SOURCE - Paix Liturgique - Lettre 413 - 12 novembre 2013
Traitant de la diffusion de la liturgie en forme extraordinaire, nous évoquons généralement dans nos lettres le sujet de la Messe, parce qu’elle est le cœur de la liturgie et le « soleil des sacrements ». Cependant, la réforme liturgique de la fin des années soixante s’est voulue totale et a transformé tout le rite latin : non seulement la Messe mais aussi chacun des sacrements et des sacramentaux (bénédictions par exemple). Parce que la célébration des autres sacrements est moins fréquente et moins centrale que la célébration de l’Eucharistie, on ne s’y est pas autant intéressé. Il n’en demeure pas moins qu'ils font pleinement partie du trésor de la liturgie traditionnelle qu’il est important de faire fructifier pour le bien des âmes. Surtout, ces sacrements et sacramentaux sont souvent de bonnes occasions pour amener ou ramener de nouvelles âmes au Seigneur car ils ont souvent une dimension familiale et sociale que la Sainte Messe a malheureusement bien souvent perdue.
Traitant de la diffusion de la liturgie en forme extraordinaire, nous évoquons généralement dans nos lettres le sujet de la Messe, parce qu’elle est le cœur de la liturgie et le « soleil des sacrements ». Cependant, la réforme liturgique de la fin des années soixante s’est voulue totale et a transformé tout le rite latin : non seulement la Messe mais aussi chacun des sacrements et des sacramentaux (bénédictions par exemple). Parce que la célébration des autres sacrements est moins fréquente et moins centrale que la célébration de l’Eucharistie, on ne s’y est pas autant intéressé. Il n’en demeure pas moins qu'ils font pleinement partie du trésor de la liturgie traditionnelle qu’il est important de faire fructifier pour le bien des âmes. Surtout, ces sacrements et sacramentaux sont souvent de bonnes occasions pour amener ou ramener de nouvelles âmes au Seigneur car ils ont souvent une dimension familiale et sociale que la Sainte Messe a malheureusement bien souvent perdue.
Le plus pastoral de ces sacrements est très certainement le baptême et c'est aussi celui qui a été le plus transformé par la réforme liturgique. Si certains baptêmes modernes se résument à une séance de questions-réponses et d'applaudissements en fin de messe, le prêtre allant parfois jusqu'à laisser les parents et parrains accomplir les sacramentaux, nous établirons ici un parallèle entre les deux formes du baptême (celle moderne et celle traditionnelle) célébrées conformément aux rituels.
Dans la forme extraordinaire, le petit rituel latin-français de 1956 (Rituale parvum ad usum diœcesium gallicæ linguæ) permet de dire un grand nombre d’oraisons et formules en français. Il n’est donc pas besoin de fournir, en début ou au cours de la cérémonie, d’explications supplémentaires (même si, dans un certain nombre de cas, une catéchèse antérieure donnée aux parents sur le sacrement conféré, est fort utile). Les rites et les prières expliquent eux-mêmes l’action sacrée de la manière la plus pédagogique qui soit, à savoir liturgiquement. Entre l'usage de la langue française pour certains passage du rituel et la force des symboles utilisés (commencement au porche de l'église, usage du sel, nombreux signes de croix, exsufflation), le baptême traditionnel est facilement accessible à tous. En ce sens, c'est une bonne initiation à la forme extraordinaire de la liturgie.
Paradoxalement, le baptême en forme ordinaire représente une cérémonie nettement plus longue, bien plus discourante, avec une liturgie de la parole et une véritable homélie. Si nous étions polémiques, nous dirions qu’elle est plus « bavarde », et incontestablement plus faible : de même que, dans la Messe en forme ordinaire, l’aspect de sacrifice propitiatoire apparaît moins, dans le baptême en forme ordinaire, l’aspect de combat contre le démon est moins marqué, ce qui est notamment caractérisé par la disparition des exorcismes proprement dits et des rites à valeur d’exorcisme. De même, l'accueil dans l'Église est symboliquement plus marqué dans la forme extraordinaire puisque tous les baptêmes commencent, physiquement, au seuil de l'église alors que, dans la forme ordinaire, l'accueil n'est généralement signifié qu'oralement.
