28 février 2015

[Mgr Williamson - Initiative St Marcel] Signe Encourageant

SOURCE - Mgr Williamson - Initiative St Marcel - 28 février 2015
Un évêque a dit, la Tradition doit rendre témoignage.
Monseigneur, faites-le vous-même davantage, sinon le troupeau va mourir.
 
Après trois numéros de ces « Commentaires » qui ont cherché à montrer la nouvelle ligne de pensée par laquelle la Fraternité Saint Pie X de Mgr. Lefebvre est en train de se faire mortellement empoisonner, présentons par contre un signe encourageant qui prouve que sa Fraternité n’est pas encore complètement morte : des propos tirés d’un sermon donné le 1er janvier de cette année à Chicago par Monseigneur Tissier de Mallerais, l’un des quatre évêques consacrés pour la FSPX en 1988. Les gens demandent souvent pourquoi on entend si peu parler de lui, parce qu’il est connu comme homme timide mais honnête, d’une foi forte, ayant l’esprit clair et une grande connaissance de Mgr. Lefebvre pour lequel il a toujours eu une grande affection. Peut-être n’a-t-il aimé que trop bien la Fraternité, en sorte qu’il n’a pas vu, ou pas voulu voir, à quel point les Supérieurs actuels depuis de longues années, lentement mais sûrement, trahissent le combat de la Foi de Mgr. Lefebvre. A-t-il placé l’unité de la Fraternité au-dessus de la Foi de l’Église ? Mais le mois dernier il a dit plusieurs choses qu’on ne saurait mieux dire.
 
Il a cité Monseigneur qui écrivait dans son Itinéraire Spirituel (Ch III, p.13) : « C’est donc un devoir strict pour tout prêtre voulant rester Catholique de se séparer de l’Église Conciliaire tant qu’elle ne retrouve pas la Tradition du Magistère de l’Église et de la Foi Catholique » Et pour insister, Monseigneur Tissier a dit, « Permettez-moi de répéter », et il a lu de nouveau toute la citation.
 
Ensuite il a fait allusion aux forces du mal qui occupent l’Église. Puis il a averti contre les « faux amis » qui maintiennent à tort que si la FSPX demeure séparée de l’Église visible elle se transformera en une secte. Il a déclaré au contraire, « Nous sommes l’Église visible », et « Nous sommes dans l’Église ».
 
Finalement il a averti contre les « faux amis » qui prétendent que la FSPX est dans une situation anormale parce qu’on n’est pas « reconnu par l’Église » et il a déclaré que c’est la situation de Rome et non la nôtre qui est anormale, que la Fraternité n’a pas besoin de « revenir », parce que ce sont les Romains qui doivent revenir. « Nous n’avons pas à chercher ce que nous pouvons faire à Rome, mais plutôt quel témoignage nous pouvons donner à toute l’Église en étant une lumière sur un chandelier et non sous un boisseau ».
 
La ligne de pensée de Monseigneur Tissier, telle qu’elle ressort de ces citations, est exactement celle de Monseigneur Lefebvre. Les coucous modernistes qui occupent actuellement le nid du rossignol, à savoir les structures de la véritable Église, peuvent présenter l’ apparence de rossignols mais leur chant, c’est à dire leur doctrine, doctrine, doctrine, les trahit immédiatement. En réalité ils ne sont rien d’autre que des coucous, sans aucun droit à occuper ce nid. Le vrai nid ne rend pas leur doctrine vraie. Leur doctrine fausse rend fausse leur occupation de ce nid. Ils peuvent être visibles dans ce nid, mais ainsi que leur doctrine le montre, ce ne sont pas de vrais rossignols. Où que le reste des vrais rossignols soit visiblement réuni, en quelque nid provisoire que ce soit, ils sont dans l’Église, ils sont la véritable Église visible, et pour quiconque a des oreilles pour entendre, leur beau chant témoigne que les coucous ne sont rien d’autre que des coucous qui ont volé le nid catholique qu’ils occupent actuellement.
 
Hélas ! Les Supérieurs actuels de l’ex-FSPX n’ont pas l’oreille musicale, et ils refusent de distinguer entre le chant des coucous et celui des rossignols, aussi jugent-ils du catholicisme selon les apparences du nid au lieu de juger selon la réalité du chant. Ce que Monseigneur Tissier dit ici doit leur avoir déplu énormément. Sans doute auront-ils exercé une pression, habilement calculée, pour être sûrs qu’il fasse marche arrière pour emboiter le pas, leur pas à eux. Et par « obéissance » il risque de faire exactement cela. Nous devons prier pour lui.
 
Kyrie eleison.

27 février 2015

[Riposte Catholique] La messe du 7 mars 1965 n’était pas entièrement en italien…

SOURCE - Riposte Catholique - 27 février 2015

On annonce que le 7 mars 2015 le pape François se rendra dans la paroisse romaine de Ognissanti (Toussaint). Un colloque sur la réforme liturgique est même prévu dans ce sillage, le 27 février 2015. Pour rappel, dans la paroisse d’Ognissanti, Paul VI avait prononcé une homélie significative dans l’histoire de la réforme liturgique. Lors du premier dimanche de Carême, Paul VI avait, en effet, célébré une messe qui devait marquer l’application du premier texte mettant en œuvre la réforme liturgique, l’instruction Inter Œcumenici. À l’occasion de cette messe, le pape Paul VI avait ainsi justifié une moindre utilisation du latin : « l’Église a estimé nécessaire cette mesure pour rendre intelligible sa prière. Le bien du peuple exige ce souci de rendre possible la participation active des fidèles au culte public de l’Église. L’Église a fait un sacrifice en ce qui concerne sa langue propre, le latin, qui est une langue sacrée, grave, belle, extrêmement expressive et élégante. Elle a fait le sacrifice de traditions séculaires, et, surtout, de l’unité de langue entre ses divers peuples, pour le bien d’une plus grande universalité, pour arriver à tous ».

Le problème est que les trophées que certains voudraient brandir ne sont pas aussi nets que cela… Rappelons que la messe célébrée par Paul VI était partiellement en italien, dans la mesure où l’offertoire et le canon avaient été dits en latin (aujourd’hui, un usage même limité du latin passerait pour certains comme un signe d’intégrisme…). Paul VI ne faisait que mettre en œuvre des réformes que l’on retrouvera le missel dit de 1965. La constitution Sacrosanctum concilium affirme que « l’usage de la langue latine, sauf droit particulier, sera conservé dans les rites latins » et que les exceptions à l’usage du latin concernent les lectures, les chants, les prières et les monitions. Quant à l’autel face au peuple, la constitution Sacrosanctum concilium reste muette sur la question. On peut enfin gloser à l’infini sur le fait de savoir si le texte ne contenait pas des arrière-pensées et si l’esprit était tout autre: en soi, dans une assemblée comprenant plus de 2000 évêques, il y avait forcément des sensibilités différentes…

Rappelons que même la minorité conciliaire était favorable à l’introduction du vernaculaire. Dans ces années fort troublées, les positions étaient loin d’être aussi tranchées. Le 6 juin 1965, un père conciliaire affirmera même: « faire en sorte que le prêtre s’approche des fidèles, communique avec eux, prie et chante avec eux, se tienne donc à l’ambon, dise en leur langue la prière de l’oraison, les lectures de l’Épître et de l’Évangile ; que le prêtre chante dans les divines mélodies traditionnelles leKyrie, le Gloria et le Credo avec les fidèles. Autant d’heureuses réformes qui font retrouver à cette partie de la messe son véritable but. » Qui est ce père conciliaire ? Le cardinal Suenens ? Non. Le cardinal Lercaro ? Non plus. Les propos ont été affirmés par… Mgr Marcel Lefebvre, qui s’exprime dans un article publié par la revue Itinéraires. La minorité conciliaire n’était pas opposée en soi à une introduction du vernaculaire dans la liturgie. Autre question: en 1965, un prélat affirmera que le missel de 1965 constituait une « restauration finale »; il n’est donc pas question d’aller plus loin. Qui est l’auteur de ces propos ? Mgr Lefebvre ? Non. Le cardinal Siri ? Non plus. Réponse: Mgr Bunigni qui, pourtant, participera à la réforme liturgique la plus radicale de l’histoire de l’Église (DC 1965, c. 316 et 318). La réforme liturgique a aussi été – pardon: a surtout été – un processus marqué par l’improvisation permanente où les initiatives pratiques ont imposé une surenchère avec comme résultat évident qu’à la fin des années 1960 on se retrouve avec des messes entièrement vernacularisées. Cela ne manque pas de piquant quand on sait qu’en 1962 Jean XXIII n’envisageait comme réforme liturgique que la suppression du… dernier évangile. (Au passage, c’est le même Jean XXIII qui débarqua Mgr Bunigni de la commission pré-conciliaire qui devait aborder les questions liturgiques…)

Le missel de 1965 correspond encore une édition du missel romain traditionnel (la réforme de 1969 sera plus radicale au point de constituer de facto un nouveau missel, et non une simple édition corrigée du missel romain traditionnel), même s’il va plus loin que la réforme de 1962 (simplification des prières au bas de l’autel, prières dites à voix haute, etc.), tout en continuant à s’inscrire dans l’optique de Sacrosanctum concilium (maintien du latin et absence de création de nouvelles prières). Il faudra attendre 1967 pour que Rome autorise la lecture du canon en vernaculaire et la simplification de certains gestes (diminution des signes de croix): un prélude avant la réforme (radicale) de 1969… Mais la question est si complexe que même des communautés refusant le missel de 1969 utiliseront le missel romain traditionnel dans ses dernières adaptations, à l’instar de la Fraternité Saint-Pie X (FSSPX). Cette dernière, par prudence, ne reviendra à l’édition de 1962 qu’en 1974. Écône avait donc commencé par l’utilisation d’un missel comportant des prières au bas de l’autel simplifiées (psaume Judica me limité à son antienne) ou omettant le dernier évangile. On ne peut pas soupçonner la FSSPX d’être à l’avant-garde de la réforme liturgique…

