31 juillet 2013

[Caelum et Terra - Philippe Maxence] Jean Madiran : sous le signe de la piété

SOURCE - Caelum et Terra - Philippe Maxence - 31 juillet 2013

Fondateur de la revue Itinéraires et du quotidien Présent, écrivain et journaliste, Jean Madiran, oblat de saint Benoît, est retourné à la Maison du Père en ce mercredi 31 juillet 2013. Comme Louis Veuillot en son temps, il reste un exemple de combattant inlassable au service de l’Église et parfois contre le personnel de celle-ci qui en notre temps n’est pas toujours à la hauteur de Celui qu’il doit servir. Jean Madiran était un disciple de Charles Maurras, mais aussi, et peut-être surtout, d’André et d’Henri Charlier dont il a contribué plus que quiconque à faire connaître et répandre l’œuvre et ce souci péguiste de la réforme intellectuelle et morale. Le Père Bruckberger a écrit de lui qu’il continuait de porter en notre temps la voix exigeante de Charles Péguy et cet hommage était juste, venant d’un homme et d’un prêtre qui se disait pour sa part le disciple de Georges Bernanos. 

À l’heure qu’il est, alors que la nouvelle vient de tomber, le moment est à la prière et à la reconnaissance. À toute une génération, dont je fais partie, Jean Madiran a appris et transmis les exigences de la vertu naturelle de piété, vertu si contraire à la modernité et dont on voit aujourd’hui, plus que jamais, qu’elle est nécessaire, alors que le spirituel et le temporel semblent s’enfoncer d’un même pas, ou d’un même mouvement, vers la reddition absolue au grand n’importe quoi.

Il est trop tôt pour dire tout ce que nous devons à Jean Madiran. Je n’étais pas un de ses proches et je n’ai pas partagé tous ses combats. Mais il a fait partie de ces hommes qui ont marqué ma jeunesse et ses écrits furent de ceux qui ont eu une influence décisive sur le jeune garçon que j’étais, quand le souci de la primauté du bien commun de l’Église et de la France m’ont suffisamment étreint pour qu’il décide d’une grande part de mon existence. Il a affermi en moi l’attachement à la messe catholique romaine, attachement non pas seulement sentimental, mais raisonné et doctrinal. Il m’a encouragé, par son exemple, à me greffer de manière décisive au grand rameau bénédictin. Il m’a appris à penser et à réfléchir en catholique, même dans les questions du combat temporel. Il était le dernier de la grande cohorte des écrivains et penseurs catholiques de l’après-guerre et sa voix va manquer alors que le ciel s’assombrit.

C’est sous le signe et dans la perspective de la piété que je garde le souvenir de ce défenseur de la foi et je le confie bien sûr à la douce miséricorde de Dieu car il a combattu le bon combat, qu’il nous faut continuer aujourd’hui, à notre manière et selon nos faibles moyens, pour l’honneur de l’Église et le salut de notre patrie.

D’autres diront mieux que moi l’hommage que Jean Madiran mérite aujourd’hui. Mais je voulais ce soir témoigner que bien au-delà du cercle de ses proches son influence aura été importante, comme j’ai pu lui dire un jour de vive voix. A Dieu, Jean Madiran.


Fidélium Deus, ómnium Cónditor et Redémptor : animábus famulórum, famularúmque tuárum remissiónem cunctórum tríbue peccatórum ; ut indulgéntiam quam semper optavérunt, piis supplicatiónibus consequántur

[Traditionalistes! (blog)] Chronique du renouveau liturgique

SOURCE - Blog "Traditionalistes" - 31 juillet 2013

Juillet 2013. Le pape François interdit aux Franciscains de prier comme ceci...


... tandis qu'aux JMJ, les évêques prient comme cela:

[Bernard Antony - Reconquête] J’ai appris ce soir le décès de Jean Madiran...

SOURCE - Bernard Antony - Reconquête - 31 juillet 2013

Lourdes, 31 juillet 2013, 20 heures.

J’ai appris ce soir le décès de Jean Madiran. L’annonce m’en a été faite par Jeanne Smits au moment où nous partions pour les prières de la procession aux flambeaux, avec tous les participants à l’université d’été du Centre Henri et André Charlier. Après Dom Gérard et Albert Gérard, vient ainsi d’être rappelé à Dieu le dernier, ici-bas, des trois parrains du Centre Charlier en 1979. La messe du 1er août sera dite à son intention par l’abbé Christian Gouyaud qui, depuis des années, accompagne nos universités.

Demeuré seul sur les terrasses de la communauté religieuse qui nous accueille, j’entends s’élever les chants de prières à la Sainte Vierge, ceux des nôtres. Et ma prière monte pour l’âme et la mémoire de Jean Madiran. Il aura mené jusqu’à son dernier souffle, en sa 94e année, depuis ceux de sa jeunesse de lycéen militant catholique et français, une longue vie de combats pour notre foi et notre patrie. Il avait, pour cela, reçu les dons d’une intelligence magnifique, d’un esprit scintillant, sans cesse en quête de la vérité et de sa défense, par la parole certes, mais principalement par la plume. Demain viendra le temps d’évoquer l’écrivain, le penseur, le grand publiciste, le directeur d’Itinéraires et de Présent, le mousquetaire de la plume.

Pour l’heure, ce sont les souvenirs de tout ce que nous avons vécu et fait ensemble dans la ferveur de l’amitié française et de l’esprit de chrétienté qui se bousculent en moi. Avec toute l’équipe militante du Centre Charlier, je partage le deuil de celle de Présent et exprime à Michèle, l’épouse de Jean Madiran, toute ma compassion, dans la conviction que, comme son vieux maître Charles Maurras, il s’est « endormi, entre les bras de l’espérance et de l’amour ».

Bernard Antony

• Co-fondateur de Présent avec Jean Madiran (†), François Brigneau (†), Pierre Durand (†) et Hugues Kéraly ; Bernard Antony est toujours resté propriétaire du titre Présent dont la naissance, en tant que quotidien, a eu lieu lors d’une des premières universités d’été du Centre Charlier.

[Yves Chiron - Aletheia] "Les Franciscains de l'Immaculée dans la tourmente"

Yves Chiron - Aletheia 204 - 31 juillet 2013

Le 2 avril 1970, à Frigento, près de Naples, dans un couvent, dédié à Notre-Dame du Bon Conseil, que les Franciscains conventuels voulaient fermer, naissait à l’initiative de deux religieux, les PP. Stefano M. Manelli et Gabriele M. Pelletieri, et avec l’accord de leurs supérieurs, un nouveau style de vie communautaire selon l’esprit franciscain sous le signe de la pauvreté, de la pénitence et de l’esprit marial. Aujourd’hui la Congrégation des Franciscains de l’Immaculée compte des centaines de membres sur tous les continents.

Il y a six ans, suite au motu proprio libérateur de Benoît XVI (promulgué le 7 juillet 2007), la congrégation commençait à adopter de manière habituelle – mais non obligatoire – le rite traditionnel de la messe.

Suite à une visite apostolique commencée il y a un an, la Congrégation pour les religieux (Congregatio pro Institutis vitae consecratae et Societatibus vitae apostolicae) a pris un décret plus qu’étonnant. Il est daté du 11 juillet dernier – mais le texte n’en a été connu que quelques jours plus tard. Ce décret nomme un Commissaire apostolique – qui appartient à l’ordre des Capucins – pour diriger les Franciscains de l’Immaculée jusqu’à la réunion de leur prochain Chapitre général et impose le rite ordinaire de la messe (rite de Paul VI) pour tous les membres de l’Institut, sauf autorisation expresse du Commissaire.

Cette double décision/sanction a beaucoup surpris d’autant plus qu’elle frappe une congrégation en pleine croissance et qui n’a pas été touchée par les scandales qu’ont connus d’autres congrégations. Le décret a reçu l’approbation formelle du pape François.

L’historien italien, et excellent vaticaniste, Sandro Magister a résumé en deux lignes, sur son site (Chiesa, 29 juillet 2013), l’événement du 11 juillet 2013 : « Sur un point névralgique – la messe selon le rite ancien –, Ratzinger en a permis la célébration à tous. Bergoglio l’a interdite à un ordre religieux qui la préférait ». La journaliste et écrivain italienne Cristina Siccardi a dramatisé encore davantage l’événement en publiant sur son site (Riscossa Cristiana, 31 juillet 2013) un article intitulé : «Les Franciscains de l’Immaculée sur la voie des martyrs des Saints de l’Eglise».

Plutôt que de commenter l’événement d’après d’autres commentaires, je crois utile de donner aux lecteurs français d’abord le texte même du décret de la Congrégation pour les religieux, puis les analyses d’un jeune historien italien de mes amis, Fabrizio Cannone, auteur de deux livres brillants (La democrazia in Giovanni Paolo II, Vérone, edizioni Fede e Cultura, Verona, 2008 et Pio IX. "Il Papa
scomodo
", Milan, Ares, 2012)  et qui connaît bien, depuis dix ans, les Franciscains de l’Immaculée.

Y.C.

[Yves Chiron - Aletheia] Entretien avec Fabrizio Cannone (Aletheia 204 - "Les Franciscains de l'Immaculée dans la tourmente")

Fabrizio Cannone - Yves Chiron - Aletheia 204 ("Les Franciscains de l'Immaculée dans la tourmente") - 31 juillet 2013

Entretien avec Fabrizio Cannone
1. Avant d’évoquer le décret du 11 juillet, pouvez-vous nous présenter brièvement la congrégation des Franciscains de l’Immaculée, ses origines et son apostolat ?
La Congrégation des Frères Franciscains de l’Immaculée a été fondée en 1970 par deux prêtres franciscains conventuels, le P. Stefano M. Manelli (né le 1er mai 1933 à Fiume, au nord-est de l’Italie) et le p. Gabriele M. Pellettieri (né le 11 juin 1940 à Vaglio di Basilicata, dans le sud). Cette congrégation a été approuvée, selon le droit diocésain, par l’archevêque de Benevento, Mgr Carlo Minchiatti, en 1990. Le 1er janvier 1998, par volonté de Jean-Paul II, elle a été reconnue de droit pontifical.
 
Dans l’histoire et les péripéties des différentes réformes franciscaines, leur particularité est d’avoir ajouté un 4e voeu aux trois voeux traditionnels de religion : le voeu dit de consécration illimitée à la Vierge Marie, suivant en cela le charisme marial de saint Maximilien Kolbe. Un autre élément typiquement ”kolbien” est le zèle pour la conversion des âmes et l’apostolat à 360 degrés : les Franciscains de l’Immaculée, qui aujourd’hui comptent environ 400 religieux dans plus de 50 maisons, ont fondé des stations de radio et de télévision dans différentes parties du monde, ils gèrent plusieurs sites internet et ils ont publié auprès de leur maison d’éditions, Casa Mariana Editrice, des dizaines d’ouvrages de spiritualité et de formation catholique.
 
Ils se signalent aussi par le nombre et la qualité de leurs publications périodiques, notamment Annales Franciscani (revue annuelle d’histoire et de spiritualité franciscaines), Immaculata Mediatrix (revue internationale de mariologie, qui oeuvre pour une définition dogmatique de la Corédemption de Marie), les Quaderni di Studi Scotisti (revue de philosophie et de théologie), et Il Settimanale di Padre Pio (revue de dévotion et d’apologétique).

Entre temps est née la branche féminine de l’institut, les Soeurs Franciscaines de l’Immaculée, érigée de droit pontifical la même année que les Frères (en 1998) et qui compte plus de 400 religieuses. En 2006 se sont agrégées aussi à l’Institut les Clarisses de l’Immaculée, qui ont trois couvents en Italie. Enfin certaines Soeurs de l’Immaculée ont aspiré à vivre dans une plus stricte clôture et ce rameau a sa maison-mère dans le monastère Santa Chiara delle Murate à Città di Castello, en Ombrie. Les laïcs qui veulent suivre le charisme franciscano-marial de la communauté sont regroupés dans une sorte de tiers-ordre, la MIM (Missione dell’Immacolata Mediatrice), qui est une Association publique de fidèles, organisée en cénacles et guidée par les prêtres de la congrégation. L’Institut dans ses branches masculine et féminine est présent sur tous les continents, mais plus particulièrement en Italie et aux Philippines.
2. Quelles sont les conséquences concrètes du décret du 11 juillet ?
Sur les conséquences concrètes du décret, un canoniste expert serait plus à même de répondre. On constate qu’il y a la volonté de retirer aux autorités actuelles, y compris au Supérieur général et fondateur, le P. Stefano M. Manelli, la direction de la congrégation. Un Commissaire a été nommé, il guidera la communauté jusqu’au Chapitre général qui se tiendra à Rome en 2014 et qui, certainement, renouvellera les charges internes à l’Institut, à partir de l’organe décisionnel le plus élevé qui est le Conseil Général. Lachose qui a stupéfait beaucoup de gens et qui a suscité le plus de commentaires est l’interdiction de célébrer la messe selon la forme extraordinaire du Rite romain, appelé aussi, dans le décret du 11 juillet, Vetus Ordo (”Ancien ordo”). Depuis le motu proprio Summorum Pontificum (2007), on pensait communément qu’une disposition aussi générale contre un droit reconnu aussi clairement ne pouvait plus être prise. Tous les amis de la communauté, que je connais et fréquente depuis 2003, savent qu’avant le motu proprio de Benoît XVI aucun prêtre de la congrégation ne célébrait la messe avec le Missel de 1962. Depuis la ”libération” de 2007, beaucoup, et même certainement la majeure partie des prêtres, des séminaristes et des soeurs de l’Institut ont commencé à apprécier la messe traditionnelle, la sentant profondément en harmonie avec le charisme propre de leur fondation, charisme qui est non seulement apostolique mais aussi ascéticopénitentiel.
 