Précisons qu’on n’envisagera ici que le cas du baptême des petits enfants quand bien même il existe un rituel de baptême des adultes et que ce rituel a une certaine prévalence sur celui des enfants : le rituel traditionnel pour les enfants (promulgué par Paul V en 1614) est une contraction des cérémonies prévues pour les adultes ; et on ne saurait négliger que la pastorale sacramentelle et catéchétique actuelle met en avant le catéchuménat des adultes comme modèle de toute initiation chrétienne. Ce que nous allons dire ne prétend pas être une étude systématique sur le baptême, ses cérémonies et sa pastorale, néanmoins les remarques qui suivent nous paraissent valoir tant pour les enfants que pour les adultes.
A) La tonalité sacralisante de la forme extraordinaire, la tonalité festive de la forme ordinaire
Pour résumer, on est en présence de deux présentations du baptême : l’un est proprement sacralisant, l’autre donne l’impression d’une festivité plus contemporaine.
C’est d’ailleurs un trait propre à l’ensemble de la liturgie réformée : elle se veut plus « insérée dans la vie ». Elle est de ce fait beaucoup moins rituelle. Et partant, elle infuse moins directement chez les participants le sens sacré de la cérémonie, ou encore le sentiment de la transcendance, que ne le fait la liturgie traditionnelle. Cette dernière fait approcher du surnaturel, paradoxalement en soulignant dans les gestes et les paroles son caractère transcendant (voir Martin Mosebach, La liturgie et son ennemi, éditions Hora Decima, 2005).
Ainsi, le baptême dans la forme ordinaire est précédé d’une formule d’accueil, un peu comme dans une réunion profane : « Le prêtre salue les personnes présentes, dit le rituel français, surtout les parents et les parrains ». Si le prêtre les connaît, il peut les appeler par leur nom.
Ainsi les variations possibles sont fort nombreuses qui, par le fait, déritualisent la cérémonie. Par exemple, si les questions préliminaires sont : « Quel nom avez-vous choisi pour votre enfant ? – N. Que demandez-vous à l’Église de Dieu ? – Le baptême », la rubrique précise (les rubriques sont les textes normalement imprimés en lettres rouges, rubrae, qui indiquent le détail des cérémonies à accomplir dans les livres liturgiques) : « Pour le dialogue ci-dessous, le prêtre peut utiliser d’autres termes et admettre de la part des parents des réponses spontanées ». Les lectures sont au choix, la prière d’intercession (prière universelle) modulable, les monitions modifiables par le prêtre si elles ne sont pas adaptées à l’assemblée. Plusieurs bénédictions de l’eau sont possibles. Il y a, au choix du prêtre, soit une imposition de la main, soit une onction avec huile des catéchumènes.
Ainsi les actes « forts » que sont les exorcismes, sont réduits à une oraison, sous deux formules au choix, dont la portée est émoussée et dont on reparlera. Certes, il faut rappeler que ce sont le geste (l’eau versée sur le front) et la parole (« je te baptise... »), sacramentels du baptême (matière et forme), qui proprement accomplissent cet exorcisme ; mais, de même que la Messe n’est pas réduite aux gestes et paroles consécratoires, le baptême se déploie en cérémonies autour de la partie essentielle, spécifiquement sacramentelle, afin que soit remplie – si possible au mieux – la vertu de religion, et que soit rendue manifeste – si possible au mieux, là aussi – la confession de foi. Les diverses cérémonies et spécialement les exorcismes du rituel traditionnel ont cette fonction d’anticiper et d’expliciter l’action du Christ et de l’Église (comme, par exemple, l’Offertoire de la Messe le fait du caractère sacrificiel propitiatoire et impétratoire du sacrement).
Au contraire, dans le rituel traditionnel de Paul V, les formules sont fixes, cérémonielles. Elles s’accompagnent de gestes extrêmement parlants : exsufflation (esprit du mal chassé, Esprit-Saint infusé) ; signes de croix répétés ; gustation du sel (sel exorcisant, sel de la sagesse, annonce de l’aliment eucharistique) ; deux exorcismes très explicites ; impositions de la main (prise de pouvoir au nom du Christ de l’enfant retenu par le démon) ; rite de l’Ephpheta (salive sur les narines et oreilles pour ouvrir les sens aux choses de Dieu) ; onctions obligatoires d’huile des catéchumènes (huile du salut, qui est en fait un autre type d’exorcisme) ; passage de l’étole violette de pénitence, dont on use pour toute la cérémonie préparatoire, à l’étole blanche de joie, pour le baptême proprement dit. Limpides sont les effets du sacrement, qui confère la grâce sanctifiante à l’enfant baptisé, qui efface le péché originel de son âme, qui lui imprime le caractère d’enfant de Dieu et de membre de l’Église, apte aux autres sacrements.
