Tendre la main, mais pas à n'importe quel prix |
27 (?) septembre 2006 - catho.be |
Les relations entre Rome et le mouvement intégriste ont connu, ces dernières semaines, une étape importante. Le 8 septembre, le cardinal Hoyos, président de la Commission pontificale Ecclesia Dei, a effectivement annoncé la création d’un nouvel institut pour accueillir dans l’Église catholique des prêtres issus de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X, fondée en 1970 par Mgr Marcel Lefebvre et toujours schismatique. Cet Institut du Bon-Pasteur, qui a le statut de société de vie apostolique et son siège en l’église Saint-Éloi de Bordeaux, est déclaré de droit pontifical et dépendra donc directement de Rome. Que le Vatican cherche à tout prix à résoudre une crise qui déchire l’Église depuis Vatican II, cela peut se comprendre. Mais fallait-il pour autant qu’il opte pour cette solution et agisse comme il l’a fait, c’est-à-dire sans tenir compte des principaux intéressés? Car il faut bien reconnaître que cette nouvelle fraternité court-circuite la réflexion de la Conférence épiscopale française. Réunie en assemblée plénière en avril dernier, celle-ci avait effectivement décidé de régler le problème traditionaliste qui se pose dans plusieurs diocèses de France et lancé un groupe de travail sur la question. La sentence de Rome est donc tombée avant que celui-ci n’ait pu rendre ses conclusions. Un véritable camouflet pour les évêques de ce pays, qui se retrouvent aujourd’hui contraints de négocier avec une communauté de croyants, n’ayant aucun compte à leur rendre et apparemment peu disposée à renoncer à l’idéologie lefebvriste. Deux des prêtres réintégrés, les abbés Laguérie et Aulagnier, ont d’ailleurs prévenu que la création du Bon-Pasteur n’était pas “une fin en soi” mais “un commencement”. Le plus inquiétant est que ces mêmes prêtres se targuent de n’avoir fait “aucune concession sur le fond”, c’est-à-dire de ne pas avoir changé d’avis sur les points cruciaux du Concile Vatican II: l’oecuménisme, la liberté religieuse, la participation des laïcs à la vie ecclésiale, le dialogue avec les autres religions, la réforme liturgique, etc. Pas question donc, pour eux, d’une quelconque marche arrière ou repentance. S’ils reviennent dans le giron de l’Église, c’est pour y agir de l’intérieur et défendre leurs positions. N’est-il pas naïf, dès lors, de leur tendre la main? Telle est la question que se posent aujourd’hui de nombreux catholiques. Pascal ANDRÉ |