Autre argument qui ressort de certains promoteurs de cette réforme liturgique qui doivent d’exprimer dans le colloque qui se tiendra aujourd’hui : « un des objectifs principaux de la réforme liturgique était la participation pleine, active et consciente à la liturgie, pour que les fidèles sortent de l’attitude de spectateurs muets et étrangers. En ce sens, le changement a été historique et a marqué un tournant ». On peut d’abord rappeler que le concept de « participation active » n’est nullement imputable à Vatican II. Dans son Motu proprio Tra le sollecitudini de 1903, Saint-Pie X demandait une « participation active aux mystères et à la prière officielle et solennelle de l’Eglise ». On peut souligner que cette « participation pleine, active et consciente » n’a pas besoin de réforme liturgique ou de réécriture du missel: le développement des messes dialoguées avant le concile visait déjà à une participation des fidèles. Le mouvement liturgique cherchait déjà à développer une culture liturgique chez les fidèles. Mais le concept de « participation active » mérite d’être creusé pour ne pas se limiter à un concept superficiel qui se cantonne à un pur activisme. En soi, la participation est avant tout spirituelle: on s’unit intérieurement à la liturgie. La présence de Mgr Piero Marini, président du Conseil pontifical pour les congrès eucharistiques internationaux, qui fera un exposé sur « la langue parlée, instrument de communion dans le dialogue de l’assemblée liturgique », donne un aperçu sur la tonalité du colloque du 27 février: certainement pas celle de « la réforme de la réforme »…

Cinquante ans après les faits, il serait juste de les restituer à leur juste mesure et de ne pas lire les évènements d’alors à la lumière des évènements suivants. La réforme liturgique a aussi été marquée par une improvisation et un processus de fuite en avant, et pas seulement par des textes dont on aurait tort de penser qu’ils suffisent, en eux-mêmes, à endiguer les maux… Mais au-delà des polémiques, de tel souci visant à justifier tel geste, il faut s’interroger sur le fait que les baptisés, massivement, ne pratiquent plus. Pire: ils n’adhèrent pas toujours aux vérités de la foi et à celles qui en découlent, en partie parce que le verbiage liturgique ne les porte guère à entretenir cette foi. L’éloignement massif des fidèles est significatif pour une réforme qui affichait pourtant sa volonté de ne pas les éloigner de la liturgie… Cinquante après, il serait temps de se poser les vraies questions, non de célébrer l’autosatisfaction ou de se cantonner à un « bilan globalement positif » de ce qui a été l’une des plus grandes catastrophes spirituelles des temps modernes…

[Séminaire Saint Vincent de Paul] Interview avec M. l'Abbé Aulagnier, IBP

SOURCE - Séminaire Saint Vincent de Paul - 27 février 2015

Entretien avec M. l'Abbé Aulagnier, IBP. Recteur du Séminaire Saint-Vincent-de-Paul. Présentation: MM. les Abbés Zucchi et Cottard.

[Abbé Alain Lorans, fsspx - DICI] Une Eglise ouverte, des églises fermées

SOURCE - Abbé Alain Lorans, fsspx - DICI - 27 février 2015

L’église Saint-Jean-Baptiste de Québec doit fermer. Edifiée à la fin du XIXe siècle, c’est une des plus belles églises de la ville, mais le diocèse n’a plus les moyens de la restaurer. Faute de fidèles – car la pratique religieuse s’est effondrée au Canada, comme dans tous les pays de vieille chrétienté –, ces églises sont transformées, les unes après les autres, en appartements, en salles d’exposition ou en hôtels. Quand elles ne sont pas purement et simplement détruites… Tout le patrimoine catholique est démantelé pierre par pierre.

Le concile Vatican II voulait ouvrir l’Eglise au monde et aux idées modernes, il réussit à fermer les églises. Cette ouverture s’est manifestée par le rejet du dogme au profit de la pastorale : depuis 50 ans, l’Eglise ne dogmatise plus, elle « pastoralise » et elle dialogue œcuméniquement… A ce sujet, il est utile d’étudier la posture intellectuelle de certains hommes d’Eglise à la lumière de ces lignes de Chesterton : « On pourrait définir l’homme : un animal qui fait des dogmes. Alors qu’il empile doctrine sur doctrine et conclusion sur conclusion pour édifier un formidable système de philosophie et de religion, il devient vraiment, dans le seul sens légitime du terme, de plus en plus humain. Quand, au contraire, il rejette une à une ses doctrines avec un scepticisme raffiné, quand il refuse d’être lié par aucun système, quand il dit qu’il ne croit plus à la finalité, quand, dans sa propre imagination, il s’installe comme Dieu, observant toutes les formes de croyances sans en partager aucune, alors par ce procédé même il retourne lentement à l’état vague des animaux errants, à l’inconscience de l’herbe. Les arbres n’ont pas de dogmes. Les navets sont singulièrement larges d’esprit. » (Hérétiques, chap. 20)

Abbé Alain Lorans

25 février 2015

[Frère Bruno Bonnet-Eymard / La Contre-Réforme Catholique au XXIe siècle] Le pape François, deux ans après: ni hérésie, ni schisme, ni scandale

Le pape François, missionnaire
en Asie, samedi 17 janvier 2015,
à Tacloban, sous une pluie battante.
SOURCE - Frère Bruno Bonnet-Eymard / La Contre-Réforme Catholique au XXIe siècle - mars 2015

Le pape François, missionnaire en Asie, samedi 17 janvier 2015, à Tacloban, sous une pluie battante.

EN démissionnant, le 11 février 2013, le pape Benoît XVI a sauvé l’Église d’un scandale épouvantable que l’information parue dans La Croix du 19 janvier 2015 résume : « Justice. Un prêtre condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle pour pédophilie. Les faits remontent aux années 1980. »

Le pape François plagiant le récit de la défaite des Israélites face aux Philistins (1 S 4, 1-11), en faisait l’application à l’état présent de l’Église : « Mais, Seigneur, qu’est-il arrivé ? Tu as attiré sur nous le mépris de nos voisins, la moquerie et le dédain de ceux qui nous entourent. Tu nous as fait devenir la risée de notre prochain ! À notre propos les gens hochent la tête. » Après avoir ainsi paraphrasé le texte biblique, le Pape ajoutait : « N’en n’avons-nous pas honte ? Tous ces scandales que je ne veux pas énumérer, mais tout le monde le sait… Nous savons où ils se sont produits ! Des scandales dont certains ont coûté beaucoup d’argent… Mais avons-nous eu honte de ces scandales, de la déroute de ces prêtres-là, de ces évêques-là, de ces laïcs ? Plus rien ne les reliait à Dieu ! Ils avaient une position dans l’Église, une position de pouvoir et souvent confortable. Mais la Parole de Dieu, non ! “ Mais je porte une médaille ”; “ Moi, je porte la croix ”… Oui, mais comme ceux-ci portaient l’Arche ! Sans avoir un rapport vivant avec Dieu et avec la Parole de Dieu ! » (16 janvier 2014)

Tel est le fruit pourri du concile Vatican II dont le pape Benoît XVI, qui fut le bras droit de Jean-Paul II à partir desdites “ années 1980 ”, a débarrassé l’Église en démissionnant, non sans une inspiration du Saint-Esprit, comme l’a dit le pape François. Cette démission, l’abbé de Nantes, notre Père, la réclamait déjà de Paul VI. Sa voix s’est éteinte avant d’avoir été entendue, mais, à l’exemple de sainte Thérèse, il est “ redescendu ” depuis son dies natalis, le 15 février 2010, et il a tant fait que Ratzinger a démissionné pour “ passer la main ” à Bergoglio, un successeur “ hors contrat ”, libre du “ pacte conciliaire ”, c’est-à-dire exempt de l’hérésie, du schisme et du scandale qui “ ruinaient ” l’Église depuis un demi-siècle.

Un seul exemple entre mille : dans son homélie en la cathédrale de Manille, le 16 janvier 2015, le pape François a appelé l’assemblée à la radicalité évangélique, à la suite du Christ pauvre : « C’est seulement en devenant nous-mêmes pauvres, en renonçant à notre auto-accomplissement, que nous pourrons nous identifier aux derniers de nos frères et sœurs. » Autrement dit : en renonçant aux prétentions autolâtriques de Jean-Paul II. « Auto-accomplissement » est, en effet, le mot clef de toute la prétendue “ anthropologie ” du pape Jean-Paul II, qui n’est autre chose que le culte de l’homme.

On comprend que Jean-Marie Guénois, nostalgique de Jean-Paul II qu’il a suivi dès lesdites “ années 80 ” au jour le jour dans ses voyages, parle de « révolution » et non pas seulement de « réforme », à la suite du Père Adolfo Nicolas, général des jésuites. Le mot exact, mais interdit, serait celui de Contre-Réforme catholique au vingt et unième siècle.

J’ai raconté dans mon livre sur notre Père comment, dans les années 50, au lendemain de la publication de l’encyclique Humani generis, l’abbé Bolze, curé de la paroisse ouvrière Saint-Bruno à Grenoble, ne supporta pas longtemps le jeune abbé de Nantes qui venait le remplacer durant les vacances : « Vous comprenez, disait-il, en trois mois, il détruit notre pastorale d’une année. » En deux ans, le pape François a déblayé les « ruines » accumulées par cinquante ans de réforme conciliaire.

Depuis l’avènement du pape François, le 13 mars 2013, le bilan de deux ans de pontificat répond aux trois Livres d’accusation de l’abbé de Nantes contre ses prédécesseurs : Paul VI (Liber I ), Jean-Paul II (Liber II ) et Ratzinger (Liber III ). Ce bilan peut se résumer ainsi : ni hérésie, ni schisme, ni scandale. Mais « un pas vacillant », conformément au “ troisième secret ” du 13 juillet 1917 où les pastoureaux virent le Saint-Père traverser « une grande ville à moitié en ruine d’un pas vacillant ».

Comme exemple de cette marche hésitante, mais dans la bonne direction, prenons sa déclaration pour la clôture de la Semaine de l’unité, le 25 janvier 2014 : « Nous tous, nous ne voulons pas devenir un sujet de scandale. Et pour cela nous tous, nous cheminons ensemble, fraternellement, sur la route vers l’unité, unis aussi en marchant » dans une « diversité réconciliée ». Ces paroles s’adressaient à l’envoyé du patriarche Bartholomaios Ier, au métropolite Gennadios, au Révérend David Moxon, représentant à Rome du prétendu “ archevêque ” de Cantorbéry, Rowan Williams, réunis en la basilique papale Saint-Paul-hors-les-murs.

Le Pape leur a dit : « Le Seigneur nous attend tous, il nous accompagne tous, il est avec nous tous sur ce chemin de l’unité. Chers amis, le Christ ne peut être divisé ! » C’est vrai, et c’est pourquoi Rowan Williams n’est pas « du Christ », et encore moins archevêque ! puisqu’il est séparé du Christ. Le pape François le sait puisqu’il se recommande des « bienheureux » Jean XXIII, Paul VI et Jean-Paul II, « ouvrant des voies nouvelles et auparavant presque impensables ». Quel aveu !