B) « Revêtez-vous de l'armure de Dieu, afin de pouvoir résister aux embûches du diable »(Éphésiens 6, 11)
On pourrait résumer ainsi : la forme extraordinaire présente le baptême comme une infusion de la vie divine dans une dynamique de combat explicite contre l’emprise du démon à cause du péché originel ; la forme ordinaire marque beaucoup moins cette perspective.
Le Catéchisme de l’Église catholique affirme ceci des effets du sacrement du baptême : « Par le Baptême nous sommes libérés du péché et régénérés comme fils de Dieu, nous devenons membres du Christ et nous sommes incorporés à l’Église et faits participants de sa mission » (n°1213). Ce que confirment les premiers mots concernant le baptême des enfants : « Naissant avec une nature déchue et entachée par le péché originel, les enfants eux aussi ont besoin de la nouvelle naissance dans le Baptême afin d’être libérés du pouvoir des ténèbres et d’être transférés dans le domaine de la liberté des enfants de Dieu, à laquelle tous les hommes sont appelés » (n°1250).
Ainsi, quand à la fin de ces cérémonies d’accueil, dans l’un comme dans l’autre rituel, le prêtre déclare : « N., entrez dans la maison de Dieu afin d’avoir part avec le Christ pour la vie éternelle », et que l’enfant pénètre dans l’église, guidé par le prêtre, c’est bien cette libération du pouvoir des ténèbres que le baptême va produire qui est signifiée, de même que l’incorporation au Corps du Christ.
Dans le rituel selon la forme extraordinaire, le prêtre, revêtu d’une étole violette – après l’interrogation sur la demande de baptême et le rappel du fondement de la vie chrétienne qu’est le double commandement de la charité – souffle trois fois sur le visage de l’enfant et prononce ces paroles : « Sors de cet enfant, esprit impur, et cède la place à l’Esprit-Saint Paraclet ». C’est l’exsufflation. Puis, il signe l’enfant sur le front et le cœur. Plus loin, dans la cérémonie, après le dernier exorcisme et la triple renonciation à Satan, ses œuvres et ses pompes, le prêtre fera une seconde signation double, cette fois avec l’huile des catéchumènes, l’huile de combat, sur la poitrine et entre les épaules. Il semble que ce soit de ces cérémonies baptismales qu’est née la coutume pour les chrétiens de tracer sur eux, d’abord de petits signes de croix, puis en Occident un grand signe, pour se placer sous la puissante protection de la Croix contre les tentations, comme pour confesser leur foi et la consécration de leurs activités à Jésus-Christ. Ainsi, « si tu es tenté, signe-toi le front avec piété, car c’est là le signe de la Passion, connu et éprouvé contre le diable pourvu que tu le fasses avec foi, non pour être vu des hommes, mais en le présentant avec habileté comme un bouclier » (Hippolyte de Rome, 170-235) ; de même, saint Ambroise de Milan (340-397) : « Nous avons le signe de la croix sur notre front, sur notre cœur et sur nos bras [on comprend difficilement autre chose que les épaules] : sur notre front, parce que nous devons toujours confesser Jésus-Christ ; sur notre cœur, parce que nous devons toujours l’aimer ; sur nos bras parce que nous devons toujours travailler pour lui. » Quoi qu’il en soit de leur origine, ces textes et pratiques antiques confirment l’orientation de combat spirituel et d’exorcisme des signations au cours du baptême.
L’imposition de la main – signe d’autorité qui brise « les liens par lesquels Satan le tenait attaché » – et l’exorcisme sur le sel qui suivent, se placent dans une même dynamique débouchant sur le premier exorcisme : « Je t’adjure, esprit impur, au nom du Père + et du Fils + et du Saint-Esprit + , de sortir et de t’éloigner de ce servant de Dieu... ».
