtre et théologien américain qui fut Préfet de l’Institut pontifical de musique sacrée à Rome et Président de laChurch Music Association of America. Ce n'est en fait qu'après la publication de son livre de 2003 que son travail commença à être connu et et reconnu. En 2006, il fut notamment l'un des conférenciers du colloque du Centre international d'études liturgiques (CIEL), organisé à Oxford.

3) Vu de France, Dobszay ressemble à un OLNI (un objet liturgique non identifié) par son souci de ne pas être enrôlé dans tel ou tel camp. Ainsi, alors qu'il est convaincu, bien avant le motu proprio de Benoît XVI, de la nécessité de célébrer plus largement selon les livres liturgiques de 1962, il n'assistera quasiment jamais à leur célébration. Cependant, par son action indépendante, voire indifférente, des influences ecclésiastiques, il s'inscrit pleinement dans la grande lignée des laïcs qui se sont dressés pour défendre, au cours du dernier demi siècle, la continuité de la grande tradition liturgique romaine.
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(1) Aujourd’hui, ce recueil est présent dans un grand nombre des paroisses hongroises et contribue grandement au maintien et à la diffusion d’un chant liturgique de qualité.