Par ailleurs, les Franciscains de l’Immaculée, avec un grand équilibre, dans tous leurs couvents,sauf ceux de vie strictement contemplative (comme l’ermitage d’Amandola, dans les Marches), célèbrent habituellement, depuis 2007, sous les deux formes liturgiques. Aussi, la prohibition du rite traditionnel contenue dans le décret paraît étrange et insuffisamment motivée.
3. On dit que le décret aurait comme origine une dissension au sein de la congrégation des Franciscains de l’Immaculée. Est-ce exact ?
Il n’est pas facile de répondre, s’agissant de choses délicates et en partie secrètes. Je crois néanmoins savoir, à travers la large connaissance que j’ai de la communauté et en particulier de plusieurs prêtres qui ont des charges importantes dans l’Institut, que depuis un certain temps il y avait des divergences entre les membres de l’Institut. Des divergences essentiellement de deux types. D’abord, il y a eu des critiques toujours plus fortes contre le Fondateur et supérieur général, qui a eu depuis peu 80 ans, et que certainsjugent ne plus être en mesure de bien suivre les multiples activités et le développement de l’Institut.
 
Typiquement, comme souvent dans ce genre de situations, ce genre de critiques émane des plus jeunes qui doivent encore mûrir et qui ont grandi trop vite. Il n’est pas facile de contenter tout le monde et des limites dans le gouvernement, de la part du Conseil Général, ne sont pas à exclure a priori.

Mais je dois dire, en toute sincérité, qu’outre avoir assisté à des dizaines de messes célébrées par le P.Stefano, spécialement à l’occasion de la profession religieuse d’amis devenus frères dans la communauté, j’ai eu la grâce d’avoir avec lui, un long entretien spirituel, entre quatre yeux, il y a trois ans à Frigento, Maison-Mère de l’Ordre. Je le considère comme un saint homme, digne fils de Padre Pio, qu’il a bien connu, à qui il a servi la messe tant de fois, de qui il a reçu la Première Communion et qui, en somme, l’a acheminé dans la vie chrétienne et religieuse.

La seconde critique interne s’est fait jour après le motu proprio de 2007 : si la majorité des prêtres aaccepté le document et en a fait un large usage, toujours néanmoins en respectant la pastorale diocésaine, certains religieux ont vu d’un mauvais oeil cette supposée ”tridentinisation”, peut-être inattendue. La cause selon moi significative est que l’Institut est peut-être l’unique au monde, au moins parmi ceux qui ont une certaine importance numérique, à avoir voulu passer, au moins pour les célébrations internes à la communauté, à la liturgie traditionnelle : et cela, je le répète, à la plus grande joie du plus grand nombre des prêtres, simples frères, religieuses et laïcs du tiers-ordre. Signe qu’il devait exister et qu’il existe un lien entre leur spiritualité et la spiritualité typique du rite traditionnel. Certains prêtres n’ont pas accepté cette évolution, pourtant prévue par le texte même du motu proprio, et ont commencé une fronde contre le P. Manelli, contre le co-fondateur P. Gabriele et les autres membres du Conseil. D’où la visite canonique, le décret et la nomination d’un Commissaire.
4. Ce décret du 11 juillet, pris par la Congrégation pour les religieux, a été approuvé de manière spécifique par le pape François. Doit-on considérer que ce décret est la première rupture du pape François avec la politique suivie par son prédécesseur en matière liturgique ?
Les commentaires, objectivement, s’égarent et beaucoup émettent des hypothèses au moins téméraires.La chose qui me stupéfie est la suspension de fait du droit concédé à tout prêtre de célébrer la messe selon le rite traditionnel. Certes, dans le Droit canon existe la suspensio a divinis, mais elle a toujours été conçue comme une mesure punitive et individuelle. Quelle faute peut avoir commis une congrégation tout entière pour se voir retirer un droit acquis ? Je ne sais pas si cette mesure, vraiment stupéfiante au regard des fruits rares des Franciscains de l’Immaculée, peut être considérée comme le début d’une nouvelle politique en matière liturgique. Mais cette disposition, bien qu’elle soit conditionnelle puisqu’elle laisse la possibilité d’utiliser le rite traditionnel après en avoir obtenu l’autorisation du Commissaire lui-même, semble en contradiction avec la pratique liturgique et théologique pluraliste soit de la Tradition (qui a toujours admis une ample pluralité de rites), soit avec l’esprit du Concile, lequel demande, me semble-t-il, de ne pas punir et de ne censurer personne dans l’Église, si ce n’est en cas d’absolue nécessité. Et cette mesure semble une mesure de punition, en ce sens que l’éventuel gouvernement déficient des Supérieurs et le supposé manque de sensus Ecclesiae, sont des choses différentes et éloignées de la forme liturgique adoptée. Qui plus est,dans ce cas, on constate aussi les nombreux fruits de jeunes vocations.
 
Propos recueillis et traduits par Yves Chiron

[J.-R. du Cray - Credidimus Caritati] Jean Madiran et Mgr Lefebvre : avant de partir

SOURCE - J.-R. du Cray - Credidimus Caritati - 31 juillet 2013

Jean Madiran s’est éteint le 31 juillet 2013. Il était un témoin privilégié de la vie de Mgr Lefebvre. Grand journaliste ayant couvert l’actualité du concile Vatican II, ayant soutenu corps et âme les débuts d’Écône, il en fut un témoin privilégié. Aussi, quand il fut question d’interroger les témoins de la vie du fondateur de la FSSPX pour réaliser un film documentaire, fut-il immédiatement question d’aller interroger Jean Madiran, l’initiateur d’Itinéraires et de Présent. C’est par Jeanne Smits, directrice de cette revue que j’ai pu joindre par téléphone Jean Madiran et ce dernier m’expliqua rapidement que les caméras et lui faisaient deux, qu’il n’avait jamais répondu à la télévision et que ce n’est pas à son âge – il était déjà nonagénaire – qu’il allait modifier son avis tranché sur ces nouvelles inventions. Je tentais une dernière chance en lui disant que j’allais lui écrire pour lui formuler sur papier ma demande. Sa réponse, sans pour autant ouvrir grand espoir, laissait plus ou moins entendre que je pouvais toujours essayer. Quinze jours plus tard, une très brève lettre de sa part m’indiquait qu’il acceptait finalement la proposition : « Ma réponse est Oui » soulignait-il, tout en me communiquant un numéro de portable et une adresse qui se trouvait à cinq cent mètres de la mienne.

Rares étaient les témoins qui avaient pu entendre Jean Madiran parler de Mgr Lefebvre après 1988, l’année des sacres. Cet épisode crucial avait mis fin à la grande entente entre deux hommes brillants, qui avaient une amitié et une estime réciproques. Puis vint le moment de l’incompréhension, de la rupture et même de la peine. Pour ma part, j’avais sagement rédigé mes questions sur le Concile et les débuts de la Fraternité, évitant bien les sujets qui risquaient de fâcher. Arrivant à son domicile, nous trouvions Jean Madiran aimable, avenant et souriant, alors qu’on nous avait parlé d’un homme au caractère bien trempé. Il nous a laissé déménager tout son salon pour installer la caméra et les spots afin de trouver le bon angle et la bonne lumière. En commençant, son caractère refit surface, il me dit que mes questions ne lui convenaient pas et qu’il choisirait les siennes. Cela commençait bien, me disais-je. Il parla du Concile où il confia que Mgr Lefebvre s’enquit de son expertise, en particulier sur le sujet relatif à la collégialité. Il plancha toute une nuit sur la question à Fontgombault avant que l’archevêque ne parte pour Rome, affermi par les analyses du grand écrivain. Dans les débuts de la Fraternité, il était encore là, veillant au lancement de l’œuvre. Le 21 septembre 1974, lorsque Mgr Lefebvre rédigea sa fameuse déclaration où il affirmait solennellement qu’il adhérait de tout son cœur « à la Rome éternelle » et qu’il refusait par contre « la Rome de tendance néo-moderniste », Jean Madiran était présent à Écône. Son fondateur demanda s’il pouvait expliquer aux séminaristes le sens de ses propos et il s’affranchit si bien de cette tâche qu’à la fin de la leçon, Mgr Lefebvre dit à ces futurs prêtres : Voyez, je n’ai rien à ajouter.

Mais Jean Madiran revenait systématiquement à la question des sacres. Visiblement, il voulait absolument aborder le sujet et il se lança dans un grand développement où il déclara : « Si la Fraternité Saint-Pie X existe encore aujourd’hui, c’est parce que Mgr Lefebvre lui a donné quatre évêques. Ce qui fait qu’elle a le poids qu’elle a, qu’elle est prise par le pape comme un interlocuteur, c’est parce qu’elle a des évêques » Et il poursuivait : « Dans l’Église, être des évêques, ça compte. Et donc, là, le fondateur avait bien fait, en tout cas il avait fait une fondation durable et assuré les conditions pour que son œuvre dure. » Il termina l’entretien en résumant Mgr Lefebvre comme « un fondateur ». On ne pouvait que saluer l’intelligence et l’humilité de cet homme de quatre-vingt dix ans qui avait finalement convoqué les caméras pour solder un compte avec l’histoire, non pour battre sa coulpe mais pour reconnaître le mérite d’un évêque dont on ressentait que des décennies plus tard il l’admirait toujours. Jean Madiran savait pertinemment que ce passage serait retenu. Il l’avait préparé et presque mis en scène. Son petit sourire le manifestait à la fin de l’entretien, bien que je me sois mordu les lèvres pendant qu’il parlait. Ayant eu l’occasion de lui écrire et de lui parler dans les mois qui suivirent, j’avais remarqué que sa pudeur lui évitait de revenir sur la question. Il avait reçu le film et il manifestait sa satisfaction.

Au-delà de ces faits récents, nous ne pouvons aujourd'hui que prier pour l'âme de cette grande figure qui a formé pendant des années les esprits, à travers la revue Itinéraires, à travers la revue Présent, les conduisant à déceler le vrai dans l'amas d'actualités qui foisonnent. Nous pouvons également lui exprimer notre reconnaissance.

J.-R. du Cray

30 juillet 2013

[Roberto de Mattei - Corrispondanza Romana] Le cas extrêmement grave des Franciscains de l’Immaculée

SOURCE - Roberto de Mattei - Corrispondanza Romana - via Riposte Catholique - 30 juillet 2013

Le cas des Franciscains de l’Immaculée se présente comme un épisode d’une extrême gravité, destiné à avoir des conséquences à l’intérieur de l’Église, conséquences peut-être non prévues par ceux qui l’ont déclenché imprudemment.

La Congrégation pour les Instituts de Vie Consacrée (également connue comme Congrégations pour les religieux), par un décret du 11 juillet 2013, signé par son Préfet, S.Em. le cardinal João Braz de Aviz et par l’archevêque secrétaire, S.E. Mgr José Rodriguez Carballo, ofm, ont relevé de leurs fonctions les supérieurs des Franciscains de l’Immaculée, confiant le gouvernement de l’Institut à un « Commissaire apostolique », le Père Fidenzio Volpi, OFM Cap. Afin de durcir la forme du décret, le cardinal João Braz de Aviz s’est muni d’une approbation ex auditu du Pape François, ce qui retire aux Franciscains de l’Immaculée toute possibilité de recours devant le Tribunal de la Signature apostolique. Les raisons de cette condamnation, qui a pour origine un exposé fait à la Congrégation pour les Instituts de Vie Consacrée par un groupe de religieux dissidents, demeurent mystérieuses. Du décret de la Congrégation et de la lettre envoyée aux Franciscains le 22 juillet par le nouveau commissaire apostolique, les seuls chefs d’inculpation semblent être ceux de faible « sentire cum Ecclesia » et d’attachement excessif au rite romain ancien.

En réalité, nous nous trouvons face à une injustice flagrante vis-à-vis des Franciscains de l’Immaculée. Cet institut religieux, fondé par les Pères Stefano Maria Manelli et Gabriele Maria Pellettieri, est l’un des plus florissants de l’Église par le nombre de vocations, l’authenticité de la vie spirituelle, la fidélité à l’orthodoxie et aux autorités romaines. Dans la situation d’anarchie liturgique, théologique et morale dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, les Franciscains de l’Immaculée devraient être pris comme exemple de vie religieuse. Le Pape rappelle souvent la nécessité d’une vie religieuse plus simple et plus sobre. Les Franciscains de l’Immaculée se distinguent justement par l’austérité et par la pauvreté évangélique avec lesquelles, depuis leur fondation, ils vivent leur charisme franciscain. Aujourd’hui, cependant, au nom du Pape, la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée relève de ses fonctions le gouvernement de l’institut, pour le transférer à une minorité de religieux rebelles, d’orientation progressiste, sur laquelle le nouveau commissaire apostolique s’appuiera pour le normaliser, c’est-à-dire pour le conduire au désastre auquel il avait jusqu’ici échappé grâce à sa fidélité aux lois ecclésiastiques et au Magistère.

Mais aujourd’hui, le mal est récompensé et le bien puni. Il n’est pas surprenant que cette dure sanction à l’égard des Franciscains de l’Immaculée provienne du même cardinal qui souhaite compréhension et dialogue avec les religieuses hérétiques et schismatiques américaines de la Leadership Conference of Women Religious (LCWR). Ces religieuses prêchent et pratiquent la théorie du genre et il faut donc dialoguer avec elles. Les Franciscains de l’Immaculée prêchent et pratiquent la chasteté et la pénitence et il n’existe donc pas de possibilité de compréhension pour eux. Ceci est la triste conclusion à laquelle parvient inévitablement un observateur impartial.

