Je vous avais promis quelques
objections, et les réponses que nous pouvons y faire.
Voici donc la première objection,
qui est peut-être la seule vraiment sérieuse, celle des déclarations de Mgr
Lefebvre affirmant, principalement après 1988, vouloir attendre la
« conversion » de Rome avant de reprendre des démarches pour une
réconciliation. Cette position est habituellement présentée sous cette
formule : pas d’accord pratique avant un accord doctrinal.
Cela est vrai et bien connu, mais
Mgr lui-même reconnaissait que cela prendrait du temps, beaucoup de temps, et
qu’il faudrait attendre les signes de la Providence pour discerner le moment
opportun. Et en cela, il s’en remettait totalement aux supérieurs de la
Fraternité, ne cessant de nous répéter : pour moi, c’est fini… vous avez
vos évêques, vos supérieurs, vos séminaires, vos prieurés, je vous ai donné
tout ce que j’avais reçu… à vous maintenant de continuer sans moi !
En outre, et ceux qui furent des premiers compagnons de Monseigneur ne devraient pas l’oublier, au-delà de ses déclarations parfois fracassantes, même aux heures les plus tendues avec Rome, Mgr Lefebvre a toujours agi et réagi en serviteur de l’Église et du Pape et en fils de Rome. Il avait le cœur romain plus que beaucoup d’entre nous, et dans toutes ses interventions même les plus fortes, ceux qui le connaissaient sentaient toujours sous-jacente une vraie tristesse : tristesse analogue à celle de Jésus-Christ pleurant sur Jérusalem mais toujours animé du désir de sauver la cité sainte, tristesse de l’état de l’Église, tristesse de devoir réagir à l’encontre des autorités de l’Église, et tristesse de n’être pas entendu, ni compris. Jamais il n’aurait esquissé le premier pas dans le sens d’une rupture avec Rome, et c’est toujours la « Rome conciliaire » qui a pris l’initiative des mesures de « séparation », pour n’aboutir qu’à le séparer un peu plus de la « Rome conciliaire » en le poussant à se réfugier toujours plus dans le cœur de la « Rome Romaine » ! Romain il fut et romain il est demeuré jusqu’à son dernier souffle. La "Romanité" n'est pas Un vain mot, furent quasiment les derniers mots de son Itinéraire spirituel.
En outre, et ceux qui furent des premiers compagnons de Monseigneur ne devraient pas l’oublier, au-delà de ses déclarations parfois fracassantes, même aux heures les plus tendues avec Rome, Mgr Lefebvre a toujours agi et réagi en serviteur de l’Église et du Pape et en fils de Rome. Il avait le cœur romain plus que beaucoup d’entre nous, et dans toutes ses interventions même les plus fortes, ceux qui le connaissaient sentaient toujours sous-jacente une vraie tristesse : tristesse analogue à celle de Jésus-Christ pleurant sur Jérusalem mais toujours animé du désir de sauver la cité sainte, tristesse de l’état de l’Église, tristesse de devoir réagir à l’encontre des autorités de l’Église, et tristesse de n’être pas entendu, ni compris. Jamais il n’aurait esquissé le premier pas dans le sens d’une rupture avec Rome, et c’est toujours la « Rome conciliaire » qui a pris l’initiative des mesures de « séparation », pour n’aboutir qu’à le séparer un peu plus de la « Rome conciliaire » en le poussant à se réfugier toujours plus dans le cœur de la « Rome Romaine » ! Romain il fut et romain il est demeuré jusqu’à son dernier souffle. La "Romanité" n'est pas Un vain mot, furent quasiment les derniers mots de son Itinéraire spirituel.
Mais relisons un peu l’histoire. D’abord, la
Fraternité – qui n’est pas née pour s’opposer au concile ou à Rome, mais pour
donner une structure dans l’Église aux prêtres formés au séminaire de
Fribourg-Ecône – a été reconnue et érigée par et dans « l’Église
conciliaire ». Mgr Lefebvre et Mgr Charrière s’étaient connus à Dakar
lorsque l’évêque de Fribourg était venu pendant une quinzaine de jours visiter
les Suisses installés au Sénégal. Ils avaient sympathisé et Mgr Lefebvre avait
maintenu les relations, sans plus… Mgr
Charrière était en réalité un véritable esprit conciliaire, avant même Vatican
II, représentant avant l’heure de ce que Mgr Benelli appela « l’Église
conciliaire ». Et c’est pourtant lui qui a érigé l’institut de droit
diocésain appelé : « Fraternité sacerdotale Saint-Pie X ». Entre
le 1° novembre 1970 et le 6 mai 1975, la Fraternité était donc bel et bien une
œuvre de « l’Église conciliaire », et cela ne gênait nullement notre
fondateur !
Et c’est dans cette période que se situent les deux
actes « fondateurs » de sa position immuable, actes révélateurs de
ses dispositions intimes: La
déclaration du 21 novembre 1974 : « Oui à la Rome éternelle, non à la
Rome moderniste » ! Il reconnaissait lui-même que cette déclaration était
forte, et il nous en a donné l’exégèse à de multiples reprises : non pas
le refus de tout ce qui venait de Rome, mais le refus de ce qui en venait sous
l’inspiration de l’esprit moderniste, étranger à la tradition catholique.