Mais à vrai dire, le pape François marche-t-il vraiment sur leurs traces ? Nous le voyons mettre tout le poids de son autorité en faveur de ce que l’abbé de Nantes appelait « l’œcuménisme catholique », pratiqué avant le Concile : attitude morale et spirituelle consistant « avant tout dans une révision des comportements, des jugements et des méthodes du passé […], allant jusqu’à la demande de pardon pour les “ fautes ” ayant accompagné ou aggravé les ruptures et entraîné de profondes blessures ». Sous cette forme catholique, « l’œcuménisme apparaissait alors comme un sincère effort et un puissant moyen pour atténuer ou guérir les conséquences de ces fautes par la mise en œuvre des vertus chrétiennes de foi, de charité et d’espérance ; mais on évitait de prendre en considération les causes réelles des séparations sur le terrain de la doctrine et de la foi ; à plus forte raison se gardait-on d’aborder “ en dialogue ” les questions touchant à la vraie nature de l’Église et aux critères de son unité visible. » (Préparer Vatican III, p. 203)

Tandis qu’en passant de cet « œcuménisme catholique » aux principes d’un mouvement ayant pris naissance et consistance en dehors de l’Église romaine, le concile Vatican II a renié son propre caractère « œcuménique » puisqu’il réduisait l’Église catholique romaine au rang de trois cent soixante et unième membre du Conseil œcuménique des Églises (coe) réformées et, accessoirement, orthodoxes.

Les catéchèses du pape François du 18 juin au 26 novembre 2014, ont « confirmé » notre foi en « l’Église une, sainte, catholique et apostolique », dont il est lui-même le témoignage éclatant, comme un signe levé parmi les nations qu’il parcourt, infatigable.
I. NI HÉRÉSIE
Le pape François confesse et défend le dogme de la foi catholique intégrale « contre les forces invisibles, les puissances des ténèbres qui dominent le monde, les esprits du mal qui sont au-dessus de nous », selon saint Paul (Épître aux ­Éphésiens 6, 10-20, commentée dans l’homélie quotidienne, à Sainte-Marthe, le 30 octobre 2014).

Notre génération, a dit le Pape, « a fait croire que le diable était un mythe, une idée, l’idée du mal… Mais le diable existe et il faut lutter contre lui avec le “ bouclier de la foi ”, car le diable ne jette pas des fleurs mais des flèches enflammées pour tuer. » C’est un combat à mort : il s’agit de se demander si l’on « croit vraiment », ou si l’on est « un peu croyant, un peu mondain ».

Tout chrétien est invité à s’interroger par ce jésuite directeur de conscience né, devenu Pape, mais particulièrement les évêques gardiens de la foi catholique et apostolique dont il est le chef. Il met en garde ceux du Synode sur la famille contre « la tentation de négliger le “ depositum fidei ”, de se considérer non pas comme des gardiens mais des propriétaires et des maîtres » (18 octobre 2014).

Aux évêques de Suisse : « Chers frères, vous avez la grande et belle responsabilité de maintenir la foi vive sur votre terre. » Faute de quoi, « les belles églises et les monastères y deviendront peu à peu des musées ; toutes les œuvres louables et les institutions rendront l’âme en laissant seulement des environnements vides et des gens abandonnés. » (1er décembre 2014) Ce n’est plus une prospective, c’est la constatation d’une réalité quotidienne. Mais le pape François ne renonce par pour autant.

Aux évêques du Congo, le 12 septembre 2014, il déclare : « La qualité de la foi au Christ mort et ressuscité, la communion intime avec lui est à la base de la solidité de l’Église. »

C’est dire que « Jésus condamne cette spiritualité de la cosmétique, où l’on veut “ paraître ” bon, beau, car la vérité intérieure est bien autre chose ! L’apparence, c’est arpenter les places, se faire voir en priant, se “ maquiller ” pour cacher son “ avidité  ” et sa méchanceté ”. » (homélie du 14 octobre)

« Ce qui importe, c’est la foi agissant par la charité. » (Ga 5, 1-6) C’est dire que « la foi n’est pas seulement réciter le Credo » (14 octobre 2014), mais « pour être saine et robuste, elle doit être constamment nourrie de la Parole de Dieu » (Tweet du 21 octobre 2014).
LA PAROLE DE DIEU.
La Parole de Dieu consignée dans la Sainte Écriture est agissante, nous disait notre Père. Le pape François de même. Il précise que sa force « passe par le cœur de celui qui la transmet ». Elle résulte de « la rencontre entre ses péchés et le Sang du Christ, qui sauve ». Ainsi, l’Évangile nous montre Pierre qui voit son propre péché en rencontrant Jésus : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. » (Mt 4, 19)

« La force de la vie chrétienne et la force de la Parole de Dieu résident dans ce moment où le pécheur rencontre Jésus et cette rencontre change sa vie… Et il trouve la force d’annoncer le salut aux autres. » (homélie du 4 septembre 2014)

Ainsi, « le lieu privilégié de rencontre avec Jésus-Christ ce sont nos propres péchés… Sans cette rencontre, point de force dans le cœur. » Le chrétien devient alors « mondain, voulant parler des choses de Dieu avec le langage humain et cela ne sert à rien : cela ne donne pas la vie ».

C’est pourquoi l’apôtre Paul souligne deux raisons de s’enorgueillir, même si « cela scandalise » : nos péchés et le Crucifié.

« Si un chrétien n’est pas capable de se sentir pécheur et sauvé par le Sang du Christ, c’est un chrétien à mi-chemin, c’est un chrétien tiède. Et quand nous trouvons des Églises “ en ruine ”, des paroisses “ en ruine ”, des institutions “ en ruine ”, les chrétiens qui les composent n’ont sûrement pas rencontré Jésus-Christ ou ont oublié leur rencontre avec Lui. »

Le pape François parle comme saint Jean à l’Église d’Éphèse dans l’Apocalypse (Ap 2, 4). Et comme la Vierge Marie dans son troisième secret.

La Parole de Dieu, pour le pape François, c’est Jésus lui-même, et Jésus crucifié, comme pour saint Paul :

« Je ne suis pas venu vous annoncer le mystère de Dieu avec le prestige du langage humain ou de la sagesse… Mais c’est l’Esprit et sa puissance qui se manifestaient. » Le pape François commente : « La Parole de Dieu est différente, elle n’est pas égale à la parole humaine, à une parole sage, scientifique, philosophique… non ! C’est autre chose ! » (1er septembre 2014)

C’est pourquoi la souffrance de Job, dans l’Ancien Testament, pose une question qui reste sans réponse jusqu’à l’avènement de Jésus, et de Jésus crucifié, « réponse d’amour au drame de la souffrance humaine, spécialement de la souffrance innocente, imprimée pour toujours dans le Corps du Christ ressuscité, montrant ses plaies glorieuses » (3 décembre, pour la 33e Journée mondiale du malade).

Le pape François a exprimé cette vérité d’une manière pathétique aux Philippines, le samedi 17 janvier 2015, à Tacloban, sur l’île de Leyte, sous une pluie battante (notre photo d’éditorial) et la menace d’une tempête tropicale, en s’adressant aux survivants du “ super-typhon ” Haiyan / Yolanda du 8  novembre 2013 :

« Je suis là pour vous dire que Jésus est le ­Seigneur, que Jésus ne déçoit pas. L’un de vous peut me dire : “ Père, il m’a déçu par ce que j’ai perdu ma maison, j’ai perdu ce que j’avais, je suis malade… ” C’est vrai ce que tu me dis, et je respecte tes sentiments ; mais je le vois là, cloué sur la Croix, et de là, il ne nous déçoit pas ! Il a été consacré Seigneur sur ce trône, et il est passé là pour toutes nos calamités. Jésus est le Seigneur ! Et il est le Seigneur de la Croix ; il a régné là ! Pour cette raison il est capable de nous comprendre, comme nous l’avons entendu dans la première lecture : il s’est fait en tout égal à nous. C’est pourquoi nous avons un ­Seigneur capable de pleurer avec nous, capable de nous accompagner dans les moments les plus difficiles de la vie. Beaucoup parmi vous ont tout perdu. Moi, je ne sais pas quoi vous dire. Lui, si, il sait quoi vous dire ! Beaucoup parmi vous ont perdu une partie de leur famille. Restons simplement en silence, je vous accompagne par le cœur en silence… »
UNE SAGESSE DU CŒUR.
Le pape François est au chevet de l’Église malade avec « la sagesse du cœur », qui « n’est pas une connaissance théorique, explique-t-il, abstraite, fruit de raisonnements. Elle est plutôt, comme écrit saint Jacques dans son Épître, “ pure, puis pacifique, indulgente, bienveillante, pleine de pitié et de bons fruits, sans partialité, sans hypocrisie ” (Jc 3, 17). Elle est donc un comportement inspiré par l’Esprit-Saint dans l’esprit et le cœur de celui qui sait s’ouvrir à la souffrance des frères et reconnaît en eux l’image de Dieu. Faisons donc nôtre l’invocation du psaume : “ Apprends-nous à bien compter nos jours, afin que nous venions à la sagesse du cœur ! ” » (Ps 90, 12)

« La sagesse du cœur veut dire servir le frère. Dans le discours de Job, “ homme juste qui jouit d’une certaine autorité parmi les anciens de la ville ” : “ J’étais les yeux de l’aveugle, les pieds du boiteux. ” » (Jb 29, 15)

Le Pape loue ces chrétiens qui « rendent témoignage aujourd’hui encore, non par leurs paroles, mais par leur vie enracinée dans une foi authentique […], qui sont proches des malades ayant besoin d’une assistance permanente, d’une aide pour se laver, s’habiller, se nourrir. Ce service, surtout lorsqu’il se prolonge dans le temps, peut devenir fatigant et pénible. Il est relativement facile de servir pendant quelques jours, mais il est difficile de soigner une personne pendant des mois, voire des années, même si celle-ci n’est plus capable de remercier. Et pourtant, voilà un grand chemin de sanctification ! Dans ces moments, on peut compter de manière particulière sur la proximité du Seigneur, et on apporte également un soutien spécial à la mission de l’Église.