L’un des chefs d’inculpation est d’être trop attachés à la Messe traditionnelle. Mais cette accusation n’est qu’un prétexte dans la mesure où les Franciscains de l’Immaculée sont bi ritualistes, c’est-à-dire qu’ils célèbrent la Messe tout à la fois selon la forme ordinaire (« nouvelle Messe » du Missel de Paul VI) et selon la forme extraordinaire du Rite romain (Messe dite tridentine selon le Missel de 1962), comme cela leur est permis par les lois ecclésiastiques en vigueur. Face à un ordre injuste, on peut imaginer que certains d’entre eux ne renonceront pas à célébrer la Messe « traditionnelle » et ils feront bien de résister sur ce point dans la mesure où il ne s’agira pas d’un geste de rébellion mais d’obéissance. En effet, les indults et privilèges accordés à la Messe « traditionnelle » n’ont pas été abrogés et ils ont une force juridique supérieure au décret d’une Congrégation et même aux intentions d’un Pape si ces dernières ne sont pas exprimées dans le cadre d’un acte juridique clair. Le cardinal Braz de Aviz semble ignorer l’existence du motu proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007, de son décret d’application, l’Instruction Universae Ecclesiae du 30 avril 2011, et de la Commission Ecclesia Dei, annexée à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dont la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée usurpe aujourd’hui les compétences.

Quelle est l’intention de la suprême autorité ecclésiastique ? Supprimer la Commission Ecclesia Dei et abroger le motu proprio de Benoît XVI ? Dès lors, il faut le dire explicitement, afin que les conséquences puissent en être tirées. Et si tel n’est pas le cas, pourquoi poser un décret inutilement provocateur à l’encontre du monde catholique qui se réfère à la Tradition de l’Église ? Ce monde connaît une phase de grande expansion, surtout parmi les jeunes, et ceci est peut-être la principale raison de l’hostilité dont il fait aujourd’hui l’objet.

Enfin, le décret constitue un abus de pouvoir qui concerne non seulement les Franciscains de l’Immaculée et ceux qui sont qualifiés improprement de traditionalistes, mais tous les catholiques. Il représente en effet un symptôme alarmant de cette perte de la certitude du droit qui contamine aujourd’hui l’intérieur même de l’Église. L’Église en effet est une société visible, au sein de laquelle est en vigueur le « pouvoir du droit et de la loi » (Pie XII, Discours Dans notre souhait du 15 juillet 1950). Le droit est ce qui définit le juste et l’injuste et, ainsi que l’expliquent les canonistes, « La potestas au sein de l’Église doit être juste et ceci est requis par la nature même de l’ Église, qui détermine les buts et les limites de l’activité de la Hiérarchie. Tout acte des Sacrés Pasteurs n’est pas juste du simple fait qu’il provienne d’eux » (Carlos J. Errazuriz, Il diritto e la giustizia nella Chiesa, Giuffré, Milano, 2008, p. 157). Lorsque la certitude du droit vient à manquer, l’arbitraire et la volonté du plus fort prévalent. Cela arrive souvent dans la société et peut arriver au sein de l’Église lorsqu’en elle la dimension humaine prévaut sur la dimension surnaturelle. Mais si la certitude du droit n’existe pas, il n’existe pas de règle de comportement sûre. Tout est laissé à l’arbitraire de l’individu ou des groupes de pouvoir et à la force sur laquelle peuvent compter ces groupes de pression afin d’imposer leur volonté propre. La force, séparée du droit, devient injustice et arrogance.

L’Église, Corps mystique du Christ, est une institution hiérarchique, basée sur une loi divine dont les hommes d’Église sont les dépositaires mais en aucun cas ni les créateurs ni les patrons. L’Église n’est pas un soviet mais un édifice fondé par Jésus Christ, au sein duquel le pouvoir du Pape et des évêques doit être exercé en suivant les lois et formes traditionnelles, toutes enracinées dans la Révélation divine. Aujourd’hui, on évoque une Église plus démocratique et égalitaire mais le pouvoir est souvent exercé de manière personnaliste, au mépris des lois et coutumes millénaires. Lorsqu’il existe des Lois universelles de l’Église, comme la Bulle de Saint Pie V Quo primum (1570) et le motu proprio de Benoît XVI Summorum Pontificum, il est nécessaire pour les modifier d’adopter un acte juridique équivalent. Il n’est pas possible de considérer comme révoquée une loi précédente si elle ne l’est pas par le biais d’un acte explicitement abrogatif de même rang.

Pour défendre la justice et la vérité à l’intérieur de l’Église, nous nous en remettons à la voix des juristes, dont certains éminents cardinaux, qui ont ordonné selon la forme extraordinaire du rite romain les Franciscains de l’Immaculée et en connaissent la vie exemplaire et le zèle apostolique. Nous en appelons surtout au Pape François afin qu’il veuille retirer les mesures contre les Franciscains de l’Immaculée et contre leur usage légitime du rite romain dans sa forme extraordinaire.

Quelque soit la décision qui sera prise, nous ne pouvons cacher le fait que le moment que traverse aujourd’hui l’Église est dramatique. De nouvelles tempêtes s’annoncent à l’horizon et ces tempêtes ne sont certainement suscitées ni par les frères ni par les sœurs franciscains de l’Immaculée. L’amour de l’Église, catholique, apostolique et romaine, les a toujours caractérisés et nous pousse à prendre leur défense. Notre-Dame, Virgo Fidelis, suggérera à la conscience de chacun en ces moments difficiles la juste route à suivre.

[Paix Liturgique] Quand fleurissent d'extrordinaires premières messes en France, en Italie, en Croatie...

SOURCE - Paix Liturgique - Lettre 398 - 30 juillet 2013

La fête des saints Pierre et Paul – dont la date dans l’ordo de Paul VI est demeurée inchangée par rapport à l’ordo tridentin (29 juin) – marque la fin de l’année d’études dans les grands séminaires : elle est devenue depuis un demi-siècle la date habituelle des ordinations, plutôt que les messes des Samedis des Quatre-Temps liturgiquement destinées à cet usage. Du coup, le mois de juillet est tout naturellement le mois des premières messes pour les prêtres qui viennent d’être ordonnés.

Ces premières messes permettent souvent aux nouveaux prêtres des Instituts Ecclesia Dei de célébrer dans des églises d’ordinaire fermées à la forme extraordinaire, en France bien sûr mais aussi en Allemagne ou en Italie, comme ce fut le cas cette année en la cathédrale de Velletri, au sud de Rome, où a célébré l’abbé Massimo Botta, tout juste ordonné pour la Fraternité Saint-Pierre. En outre, comme nous l’avions évoqué en octobre 2010 à propos d’une première messe dans le diocèse de Ciudad del Este au Paraguay, cela permet à de plus en plus de nouveaux prêtres de choisir la forme extraordinaire pour leur première messe. Un choix que vient de faire par exemple l'abbé Manuel González – l'un des six nouveaux prêtres de l'archidiocèse de Tolède (Espagne) – et qui démontre que la génération Summorum Pontificum est une réalité qui s’étoffe d’année en année.
UNE "PREMIÈRE" EN CROATIE
Parmi les premières messes à signaler cette année, nous voudrions souligner l’événement que représente celle qui a été célébrée le dimanche 30 juin à Zagreb par le tout nouvel abbé Marko Tilosanec. Né en 1986, l’abbé Tilosanec a fait ses études au séminaire de Zagreb avant d’être ordonné pour le diocèse de Varazdin, diocèse suffragant de l’archidiocèse de Zagreb. Érigé en 1997, le diocèse de Varazdin compte plus de 160 prêtres pour une centaine de paroisses : à la différence des différents pays de l’Union européenne qu’elle vient de rejoindre, la Croatie abrite en effet un catholicisme encore solide, même si le taux de pratique des 90 % de catholiques du pays n’est que légèrement supérieur à 15 % (rappelons que celui-ci ne dépasse pas les 4 % en France).

La forme extraordinaire est quasi méconnue en Croatie. La Fraternité Saint-Pie X n’y a pas de célébration régulière et il n’existe qu’une seule application dominicale et hebdomadaire du Motu Proprio Summorum Pontificum dans tout le pays, celle de Zagreb, qui a précisément accueilli l’abbé Tilosanec pour sa première messe.

En raison d’une hiérarchie ecclésiastique très « conservatrice » et peu favorable à la forme extraordinaire du rite romain, l’abbé Tilosanec n’a pu célébrer qu’une messe chantée dans une chapelle relativement exiguë. Les fidèles, en majorité de l’âge du célébrant (25-30 ans), avaient préparé un livret de messe précédé d’un mot expliquant l’originalité de la messe traditionnelle : la position ad orientem du célébrant, son ton de voix, les prières au bas de l’autel et celles d’offertoire, l’attitude des fidèles, la communion distribuée sur les lèvres, etc. De l’avis unanime, tout se déroula pour le mieux. Ajoutons ce détail touchant : c’était la première fois que cette communauté – bénéficiant, depuis février 2011 mais dans des conditions difficiles, de l’application dominicale et hebdomadaire de Summorum Pontificum – assistait à une messe avec encensement.

Comme nous l’a confié l’un des participants à cette première messe de l’abbé Tilosanec : « Tandis que les politiciens croates célébraient l’entrée de la Croatie dans l’Union européenne, nous célébrions en l’église Saint-Martin quelque chose nous reliant bien plus profondément à l’Europe et à tout le monde catholique. »
PREMIÈRES MESSES EN FRANCE
En France, on peut signaler cette année la première messe en forme extraordinaire d’un jeune prêtre diocésain dans les Pyrénées. Et une autre à Versailles, où l’abbé Guillaume Dupont, tout nouveau prêtre, a célébré le 1er juillet sa première messe à Notre-Dame-des-Armées. Cela fait donc un prêtre idoine de plus dans le diocèse de Versailles. Prions pour qu’il puisse être laissé libre de satisfaire l’une des nombreuses demandes d’application du Motu Proprio en attente de réponse dans le diocèse.

Discrètement, le Motu Proprio a pour ainsi dire mûri dans les séminaires : il y a quelques années, les nouveaux prêtres « restaurateurs » arboraient une soutane lors de leur première messe ; aujourd’hui, ils célèbrent une messe dans la forme extraordinaire. Il est d’ailleurs probable que le phénomène s’accentuera l’an prochain car les futurs prêtres, “cuvée” 2014, seront des jeunes gens entrés au séminaire en 2007, alors que Benoît XVI venait tout juste en juillet de publier le Motu Proprio. La génération Motu Proprio s’avance.

29 juillet 2013

[Sandro Magister - Chiesa (blog)] Pour la première fois François contredit Benoît

SOURCE - Sandro Magister - Chiesa (blog) - 29 juillet 2013

Sur un point névralgique: la messe selon le rite ancien. Ratzinger en a permis la célébration à tous. Bergoglio l’a interdite à un ordre religieux qui la préférait

ROME, le 29 juillet 2013 – Un point sur lequel Jorge Mario Bergoglio était attendu au tournant, après avoir été élu pape, était celui de la messe selon l’ancien rite.

Certains prédisaient que le pape François ne s’éloignerait pas de la ligne de son prédécesseur. Celui-ci avait libéralisé, par le motu proprio "Summorum pontificum" du 7 juillet 2007, l’usage de la célébration de la messe selon l’ancien rite en tant que forme "extraordinaire" du rite moderne : Benoît XVI libéralise l'usage de l'ancien rite de la messe. Et il explique pourquoi et par l’instruction qui y faisait suite, "Universæ ecclesiæ", en date du 13 mai 2011 : Deux messes pour une seule Église

D’autres, en revanche, prévoyaient que le pape François allait restreindre – ou même carrément supprimer – la possibilité de célébrer la messe selon le rite d’avant le concile Vatican II, même si cela revenait à contredire les décisions de Benoît XVI alors que celui-ci était encore vivant.

Quand on lit un décret qui a été publié, peu de temps avant le voyage du pape François au Brésil, par la congrégation vaticane pour les religieux, avec l'approbation explicite du pape lui-même, il semble bien qu’il faille donner raison plutôt aux seconds qu’aux premiers.

Ce décret est daté du 11 juillet 2013, avec le numéro de protocole 52741/2012. Il porte la signature du préfet de la congrégation, le cardinal Joao Braz de Aviz, membre des Focolari, et celle du secrétaire de cette même congrégation, l'archevêque José Rodríguez Carballo, franciscain.

Braz de Aviz est le seul haut dirigeant de la curie qui soit de nationalité brésilienne, raison pour laquelle il a accompagné le pape François dans son voyage à Rio de Janeiro. Il a la réputation d’être progressiste, même si celle d’esprit brouillon lui correspond mieux. Et il sera probablement l’un des premiers à sauter, dès que la réforme de la curie annoncée par le pape François prendra corps.

Rodríguez Carballo, en revanche, jouit de la pleine confiance du souverain pontife. Sa promotion au rang de numéro deux de la congrégation a été voulue par le pape François lui-même, au début de son pontificat.

Il est donc difficile de penser que le pape Bergoglio ne se serait pas rendu compte de ce qu’il approuvait lorsque le décret lui a été présenté avant d’être publié.

Le décret met un commissaire apostolique – en la personne du capucin Fidenzio Volpi – à la tête de toutes les communautés de la congrégation des Frères Franciscains de l'Immaculée.

Ce qui constitue déjà un motif d’étonnement. Parce que, parmi les communautés religieuses nées dans l’Église catholique au cours des dernières décennies, les Franciscains de l'Immaculée sont l’une des plus florissantes. Ils comportent des branches masculines et féminines, les vocations y sont nombreuses et jeunes et ils sont implantés sur plusieurs continents, avec entre autres une mission en Argentine.