Un autre signe de croix sur le front : « Et ce signe de la sainte + croix que nous traçons sur son front, toi, démon maudit, n’aie jamais l’audace de le profaner, nous te l’ordonnons par le même Jésus-Christ Notre-Seigneur », précède une oraison. Vient alors l’invitation à entrer dans l’église que nous avons déjà relevée.
Dans le rituel selon la forme ordinaire, les cérémonies d’accueil sont plus courtes ; mais plus encore que leur brièveté, c’est la signification qui leur est donnée qui, par contraste avec ce qui précède, attire l’attention. Après l’interrogation sur la demande de baptême, le prêtre, vêtu dès le départ d’une étole blanche (ou « d’une couleur qui marque la joie »), trace un signe de croix sur le front de l’enfant et déclare : « N…, la communauté chrétienne t’accueille avec joie. En son nom, je te marque de la croix, le signe du Christ, notre Sauveur. Et vous, ses parents (son parrain et sa marraine), vous le marquerez après moi de ce même signe. » Ce qui est immédiatement suivi par l’invitation à entrer « dans la maison de Dieu afin d’avoir part avec le Christ pour la vie éternelle ». La procession vers le lieu du baptême se fait alors en chantant le psaume 99 (100), psaume de louange par excellence, ou un autre chant de tonalité semblable.
Dans le rituel traditionnel, le prêtre, ayant mis un pan de son étole violette sur l’épaule de l’enfant, le conduit jusqu’au lieu du baptême en disant, avec l’enfant (son parrain), le Credo et le Pater.
Nous sommes ici en présence de ce qui est sans doute l’exemple le plus frappant de transcription dans la liturgie rénovée, à la suite du concile Vatican II, de l’extrême difficulté de la profession moderne de la foi – y compris dans cette forme particulière qu’est la liturgie – à parler de Satan et des fins dernières. On peut mentionner en parallèle, et à l’autre bout de l’existence, la disparition dans la liturgie des obsèques de textes comme le Dies irae et le Libera me. De même, la version expurgée des paroles introductives à la Consécration dans la Prière eucharistique n°2 : en place de ce que la Tradition apostolique (à laquelle on veut faire remonter cette Prière 2) disait : « Tandis qu’il se livrait à une souffrance volontaire pour détruire la mort, briser les chaînes du diable, fouler l’enfer à ses pieds, répandre sa lumière sur les justes, établir l’Alliance et manifester sa Résurrection, il prit le pain... », on a seulement : « Au moment d’être livré et d’entrer librement dans sa Passion, il prit le pain... ».
L’impression qui se dégage du rituel de baptême est que le futur baptisé entre de plain-pied dans l’Église, que la joie est tout de suite, essentiellement, presque exclusivement, de mise. Le contraste est assez net avec la tonalité dramatique qui caractérise toute la première partie de la célébration selon le rituel traditionnel, lequel ne méconnaît pourtant pas, dès le commencement, la joie de la vie nouvelle inaugurée par le baptême (l’oraison qui suit l’imposition du sel en est un exemple : « qu’imprégné du sel, symbole de votre sagesse, il [le baptisé] ne soit pas atteint par l’infection des passions mauvaises, mais qu’au parfum de vos enseignements, il vous serve avec joie dans votre Église »).
Pour autant, la lutte contre le démon et le mal n’est pas absente dans le nouveau rituel. La mention en est faite plus tard dans la célébration : la communauté chrétienne ayant introduit le futur baptisé dans l’église, avant que de le faire dans l’Église, ayant entendu l’enseignement sur le baptême délivré par la liturgie de la parole, procède à la préparation immédiate au sacrement proprement dit. C’est ici que se place ce que le rituel nomme « Prière d’exorcisme et de délivrance » qui se situe, au regard de ce qui va suivre, à la place du dernier exorcisme du rituel traditionnel. On notera tout d’abord que la prière est adressée à Dieu, alors que les exorcismes sont à proprement parler des paroles adressées au démon : changement assez notable qui témoigne sans doute d’une réticence que nous avons mentionnée. Deux prières sont au choix : toutes deux rappellent que le Fils de Dieu est venu dans le monde pour délivrer l’homme, esclave du péché ; puis l’une met en valeur les combats à venir : « Tu sais que cet enfant, comme chacun de nous, sera tenté par les mensonges de ce monde et devra résister à Satan. Nous t’en prions humblement : par la Passion de ton Fils et sa Résurrection, arrache-le au pouvoir des ténèbres : donne-lui la force du Christ, et garde-le tout au long de sa vie » ; tandis que l’autre formule au choix se centre sur le péché originel : « Nous te supplions pour ce petit enfant : qu’il soit racheté du péché originel, qu’il resplendisse de ta présence, et que l’Esprit-Saint habite en lui ». La dernière formule rapproche fortement la prière de délivrance de l’exsufflation qui ouvre le rituel traditionnel ; la seconde place la délivrance dans la perspective de l’avenir, de l’initiation dont le baptême est la porte d’entrée, ainsi que nous allons essayer de le mettre en évidence.