« La sagesse du cœur, c’est être avec le frère. Le temps passé à côté du malade est un temps sacré. C’est une louange à Dieu, qui nous conforme à l’image de son Fils qui “ n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude ” (Mt 20, 28). Jésus lui-même a dit : “ Et moi je suis au milieu de vous comme celui qui sert. ” (Lc 22, 27)

« Avec une foi vive, nous demandons à l’Esprit-Saint de nous donner la grâce de comprendre la valeur de l’accompagnement, si souvent silencieux, qui nous conduit à consacrer du temps à ces sœurs et à ces frères qui, grâce à notre proximité et à notre affection, se sentent davantage aimés et réconfortés. En revanche, quel grand mensonge se dissimule derrière certaines expressions qui insistent tellement sur la “  qualité de la vie  ”, pour inciter à croire que les vies gravement atteintes par la maladie ne seraient pas dignes d’être vécues !

« La sagesse du cœur, c’est la sortie de soi vers le frère. Notre monde oublie parfois la valeur spéciale du temps passé auprès du lit d’un malade, parce qu’on est harcelé par la hâte, par la frénésie de l’action, de la production et on oublie la dimension de la gratuité, de l’acte de prendre soin, de se charger de l’autre. En réalité, derrière cette attitude se dissimule souvent une foi tiède, oublieuse de cette parole du Seigneur qui déclare : “ C’est à moi que vous l’avez fait.  ” (Mt 25, 40)»

Le Pape rappelle alors le principe posé dans son Exhortation apostolique Evangelii gaudium : « La priorité absolue de “ la sortie de soi vers le frère ” comme un des deux commandements principaux qui fondent toute norme morale et comme le signe le plus clair pour faire le discernement sur un chemin de croissance spirituelle en réponse au don absolument gratuit de Dieu. ” » (n° 179)

C’est ainsi que « de la nature missionnaire même de l’Église jaillissent “ la charité effective pour le prochain, la compassion qui comprend, assiste et encourage ” » (ibid.).

Après avoir mis en garde les modernes « amis de Job » contre « cette fausse humilité qui, au fond, recherche l’approbation et se complaît dans le bien accompli », le pape conclut ce message pour la 33e  Journée mondiale du malade 2015, par une admirable élévation sur le sens de la souffrance « lorsque la maladie, la solitude et l’incapacité l’emportent sur notre vie de don ». C’est alors que « l’expérience de la souffrance peut devenir un lieu privilégié de la transmission de la grâce et une source pour acquérir et renforcer la sapientia cordis ».

Tel Job déclarant à Dieu : « Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu » (Jb 42, 5), « les personnes plongées dans le mystère de la souffrance et de la douleur, accueilli dans la foi, peuvent également devenir des témoins vivant d’une foi qui permet d’habiter la souffrance elle-même, bien que l’homme, par son intelligence, ne soit pas capable de la comprendre en profondeur ».

Le pape François termine en demandant à « Marie, Siège de la Sagesse, d’intercéder comme notre Mère pour tous les malades et pour ceux qui en prennent soin », afin que « dans le service du prochain qui souffre et à travers l’expérience même de la souffrance, nous puissions accueillir et faire croître en nous la véritable sagesse du cœur ».

Tout l’enseignement et le comportement du pape François permet de mesurer la formidable imposture et la mortelle illusion où le concile Vatican II a plongé l’Église depuis que les Pères se sont pris pour le Collège des Apôtres, témoins immédiats et inspirés du Christ lui-même, en citant la première lettre de saint Jean (1 Jn 1, 2-3) au début de la Constitution Dei Verbum :

« Saint Jean, qu’on cite là abusivement, avait “ vu ” et “ touché ” le Verbe de Vie et il a raconté, avec le secours de l’inspiration divine accordée aux Apôtres, ce qu’il avait lui-même entendu et vu le Christ dire et faire. Mais ni Paul VI, ni les cardinaux Alfrink, Suenens, Marty, etc., ni le Concile en sa totalité collégiale, n’ont vu ni touché ni entendu le Christ. À Vatican II, point d’apparition ni d’illumination ! Le prétendre est une première imposture. Une seconde est de faire comme si l’Esprit-Saint s’était tenu là pour inspirer les Pères à l’égal des Prophètes de l’Ancien Testament et des Apôtres de l’Évangile. » (Georges de Nantes, CRC n° 51, décembre 1971, p. 10)

Le pape François, lui, loin de tout illuminisme, ne cesse de nous exhorter à « toucher » réellement « la chair souffrante du Christ qui se rend visible à travers les innombrables visages de ceux que lui-même appelle “ ces plus petits de mes frères ” (Mt 25, 40-45) » (Message pour la journée mondiale de la paix 2015 ).
II. NI SCHISME
C’est ainsi que le pape François reconstitue l’unité de l’Église par sa charité universelle. « Bien enracinés dans la communion personnelle avec Dieu, dit-il aux religieux et religieuses pour l’ouverture de l’Année de la vie consacrée, soyez des constructeurs infatigables de fraternité, avant tout en mettant en pratique entre vous la loi évangélique de l’amour mutuel, et puis avec tous, spécialement les plus pauvres. Montrez que la fraternité universelle n’est pas une utopie, mais le rêve même de Jésus pour l’humanité tout entière. » (30 novembre 2014)

Tel était aussi « le rêve » du Père de Foucauld, « frère universel ». Et ce « n’est pas une utopie », parce que « la vie consacrée est un don à l’Église, disait déjà Mgr Bergoglio, le 13 octobre 1994 au Synode sur la vie consacrée, elle naît dans l’Église, croît dans l’Église, et est tout orientée vers l’Église ».

« Non, Vénérables Frères, disait saint Pie X, il n’y a pas de vraie fraternité en dehors de la charité chrétienne, qui, par amour pour Dieu et son Fils Jésus-Christ notre Sauveur, embrasse tous les hommes pour les soulager tous et pour les amener tous à la même foi et au même bonheur du Ciel. » (Lettre sur le Sillon, n° 24, CRC n° 47, p. 7)

Aux participants de la rencontre internationale “ Le projet pastoral d’Evangelii gaudium ”, organisée par le Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, le pape ­François confie son souci : « Jésus, “ en voyant ces foules, fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger ” (Mt 9, 36). Tant de personnes, dans les périphéries existentielles de nos jours, sont “ désemparées et abattues ” et attendent l’Église, nous attendent ! »

À vrai dire, dans notre monde en folie, un seul homme répond à cette attente : notre Saint Père le pape François !

« Comment les rejoindre ? Comment partager avec elles l’expérience de la foi, de l’amour de Dieu, de la rencontre avec Jésus ? » (19 septembre 2014) D’abord, en « confessant » cette foi sans défaillance. Il le rappelle avec insistance aux évêques :

« La mission qui vous est confiée est de paître le troupeau, en marchant selon les circonstances devant, au milieu et derrière. »

Comme Dieu. À l’homélie du 8 septembre 2014, en la fête de la Nativité de la Très Sainte Vierge Marie, le Pape commente la généalogie qui ouvre l’Évangile selon saint Matthieu en présentant la succession des générations d’Abraham à la Vierge Marie, « de laquelle naquit Jésus » (Mt 1, 16). Dieu laisse la Création à ses lois internes pour se développer, mais à l’homme, au sixième jour, il donne « une autre autonomie, un peu différente : la liberté. Et il dit à l’homme d’avancer dans l’histoire. » Et même lorsque l’homme « a mal usé de cette liberté, Dieu lui fait une promesse et l’homme sort du Paradis avec une espérance.

« Son chemin ne se fait pas dans la solitude. Dieu marche avec lui, parce qu’il est le Dieu du temps, il est le Dieu de l’Histoire et il est le Dieu qui marche avec ses enfants. » C’est pourquoi l’autonomie de l’homme n’est pas « une indépendance ».

« Le peuple de Dieu ne peut subsister sans ses pasteurs, évêques et prêtres ; le Seigneur a fait à l’Église le don de la succession apostolique, au service de l’unité de la foi et de sa transmission complète. » (1er décembre, visite ad limina des évêques de Suisse)

Par exemple, si « nous devons cacher notre foi eucharistique sous prétexte de rencontre, nous ne prenons pas suffisamment au sérieux notre patrimoine ni celui de notre interlocuteur ». Ce n’est pas « marcher vers le rétablissement de la pleine communion à laquelle nous tendons ». La remarque ne vaut pas seulement pour la Suisse ! …

Comment avancer sur ce chemin ? Par le « dialogue » et le martyre.
LE DIALOGUE.
« Un authentique dialogue est toujours une rencontre entre des personnes avec un nom, un visage, une histoire ; et pas seulement une confrontation d’idées.

« Cela vaut surtout pour nous, chrétiens, qui savons que la vérité est la personne de Jésus-Christ. L’exemple de saint André qui, avec un autre disciple, a accueilli l’invitation du divin Maître : “ Venez et voyez ”, et “ ils restèrent auprès de lui ce jour-là ” (Jn 1, 39), nous montre avec clarté que la vie chrétienne est une expérience personnelle, une rencontre transformante avec Celui qui nous aime et veut nous sauver. De même, l’annonce chrétienne se répand grâce à des personnes qui, amoureuses du Christ, ne peuvent pas ne pas transmettre la joie d’être aimées et sauvées. »

C’est la raison pour laquelle la vie consacrée est « au cœur de l’Église comme un élément décisif de sa mission, en tant qu’elle exprime l’intime nature de la vocation chrétienne et la tension de toute l’Église Épouse vers l’union avec l’unique Époux » (Lettre apostolique du pape François à tous les consacrés, 2  décembre 2014)

Le pape François en est en lui-même la preuve vivante. Comme successeur de Pierre à qui le Seigneur a confié la tâche de confirmer ses frères dans la foi (Lc 22, 32), et « comme votre frère, consacré à Dieu comme vous », écrit-il à tous les religieux de l’Église catholique romaine (ibid.).

Il les a invités à « revenir aux fondateurs » afin de « garder vivante l’identité, comme aussi pour raffermir l’unité de la famille » et « cueillir l’étincelle inspiratrice, les idéaux, les projets, les valeurs qui les ont mus ».

Comme sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, au plus loin de la grandiloquence de ses prédécesseurs conciliaires, le pape François invite « les religieux et religieuses » à « confesser avec humilité et grande confiance dans le Dieu Amour (cf. 1 Jn 4, 8) sa propre fragilité » et à « la vivre comme une expérience de l’amour miséricordieux du Seigneur ». Comme le Père de Foucauld voulait « crier l’Évangile » par toute sa vie, le Pape veut faire de l’Année de la vie consacrée « une occasion pour crier au monde avec force et pour témoigner avec joie de la sainteté et de la vitalité présentes chez un grand nombre de ceux qui ont été appelés à suivre le Christ dans la vie consacrée ».