Ils se veulent fidèles à la tradition, dans le plein respect du magistère de l’Église. C’est si vrai que, dans leurs communautés, ils célèbrent la messe aussi bien selon le rite ancien que selon le rite moderne, comme le font d’ailleurs, partout dans le monde, des centaines d’autres communautés religieuses – comme les bénédictins de Nursie, pour ne citer qu’un seul exemple – appliquant ainsi l’esprit et la lettre du motu proprio "Summorum pontificum" de Benoît XVI.

Mais c’est précisément cela qui leur a été contesté par un noyau de dissidents internes. Ceux-ci ont fait appel aux autorités vaticanes pour se plaindre de la propension excessive de leur congrégation à célébrer la messe selon le rite ancien, ce qui aurait pour effet de créer des exclusions et des oppositions au sein des communautés, de miner l'unité interne et, pire encore, d’affaiblir le "sentire cum Ecclesia" le plus général.

Les autorités vaticanes ont réagi en envoyant, il y a un an, un visiteur apostolique. Et maintenant voici qu’un commissaire est nommé.

Mais ce sont les cinq dernières lignes du décret du 11 juillet qui suscitent le plus d’étonnement :

"En plus de ce qui est indiqué ci-dessus, le Saint Père François a décidé que tous les religieux de la congrégation des Frères Franciscains de l'Immaculée sont tenus de célébrer la liturgie selon le rite ordinaire et que, éventuellement, l'usage de la forme extraordinaire (Vetus Ordo) devra être explicitement autorisée [sic] par les autorités compétentes, pour tous les religieux et/ou communautés qui en feront la demande".

L’étonnement est dû au fait que ce qui est ainsi décrété contredit les dispositions prises par Benoît XVI. Celles-ci n’exigent, pour la célébration de la messe selon le rite ancien "sine populo", aucune demande préalable d’autorisation :

"Ad talem celebrationem secundum unum alterumve Missale, sacerdos nulla eget licentia, nec Sedis Apostolicæ nec Ordinarii sui" (1).

Et pour les messes "cum populo", elles fixent quelques conditions, mais toujours en assurant la liberté de célébrer.

En général, il est possible d’exercer, contre un décret pris par une congrégation du Vatican, un recours devant le tribunal suprême de la signature apostolique, aujourd’hui présidé par un cardinal qui est considéré comme un ami par les traditionalistes, l'Américain Raymond Leo Burke. 

Mais si le décret fait l’objet d’une approbation du pape sous une forme spécifique, comme cela semble être le cas dans cette affaire, le recours n’est pas admis.

Les Franciscains de l'Immaculée devront se conformer à l’interdiction de célébrer la messe selon le rite ancien à partir du dimanche 11 août.

Et alors que va-t-il se passer, non seulement chez eux mais dans toute l’Église ?

Benoît XVI était convaincu que "les deux formes d’utilisation du rite romain peuvent s’enrichir réciproquement". Il l’avait expliqué dans la lettre affligée qu’il avait adressée aux évêques du monde entier pour accompagner le motu proprio "Summorum pontificum" : "C’est avec beaucoup de confiance et d’espérance…"

Mais à partir de maintenant il n’en est plus ainsi, ou tout du moins pas pour tout le monde. Il ne restera aux Franciscains de l'Immaculée, contraints de célébrer la messe uniquement selon la forme moderne, qu’une seule façon de mettre à profit cet autre souhait de Benoît XVI : "manifester" aussi dans cette forme moderne, "plus fortement que ce n’est bien souvent le cas jusqu’à présent, cette sacralité qui fait que beaucoup de gens sont attirés par le rite ancien".

Il est de fait que l’un des fondements du pontificat de Joseph Ratzinger a été altéré. Par une exception dont beaucoup de gens craignent – ou souhaitent – qu’elle devienne rapidement la règle.
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(1) Fait curieux, six années après sa publication, le motu proprio "Summorum Pontificum" de Benoît XVI continue à n’être présent, sur le site du Saint-Siège, qu’en deux langues qui comptent parmi les moins connues : le latin et le hongrois.

[Ennemond - Forum Catholique] Roberto de Mattei sur l'affaire des Franciscains de l'Immaculée

SOURCE - Ennemond - Forum Catholique - 29 juillet 2913


Le Professeur Roberto de Mattei indique qu'il s'agit d'une « affaire d’une extrême gravité » qui risque de remettre en cause non seulement le Motu Proprio Summorum Pontificum mais aussi la commission Ecclesia Dei. Cette affaire repose sur une plainte d'une minorité de moines en dissidence. Il s'inquiète de l’état alarmant des sécurités juridiques au sein de l’Eglise face à l’arbitraire du plus fort en observant que c'est le même cardinal qui gère d’une poigne de fer les franciscains de l’Immaculée qui accepte par ailleurs de dialoguer avec complaisance avec les religieuses progressistes américaines.

Par ailleurs, l'agence CNA indique que l'une des raisons d'inquiétude réside dans le fait que les Franciscaines de l'Immaculée, la branche féminine, n'assistent qu' à la messe traditionnelle et que leur supérieure serait - le crime semble impardonnable - proche des milieux lefebvristes. Le point Godwin est atteint et la reductio ad lefebvrum explicite...

28 juillet 2013

[Abbé Iborra - Paroisse Saint-Eugène (Paris)] « Oui, il nous faut consentir à la rudesse de la croix pour pouvoir goûter à la douceur de Dieu»

SOURCE - Abbé Iborra - Paroisse Saint-Eugène (Paris) - 28 juillet 2013

Sermon prononcé par l’abbé Iborra en l’église Saint-Eugène le dimanche 28 juillet 2013, 17e dimanche du temps ordinaire (forme ordinaire de l’unique rit romain).
« Demandez, vous obtiendrez ; cherchez, vous trouverez ; frappez, la porte vous sera ouverte. Celui qui demande reçoit, celui qui cherche trouve ; et pour celui qui frappe, la porte s’ouvre. » Qui de nous ne s’est pas trouvé un jour désemparé devant ces paroles de Jésus ? Qui de nous n’a pas été un jour profondément déçu par ce Dieu censé aller au-devant de nos prières et qui pourtant ne les exauce pas. Je ne parle pas de ces prières qui sont autant de caprices d’enfant et dont on sourit ensuite d’avoir osé les formuler. Ni non plus de ces prières angoissées à un Dieu dont on ne se soucie habituellement guère sauf quand par imprévoyance ou pour tout autre raison on se trouve dans une situation humainement sans issue : Dieu fait alors figure d’ultime recours. Non, sans oublier la part de justesse qui habite ces prières, je pense à toutes celles qui épousent ce que nous savons de la volonté de Dieu telle qu’elle est révélée dans la Bible. Nous savons que Dieu aime la vie, qu’il est plein d’amour et tout-puissant. Alors pourquoi la mort, et des morts qui nous semblent particulièrement injustes ? Un garçon de 18 ans dont la mère, catéchiste, encore jeune, allait mourir le lendemain me disait en sanglotant : « Comment voulez-vous que je croie encore. Elle faisait le catéchisme, elle était engagée dans la paroisse. Où donc est Dieu ? Que fait-il ? » On peut bien trouver des réponses théologiques. Mais on ne peut pas ne pas entendre la vérité de cette réaction. Que dire aussi de toutes ces prières où nous supplions Dieu de nous rendre semblables à son Fils, de ces prières où nous demandons la délivrance de nos défauts, pour mieux correspondre à ce qu’il attend légitimement de nous. Là encore, nous risquons de nous entendre dire, comme à S. Paul qui se plaignait de « l’écharde plantée dans sa chair », « Ma grâce te suffit. Ma puissance se déploie dans la faiblesse ». Oui, combien de prières bonnes, justes, désintéressées même – comme lorsque nous prions pour la conversion de ceux que nous aimons – qui ne sont pas exaucées.

Alors à quoi bon la prière de demande ? Ne vaudrait-il pas mieux borner notre prière à la louange et à l’action de grâces ? Et puis quel sens cela a-t-il de demander quelque chose à Dieu ? La volonté humaine aurait-elle le pouvoir de faire pression sur la volonté divine, comme le laisserait croire l’intercession d’Abraham rapportée dans la première lecture ou l’histoire de ce voisin importun raconté par Jésus dans l’évangile d’aujourd’hui ? Un Dieu qui change d’avis est-il encore Dieu ? N’entre-t-il pas dans la définition de Dieu d’être immuable en ses desseins, et cela de toute éternité ? Et quelle image de Dieu risquons-nous de nous forger : celle d’un tyran qu’il faut fléchir, d’une puissance capricieuse qu’il faut parvenir à apprivoiser puis à manipuler en trouvant la formule adéquate, la clef du coffre-fort aux grâces divines ? La prière n’aurait-elle pas partie liée avec la magie ? Et ne relève-t-on pas bien des conduites superstitieuses chez les gens qui prient ? La prière ne serait-elle pas un acte magique de primitif qui ignore les lois rigoureuses de la nature ? Lorsque nous disons un peu vite que nous sommes exaucés, n’est-ce pas simplement parce que le cours des choses, l’enchaînement des causes, le dynamisme à l’œuvre dans la nature a produit un résultat qui correspondait à nos attentes ? Et puis s’enraciner dans la prière n’est-ce pas s’enfoncer dans l’aliénation, se rendre dépendant d’un plus puissant ? N’est-ce pas non plus démissionner, refuser de prendre à bras le corps les problèmes de l’existence, compter sur un hypothétique et arbitraire deus ex machina ?
*
Voici quelques unes des questions qui peuvent heurter notre esprit quand nous parlons de prière de demande. Nous aussi, nous aurions envie de dire, comme les disciples : « Compte tenu de tout cela, Seigneur, apprends-nous quand même à prier ? » Que nous répond Jésus ?

Il commence par nous établir dans une relation de confiance, de familiarité même. Dieu n’est pas une puissance impersonnelle, arbitraire et tyrannique mais un Père, son Père, et si nous le voulons bien, notre Père. Et un Père peut-il ne pas aller au-devant des désirs de ses enfants ? Dieu connaît les demandes de notre cœur avant même que nous les formulions nous dit ailleurs Jésus. Dieu n’est pas un tyran dont nous aurions à fléchir la volonté. Mais prions-nous avec assez de foi pour obtenir ce que lui veut nous donner ? Le problème de l’exaucement de la prière, c’est surtout le problème de la conversion de notre désir. Dieu veut en effet nous donner l’Esprit Saint, c’est-à-dire l’Esprit de son Fils. Mais est-ce que nous nous voulons vraiment le recevoir ? Il veut en effet nous rendre semblables à son Fils. Et la prière du Fils, ce n’est pas la prière d’un mendiant calculateur, comme celui de la Belle Porte au Temple, c’est la prière d’un homme libre et aimant. Ce sont de tels adorateurs que veut le Père. La prière de Jésus est la prière de quelqu’un qui aime et qui donc se soucie d’abord des désirs de celui à qui il s’adresse : « Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne ». En priant ainsi, nous nous décentrons de nous-mêmes, nous exprimons notre amour. Mais en même temps, notons bien que si Dieu désire que son nom soit sanctifié ou que son règne vienne, ce n’est pas d’abord pour lui, mais bien pour nous. Dieu n’a pas besoin de nous pour être heureux. C’est nous qui avons intérêt à ce que sa volonté se fasse sur la terre. Car c’est notre salut alors qui s’accomplit, ce sont les conditions de notre existence qui deviennent plus humaines. Car nous, nous avons besoin de Dieu pour exister de manière authentique. C’est ce que rappelle la demande : « Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour ». Nous ne sommes pas autonomes au point de pouvoir vivre fermés sur nous-mêmes : nous dépendons de la nature, des autres, et ultimement de Dieu qui à chaque instant nous donne l’exister, l’acte d’être. Le pain est le symbole de notre incomplétude.

Les deux dernières demandes rappellent que nous sommes non seulement des créatures, mais aussi des créatures fragiles, des pécheurs : nous demandons à Dieu qu’il nous pardonne nos fautes et nous lui demandons de ne pas entrer en tentation. Quelle est-elle cette tentation ? Celle de la foi, celle de la foi du Christ. Toute tentation se ramène à ce que Paul appelle « la parole de la croix ». Notre tentation c’est de vouloir entrer dans la gloire sans passer par la croix. Mais notre prière est celle du Christ qui a dit : « Non pas ma volonté mais ta volonté ». Toute prière qui cherche à évacuer la croix n’est plus une prière chrétienne mais une prière païenne. Que nous le voulions ou non, notre destin est intimement lié à celui du Christ : nous sommes les membres de son Corps. Nous avons à reproduire dans notre vie ce que lui-même a vécu. Or dans un monde marqué par le désordre du péché, c’est-à-dire par l’égocentrisme suicidaire, il n’y a pas d’autre antidote que le don de sa vie, paradoxale condition pour obtenir la vie, et la vie en abondance. Mais voilà, tout cela nous apparaît comme folie. C’est la folie de la croix, sagesse aux yeux de Dieu. Et c’est pourquoi il nous faut absolument prier pour obtenir l’Esprit Saint, l’Esprit de la sagesse de Dieu qui nous fait entrer dans son dessein de salut et nous fait ainsi comprendre que « la dette du péché est clouée à la croix », cette croix par laquelle la mort est engloutie dans la victoire. Oui, il nous faut consentir à la rudesse de la croix pour pouvoir goûter à la douceur de Dieu.

27 juillet 2013

[Abbé Christian Bouchacourt, fsspx] Sans la foi...