C) Les réflexions de Paix liturgique
1 – Il n'est pas inutile de rappeler que le Motu Proprio Summorum Pontificum n'envisage pas que la Messe, mais traite également du baptême traditionnel en prévoyant expressément le droit pour le curé d'utiliser le rituel ancien pour son administration. La question de l'horaire familial, qui revient souvent dans la mise en place d'une célébration de la Messe selon la forme extraordinaire du rit romain, ne se posant pas s'agissant du baptême, les obstacles à la célébration du baptême dans la forme extraordinaire sont beaucoup moins grands que ceux frappant la célébration de la Messe. À bien y réfléchir, il n'existe pas de raison sérieuse pour un prêtre de refuser d'utiliser le rituel ancien s'agissant du baptême. Songeons-y pour les baptêmes de nos enfants et demandons, quand cela est possible, à nos curés territoriaux de les baptiser dans nos paroisses selon la forme extraordinaire du rit romain.
2 – Il serait totalement erroné de dire que le rituel traditionnel est focalisé sur l’expulsion du démon. C’est d’abord d’infusion de la grâce sanctifiante qu’il parle, mais dans une âme sous l’emprise du mal. La structure de la célébration, ses étapes (seuil de l’église, entrée des fonts baptismaux, fonts baptismaux eux-mêmes), le changement d’étole, de la violette à la blanche : tout oriente vers le moment suprême du baptême, vers le don de la vie surnaturelle, dans une perspective très réaliste, celle d’un combat spirituel contre le Prince de ce monde.
3 – Si donc, il est une déficience importante dans le baptême selon la forme ordinaire, elle tient en ce que cette forme ordinaire n’explicitant pas suffisamment clairement la dimension dramatique inhérente à la vie chrétienne, se place de plain-pied dans une joie communautaire, qui peut n’être que naturelle ou ne s’accrocher qu’à des dimensions superficielles relevant de l’animation liturgique.
4 – Nous ne parlons ici que du sacrement de baptême. Mais la pédagogie de la foi du rituel traditionnel a la même force pour les autres sacrements ; par exemple, dans le rituel de l’onction des malades, où l’effet très consolant attaché à la grâce sacramentelle (la guérison de l’âme et du corps) est particulièrement bien explicité par les grandes oraisons traditionnelles. Tout pasteur qui use du rituel dans la forme extraordinaire a pu expérimenter cet effet puissamment réconfortant sur les grands malades qui reçoivent le sacrement en pleine conscience.
5 – Nous avons évoqué l’extrême difficulté de la profession moderne de la foi à parler de Satan et des fins dernières. Plus généralement, la comparaison des deux formes liturgiques dans le rituel du baptême fait apparaître la difficulté de la transmission depuis Vatican II. Même avec les meilleures intentions et le désir de dispenser la foi de l’Église, le message passe très mal, ou ne passe pas. Au lieu de parler simplement et directement des vérités de foi, dont beaucoup sont « dérangeantes » pour l’esprit du monde, on use de formules plus douces, on évite l’allusion à des réalités telles que le péché originel, le démon, le péché mortel, l’Enfer, on donne à ces vérités une traduction censée être plus facilement recevable dans la culture contemporaine, ou bien on se contente de généralités inconsistantes. Pour le dire en termes vulgaires : on donne l’impression de « tourner autour du pot ». Le résultat est souvent catastrophique, ce type de discours étant finalement bien plus obscur que ne l’était le latin. La liturgie nouvelle, la catéchèse nouvelle, la prédication nouvelle, parlent beaucoup, mais elles disent très peu ; ou en tout cas, elles le disent mal, car le résultat est là : elles ne sont pas comprises.