La première question que nous pose notre Saint-Père, à nous religieux, modèles du troupeau par vocation, s’inspire de la lettre à l’Église d’Éphèse, dictée par Jésus à saint Jean dans l’Apocalypse : « Jésus est-il vraiment notre premier et unique amour, comme nous nous le sommes proposé quand nous avons professé nos vœux ? C’est seulement s’il en est ainsi que nous pouvons et devons aimer dans la vérité et dans la miséricorde chaque personne que nous rencontrons sur notre chemin, parce que nous aurons appris de Lui ce qu’est l’amour et comment aimer : nous saurons aimer parce que nous aurons son Cœur même. »

Et quel est le fruit de cette communion au ­Sacré-Cœur de Jésus ? « La compassion qui prenait Jésus quand il voyait les foules comme des brebis dispersées sans pasteur. Comme Jésus, mû par cette compassion, a donné sa parole, a guéri les malades, a donné le pain à manger, a offert sa vie même, de même les fondateurs se sont aussi mis au service de l’humanité à qui l’Esprit les envoyait, selon les ­manières les plus diverses : l’intercession, la prédication de l’Évangile, la catéchèse, l’instruction, le service des pauvres, des malades. »

Le pape François réussira-t-il à ranimer cet Esprit exténué par cinquante ans de “ Réforme ” conciliaire ? Oui, s’il en appelle au Cœur Immaculé de Marie. Toute la vie de sœur Lucie en porte témoignage. Elle n’a pas “ réformé ” son Carmel, mais elle s’y est consumée d’une ardente dévotion au Cœur ­Immaculé de Marie comme « le dernier remède » donné au monde pour le sauver de sa folie : « Le saint Rosaire et la dévotion au Cœur Immaculé de Marie étant les ultimes remèdes, cela signifie qu’il n’y en aura pas d’autre. » (au Père Fuentes, 1957 !)
L’ŒCUMENISME DU SANG.
Or, dans la vision du « troisième secret », la Vierge Marie a montré par quel moyen Dieu, notre Père, administrerait cet « ultime remède » : « Sous les deux bras de la Croix, il y avait deux Anges, chacun avec un vase de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs, et avec lequel ils arrosaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »

Aujourd’hui, non seulement les événements accomplissent cette prophétie, mais ils indiquent au pape François le même « remède » aux divisions qu’il déplore : « Les souffrances endurées par les chrétiens apportent une contribution inestimable à la cause de l’unité. C’est l’œcuménisme du sang, qui demande un abandon confiant à l’action de l’Esprit-Saint. » (Lettre aux chrétiens du Moyen-Orient, 23 décembre 2014)

Le sanctuaire de l’Esprit-Saint est le Cœur Immaculé de Marie. La dévotion du pape François à la Vierge Marie est manifeste. Il lui manque seulement… quoi donc ?

Le 8 décembre dernier, il remarquait que « Marie répond à la grâce et s’abandonne en disant à l’ange : “ Qu’il me soit fait selon ta parole. ” (Lc 1, 38) Elle ne dit pas : “  Je ferai selon ta parole ” :non ! Mais : “ Qu’il me soit fait ” […]. À nous aussi, il est demandé d’écouter Dieu qui nous parle et d’accueillir sa volonté. »

À la bonne heure ! Le Pape va donc « écouter Dieu » qui lui demande de recommander la dévotion réparatrice des cinq premiers samedis, et d’ordonner à tous les évêques du monde en communion avec lui de consacrer la Russie au Cœur Immaculé de Marie… Bientôt ?

À l’Angélus du 21 décembre, commentant la même Salutation angélique, le Pape a loué « la capacité qu’a la Mère du Christ de reconnaître le temps de Dieu. Marie est celle qui a rendu possible l’Incarnation du Fils de Dieu, “ la révélation du mystère enveloppé dans le silence depuis les siècles éternels  ” (Rm 16, 25). Elle a rendu possible l’incarnation du Verbe, grâce précisément à son “ oui ”humble et courageux.

« Marie nous enseigne à saisir le moment favorable où Jésus passe dans notre vie et demande une réponse rapide et généreuse. Jésus passe […]. Le Verbe qui a trouvé sa demeure dans le sein de Marie, dans la célébration de Noël vient à frapper nouvellement dans le cœur de chaque chrétien. Chacun de nous est appelé à répondre, comme Marie, avec un “ oui ” personnel et sincère, en se mettant pleinement à la disposition de Dieu et de sa miséricorde, de son amour.

« Combien de fois Jésus passe dans notre vie, et combien de fois il nous envoie un ange, combien de fois, nous ne nous en rendons pas compte parce que nous sommes si pris, plongés dans nos pensées, dans nos affaires, et même en ces jours dans nos préparatifs de Noël, que nous ne nous rendons pas compte qu’Il passe et qu’il frappe à la porte de notre cœur, en demandant accueil, en demandant un “ oui ” comme celui de Marie.

« Un saint disait : “ J’ai peur que le Seigneur passe ! ” Savez-vous pourquoi il avait peur ? Il avait peur de ne pas s’en rendre compte et de le laisser passer. »

Il s’agit de saint Augustin. Le Père Kolbe le cite en effet, lui aussi, dans une lettre du 3 janvier 1927 à ses frères : « Souvenons-nous aussi souvent que la dureté du cœur est une conséquence de l’abus de la grâce divine. Voilà pourquoi saint Augustin dit : “ Je crains le Dieu qui passe, c’est-à-dire la grâce qui passe parce que parfois je la néglige, et je crains d’avoir un jour à rendre compte pour cela. ” »

Le pape François ignorera-t-il encore longtemps la grâce qui passe dans le message de Notre-Dame de Fatima dont nous célébrerons le centenaire en 2017 ? Il vaudrait mieux ne pas attendre que disparaissent tous les chrétiens du Moyen-Orient, dont la Russie est aujourd’hui le seul défenseur sur la scène internationale…

Prions pour que le Saint-Père la consacre au Cœur Immaculé de Marie !
III. NI SCANDALE, SINON CELUI DE LA CROIX
Car ce Pape plein de componction, n’hésite pas à demander pardon pour ses propres manquements ou erreurs et pour ceux des responsables de la Curie, notamment « pour les scandales qui ont fait tant de mal ». Dans le demi-siècle écoulé depuis le Concile c’est une première ! tout inspirée de l’Évangile, au chapitre de la « correction fraternelle » où Jésus « indique l’effort que le Seigneur demande à la communauté pour accompagner celui qui se trompe, afin qu’il ne se perde pas. Il faut d’abord éviter le bruit des faits divers et le potin de la communauté – c’est la première chose, cela. “ Va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute. ” (Mt 18, 15)

« Cette attitude est faite de délicatesse, de prudence, d’humilité, d’attention à l’égard de celui qui a commis une faute, en évitant que les paroles blessent et tuent le frère. Car, vous le savez, les paroles aussi peuvent tuer ! Quand je médis, quand je fais une critique injuste, quand j’ “ écorche ” un frère avec ma langue, tout cela c’est tuer la renommée de l’autre ! Les paroles aussi tuent. Faisons attention à cela. » ( Angélus du 7 septembre 2014)

Par exemple, quelques lignes d’un “ vaticaniste ” : dans Le Figaro, en blessant le bon renom du Saint-Père, introduisent la défiance dans l’âme de ses brebis. Mortelle atteinte à son œuvre de restauration de l’unité du troupeau derrière son bon et beau Pasteur !

« Dans le même temps, avoir la discrétion de lui parler seul à seul sert à ne pas mortifier inutilement le pécheur. On en parle à deux, personne ne s’en aperçoit et tout est fini. C’est à la lumière de cette exigence que se comprend aussi la série d’interventions suivantes, qui prévoit l’implication de quelques témoins, puis de la communauté.

« Le but est d’aider la personne à se rendre compte de ce qu’elle a fait, et que par sa faute elle a offensé non seulement une personne, mais tous. »

Le fruit de la “ correction fraternelle ” ainsi conçue est de dé­sarmer « la colère ou le ressentiment, qui portent à insulter et à attaquer. Il est très laid de voir sortir de la bouche d’un chrétien une insulte ou une agression. C’est laid. Entendu ? [murmure approbateur des cinquante mille personnes massées place Saint-Pierre, sous la fenêtre du Saint-Père]. Pas d’insulte ! Insulter n’est pas chrétien. Entendu ? Insulter n’est pas chrétien. »

Le Pape y revient le 12 septembre, à l’homélie de sa Messe quotidienne, en commentant l’Évangile de la paille et de la poutre (Lc 6; 39-42) :

« On ne peut pas corriger une personne sans amour et sans charité. On ne peut pas faire une intervention chirurgicale sans anesthésie : le malade mourrait de douleur. La charité est comme une anesthésie qui aide à recevoir les soins et à accepter la correction. » Il s’agit de parler avec douceur, avec amour, en vérité, sans « calomnies » ni « commérages ». « La vérité dite avec charité et amour est plus facile à accepter. » (12 septembre 2014)

« En réalité, devant Dieu nous sommes tous pécheurs et nous avons besoin du pardon. Tous. Jésus en effet nous a dit de ne pas juger. La correction fraternelle est un aspect de l’amour et de la communion qui doivent régner dans la communauté chrétienne, c’est un service réciproque que nous pouvons et devons nous rendre les uns aux autres. Corriger le frère est un service, qui n’est possible et efficace que si chacun reconnaît qu’il est pécheur et qu’il a besoin du pardon du Seigneur. La même conscience qui me fait reconnaître la faute de l’autre me rappelle d’abord que j’ai moi-même fait des fautes et que je fais si souvent des fautes. » (7 septembre).

C’est pourquoi « celui qui corrige doit aussi s’abstenir de “ faire le juge ” », ajoute le Pape, en observant que les chrétiens ont souvent « la tentation de se prendre pour des Docteurs, de se situer en dehors du jeu du péché et de la grâce, comme s’ils étaient des anges » (12 septembre).

En définitive, « c’est ­l’Esprit-Saint qui parle à notre esprit et nous fait reconnaître nos fautes à la lumière de la parole de Jésus ».