SOURCE - Abbé Christian Bouchacourt - Iesus Christus N° 142 - publication récente

Peu avant de s’élever au Ciel, Notre Seigneur confia une mission à ses apôtres: « allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit (…) Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné ».(1) Cet ultime commandement contient tout l’élan missionnaire de l’Eglise depuis sa fondation et trouve son écho dans ces paroles de saint Paul : « Sans la foi il est impossible de plaire à Dieu. Car celui qui s’approche de Dieu doit croire qu’il existe et qu’il se fait le rémunérateur de ceux qui le cherchent ».(2) C’est ainsi que depuis deux mille ans des hommes et des femmes quittent tout et partent jusqu’aux extrémités de la terre pour transmettre la foi tandis que d’autres, encore aujourd’hui, pour la défendre et y être fidèles versent leur sang avec le courage des martyrs.

Cette foi n’est pas un sentiment qui sommeille au tréfonds de l’âme et s’éveille avec la conscience, mais un don de Dieu, une des trois vertus théologales, qui « nait de la prédication ».(3) Au service de Dieu, le prédicateur par ses paroles, en effet, prédispose les intelligences et les volontés au don de la foi. Où puise t-il la matière de son enseignement ? Dans l’Ecriture Sainte et dans le Magistère de l’Eglise. A ceux qui prêchent la sainte doctrine dans son intégrité, Notre Seigneur promet d’accorder des grâces spéciales pour toucher les cœurs.

Cette vertu de foi est le trésor le plus précieux que nous ayons reçu. Il nous faut la conserver, la développer, la manifester, la protéger, en vivre et la transmettre comme l’ont fait ceux qui nous ont précédés. D’elle, nous aurons à rendre compte lorsque nous paraîtrons devant le tribunal divin à l’heure de notre mort. De sa qualité et des œuvres qui en découlent dépendent notre union à Dieu ici-bas et notre éternité future. Relisons le court dialogue qui se noua entre le prêtre et nos parrains et marraines le jour de notre baptême : « Que désirez-vous ? » « La foi » « Que vous procure la foi ? » « La vie éternelle ». L’enjeu est donc capital ! Aussi, pour préserver ou défendre cette foi reçue, nous devons être prêts à tous les sacrifices, même à celui de notre vie si les circonstances l’exigeaient.

La foi c’est aussi un tout. On ne peut faire un choix entre les vérités qui la constituent, retenant celles qui nous plaisent et en refusant celles qui ne nous conviennent pas ou nous dérangent. Celui qui fait une telle sélection perd la foi catholique, comme le dit clairement saint Thomas d’Aquin, car il adhère à sa propre volonté (4) et non à Dieu. Il est dans l’erreur et s’il persévère avec opiniâtreté dans celle-ci, il se met hors de l’Eglise mettant en péril, par le fait même, son salut éternel. C’est ce choix orgueilleux que firent par exemple des hérésiarques comme Luther et Calvin.

Cette foi ne procède pas de la science mais de la Révélation ; elle n’est pas une question de philosophie, mais une doctrine de l’Evangile. Elle n’est nullement un code de morale mais une invitation à suivre une personne : Jésus-Christ, qui nous demande de mettre en pratique son enseignement et d’utiliser les moyens qu’il a institués, c'est-à-dire les sacrements, la prière et la pratique de la vertu pour nourrir et fortifier nos âmes. De cette foi découlera un agir ; « Justus ex fide vivit »(5) Le juste vit de sa foi. « Si elle n’a pas les œuvres elle est tout à fait morte ».(6) Elle doit donc imprégner les paroles, les actions et la vie du fidèle. Cette foi vécue a donné le jour à une civilisation : la Chrétienté, réalisation visible du Règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ dans la société. Elle a ressuscité l’homme déchu et diffusé le sang du Christ dans tous les recoins de la société.

Les adversaires de l’Eglise n’ont cessé d’attaquer ce magnifique édifice social et religieux tout au long de l’histoire. Cette lutte a atteint son apogée avec la Révolution française, au XVIIIe siècle, puis avec le communisme et le laïcisme qui en sont les fruits amers. L’Eglise résista vaillamment, engendrant en son sein des générations de saints admirables attestant ces mots fameux de Tertullien, « le sang des martyrs est semence de chrétiens ». La foi continua de se répandre envers et contre tous.

Alors est arrivé le concile Vatican II. Les hommes d’Eglise se sont mis à douter. Le modernisme dénoncé par Saint Pie X redressa la tête de manière insolente. Les condamnés d’hier, les Pères Congar, Rahner, Teilhard de Chardin, de Lubac, devinrent les maîtres à penser. La fidélité à Dieu passa au second plan afin de privilégier une réconciliation avec le Monde. Pour y parvenir, il fallait en terminer avec les condamnations et préparer un arrangement avec lui. Une naïveté mortifère guida cette nouvelle ère. L’humanité serait arrivée à suffisamment de maturité pour parvenir à ne plus se laisser tromper. Jean XXIII exprima cette utopie gravissime de conséquences lors du discours inaugural qu’il prononça à l’ouverture du concile : « Certes il ne manque pas de doctrines et d’opinions fausses, de dangers dont il faut se mettre en garde et que l’on doit écarter, mais tout cela est si manifestement opposé aux principes d’honnêteté et porte des fruits si amers, qu’aujourd’hui les hommes semblent les condamner d’eux-mêmes… » (7)

Un pacifisme mortifère s’instaura alors dans l’Eglise. Il ne fallait plus chercher à convertir l’autre mais à le comprendre. On supprima toutes les aspérités qui pouvaient empêcher ce compromis tant désiré avec ceux qui ne partageaient pas notre foi. L’unité du genre humain fut privilégiée à l’intégrité de la foi, à sa défense et à sa transmission. A dessein, la formation dans les séminaires fut modifiée de fond en comble, ainsi que la liturgie, le catéchisme, les sacrements, le droit canonique, les concordats avec les états, etc…Si aucun dogme de la foi n’est explicitement nié dans les textes du concile, un grand nombre sont remis en cause en raison de l’esprit relativiste, naturaliste et moderniste qui les imprègne. De plus les affirmations conciliaires sur la liberté religieuse, l’œcuménisme et la collégialité s’opposent de façon notoire à l’enseignement traditionnel des Papes. Les conséquences de ce brigandage de la foi sont dramatiques comme en témoigne un récent sondage fait en France, révélant par exemple que seulement 10% des catholiques croient en la résurrection des morts à la fin des temps, 42% nient la résurrection du Christ, 63% disent ne pas croire en la Sainte Trinité, 67% ne croient pas en l’existence du diable. Moins de la moitié des catholiques croient en la Présence Réelle et un nombre infime en l’existence du purgatoire et de l’enfer !

La foi, comme jamais, est en péril ! C’est pour tenter de la sauver, que Mgr Lefebvre fonda la Fraternité Saint Pie X. dans le seul but de transmettre la foi de toujours, celle qui a formé des générations de saints. Ainsi le combat de la foi était sauvé et pouvait continuer. Mais sans prêtres, il était perdu d’avance. Aussi ouvrit-il des séminaires puis des prieurés et des écoles sur tous les continents. Ne « voulant pas laisser les fidèles de la Tradition et ses séminaristes orphelins », ne voyant aucun évêque disposé à prendre sa relève, il sacra 4 évêques. Ce fut « l’opération survie » selon ses propres mots devenus célèbres, prononcés le jour des consécrations épiscopales, le 30 juin 1988, il y a 25 ans.

Vous-mêmes, chers fidèles, vous avez quitté vos paroisses pour recevoir et garder la foi de toujours. Vous, chers parents, faites des sacrifices édifiants pour mettre vos enfants dans des écoles afin qu’ils reçoivent un enseignement catholique. Vous participez à ce combat. Cette fidélité est difficile. Elle exige des renoncements sociaux, matériels, familiaux parfois héroïques. Combien de familles se sont divisées, combien d’amitiés se sont rompues pour garder la foi de nos pères, celle des martyrs et des saints qui nous ont précédés. Le Christ l’avait annoncé : « Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre mais le glaive. Car je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère ; on aura pour ennemi les gens de sa famille ».(8) Dieu récompense et bénit déjà tous ces sacrifices douloureux mais consentis et offerts par amour envers Notre Seigneur et son Eglise. Les vocations continuent d’affluer dans nos séminaires, de nouvelles écoles et prieurés sont fondés, des foyers exemplaires s’unissent devant Dieu. Nous trouvons là de vrais motifs d’espérance et de consolation.

Certes, comme dans tout combat, il y a des blessés et des morts à déplorer. Des divisions et des abandons entre nous se sont manifestés. Ne nous en scandalisons pas : le Christ lui-même en a souffert durant sa Passion ainsi que les apôtres et les premiers chrétiens aux temps de la persécution. Saint Paul en parle souvent et s’en plaint dans ses écrits. Relisons ses lettres, nous en tirerons profit. Prions pour ceux qui ont pris une autre voie que la nôtre et continuons notre route en suppliant Dieu de nous accorder la grâce de la fidélité. Pour l’amour du Ciel n’entrons pas dans des polémiques stériles qui nous font perdre notre temps et nous détournent de l’essentiel. Dieu, à notre dernier jour, nous demandera des comptes de notre âme et de celles qui nous ont été confiées. Nous serons jugés sur notre fidélité et non sur celle des autres.

Cette fidélité, soyons-en bien convaincus, est une grâce de Dieu. Elle se mérite par la prière, la pénitence, une vie sainte et une bonne formation mais non par des incantations et des déclarations de matamore. Rappelons-nous les grandes promesses de saint Pierre de ne pas abandonner le Christ avant sa Passion ! Relisons ces conseils que Mgr Lefebvre donnait à ses séminaristes : « Notre combat est surnaturel, contre les puissances spirituelles du démon et des anges mauvais, un combat de géants ; pas un combat de discussions, de joutes intellectuelles. Vous entrez dans l'histoire de l'Eglise en entrant au séminaire, mais vous menez un combat qui n'est pas sur le plan naturel, ou alors vous êtes complètement hors de la vérité. Notre combat est sur le plan de la grâce divine. Préparez-vous philosophiquement, mais la grâce qui convaincra les âmes, vous ne l'obtiendrez que par la prière, le sacrifice, la mortification, la sainteté vécue . »(9)

Rendons grâce à Dieu pour l’acte héroïque que Mgr Lefebvre a posé il y a 25 ans. Grâce à lui nous avons des prêtres, des prieurés, des écoles. Les fruits de la Messe peuvent continuer à se répandre. Mais ne nous endormons pas ! Cet héritage est le fruit de sacrifices immenses. Il faut non seulement le conserver et le défendre mais aussi le faire prospérer et le transmettre à ceux qui nous suivront. Menons ce combat pour l’amour de Dieu et de l’Eglise. Les épreuves venues de l’intérieur de la FSSPX comme de l’extérieur, ont été nombreuses hier et continueront demain. Elles sont le lot du chrétien ! Soyons persuadés que tout cela n’est pas inutile

Gardons bien allumée dans nos âmes la lumière de la foi. Remercions chaque jour Dieu de nous l’avoir donnée et soyons-en dignes et fiers. « Tout est possible à celui qui croit » (10) disait Notre Seigneur. Il est notre force, notre espérance et notre soutien. Ces paroles de Judas Maccabée gardent aujourd’hui toutes leurs forces : « il arrive facilement qu’une multitude tombe aux mains d’un petit nombre et il est indifférent au Ciel d’opérer le salut au moyen de beaucoup ou de peu d’hommes, car la victoire à la guerre ne tient pas à l’importance de la troupe : c’est du Ciel que vient la force ».(11) Accompagnée de celle qui fut un modèle admirable de fidélité, « forte comme une armée rangée en bataille » (12) la Très Sainte Vierge Marie, tout devient possible.

Courage donc et que Dieu vous bénisse !

Padre Christian Bouchacourt
Superior de Distrito América del Sur
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(1) Mat, XXVIII, 19 & Mc XVI, 16.
(2) Hebreux, XI, 6.
(3) Romain X, 17.
(4) “Somme théologique”, IIa IIæ, Question 5, article 3.
(5) I Co VIII, 1.
(6) Saint Jacques, II, 17.
(7) Jean XXIII: Discours inaugural du concile Vatican II, le 11 octobre 1962.
(8) Evangile selon Saint Mathieu, X, 34-36.
(9) Mgr Lefebvre: Conférence spirituelle, du 9 janvier 1978.
(10) Evangile selon saint Marc, VIII, 23.
(11) 1er livre des Maccabées, III, 18-19.
(12) Cantique des Cantiques, VI, 9

[Mgr Williamson] Le mal perdure - I

SOURCE - Mgr Williamson - 27 juillet 2013

Pour défendre la Déclaration Doctrinale (DD) très mauvaise qu’a soumise officiellement la Fraternité St Pie X aux autorités romaines au mois d’avril l’année dernière comme base d’un accord pratique entre Rome et la Fraternité, on dira souvent que la DD, une fois refusée par Rome, n’a plus aucun intérêt et mérite d’être oubliée. Mais dans le dernier numéro du Recusant, revue de la « Résistance » récemment parue en Angleterre, on lit un argument contraire qui mérite une sérieuse considération. Le voici, en citations directes, ou résumé :--
 
« La DD, comme le manifestent et son nom et son contenu, est la proclamation que certaines positions doctrinales portant sur des questions de toute première importance dans la crise actuelle de l’Église, sont acceptables pour la Fraternité. Le problème c’est que plusieurs des positions prises dans la DD ne sont pas acceptables. » Par exemple devant le Chapitre Général de la Fraternité tenu il y a un an, un théologien éminent de la Fraternité a conclu, « Cette Déclaration est donc profondément ambiguë et pèche par omission contre la dénonciation claire et nette des erreurs principales qui sévissent encore à l’intérieur de l’Église et détruisent la foi des fidèles. Cette Déclaration telle qu’elle se présente laisse supposer que nous accepterions le présupposé de ‘l’herméneutique de la continuité’. »
 
« Donc le mal résultant de la DD est celui d’une prise de position publique qui est douteuse du point de vue doctrinal. » Et en tant que telle, elle n’a été ni « retirée » ni « renoncée ». De fait, Mgr. Fellay refuse systématiquement d’admettre que sa Déclaration soit d’aucune façon douteuse. Tout au plus reconnaît-il qu’il a essayé d’être « trop subtil », mais il n’admet pas qu’une telle subtilité soit tout à fait déplacée lorsqu’il s’agit de défendre la Foi. Mgr. Fellay se plaint que l’unique problème c’est qu’il « n’a pas été correctement compris », même par des membres de la Fraternité hautement compétents en théologie. Entre autres il permet à l’abbé Themann aux USA de défendre la DD dans des conférences publiques, enregistrées et distribuées aux fidèles. »
 
Certes, le mal aurait pu être bien pire si Rome avait accepté la DD, mais cela ne diminue pas les ravages qui résultent de sa manifestation de ce qui est doctrinalement acceptable pour la Fraternité. Si en effet Mgr. Fellay dit qu’il « retire » ou « renonce à » la DD, il est fort probable qu’il veut dire par là pas plus qu’elle était inopportune à ce moment-là, parce qu’elle pouvait causer des divisions à l’intérieur de la Fraternité. « Jamais il n’a même insinué que la DD soit doctrinalement douteuse ou inacceptable. Pourtant ci-gît le vrai problème dès le début, et ce problème-ci est loin d’être résolu : le Supérieur Général donne l’impression de se refuser à faire une profession sans ambiguïté de la position de la Fraternité. » 
 
En conclusion, le scandale causé par la DD n’a toujours pas été réparé. « Et essayer de minimiser l’importance de l’affaire pour maintenir ou restaurer la paix et l’unité parmi les fidèles risque de les faire penser que la doctrine n’est pas si importante que cela, pourvu que l’on puisse continuer tranquillement comme on est, avec la vraie Messe, etc.. » Minimiser ainsi l’affaire ne fera qu’aggraver le scandale. (Fin de l’article du Recusant).
 