Et il y eut aussi, sa fière réponse à l’éditorial de l'abbé de
Nantes où celui-ci l'incitait à rompre avec Rome, en février 1975 ! C’est dans
la lettre de Mgr Lefebvre à l'abbé de Nantes qu’il lui répond : « Sachez que si un Évêque rompt avec Rome ce ne sera pas moi. Ma « Déclaration
» le dit assez explicitement et fortement. » Cette lettre est du 19 mars 1975 !
Libre aux évêques indépendants de
« l’Église Catholique » d’opérer cette rupture, mais qu’ils ne se
réclament pas d’une soi-disant fidélité à la pensée de Mgr Lefebvre pour cela,
et qu’ils cessent de nous faire rire jaune en parlant de « la
trahison des autorités actuelles de la Fraternité Saint-Pie X à l'esprit et à
l'œuvre de Monseigneur Marcel Lefebvre ». Qu’ont accepté nos supérieurs
parmi ce que refusait Mgr Lefebvre : la nouvelle messe ? Les théories
conciliaires ? La liberté religieuse ? Le culte de l’homme ?
L’œcuménisme indifférentiste ? Ou bien encore, ont-ils perdu cette
romanité si chère à Monseigneur ? Au lieu de critiquer et condamner Mgr
Fellay, que ces messieurs fassent des propositions positives et constructives.
Que nous proposent-ils comme solution ? Rien, à part le refus et la
rupture !
Puis-je rappeler au passage cette belle déclaration de l’abbé Williamson, directeur
du séminaire américain de Ridgefield et actuel chef de file de la Résistance,
le 8 décembre 1987 - après donc le “scandale" d’Assise - : « Prions pour la Fraternité ! Prions en
particulier pour le cardinal Gagnon qui revient aujourd’hui au séminaire de la
Fraternité en Suisse, après avoir terminé sa visite d’un mois dans les maisons
de la Fraternité en Suisse, en France et en Allemagne. Prions pour lui,
lorsqu’il rédigera son rapport sur la Fraternité à l’intention du Saint-Père,
afin qu’il présente la vérité de telle sorte qu’il gagne l’approbation du pape.
Prions pour le pape pour qu’il puisse faire ce qu’il devrait clairement faire :
donner la juridiction et un statut à la
Fraternité, laquelle le mérite entièrement. Ceci est absolument nécessaire pour
le bien de l’Église universelle, sans parler de la Fraternité.
Il est humain, et je ne le reprocherai à
personne, de changer parfois d’avis, mais il ne me semble pas correct d’accuser
de trahison ceux qui n’ont pas changé ! Et quand bien même ils auraient
changé de position en raison de nouvelles circonstances, ne peut-on leur accorder
la même bienveillance qu’à Mgr Williamson ?
Il y eut encore ces mots de Mgr aux futurs
évêques : « Je vous conjure de demeurer attachés au Siège de
Pierre, à l’Église Romaine, Mère et Maîtresse de toutes les Églises, dans la
foi catholique intégrale ».
Et nous pouvons conclure avec les
propos de Mgr lui-même, fidèle à ses premières positions jusqu’au bout, dans
les considérations qu’il adressait aux diacres en retraite à Montalenghe en
juin 1989, et donc après les sacres épiscopaux. Il leur donnait une dernière
fois le sens de sa déclaration de 1974 : « Je pense quand même que
nous avons besoin d’un lien avec Rome… Rome, c’est quand même là que se trouve
la succession de Pierre, la succession des apôtres, de l’apôtre Pierre, de la
primauté de Pierre et de l’Église ; si on coupe avec ce lien, on est
vraiment comme une embarcation qui est larguée au grès des flots, sans plus
savoir à quel lieu nous sommes rattachés et à qui nous sommes rattachés. Je
pense qu’il est possible de voir dans la personne qui succède à tous les papes
précédents, puisque s’il occupe le siège, il a été reçu comme évêque de Rome à
saint Jean de Latran, or c’est l’évêque de Rome qui est le successeur de
Pierre, il est reconnu comme successeur de Pierre par tous les évêques du monde.
Bon ! Qu’est-ce que vous voulez, on peut penser qu’il est vraiment le
successeur de Pierre ! Et en ce sens nous nous rattachons à lui et à
travers lui à tous ses prédécesseurs, ontologiquement si je puis dire. Et puis
ensuite, ses actions, ce qu’il fait, ce qu’il pense, et les idées qu’il répand,
c’est autre chose, bien sûr. C’est une grande douleur pour l’Église catholique,
pour nous, que nous soyons obligés de constater une chose semblable. Mais
je pense que c’est la solution qui correspond à la réalité. » (N.B. il
s’agit de la transcription écrite fidèle d’un texte parlé, qui exprime bien la
pensée, mais ne peut pas toujours respecter la grammaire).
Ces vérités, bien connues déjà
par les esprits bienveillants, peuvent nous aider à y voir clair et à tenir
bon, sans nous laisser séduire par ces lugubres et tristes sirènes de malheur
qui oublient ce trésor caché dans l’âme de Mgr. Lefebvre, qui fut pourtant leur
père : l’amour de Rome où se trouve et se trouvera jusqu’à la fin des
temps la succession de Pierre, la succession des apôtres, de l’apôtre Pierre, de
la primauté de Pierre et de l’Église !