Ce sentiment intime ne quitte pas le Saint-Père. Aux Philippines, à Tacloban, sur l’île de Leyte, dévastée par le typhon Yolanda en novembre 2013, « la Messe a été pour moi un moment très fort, confie‑t‑il. Voir tout le peuple de Dieu, là, immobile, en train de prier, après cette catastrophe, penser à mes péchés, et à ces gens… Au moment de la Messe, je me suis senti comme anéanti, j’avais presque de la peine à parler. » (19 janvier 2015, dans l’avion de retour de Manille à Rome)

Mais il y a plus grave que les péchés du Saint-Père ! Le scandale, a expliqué le Pape, à l’homélie du 10 novembre 2014, c’est « afficher un style de vie : “ Je suis chrétien ”, et puis vivre comme un païen qui ne croit en rien. »

Alors que le chrétien doit être tel que l’Ancien décrit par saint Paul : “ Un homme sans reproche[…]; il ne doit être ni arrogant, ni coléreux, ni buveur, ni violent, ni avide de propos malhonnêtes ; il doit ouvrir sa maison à tous, être ami du bien, raisonnable, juste, saint, maître de lui… ” (Tt 1, 1-9)

En effet, « la foi confessée » doit être « vécue » :

« Quand un chrétien ou une chrétienne, qui va à l’Église, qui va en paroisse, ne vit pas comme tel, il scandalise […]. Le scandale détruit la foi ! »

De même, « un chrétien qui n’est pas capable de pardonner scandalise : il n’est pas chrétien ». Selon la parole du Christ « Si ton frère a commis une faute contre toi, fais-lui de vifs reproches et, s’il se repent, pardonne-lui. Même si sept fois par jour il commet une faute contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : “ Je me repens ”, tu lui pardonneras.

« Tant de familles sont divisées parce qu’on ne s’y est pas pardonné ! Enfants éloignés des parents, maris éloignés des femmes… »

« Sans la foi on ne peut vivre sans scandaliser et en pardonnant toujours ». Et cette « lumière de la foi » est un don : « Personne ne peut avoir la foi par les livres ou en allant à des conférences. La foi est un don de Dieu. »

Et ce don est gratuit ! Nous lisons dans l’Évangile que Jésus expulse les marchands du Temple profané par « le grave péché qu’est le scandale de la maison de Dieu qui devient un lieu d’affaires ». Suivez mon regard… C’était le 21 novembre, en la fête de la Présentation de la Vierge Marie :

« Le peuple de Dieu sait pardonner à ses prêtres lorsqu’ils ont une faiblesse, lorsqu’ils tombent dans un péché… Mais il y a deux choses qu’il ne peut pardonner : un prêtre attaché à l’argent et un prêtre qui maltraite les gens. »

Aussi le Pape a-t-il conclu en souhaitant que Marie enseigne aux chrétiens « à garder le Temple propre, à recevoir avec amour ceux qui viennent, comme si chacun d’eux était la Vierge Marie ».

Dans sa catéchèse du 29 octobre sur l’Église, « réalité visible », le Pape enseigne ce mystère : « Malgré nos limites et notre pauvreté, le Seigneur a fait de nous des instruments de grâce et le“ signe ” visible de son amour pour toute l’humanité. Oui nous pouvons devenir motif de scandale, mais nous pouvons aussi devenir motif de témoignage, en disant par notre vie ce que Jésus veut de nous. »

C’est pourquoi le Pape a déclaré la guerre aux « bavardages », aux « murmures », aux « commérages » si contraires à ce « témoignage ». Il ne cesse d’y revenir. C’est le point numéro 9 de ses “ vœux ” à la Curie ! C’est une « maladie grave qui commence simplement, peut-être seulement pour échanger quelques mots, et elle s’empare de la personne en la faisant devenir “ semeur de zizanie ” (comme Satan) et, dans beaucoup de cas, “ homicide de sang-froid ” de la réputation de ses collègues et de ses confrères. »

Le ton du Pape est pathétique : « Frères, ­gardons-nous du terrorisme des bavardages ! »

Et il en avertit les millions d’abonnés à son tweet : « Le commérage est une bombe que l’on jette sur la communauté et qui la détruit. » (30 décembre 2014)

En revanche, il est un “ scandale ” réparateur.
LE SCANDALE DE LA CROIX.
Par la Croix, « Dieu transmet sa force de guérison qui est sa miséricorde, plus forte que le venin du tentateur », explique le Pape aux jeunes mariés qui ont échangé leurs consentements en sa présence, à Saint-Pierre, le 14 septembre, en la fête de l’Exaltation de la Sainte Croix.

Dans son homélie, le Pape a comparé la famille à ce peuple hébreu en marche dans le désert :

« Ce peuple fait penser à l’Église en marche dans le désert du monde d’aujourd’hui, Peuple de Dieu composé en majorité de familles. »

Le Pape commente le récit biblique :

« À un certain point, “ le peuple n’a pas supporté le voyage ” (cf. Nb 21, 4). Ils sont fatigués, l’eau manque et ils mangent seulement la “ manne ”, une nourriture prodigieuse, donnée par Dieu, mais qui en ce moment crucial semble insuffisante. Alors ils se lamentent et protestent contre Dieu et contre Moïse : “ Pourquoi nous avez-vous fait partir ?… ” (cf.  Nb 21, 5) Il y a la tentation de revenir en arrière, d’abandonner le chemin.

« Cela fait penser aux couples qui “ ne supportent pas le voyage ” de la vie conjugale et familiale. La fatigue du chemin devient une lassitude intérieure ; ils perdent le goût du mariage, ils ne puisent plus l’eau de la source du sacrement. La vie quotidienne devient pesante, et souvent “ écœurante  ” », comme la “ manne ” dont les juifs se dégoûtèrent…

« En ce moment de désarroi, dit la Bible, surviennent les serpents venimeux qui mordent les gens, et beaucoup meurent. Ce fait provoque le repentir du peuple, qui demande pardon à Moïse et lui demande de prier le Seigneur pour qu’il éloigne les serpents. Moïse supplie le Seigneur et celui-ci donne le remède : un serpent de bronze, suspendu à une hampe ; quiconque le regarde sera guéri du venin mortel des serpents.

« Que signifie ce symbole ? Dieu n’élimine pas les serpents, mais il offre un “ antidote ” : à travers ce serpent de bronze, fait par Moïse. »

Qu’est ce mystère ? C’est la figure de celui de la Rédemption. « Jésus s’est identifié à ce symbole » qui est la figure de sa propre vocation de Rédempteur : « En effet, explique le Pape, le Père, par amour, l’a “ donné ” aux hommes, Lui, le Fils unique, pour qu’ils aient la vie (cf. Jn 3, 13-17); et cet amour immense du Père pousse le Fils, Jésus, à se faire homme, à se faire serviteur, à mourir pour nous et à mourir sur une croix ; à cause de cela, le Père l’a ressuscité et lui a donné la domination sur tout l’univers. Ainsi s’exprime l’hymne de la Lettre de saint Paul aux Philippiens (2, 6-11). Celui qui se confie à Jésus crucifié reçoit la miséricorde de Dieu qui guérit du venin mortel du péché. »

Application où nous retrouvons tout l’enseignement de Georges de Nantes, notre Père, sur le mariage : « Le remède que Dieu offre au peuple vaut aussi, en particulier, pour les époux qui “ ne supportent pas le chemin ” et sont mordus par les tentations du découragement, de l’infidélité, de la régression, de l’abandon… À eux aussi, Dieu le Père donne son Fils Jésus, non pour les condamner, mais pour les sauver : s’ils se confient à Lui, il les guérit par l’amour miséricordieux qui surgit de sa croix, par la force d’une grâce qui régénère et remet en chemin, sur la route de la vie conjugale et familiale. »

Le synode sur la famille a donné l’occasion au pape François de mettre en garde, dans son discours de clôture de la première session, contre « la tentation de descendre de la Croix, pour faire plaisir aux gens », au lieu d’y rester attaché pour faire plaisir au Père (18 octobre 2014).
LA VICTOIRE DE LA CROIX, NOTRE SEULE ESPÉRANCE.

À l’Angélus du dimanche 14 septembre, en la fête de l’Exaltation de la Sainte Croix, le Pape a déclaré : « Un non-chrétien pourrait nous demander : Pourquoi “ exalter ” la Croix ?

« Nous pouvons répondre que nous n’exaltons pas n’importe quelle croix : nous exaltons la Croix de Jésus, parce qu’en elle s’est révélé au plus haut point l’amour de Dieu pour l’humanité : “ Dieu a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique. ” (Jn 3, 16) Le Père a “ donné ” le Fils pour nous sauver, et cela a comporté la mort de Jésus et sa mort sur la Croix.

« Pourquoi la Croix a-t-elle été nécessaire ? À cause de la gravité du mal qui nous tenait esclaves. La Croix de Jésus exprime ces deux choses : toute la force négative du mal, et toute la douceur toute-puissante de la miséricorde de Dieu. La Croix semble déclarer la faillite de Jésus mais, en réalité, elle marque sa victoire.

« Sur le Calvaire, ceux qui se moquaient de lui disaient : “ Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix. ” (Mt 27, 40) Mais c’est l’inverse qui était vrai : c’est précisément parce qu’il était le Fils de Dieu, que Jésus était là, sur la Croix, fidèle jusqu’au bout au dessein d’amour du Père. Et c’est justement pour cela que Dieu a “ exalté ” Jésus (Ph 2, 9), en lui conférant une royauté universelle.

« Et quand nous tournons notre regard vers la croix où Jésus a été cloué, nous contemplons le signe de l’amour, de l’amour infini de Dieu pour chacun de nous et la racine de notre salut. De cette Croix jaillit la miséricorde du Père qui embrasse le monde entier. Par la Croix du Christ, le Malin est vaincu, la mort est battue, la vie nous est donnée, l’espérance revit. C’est important : par la Croix du Christ, l’espérance nous est redonnée. La Croix de Jésus est notre seule espérance !

« Voilà pourquoi l’Église “  exalte  ” la Sainte Croix, voilà pourquoi nous, chrétiens, nous bénissons par le signe de Croix. C’est-à-dire que nous “  n’exaltons pas  ” les croix, mais la Croix glorieuse de Jésus, signe de l’immense amour de Dieu, signe de notre salut et chemin vers la Résurrection. Voilà notre espérance.