Cet article expose de façon bien modérée le problème posé par cette DD, ni rétractée ni désavouée par Mgr Fellay. Car comment une Congrégation catholique peut-elle conserver et servir la Vérité lorsqu’elle est menée par un Supérieur qui se joue si obstinément de la Vérité ? Si la Fraternité représente un canot de sauvetage, ou bien elle se débarrasse de ce Capitaine illusionné qui cherche sans cesse à percer des trous dans le fond du canot, ou bien la Fraternité d’un canot de sauvetage devient un canot de noyade. Que le Bon Dieu dans sa miséricorde ouvre les yeux à la Fraternité.
 
Kyrie eleison.

[Mgr Tissier de Mallerais - Le Sel de la Terre] Y a-t-il une Eglise conciliaire?

SOURCE - Mgr Tissier de Mallerais - Le Sel de la Terre - via Gentiloup - Eté 2013

"Dans un article de 16 pages Mgr Tissier de Mallerais répond à la question: Y a-t-il une Eglise conciliaire? Il termine cette étude par une très vigoureuse profession de foi en l'Eglise catholique par opposition à l'Eglise conciliaire. Ce sont donc les deux dernières pages et demie de cet article que je copie pour leur très plaisante vigueur. [...] Toutes les notes concernant ce texte n'ont pas été reprises, je n'ai répercuté que celles qui me semblaient les plus significatives. Pour avoir cette analyse en entier avec toutes ses notes, se reporter au Sel de la Terre N° 85 - Eté 2013, qui vient de paraître. GL"

[...]
Les méthodes par lesquelles subsiste l'Eglise conciliaire
Vouée à l'autodémolition, l'Eglise conciliaire n'en subsiste pas moins vigoureusement. En quoi consiste ta ténacité? En ce que sa hiérarchie use de tout le pouvoir de la hiérarchie catholique qu'elle occupe, détient et dévoie.

Depuis l'instauration de la messe de Paul VI, elle a continuellement persécuté les prêtres fidèles à la vraie messe, au vrai catéchisme, à la vraie discipline sacramentelle, et les religieux fidèles à leur règle et à leurs vœux. Nombreux sont les prêtres qui sont morts de chagrin de devoir, par obéissance, croyaient-ils, adopter les nouveaux rites et usages. Nombreux aussi sont ceux qui sont morts dans l'ostracisme, la relégation canonique et psychologique, mais heureux de porter un témoignage inflexible au rite catholique, à la foi intègre, au Christ-Roi. Les menaces, la crainte, les censures et autres punitions ne les ont pas ébranlés. Mais hélas, combien sont ceux qui ont cédé à ces méthodes de violence, au chantage de la "désobéissance" et de la destitution exercé sur eux par leurs supérieurs. C'est là qu'on touche du doigt la malice libérale de ces chefs: ne dit-on pas à raison qu'il n'y a pas plus sectaire qu'un libéral? N'ayant pas de principes pour faire régner l'ordre, ils font régner un régime de soumission par la terreur.

La malice de la hiérarchie conciliaire est achevée par l'usage qu'elle fait du mensonge et de l'équivoque. Ainsi le motu proprio du pape Benoît XVI déclarant que la messe traditionnelle n'a jamais été supprimée et que sa célébration est libre, assortit cette liberté de conditions contraires à cette dernière, et va jusqu'à qualifier la messe authentique et sa contrefaçon moderniste de "forme extraordinaire et ordinaire du même rite romain"..

Le mensonge se poursuit dans la soi-disant "levée" des excommunications, soi-disant encourue par les quatre évêques consacrés par S.E. Mgr Lefebvre en 1988, comme si elles avaient été réellement encourues.

Mais par un surprenant contraste, la hiérarchie conciliaire n'a jamais été capable de faire respecter le cinquième commandement de Dieu, "tu ne tueras pas", qui ne fut guère prêché par les évêques: les pays naguère catholiques sont ceux où l'avortement est le plus en cours; et l'encyclique Humanae vitae du pape Paul VI n'a guère été relayée par les évêques, si bien que la pilule anti-conceptionnelle est d'usage courant chez la plupart des jeunes-filles et des femmes dans l'Eglise catholique. Les meurs immonde du monde actuel ne sont que le débordement du vice auquel la hiérarchie conciliaire n'a su opposer aucun obstacle. Cette Eglise conciliaire attire dans sa pseudo-communion une masse de chrétiens vivant en réalité dans le péché et le paganisme pratique.
Ne pas appartenir à l'Eglise conciliaire est une grâce et un témoignage providentiel
Bienheureux ceux qui ne sont pas de cette "communion des profanes", qui en sont providentiellement exclus ou sont menacés d'en être exclus! Heureuse relégation ou déréliction! La vocation de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, depuis son érection par l'Eglise catholique en 1970 et le décret de louange qui l'a honorée en 1971, n'a jamais été de recevoir les bénédictions et reconnaissances de cette Eglise conciliaire! Il était sans doute nécessaire que cette société sacerdotale, avec toute la famille de la Tradition, fût comme le flambeau allumé et qu'on ne met pas sous le boisseau conciliaire, mais sur le chandelier du pilori, afin qu'elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison de Dieu. Il était probablement préférable, selon les voies de la Providence, que cette partie saine de l'Eglise, devenue, comme le divin Maître, pierre de scandale, pierre rejetée par les bâtisseurs de la dissociété ecclésiale conciliaire, devienne la pierre angulaire et la clef de voûte de la cathédrale catholique indestructible. Notre témoignage inflexible envers la vraie Eglise de Jésus-Christ, envers le sacerdoce et la royauté du Christ prêtre et roi exige sans doute, de la part de l'Eglise conciliaire, l'exclusion et l'ostracisme prononcés contre nous et ce que nous représentons. Mais de même que Saint-Joseph dans son exil d'Egypte portait l'Enfant-Jésus et sa divine Mère, qui constituaient le germe de l'Eglise, de même, dans son exil, la famille de la Tradition porte l'Eglise en elle, sans avoir sans doute l'exclusive de cette glorieuse fonction, mais en ayant la moelle et le cœur, l'intégrité et l'incorruption. Elle porte par conséquent en elle le pontife romain, en qui le successeur de Pierre se libérera un jour d'une longue captivité (A) et sortira du somme de ses grandes illusions, pour proclamer comme jadis le premier pape à Césarée de Philippe à l'adresse de son Maître: "Tu es Christus, Filius Dei vivi!"

Dés lors, si nous sommes compliqués, nous regretterons d'être privés de la communion conciliaire ou de son apparence de communion ecclésiale et nous serons malheureux et inquiets, sans cesse en quête d'une solution. Si en revanche nous avons une foi et une simplicité d'enfant, nous chercherons simplement quel témoignage rendre à la foi catholique. Et nous trouverons: c'est d'abord le témoignage de notre existence, de notre permanence, de notre stabilité, avec celui de notre profession de foi catholique intégrale et de notre refus des erreurs et des réformes conciliaires. Un témoignage est absolu. Si je rends témoignage à la messe catholique, au Christ-Roi, il faut que je m'abstienne des messes et des doctrines conciliaires. C'est comme le grain d'encens aux idoles: c'est un seul grain ou pas du tout. Donc "c'est pas du tout". Et puis ce témoignage c'est aussi la persécution, c'est normal de la part des ennemis de cette foi, qui veulent réduire notre opposition radicale à la nouvelle religion, et aussi longtemps qu'il plaira à Dieu qu'ils persévèrent dans leurs desseins pervers. N'est-ce pas Dieu lui-même qui pose cette inimitié entre l'engeance du diable et les fils de Marie? Inimicitias ponam! (B)

Alors, dés que, dans le recueillement de l'oraison, on a perçu cette vocation propre qui est la nôtre, adaptée par Dieu à la crise actuelle, on y acquiesce en parfaite droiture et grande paix: droiture incapable d'avoir une quelconque complicité avec l'ennemi, paix sans amertume. On y court, on y bondit et on dit comme Sainte-Thérése de l'Enfant-Jésus: "Dans l'Eglise ma Mère, j'ai trouvé ma vocation!"Et on demande à la sainte magnanime: "Obtenez-moi la grâce d'avoir dans l'Eglise et pour l'Eglise une âme de martyr ou au moins de confesseur de la foi!"

Mgr Tissier de Mallerais
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(A) "Et voici qu'un ange du Seigneur apparut, et une lumière brilla dans l'appartement; et l'ange, touchant Pierre au côté, l'éveilla, en disant: lève-toi vite (Surge velociter). Et les chaînes tombèrent de ses mains Ac 12,7
(B) "Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta race et la sienne. Elle te brisera la tête et tu tâcheras de la mordre par le talon." gen 3,15

26 juillet 2013

[Credidimus Caritati] Comment comprendre les paroles de Mgr Lefebvre ? L’archevêque répond lui-même

SOURCE - Credidimus Caritati - 26 juillet 2013

Les citations du fondateur de la Fraternité semblent fuser ici ou là sous l’effet de réactions affectives : l’inquiétude ou la passion. On brandit l’une pour justifier l’idéologie du moment, on saisit là une autre pour asseoir une thèse a posteriori. Que penserait-il lui-même de ceux qui s’emparent de ses propos ? Que dirait-il à ceux qui amassent citation sur citation pour tirer des conclusions qui s’apparentent à des équations mathématiques ? A défaut de pouvoir parler à la place du défunt fondateur de la Fraternité, nous empruntons ses propres mots. De son vivant, il fut confronté à ceux qui utilisaient ses écrits, voulaient y déceler des contradictions ou encore des opportunités pour tirer des conclusions théologiques hâtives et, par conséquent, désordonnées :
« Je ne dis pas que dans les paroles, on ne peut tirer une phrase et puis l’opposer à une autre, la tirer du contexte et, ainsi de suite, me faire dire des choses qui ne sont pas dans mon esprit. J’ai pu quelquefois dire des phrases assez fortes, par exemple que le Concile était plus ou moins schismatique. Dans un certain sens c’est vrai parce qu’il y a une certaine rupture avec la Tradition. Donc dans le sens selon lequel le Concile est en rupture avec la Tradition, on peut dire, dans une certaine mesure, qu’il est schismatique. Mais quand j’ai dit cela, ce n’était pas pour dire que le Concile est vraiment, profondément schismatique, définitivement. Il faut comprendre avec tout ce que je dis. Le Concile est schismatique dans la mesure où il rompt avec le passé, ça c’est vrai. Mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il soit schismatique au sens précis, théologique du mot.

« Alors quand on prend les termes comme ça, on peut dire : « Voilà ! Si le Concile est schismatique, le pape ayant signé le Concile est schismatique et tous les évêques qui ont signé le Concile sont schismatiques, donc on n’a plus le droit d’être avec eux. » Ce sont des raisonnements faux. C’est de la folie, ça n’a pas de sens !

