Le cardinal Dario Castrillon Hoyos, a estimé que les négociations en vue de la "réconciliation" et de la "pleine communion" avec la Fraternité saint Pie X allaient se poursuivre normalement, malgré la création, le 8 septembre, de l’Institut du Bon pasteur. Interrogé le 21 septembre par l'agence I.MEDIA, partenaire de l'Apic à Rome, le préfet de la Congrégation pour le clergé et président de la commission pontificale Ecclesia Dei a aussi affirmé que l’Eglise faisait “confiance“ aux membres du nouvel Institut accueillant d’anciens prêtres et séminaristes, disciples de Mgr Lefebvre.
Christicity loin de vouloir polémiquer, a souhaité comprendre l’attachement de fidèles et de prêtres à l’ancienne forme liturgique. Nous avons donc rencontré M. l’abbé Benoît Jayr prêtre de l’institut du Christ Roi Souverain Prêtre qui célèbre quotidiennement la messe dite de saint Pie V
Bonjour M l’abbé, vous êtes chapelain de Saint Louis de Port Marly dont vous assurer le culte selon le missel dit de saint Pie V, pouvez-vous nous expliquer brièvement les caractéristiques de cette liturgie ?La caractéristique la plus évidente de la liturgie romaine traditionnelle est qu’elle est théocentrique. C’est à dire qu’elle a Dieu pour centre. Ce qui caractérise la réflexion moderne c’est qu’elle met l’homme au centre. Si l’on ne saisit pas cette clé du monde dans lequel nous vivons, alors nous ne pouvons pas comprendre notre époque. La liturgie romaine traditionnelle qui plonge ses racines dans les premiers siècles de l’histoire de l’église (on ne peut pas déterminer exactement à quelle époque est née la messe dite de saint Pie V qui n’est pas d’ailleurs de Saint Pie V, qui lui est bien antérieure, Saint Pie V n’a fait que la codifier), met en relief la primauté du culte divin.
La messe romaine traditionnelle n’est pas l’invention de quelque spécialiste de liturgie. Elle est le fruit d’un développement homogène qui s’est réalisé d’une manière organique à travers les siècles de l’histoire de l’Eglise.
Elle est donc une expression très précise de la foi de l’Eglise en l’Eucharistie. Elle manifeste la dimension sacrificielle de la messe et la verticalité du culte liturgique qui est d’abord pour Dieu. La liturgie c’est un échange entre le Ciel et la terre, c’est une pluie de grâces pour chacune de nos âmes pour les défunts comme pour les vivants.
Peut-on suivre cette liturgie et être en pleine communion avec Rome, cette messe est-elle autorisée ?On a beaucoup discuté sur cette question durant les quarante dernières années et depuis 1984, date à laquelle le Pape Jean Paul II a réalisé les premières ouvertures à l’égard de cette liturgie, l’ensemble des documents émanant de l’autorité romaine est claire. Cette liturgie n’a jamais été interdite, aucun document romain officiel ne l’atteste, et de nombreux évêques et cardinaux l’ont célébrée pour des occasions majeures, ordinations sacerdotales, etc.…. En célébrant cette liturgie, on est en pleine communion avec Rome puisque cette liturgie est la liturgie romaine authentique et que Jean-Paul II comme notre Pape Benoît XVI ont voulu qu’elle retrouve son droit de cité. Bref, cette messe est aussi aujourd’hui un chemin de communion.
Cette liturgie n’est-elle pas un peu terne ?Le rit romain traditionnel est à la fois solennel et sobre. La beauté du chant grégorien et des polyphonies sacrées, la clarté de la langue latine lui donnent un style noble. Loin des bavardages et des commentaires parasites, la liturgie romaine traditionnelle manifeste la sacralité, le silence d’adoration. Elle laisse la place au sens de la contemplation et de l’intériorité. Les gestes, les symboles, les paroles, les rites pluriséculaires favorisent la méditation, tout ceci nous relie à cette longue chaîne de la prière de nos pères. Et pour l’homme de notre époque, qui souvent étouffe dans un monde trop horizontal, cette liturgie est une fenêtre ouverte sur le ciel.
La création récente de l’Institut de droit pontifical « Le Bon Pasteur » et les récents échos que s’est fait la presse du souhait de Benoît XVI de voir tous les fidèles « traditionalistes » retourner à une pleine communion avec Rome m’amène à cette question : que peuvent apporter à l’Eglise aujourd’hui les fidèles dit «traditionnels» et la messe de «saint Pie V» ?Avant de répondre à votre question je donnerai une petite précision : l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, dont je suis membre, prêtre depuis 1992, n’a jamais été en rupture de communion avec Rome. Nous avons toujours été fidèles au Saint Père et à l’Eglise.
Et maintenant, pour répondre à votre question, je dirai que cette reconnaissance romaine, non seulement pour l’Institut du Bon Pasteur mais aussi pour toutes les autres maisons qui bénéficient des livres liturgiques traditionnels, manifeste bien la volonté du Saint Père. Tous ses gestes en faveur de ceux qu’on appelle les « traditionalistes »sont aujourd’hui indéniables. Benoît XVI est le continuateur, quoique dans un style très différent, de l’œuvre entreprise par Jean-Paul II. On ne pourra pas dire : « C’était une idée propre au Pape Jean Paul II, c’est fini avec Benoît XVI, » le Pape actuel est dans la ligne de son prédécesseur. Ce que les fidèles dits « traditionnels » et la messe de Saint Pie V peuvent apporter, c’est un sens ecclésial fort car la liturgie romaine traditionnelle nous fait aimer l’Eglise, elle nous romanise, elle nous rend plus romain. Elle est le lien avec l’histoire de l’occident chrétien, c’est la liturgie romaine qui a unifié.