« Et quand nous contemplons et célébrons la Sainte Croix, nous pensons avec émotion à nos si nombreux frères et sœurs qui sont persécutés et tués à cause de leur foi en Jésus-Christ. » (14 septembre 2014)

La vision du “ troisième secret ” de Notre-Dame de Fatima nous en avertit depuis bientôt cent ans :

À la suite d’ « un Évêque vêtu de Blanc » dont « nous eûmes le pressentiment que c’était le Saint-Père », écrit Lucie, « plusieurs autres évêques, prêtres, religieux et religieuses gravissaient une montagne escarpée, au sommet de laquelle était une grande Croix de troncs bruts comme si elle était en chêne-liège avec l’écorce. Le Saint-Père, avant d’y arriver, traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de douleur et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande Croix, il fut tué par un groupe de soldats qui lui tirèrent plusieurs coups et des flèches. Et de la même manière moururent les uns après les autres les évêques, prêtres, religieux et religieuses, et divers laïcs, des messieurs et des dames de rangs et de conditions différentes.

« Sous les deux bras de la Croix, il y avait deux Anges, chacun avec un vase de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs, et avec lequel ils arrosaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »

Ainsi s’achève le grand “ secret ” confié le 13 juillet 1917 à trois enfants. Notre-Dame ajouta ceci que les événements dramatiques des 7, 8 et 9 janvier marquent d’une actualité urgente :

« Quand vous récitez le chapelet, dites après chaque mystère : “ Ô mon Jésus, pardonnez-nous, ­préservez-nous du feu de l’enfer, attirez au Ciel toutes les âmes, surtout celles qui en ont le plus besoin. ” »Ainsi soit-il !

frère Bruno de Jésus-Marie

24 février 2015

[Riposte Catholique] Le Motu Proprio à Singapour


SOURCE - Riposte Catholique - 24 février 2015

Nous avons déjà évoqué l’application du Motu Proprio en Asie (avec Hong-Kong). La messe dans la forme extraordinaire est également célébrée à Singapour. Le pays compte un seul diocèse érigé en 1972 pour environ 300 000 catholiques, 31 paroisses et 141 prêtres. 4 prêtres du diocèse célèbrent régulièrement la messe dans la forme extraordinaire.

Un prêtre de la Fraternité Saint-Pierre, l’abbé Duncan Wong, originaire de Malaisie, avait enseigné dans une école catholique de Singapour avant son entrée au Séminaire. Lorsque, après son ordination en 2003, il est venu visiter des amis et a célébré la messe, cela a suscité un certain intérêt de beaucoup de fidèles. (La FSSPX est présente à Singapour, voir plus bas*).

Une communauté de fidèles s’est donc développée… et compte aujourd’hui près de 200 fidèles réguliers. En 2013, l’archevêque de Singapour, Mgr William Goh Seng Chye, a attribué aux fidèles l’église Saint Joseph, une église historique du centre de la ville. Le journal Regina Magazine consacre d’ailleurs plusieurs pages à la communauté singapourienne. Au moment où notre post allait être envoyé, nous trouvons la dernière lettre de Paix Liturgique qui complétera grandement notre propos!!!

* La Fraternité Saint-Pie X est implantée en Asie depuis une quinzaine d’années à Singapour, qui est aussi le siège du District d’Asie (3 prêtres résident sur place).

[Paix Liturgique] La belle histoire du retour de la messe traditionnelle à Singapour: les signes des temps

L'abbé Tay / Saint-Joseph de Singapour.
SOURCE - Paix Liturgique - Lettre n°478 - 24 février 2015

Le numéro 12 du magazine de langue anglaise Regina est consacré à des portraits de paroisses vouées à la forme extraordinaire de la messe.

Parmi ceux-ci, celui sur la naissance de la communauté Summorum Pontificum de Singapour a retenu notre attention. On va voir pourquoi.
I – UNE RENAISSANCE ÉTONNANTE - L’essentiel de l’article de Regina Magazine
« Le long et tortueux chemin vers Saint-Joseph »
par Estella Young, Regina Magazine n° 12, février 2015

Le catholicisme est arrivé à Singapour en 1832 avec des prêtres des Missions étrangères de Paris (MEP). Ils y construisirent des églises et firent venir des religieux pour ouvrir des écoles, des orphelinats et un séminaire. Aujourd’hui, certaines des écoles catholiques figurent parmi les meilleures du pays et sont renommées pour offrir une excellente formation scolaire en même temps qu’une solide formation morale et éthique. En 2012, on décomptait 303 000 catholiques à Singapour (5,7% de la population), pour 31 églises et environ 140 prêtres, dont quatre célèbrent la forme extraordinaire de la messe.

L’histoire de la messe traditionnelle à Singapour est l’histoire du grain de moutarde. Ce grain a été arrosé non pas par des occidentaux expatriés ou des prêtres étrangers mais par les prières patientes et le soutien matériel d’un tout petit groupe de laïcs, demeurés fidèles même quand le sol semblait terriblement pierreux.

Jusqu’en 2005, la liturgie traditionnelle était peu connue à Singapour. Les archevêques ne l’avaient pas autorisée pendant des décennies. Les plus anciens gardaient le souvenir de deux messes célébrées par les supérieurs de la Fraternité Saint-Pierre (FSSP) au cours de visites faites à un candidat séminariste potentiel, Duncan Wong, enseignant dans une école catholique de la ville. L’archevêché ayant interdit toute publicité, l’assistance y était réduite.

En août 2005, l’abbé Duncan Wong, devenu prêtre pour la FSSP et nommé à Sydney, s’arrête à Singapour pour rendre visite à ses nombreux amis et soutiens et l’archevêque, Mgr Chia, l’autorise à célébrer deux messes dans une église paroissiale. Pour chanter le propre et l’ordinaire de ces messes, la commission archidiocésaine de musique liturgique lance alors un appel aux volontaires. La nouvelle connue, des centaines de personnes assistent aux deux messes : jeunes et vieux, laïcs et religieux. Pour la plupart des jeunes, c’est leur premier contact avec la liturgie traditionnelle.

Cinq de ces jeunes décident alors de prolonger cet événement en fondant la première chorale grégorienne masculine de Singapour, le 26 décembre 2005 : la Schola Cantorum Sancti Gregorii Magni . Plusieurs douzaines de jeunes catholiques vont bien vite se retrouver autour des vêpres et complies chantées dans la forme ordinaire un dimanche par mois dans une paroisse du centre-ville et suivies d’un moment de convivialité dans un café voisin.

En 2006 et 2007, en plus des vêpres mensuelles, la Schola et une équipe de servants de messe, dont un ancien séminariste de la FSSP, organisent plusieurs messes chantées, novus ordo, en latin. Le directeur de la Schola, Francis Nyan, qui a étudié le grégorien à Solesmes, est invité par l’archidiocèse à diriger deux leçons d’introduction au chant grégorien.

Mais les fidèles ont de plus grands espoirs. Certains prennent contact avec différents prêtres jusqu’à ce que l’un d’entre eux, l’abbé Augustine Tay, vicaire à Notre-Dame-du Perpétuel-Secours, indique être disposé à accueillir la communauté dans sa paroisse. Début 2008, les vêpres mensuelles deviennent une messe mensuelle, novus ordo, célébrée par l’abbé Tay. L’abbé Tay en profite pour apprendre la forme extraordinaire avec l’aide de l’ancien séminariste de la FSSP et commence à célébrer la messe basse en semaine.

Pour le groupe de fidèles, cette messe mensuelle a des allures de mobilisation générale. Si la plupart des jeunes gens rejoignent la Schola ou l’équipe des servants de messe, trois sœurs issues d’une famille tradi de 10 enfants cousent les ornements et le linge d’autel avec soin et amour. Les autres se financent pour réaliser ou acquérir le mobilier liturgique et les objets du culte.

Au bout d’un an, l’abbé Tay se voit confier l’aumônerie d’une maison de retraite. Au lieu de la messe novus ordo mensuelle, il y célèbre, dans la petite chapelle de l’établissement, la forme extraordinaire, le dimanche et les jours de fête. Un petit nombre mais toujours croissant de fidèles l’y retrouve.

Finalement, le directeur d’une école privée catholique, offre à la communauté la possibilité d’utiliser la chapelle de l’école un dimanche sur deux. De 2009 à 2013, la messe y est offerte, tout d’abord dans la forme ordinaire puis, à partir de 2011, exclusivement dans la forme extraordinaire.

En ce nouveau lieu, le groupe s’épanouit. Des baptêmes et des mariages y sont célébrés. L’intérêt pour la messe traditionnelle est stimulé quand le principal journal de langue anglaise e Singapour publie en 2012 un reportage à la communauté lors d’un numéro spécial de Pâques consacré aux groupes chrétiens originaux. Quelques mois plus tard, la Schola est invitée à chanter dans la principale salle de concerts de l’île pour un festival de musique sacrée et est réinvitée en 2013.

Cependant, ce n’est qu’avec l’arrivée d’un nouvel archevêque en mai 2013 que la communauté finit par avoir plein droit de cité. Mgr William Goh considère en effet prioritaire de tendre la main à tous les groupes de l’archidiocèse qui s’attachent à nourrir la spiritualité des fidèles. Non seulement, en septembre 2013, il assiste au chœur à la célébration de la forme extraordinaire, une première dans l’archidiocèse [créé après la réforme liturgique, NdT], mais établit aussi, en octobre 2013, la communauté en l’église Saint-Joseph, l’une des plus anciennes et des plus belles églises de Singapour. Il décrète pour l’occasion que la messe y sera hebdomadaire et non plus bimensuelle et lui assigne l’abbé Tay pour célébrant.

Aujourd’hui quatre prêtres offrent la messe dominicale à Saint-Joseph. L’assistance y est de 200 personnes et cette dynamique communauté bénéficie du catéchisme, d’un cours de latin et plusieurs de ses jeunes membres expérimentent l’appel de la vie religieuse, sur l’île mais aussi à l’étranger.

[…]

L’église Saint-Joseph accueille un mélange éclectique de fidèles. Aux messes ordinaires en anglais, s’ajoutent des messes dominicales en français, vietnamien et tagalog. Le curé, l’abbé Yeo, s’y est montré très accueillant pour la forme extraordinaire. Il ne la célèbre pas mais reçoit les confessions avant la messe et assiste pour la distribution de la communion.

II – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) « Dans l’Église d’aujourd’hui on parle beaucoup de créer des communautés et de s’engager activement dans la nouvelle évangélisation. Nous avons réussi à faire l’un et l’autre tout simplement en nous retrouvant autour d’un objectif commun : prier et adorer le Seigneur. Concentrés sur le Christ, nous avons irradié le Christ aux autres et à tout le diocèse dans son ensemble. » Ce témoignage d’un jeune fidèle de Singapour (20 ans), rapporté par le magazine américain, est la synthèse parfaite de ce que l’on pourrait appeler l’effet Summorum Pontificum : la force de la liturgie traditionnelle tient au fait qu’elle est toute centrée sur la valorisation de la présence réelle du Christ lors de la consécration et le rappel solennel du mystère de son sacrifice renouvelé de manière non sanglante. Voilà ce qui attire la jeunesse et refait la jeunesse de l’Église. À Singapour comme ailleurs.