« C’est pour ça que je fais paraître dans Cor Unum cet article sur la foi. Je ne sais pas si vous avez lu le commentaire de la vertu de foi par le Père Bernard, commentaire de l’article de saint Thomas d’Aquin. Il prend l’esprit de saint Thomas d’Aquin, où il montre justement l’infidélité chez les fidèles, où il montre que parmi ces fidèles il y a le péril de la foi, qu’il y a beaucoup de fidèles dont on dirait : « Oh ! il n’a plus la foi, c’est un païen, c’est un athée ». Si on veut, dans une certaine mesure, parce que ce sont des gens qui ne pratiquent plus, des gens qui n’éduquent pas chrétiennement leurs enfants, des gens qui ont des raisonnements païens, du monde, matérialistes, tout ce qu’on voudra. Alors on dit : « Ils n’ont plus la foi ! » Est-ce qu’on peut dire vraiment qu’ils n’ont plus la vertu de foi ? C’est autre chose ne plus avoir l’esprit de foi, ne plus pratiquer sa foi, et ne plus avoir la foi, ce sont des formules différentes. C’est dangereux d’appliquer tout de suite ces choses-là, parce que par le baptême ils gardent la vertu de foi. Ils ont la vertu de foi, mais ils ne la mettent pas en exercice, ils ne la pratiquent pas. Ça c’est autre chose. »
(Mgr Marcel Lefebvre, retraite sacerdotale, 1980)

25 juillet 2013

[Disputationes Theologicae] En avant, avec patience et détermination - Les développements de l’affaire de l’Institut du Bon Pasteur

SOURCE - Disputationes Theologicae - 25 juillet 2013

Comme cela a été annoncé et promis, Disputationes Theologicae continue, en restant, comme il se doit, fidèle à la ligne de la franchise ecclésiale et de la critique constructive, à informer sur les développements de l’affaire de l’IBP. Et cela sans agir d’une façon précipitée – comme cela est évident à tout observateur attentif – mais toutefois en tentant de persévérer dans cet amour de la vérité, bien que difficile, qui nous a poussé à parler (et cela aussi avec une visibilité appropriée) à propos d’autres sujets. De sorte que, après avoir prudemment suivi « l’échelle » évangélique, nous publions aussi les actes récemment établis, qui – nous l’estimons – parlent d’eux-mêmes.

Nous ne perdons pas non plus de vue – contrairement à la si fréquente démagogie – que les pressions sont un aspect très important, mais que ce n’est pas le seul : le facteur principal est comment nous nous rapportons à celles-ci, libre arbitre après libre arbitre. C’est en effet la présence fréquente de ce second facteur, le facteur intérieur, ce qui laisse le champ au premier. Observons l’histoire récente (qui – hélas, est si rarementmagistra vitae…), par exemple l’histoire ecclésiastique : si les hommes d’Église “de bonne doctrine” avaient amplement préféré le bien de la cause au bien personnel (ou au mirage de celui-ci …), si au moins les “bons ” avaient été disponibles pour s’exposer personnellement sans trop de calculs opportunistes – d’une fausse prudence uniquement humaine – et cela de façon stable, la crise moderniste n’aurait-elle pas pu nuire beaucoup moins ? Peut-être le Seigneur nous aurait-il même épargné totalement ce châtiment. D’autre part, ces épreuves ont le grand mérite de dévoiler les cœurs et de les passer au crible un par un.

Voilà donc les actes qui ont été établis au cours de ces derniers mois. Et cela en observant, sans anxiété, les signes de la Providence et pendant que pratiquement toutes les activités ordinaires, les joies assouvissantes du sacerdoce et du Séminaire, continuaient comme toujours. Nous nous en remettons à cette Providence par l’intercession de la Vierge Marie, sans hâte, pour le futur aussi. Fiat voluntas Tua. 

Pour la version originale en langue italien ne des documents voir ici.