2) Lors de la messe à laquelle il a assisté en septembre 2013, Mgr Goh a prononcé l’homélie et expliqué le sens du motu proprio de Benoît XVI. En particulier, il a rappelé que « l’unité dans la diversité caractérise » la liturgie de l’Église et que les préférences liturgiques ne devraient jamais être un motif de division ou de discorde entre catholiques. Selon lui, la vraie mesure de la prière est de savoir si elle nous porte ou non à un plus grand amour de Dieu et de notre prochain. Il a en outre souligné que la forme extraordinaire mérite le plus grand respect pour avoir nourri les saints de l’Église pendant des siècles et, surtout, qu’elle préserve un sens du mystère sacré qui attire les fidèles.

3) Depuis 1999, Singapour est le siège du district d’Asie de la Fraternité saint Pie X. Deux messes dominicales réunissant plus d'une centaine de fidèles et la messe quotidienne sont célébrées en son prieuré. Il est intéressant de noter une fois encore combien l’offre diocésaine de la messe traditionnelle n’assèche pas les communautés de la FSSPX mais au contraire fait apparaître de nouveaux fidèles. L’inverse aussi est vrai si l’on pense à l’exemple de Rambouillet où plus de 200 fidèles n’ont droit à l’application de Summorum Pontificum qu’une fois par mois en l’église Saint-Lubin et où la FSSPX s’est installée depuis 2011 (précisément aux Essarts-le-Roi) en rassemblant rapidement une centaine de fidèles. En vérité, la multiplication des lieux de culte traditionnels augmente de manière conséquente, même si non linéaire, le nombre des fidèles. En outre, comme notre campagne de sondages l’avait démontré et comme le confirme le cas de Singapour, l’existence de catholiques silencieux désireux de bénéficier du trésor que représente la liturgie traditionnelle se vérifie également à travers le monde entier.

4) Le cas de Singapour montre aussi, et c'est une constante, que parmi les fidèles potentiels, les jeunes répondent souvent positivement dès lors qu’il leur est donné de connaître la liturgie traditionnelle. C’est ce que soulignait le cardinal Cañizares, alors préfet de la Congrégation pour le Culte divin, dans la préface (voir notre lettre 448) qu’il a donnée à la thèse publiée d'un bénédictin espagnol sur les principes d'interprétation du Motu Proprio Summorum Pontificum (*) : « Le Motu Proprio a en outre donné lieu à un phénomène surprenant pour beaucoup et qui représente un vrai "signe des temps" : l'intérêt que la forme extraordinaire du rite romain suscite chez les jeunes qui ne la connurent jamais comme forme ordinaire. Cet intérêt manifeste une soif de "langages" qui sortent de l'ordinaire et qui nous entraînent vers de nouvelles frontières que de nombreux pasteurs n'avaient jamais envisagées. Ouvrir le trésor liturgique de l'Église à tous les fidèles a rendu possible la découverte des richesses de notre héritage à ceux qui les ignoraient, cette forme liturgique suscitant de nombreuses vocations sacerdotales et religieuses à travers le monde, prêtes à donner leur vie au service de l'évangélisation. » Cette « soif » de forme extraordinaire que nous découvrons à Singapour, nous l'avions aussi effleurée à Hong-Kong dans notre entretien avec le cardinal Zen (voir notre lettre 468). Elle explique pourquoi les jeunes fidèles de Singapour passent outre l'horaire peu familial de leur messe : 15 heures ! Comme nous l'a confié l'un d'entre eux : « Oui, l'horaire n'est pas favorable mais cela crée entre nous des liens forts, un esprit de communauté dans la communauté qui est unique. »

(*) Los Principios de interpretación del motu proprio Summorum Pontificum, par le Père Alberto Soria Jiménez, Éditions Cristiandad, Madrid, 2014.

22 février 2015

[Amandine Faraud - La Voix du Nord / Boulogne-sur-Mer] Chez les traditionalistes, la messe n’a pas changé depuis des siècles

SOURCE - Amandine Faraud - La Voix du Nord / Boulogne-sur-Mer - 22 février 2015

Dimanche, 11 heures moins dix, les cloches de l’église Saint-Louis se mettent à sonner. Les fidèles se saluent sur le trottoir de la rue Félix-Adam avant que la messe ne commence. Là, rien ne les distingue d’autres croyants catholiques. Mais une fois dans cette église traditionaliste, ils entrent dans une ambiance bien particulière. À chaque passage en face de l’autel, ils posent un genou à terre. Tous, ou presque, prient à genoux. L’orgue et la chorale sont omniprésents et la majorité des chants sont en latin. Comme la messe. Le prêtre murmure face à l’autel, donc dos aux croyants, puis prêche (en français) face à eux.

La communion est plus théâtrale que dans les messes modernes. Devant une grille basse ornée d’un drap blanc, les fidèles s’agenouillent. Le prêtre, de l’autre côté, distribue les hosties directement dans la bouche de chacun.

« C’est un plus beau sacrifice », estime Grégoire. « C‘est plus intérieur. » Depuis son enfance, il a toujours préféré l’église traditionaliste. Sa sœur, Anne, fréquente les deux. «Parce que j’aime l’ouverture. »


Une centaine de fidèles


« Nous n’avons rien n’a changé à ce qui se fait depuis des siècles », commente l’abbé Gaudray. Basé à Croix, il vient tous les deux mois, en remplacement de l’abbé Pouliquen. Tous deux sont membres de la Fraternité Saint-Pie X, fondée en 1970. L’église se modernisait, une partie du clergé ne voulait pas de ce changement. Aujourd’hui, « il y a encore une tension » dans le clergé, estime l’abbé Gaudray. Pour lui, l’église moderne est trop loin des origines pour être dans le vrai. Alors « on reste en retrait ». Dans le Boulonnais, on compterait près de cent fidèles à Saint-Louis. Dimanche dernier, ils étaient une petite cinquantaine lorsque les cloches ont retenti.

21 février 2015

[Yves Daoudal] François et les tradis

SOURCE - Yves Daoudal - 21 février 2015
François a reçu hier le clergé de Rome. Le compte rendu de l’agence Zenit en anglais s’étend longuement sur ce que le pape a dit à propos de la liturgie. Notamment la « forme extraordinaire », et le motu proprio Summorum Pontificum :
Le Pape François a expliqué que ce geste de son prédécesseur, « un homme de communion », avait l’intention d’offrir « une main courageuse aux lefebvristes et traditionalistes », ainsi qu’à ceux qui voulaient célébrer la messe selon les rites anciens. Ce qu’on appelle Messe tridentine, a dit le pape, est une « forme extraordinaire du rite romain », celui qui a été approuvé à la suite du concile Vatican II. Ainsi elle n’est pas considérée comme un rite distinct, mais comme une « forme différente du même rite».
Cependant, le Pape a noté qu’il y a des prêtres et des évêques qui parlent d’une « réforme de la réforme ». Certains d’entre eux sont « saints » et parlent « de bonne foi ». Mais « c’est une erreur », a dit le Pape. Il a ensuite évoqué le cas de certains évêques qui ont accepté des séminaristes traditionalistes qui avaient été chassés d’autres diocèses, sans rechercher des informations sur eux, car « ils présentaient très bien, très pieux ». Ils furent ensuite ordonnés, mais il se révéla plus tard qu’ils avaient «des problèmes psychologiques et moraux». 
Ce n’est pas habituel, mais ça « arrive souvent » dans ces milieux, a souligné le pape, et ordonner ce type de séminaristes c’est comme placer « une hypothèque sur l’Eglise ». Le problème sous-jacent est que certains évêques sont parfois accablés par « le besoin de nouveaux prêtres pour le diocèse ». Par conséquent, le discernement approprié parmi les candidats n’est pas fait, et parmi eux certains peuvent se cacher des « déséquilibres » qui se manifestent ensuite dans les liturgies. En fait, la Congrégation des évêques, a poursuivi le Pontife, a dû intervenir auprès de trois évêques sur trois de ces cas, bien qu’ils ne soient pas produits en Italie.
Je préfère ne pas commenter, car je crains que, bien que je ne sois pas séminariste, on me trouve quelque peu déséquilibré… Car ça arrive si souvent dans ces milieux…

Mais on aura remarqué évidemment la pique contre Benoît XVI, qui est sans doute « saint » et de « bonne foi » mais qui se trompe sur la liturgie… (Parce que François est devenu subito un maître en la matière…)

L’autre grand sujet abordé dans cette rencontre, si l’on en croit Zenit, c’est la question posée par le Père (?) Giovanni Cereti, qui enseigne dans diverses facultés de théologie, et qui « a reçu une dispense après s’être marié » - dispense du célibat sacerdotal, et de toute activité sacerdotale.

D’abord Zenit nous précise que le Père (?) Giovanni Cereti est l’auteur d’un livre « dans lequel il établit que pendant le premier millénaire les gens en situation d’adultère étaient réadmis dans la communauté après une période de pénitence et pouvaient recevoir la communion en étant de nouveau mariés ».

Bien sûr, il fallait qu’il soit là, puisque c’est l’obsession de François. Zenit oublie simplement de rappeler que ce livre, opportunément réédité en 2013, a été publié en 1977, et qu’il fut immédiatement démoli par un spécialiste de la question, le Père jésuite Henri Crouzel (par ailleurs spécialiste d’Origène et d’orientation quelque peu progressiste, mais historien rigoureux).

Mais le Père (?) Giovanni Cereti a plusieurs cordes à son arc pourri. Sa question, plus tordue encore, était de savoir si à l’avenir les prêtres qui ont obtenu une dispense pourront de nouveau célébrer la messe… En bref, pour avoir des prêtres mariés, il suffirait que les prêtres se marient, demandent une dispense du célibat, et, munis de leur dispense, demandent de célébrer de nouveau la messe et les autres sacrements…

« C’est un problème qui n’a pas de solution facile », a répondu le pape. Ajoutant bien sûr que cette question lui tient à cœur, à lui et à l'Eglise. (C’est là qu’il y a des jours où je me demande si je fais bien partie de la même Eglise.)