1 - Préavis de recours au Tribunal Suprême de la Signature Apostolique envoyé au Révérendissime Dom Antoine Forgeot le 29 mai 2013
Au Révérendissime Père Abbé
Dom Antoine Forgeot en tant qu’exécuteur de la Commission Ecclesia Dei
p. c. À la Révérendissime Commission Ecclesia Dei 
Objet : préavis de recours 
Courtalain, le 29 mai 2013 
Révérendissime Père Abbé, 
après avoir présenté le texte annexé ci-après, et vu que j’ai reçu en réponse des phrases au ton menaçant, mais sans présentation d’arguments aux problèmes que j’ai avancés, et vu que je n’ai pas reçu l’envoi des documents de nature publique que j’ai demandés, y compris le ou les décrets du 18 juillet et/ou du 19 juillet (les dates et les objets qui m’ont été fournis ne coïncident pas) et le rapport du canoniste qui représente la Commission au Chapitre, le Rév. Père Poquet de Haut-Jussé (dont le nom a été, au dire de l’abbé Laguérie, établi discrètement avec Mgr Guido Pozzo); 
après que je vous ai confidentiellement envoyé, à vous, Révérendissime Père Abbé, un texte avec quelques questions qui m’a été renvoyé, et après avoir expédié de nouveau le même texte, sans que je n’aie encore eu une réponse à mes questions; 
par la présente, je communique que, dans les prochains jours, vu l’état des choses, je vais désormais me voir contraint – à mon grand regret – à intenter un recours canonique exercé selon le Droit de l’Église Romaine. 
En effet, si, suite à la réponse écrite de la Révérendissime Commission du 29 mai dernier, je reste sans aucune suite bienveillante, je vais devoir conclure que les termes de la supplicatio pourront être considérés désormais échus. Du fait que les réponses aux questions que j’ai formulées sur les motivations canoniques de l’annulation de l’élection de l’abbé Roch Perrel et du Conseil Général de l’IBP (dont la nullité reste sans être prouvée) – Conseil qui comprend le soussigné, qui, entre autre, résulte donc partie lésée –, ainsi que sur les raisons juridiques sous-jacentes à l’introduction de la confirmation des élus de la part de la Commission (un élément nouveau qui introduit subrepticement une norme non prévue par le Droit canonique ni par nos Statuts), ne me sont pas parvenues, je vais être obligé d’agir ad normam iuris, bien que j’aie, jusqu’à aujourd’hui, préféré et tenté des voies plus discrètes, tant que compatibles avec la charité fraternelle dans la vérité. Charitas in veritate. 
Accessoirement à ce qui est exprimé ci-dessus, je me vois aussi obligé de présenter un recours concernant le remaniement du corps électoral capitulaire, qui, outre le fait que ce remaniement est contraire au Droit et à nos Statuts, semble aussi être contraire à la justice naturelle la plus élémentaire (les résultats en seraient objectivement altérés et pourraient sembler “orientés”).  
Je n’ai pas l’intention de décrire ici la pratique singulière de convocation à laquelle nous avons assisté jusqu’à aujourd’hui, qui me semble tout au moins juridiquement discutable, si ce n’est catégoriquement ‘a-juridique’. 
Je précise en outre, pour exprimer filialement ce que j’ai sur le cœur et le présenter à votre évaluation paternelle, qu’une telle procédure me paraît imprudente en ce qui concerne la continuation sereine de l’activité de l’Institut (qui – objectivement et abstraction faite des intentions personnelles – reste l’objectif primaire de toute intervention) et pourrait paraître inconvenante au bien d’une société déjà si tourmentée par les pressions réitérées dans le but d’en altérer l’identité, une identité reconnue par les Statuts voulus par le Souverain Pontife Benoît XVI. 
Il va de soi – évidemment – qu’un recours à la Prima Sedes est par essence un acte public, qu’il ne serait par conséquent pas inconvenant d’annoncer publiquement ; toutefois, je désire ardemment que les voies interlocutoires puissent être activées dans un délai convenable qui précède le 4 juin, date jusqu’à laquelle je continuerai d’espérer. 
Qu’il me soit permis de rappeler que des interventions semblables ont objectivement engendré, abstraction faite des intentions des auteurs, des ruptures et des durcissements douloureux, qui résultent être les pires ennemis du terrain d’un saint esprit de communion. Avec la tristesse que j’éprouve en constatant que l’histoire du “monde traditionaliste” semble n’avoir rien enseigné – tant dans le cas de Mons. Lefebvre, où la rupture aurait pu être évitée à temps, que dans le cas de la Fraternité Saint Pierre en l’An Saint 2000, où la lourde « mise sous Commissaire » et les manigances et pressions (dont des prêtres de cette Fraternité nous ont confié le conditionnement douloureux) ont renforcé le climat de défiance qui a suivi dans des secteurs variés de ce monde – je garde l’espoir que l’on ne s’obstinera pas à suivre une ligne qui suit plutôt la politique de la terre brûlée plutôt que celle de la paix et de l’union, dans la vérité et dans la charité, où nous mène cette agréable fête du Très Saint Sacrement. 
En toute franchise évangélique et dans la prière à Marie Reine.  
Don Stefano Carusi
Le texte antérieur mentionné ci-dessus, de nouveau envoyé, était le suivant:
Suit l’annexe: 
ANNEXE 
Instance à la Commission Pontificale Ecclesia Dei 
À Son Excellence Révérendissime Mgr Gerhard L. Müller
A Son Excellence Révérendissime Mgr J. Augustine Di Noia
p.c. au Révérendissime Père Abbé Dom Antoine Forgeot 
Courtalain, le 8 mai 2013,
Apparition de Saint Michel Archange
et Supplication à Notre-Dame du Rosaire 
Excellences Révérendissimes, 
le 4 mai 2013, j’ai été mis au courant de la lettre aux membres de l’Institut du Bon Pasteur, que Vos Excellences ont voulu nous faire parvenir moyennant l’expédition du Révérendissime Dom Forgeot, qui est partie de Fontgombault le 1 mai 2013. 
J’ai lu à cœur ouvert les exhortations à la paix et à la réconciliation ; et je me réjouis d’avoir été en syntonie avec celles-ci, dans l’amour à la vérité et à la justice, dans mes tentatives suivantes : juillet 2012, septembre 2012, avril 2013. Malheureusement, comme la Révérendissime Commission nous l’écrit elle aussi, à mon grand regret, il n’a pas été possible d’arriver à une résolution raisonnable de la situation concrète. Une situation dans laquelle – sans animosité pour la personne, mais aussi sans aveuglement face aux faits – l’abbé Laguérie a publié, après avoir fait parvenir un bulletin électoral ad hoc, après avoir abandonné le Chapitre en plein déroulement, après avoir signé un document de renonciation à ses titres peu avant cet abandon, comme si de rien n’était des écrits de signe contraire, par Internet, déjà dès juillet 2012! 
Par cette supplicatio, je présente, après avoir demandé conseil auprès de la Révérendissime Curie Romaine, quelques instances, à cette Commission et à tous les degrés prévus selon la pratique de notre Sainte Mère l’Église, sans, d’autre part, exclure de les considérer à nouveau. 
Je vous présente donc, en premier degré, les trois instances suivantes: 
Instance n. 1 – Je demande la copie du décret du 19 juillet 2012, un décret émis suite à je ne sais pas quelles informations et en tout casinaudita altera parte, puisque le Secrétaire de l’époque de cette Commission, le Révérendissime Mgr Guido Pozzo avait répondu par courriel à l’abbé Perrel deux jours auparavant, en s’exprimant avec le ton de qui comprend tout, qu’il n’était disposé à écouter aucun des Capitulaires. 
Instance n. 2 – Je demande les raisons juridiques qui ont amené à estimer nulle l’élection de l’abbé Perrel et du Conseil, y compris l’appelant, une élection que tous les Pères Capitulaires présents (plus des deux tiers des ayant droit) ont exercée et qui avait été réalisée uniquement après en avoir informé cette Révérendissime Commission et en avoir en vain demandé l’avis avant de continuer, sans recevoir aucun signe contraire de votre part. Quelles sont les raisons de la nullité de l’élection adoptée par l’abbé Laguérie, cela résulte en effet évident car, pour l’égalité de voix, fut essentiel un bulletin arrivé par correspondance et remplacé peu avant le scrutin par le Rév. Père Canoniste Poquet du Haut Jussé, que l’abbé Laguérie dit avoir concordé discrètement avec le Secrétaire de l’époque de cette Révérendissime Commission. Le contraste avec le Code étant flagrant (cf. can. 167), comme cela fut souligné lors du Chapitre (cf. Rapport du Secrétaire du Chapitre), la nullité est évidente, tout comme elle fut évidente pour les Capitulaires. Par contre, nous ne comprenons pas quel élément juridique aurait annulé l’élection, cette fois avec une majorité qualifiée, de l’abbé Perrel et de son Conseil.  
Instance n.3 – Je demande les raisons de la nécessité de confirmer celui qui sortira élu Supérieur de l’IBP aux prochaines élections, de la part de cette Commission, comme cela est précisé dans le décret du 15 avril 2013. Cet élément ne résulte pas présent dans le Code de Droit Canonique en vigueur, ni non plus dans nos Statuts, ce qui a été voulu (à l’époque ne nous a pas du tout été présenté comme transitoire) de l’Éminentissime Card. Castrillon Hoyos. Il est en effet évident, aujourd’hui malheureusement non pas partout avec certitude (comme cela sera certes bien connu à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi), que le Pontife Romain jouit du droit d’intervenir directement sans exceptions : mais vu qu’il s’agit de Statuts récemment approuvés par volonté directe – c’est ce que nous a dit le Card. Castrillon Hoyos – du S.S. Benoît XVI, il semble à l’appelant et aux sources qu’il a consultées que des éléments difformes éventuels doivent résulter approuvés directement et de façon spécifique par le Saint Père. 
Restant dans l’attente des élucidations mentionnées ci-dessus, qui, en ce qui concerne les points n. 2 et 3, postulent évidemment aussi une question humble de reconsidération, je l’espère avec sérénité et je prie le plus possible, afin que l’éventualité fâcheuse d’un recours jusqu’à l’Auguste Table, soit évité. 
En me permettant de confier le futur de notre Institut à Vos prières, j’implore Votre bénédiction et je Vous adresse mes salutations les plus spirituelles. 
Don Stefano Carusi, membre élu du Conseil de l’IBP 
2 - Suite à l’absence de réponse de la part du Commissaire de la Commission “Ecclesia Dei”, qui, au contraire, convoquait des élections primaires, en modifiant la composition du Chapitre en fonction, qui allait procéder de nouveau à l’élection du Supérieur, a été transmise la présente Instance au Tribunal Suprême de la Signature Apostolique, une instance qui implique la suspension des mesures objet du recours.
Instance au Tribunal Suprême de la Signature Apostolique 
À Son Éminence Révérendissime Card. Raymond Burke
p.c. À la Révérendissime Secrétairerie d’État
p.c. À la Révérendissime Congrégation des Religieux
p.c. À la Révérendissime Commission Ecclesia Dei
p.c. Au Révérendissime Dom Antoine Forgeot 
Courtalain, le 3 juin 2013 
Éminence Révérendissime, 
par la présente, je fais directement appel au Tribunal Suprême que Vous présidez pour présenter ce qui suit à titre d’Instance, la suite de l’Instance juridique que j’ai déjà soumise à la Révérendissime Commission Ecclesia Dei, concernant l’annulation de l’élection du Supérieur Général de l’Institut du Bon Pasteur qui a eu lieu en juillet 2012 dernier. 
Le 8 mai 2013, après avoir reçu, le 4 mai, la nouvelle certaine d’un décret annulant l’élection du Supérieur Général du Bon Pasteur et la mienne, j’ai soumis – en tant que partie lésée aussi – une Instance à la Commission Ecclesia Dei afin de connaître les raisons juridiques d’un tel acte d’annulation ; des raisons qui, de par leur nature, sont publiques, tout au moins pour les sujets qui sont, en ce qui concerne la disposition, des parties lésées. 
Par la lettre datée 20 mai 2013 que j’annexe, Son Excellence Mgr Di Noia ne m’a répondu rien d’autre que l’injonction de m’“abstenir” définitivement de tout acte qui “provoquerait des désagréments”, en ajoutant aussi une phrase qui se prête à des interprétations variées, même éventuellement menaçante, c’est-à-dire que la chose aurait été un bien pour la personne que je suis ; nulle autre spécification n’a été ajoutée, ni les documents ne m’ont-ils été envoyés, ni la disponibilité à me les envoyer dans les trois mois après réception de la lettre ne m’a-t-elle été indiquée. 
La pratique de l’Église étant toujours celle du recours franc et ouvert à laPrima Sedes, ce qui est, entre autres, un acte de déférence au Vicaire du Christ et à Sa Curie, je suis convaincu que le recours filial aux organes compétents peut être, dans le culte de la justice et du droit, la voie propice pour favoriser une transparence juridique humble et rigoureuse que, garantie véritable à la personne, l’Église a tant à cœur. 
Suite à une telle communication et alors que, à défaut d’une réponse adéquate, j’étais en train d’anticiper le projet de mon intervention actuelle, j’ai reçu des menaces de “graves sanctions”. Celles-ci étaient exprimées d’une manière canonique irrecevables, et ont suscité en moi une profonde douleur, liée au scandale et à la réprobation, non pas pour les intentions car ce n’est pas à moi de les juger mais au Très Haut le jour du Jugement, mais pour la manière dangereusement indéfinie des susdites menaces, ce qui n’est certainement pas compatible avec la franchise chrétienne sereine et la paix ecclésiale dans la justice (cf. Annexe n. 7). 
Je présente donc la documentation citée à ce Révérendissime Tribunal, actuellement sous forme d’Instance, en restant dans la prière ouvert à des possibilités de conciliation, qui soient compatibles avec les principes rappelés par les Souverains Pontifes Pie XII et Paul VI sur le lien dont il faut absolument tenir compte entre la paix et la justice. 
Je transmets au besoin, en tant que parties intégrantes, les annexes suivantes: 
Annexe n. 1) Rapport du Chapitre Général de l’Institut du Bon Pasteur de juillet 2012 rédigé par le Secrétaire du Chapitre.
Annexe n. 2) Lettre de Son Excellence Mgr Müller aux membres de l’Institut du Bon Pasteur du 15 avril 2013.
Annexe n. 3) Instance à la Commission Pontificale Ecclesia Dei présentée par le soussigné le 8 mai 2013.
Annexe n. 4) Lettre à Mgr Di Noia du 20 mai 2013.
Annexe n. 5) Lettre du soussigné au Révérendissime Père Abbé Dom Antoine Forgeot du 29 mai 2013.
Annexe n. 6) Annonce du recours canonique par voie hiérarchique du 31 mai 2013.
Annexe n. 7) Décret du Révérendissime Dom Antoine Forgeot, daté 30 mai 2013. 
Avec mes pauvres prières, je m’incline pour baiser la Pourpre sacrée
Don Stefano Carusi, IBP
3) - Contextuellement, a été envoyé, avec cinq autres confrères, le recours hiérarchique suivant concernant la disposition qui, en fait, procédait à l’altération de la composition du Chapitre qui devait élire le Supérieur de l’Institut:
À Son Excellence Révérendissime Mgr Gerhard Müller
À Son Excellence Révérendissime Mgr Augustine Di Noia
Commission Pontificale Ecclesia Dei
p. c. À la Révérendissime Secrétairerie d’État
p. c. À la Révérendissime Congrégation des Religieux  
Objet : recours hiérarchique 
Courtalain, le 2 juin 2013 
Excellence Révérendissime, 
nous nous voyons obligés de présenter à Vos Excellences un recours hiérarchique, après avoir épuisé toutes les voies de l’arrangement pacifique du litige. À partir du moment où nous avons eu la communication, bien que fragmentaire et imprécise, nous avons demandé, avec des remonstrationes écrites variées envoyées au Révérendissime Antoine Forgeot, Supérieur Général pro tempore de l’Institut du Bon Pasteur, la révocation de la disposition ab ipsius auctore(CIC, c. 1734), une disposition qui convoquait des élections pour le remaniement du corps électoral capitulaire de l’Institut du Bon Pasteur, en en altérant la composition initiale. Nous soulignons que cette disposition résulte être promulguée sans dérogation manifeste en la matière. L’auteur, par la réponse écrite du 31 mai dernier ne donnait suite à aucune reconsidération de la disposition que nous exposons ci-dessous dans les détails, ni ne donnait suite à la voie de la médiation que nous avions proposée durant les deux jours suivants (CIC, c. 1733).  
Suite au décret de nomination du 15 avril dernier Vos Excellences avez nommé le Rév. Dom Antoine Forgeot, Commissaire avec la fonction de Supérieur Général pro tempore pour l’Institut du Bon Pasteur, dans le but de procéder à l’élection du futur Supérieur Général, conformément au Droit et à nos Statuts. 
Il y a environ une semaine, il nous a été communiqué par plusieurs courriels dont les contenus étaient différents, que la réunion consultative et d’échange débonnaire d’opinions en vue d’une pacification, prévue pour le 4 juin, avait été transformée en section électorale (cf. courriels annexés) pour organiser des élections primaires qui modifieraient en grande partie la composition du Chapitre. Nous précision que le Chapitre est déjà en fonction depuis plus d’un an et qu’il reste en fonction pendant les cinq ans prochains aux termes des Statuts (V. 4) ; les membres de droit ont été approuvés par cette Commission et les membres élus ont eu accès aux fonctions conformément aux pratiques statutaires approuvées par écrit par cette Commission, qui approuva aussi les résultats des scrutins et la convocation régulière de juillet 2012. 
La disposition, outre la rapidité de la communication très proche de la rencontre qui nous avait été annoncée initialement comme simplement consultative, vise à organiser un nouveau vote, qui en fait remanie la composition initiale du Chapitre Général, et ne résulte pas consonant avec le Droit et avec les normes procédurales : 
En l’espace d’une semaine, immédiatement après la rencontre consultative du 4 juin, nous avons eu la nouvelle peu précise que l’on procédait à l’innovation imprévue et inattendue et que par conséquent de nouvelles élections primaires étaient établies, sans fournir aucune raison juridique (courriel du 23 mai), que l’on procédait à la destitution de deux membres de droit, à la diminution du nombre des membres élus (qui de quatre devenaient deux), à la communication que l’abbé Héry était un membre de droit, suivie d’un démenti écrit de la même nouvelle, démentie à son tour par une troisième communication de signe opposé (cf. courriels annexés des 27 et 29 mai 2013) ; il en est de même pour les diacres incardinés, qui, au premier moment, ont été indiqués par écrit comme électeurs pour être ensuite expulsés du collège électoral il y a environ deux jours, le tout à moins d’une semaine de la rencontre consultative, à l’improviste transformée en votation primaire. Nous précisons que ces communications sont toutes parvenues, par courriel et d’une manière fragmentaire, à quelques-uns et non pas à tous les membres de l’Institut, ce qui a engendré objectivement de la confusion et de la défiance juridique, car nous avons découvert une pratique procédurale qu’il nous semble impossible de concilier avec le Code et avec nos Statuts et qu’en toute conscience nous ne pouvons approuver. 
Le remaniement presque complet du corps électoral capitulaire, en fonction pour les cinq prochaines années, sans qu’il consiste aucune attribution de pouvoirs extraordinaires en ce sens – et vu qu’il n’y avait aucune dérogation manifestée – ne rentre pas dans les munera conférés au Supérieur pro tempore (cf. Décret de la Commission Ecclesia Dei, prot. 80/2006, 15 avril 2013). Nous présentons donc un recours par voie hiérarchique afin que soit reconnue la nullité juridique de la disposition citée du Rév. Dom Forgeot, qui résulte avoir la faculté d’organiser l’élection invoquée par le décret mentionné, mais non pas pour altérer la composition de tout le Chapitre. Le Souverain Pontife Jean Paul II, en invoquant le respect du Code, qu’il appelait “le troisième pilier de l’Église”, soulignait que la clarté procédurale est le support nécessaire présupposé de tout acte juridique ecclésial et de sa crédibilité. 
Ni ne pouvons en outre garder sous silence que l’élection successive à cette procédure, du fait de sa nullité, exposerait l’Institut à de très graves troubles qui, objectivement et abstraction faite des intentions, ne feraient qu’aggraver la situation déjà délicate de notre société. Non seulement certains membres de l’Institut, avertis depuis moins d’une semaine et par courriels contradictoires – qui ne parlaient, entre autres, pas initialement d’élection – n’ont pas prévu de se rendre matériellement sur le lieu de la rencontre (que l’on pense à combien d’entre eux demeurent en Amérique du Sud, lesquels ne peuvent même pas – raisonnablement – être avertisin extremis), mais nous soulignons que nous ne pouvons vraiment pas concevoir une telle procédure. Tout résultat sortant de l’imposition d’une telle votation ne pourra qu’être l’opposé de l’“élection sereine et sûre” souhaitée par le Décret du 15 avril dernier. 
Nous soulignons aussi l’inconvenance des menaces écrites que certains des signataires reçoivent en cette période qui est une période électorale, nous ne pouvons donc certainement pas dire qu’il y ait un climat permettant de pouvoir procéder sereinement, car il est évident qu’une altération semblable du corps électoral mènerait vraisemblablement à des résultats différents de ceux qui viendraient du corps électoral original des Pères capitulaires. 
Nous demandons donc, avant de recourir au Tribunal Suprême de la Signature, que le vote ait lieu comme selon la procédure avec le même corps électoral capitulaire de juillet 2012 et la suspension immédiate – liée au présent recours – de la décision convoquant les élections du 4 juin prochain mentionnées. 
Dans l’espoir d’une solution, nous vous adressons nos salutations distinguées et restons dans l’attente d’une réponse dans la prière à Jésus le Bon Pasteur.
(Suivent les six signatures des prêtres appelant)
4) - Alors que le Commissaire Forgeot procédait comme si de rien n’était à une nouvelle élection, pour laquelle ont été aussi convoqués quatre prêtres qui avaient abandonné l’Institut avant le dernier Chapitre, dont deux se sont même présentés (et malgré cela le quorum, qu’il avait déjà prévu pour la validité de l’élection, n’a même pas été atteint), nous avons aussi reçu la communication déconcertante d’une prorogation d’un an de l’abbé Laguérie, une notification dont personne n’était au courant avant le 4 juin 2013, ni les Pères capitulaires ni les membres de l’Institut.

Ainsi, la présente intégration au recours est devenue nécessaire:
Courtalain, le 8 juin 2013 
Excellences Révérendissimes, 
ce n’est que successivement, par rapport à notre recours du 3 du mois courant, que nous avons appris que la Commission Ecclesia Dei a confirmé motu proprio le Supérieur échu et non réélu, l’ Abbé Philippe Laguérie, qui “est reconduit pour un an”. La circonstance, référée par le représentant, Dom Antoine Forgeot, de ladite Commission, le 4 du mois courant, qui nous a été référée par des confrères, a été confirmée successivement par ce-ci par écrit dans le courriel annexé par lequel il nous communique son rôle d’“aider le supérieur sortant, Mr l’abbé Philippe Laguérie, à préparer l’élection”. Cette procédure foule aux pieds la volonté de notre Chapitre de juillet 2012, qui a légitimement retenu ne pas confirmer ce candidat et se révèle complètement irrespectueuse de nos statuts, approuvés par le Saint Siège pas plus tard qu’en 2006, qui ne prévoient pas une telle procédure. Donc, nous refusant de considérer un accord bilatéral comme étant un chiffon de papier, nous nous voyons obligés d’intégrer notre récente Instance avec cet élément aussi, qui, entre autres, ne consent pas de reconnaître que le Délégué de la Commission soit un garant impartial de la répétition d’une élection controverse. Bien que stupéfaits et attristés à l’extrême, nous sommes en train de tenter de procéder avec le maximum de modération et de responsabilité possible si bien que nous avons encore gardé les susdits comportements, qui ne peuvent nous sembler que de scandaleux abus de pouvoir, dans la discrétion. 
Nous prions ardemment afin que nous ne soyons pas obligés, en cas d’échec de la voie de l’Instance aussi, de saisir désormais prochainement les voies de justice accomplies, comme conformément à la procédure toujours considérée légitime dans la Sainte Église Romaine, amie du droit et de la justice 
(Envoyée au nom des appelants précédents)
La Rédaction de Disputationes Theologicae