SOURCE - François Teutsch - Bd Voltaire - 23 octobre 2014
Cette propension de certains à s’ériger en censeurs est lassante.
Cette propension de certains à s’ériger en censeurs est lassante.
Est-ce un hasard si la date du 22 octobre a été choisie par un membre de la Fraternité Saint-Pie X pour faire publier, sur ce site, un article exposant les raisons pour lesquelles, selon elle, une réconciliation avec Rome n’est ni possible, ni souhaitable ? Le 22 octobre, l’Église fête saint Jean-Paul II, figure honnie de certains traditionalistes. Le 22 octobre, jour anniversaire du retentissant « N’ayez pas peur » de 1978, qui résonne encore dans nos mémoires.
À vrai dire, cette propension de certains à s’ériger en censeurs est lassante. D’un côté, les donneurs de leçons type Patrice de Plunkett portent un contre-témoignage permanent de ce que devrait être la charité fraternelle, en dénonçant toute idée dissidente des leurs, au nom bien entendu d’une parfaite fidélité à Rome (et surtout aux évêques français, ce qui n’est pas tout à fait pareil…). Ou, plus perfides, les titres du groupe Bayard (La Croix, La Vie), qui entretiennent dans leur lectorat sexagénaire le sirupeux poison d’un relativisme social-démocrate-chrétien bien éloigné du dynamisme qu’on attend du peuple chrétien.
Et puis, de l’autre côté, les « Saint-Pie X » qui fantasment une Église d’avant, parée de toutes les qualités, par opposition avec la Rome actuelle toute acquise aux idées modernistes. Et qui, avec une modestie devenue leur marque de fabrique, exposent sans complexe qu’ils attendent que Rome revienne à eux, c’est-à-dire à la vraie foi. Demain, Mgr Fellay pape, pour réparer les erreurs du siècle et, sans doute, « décanoniser » Jean-Paul II ?
Votre serviteur, élevé dans la bourgeoisie catholique libérale, doit d’avoir conservé la foi à l’adolescence à deux amis de pension se réclamant du mouvement lefebvriste. À eux parmi d’autres, mais ceux-ci lui ont transmis des éléments solides qu’eux seuls, au milieu des années 80, avaient le courage d’exprimer au sein d’un enseignement « catholique » en totale déliquescence catéchétique. C’est donc avec ce souvenir reconnaissant qu’il est libre de dire aujourd’hui ce qu’il pense. L’attitude de ces gens qui prétendent faire la leçon sans cesse à l’Église catholique est tout simplement incohérente. Elle s’apparente à une lutte politique où, par des réseaux d’influence, on tente de faire prévaloir des idées sur d’autres. Elle tend à transformer l’Église en démocratie, ce qu’elle n’est et ne peut être.
Certes, l’Église est humaine. Les hommes et les femmes qui la composent ici bas, ceux qui la dirigent ne sont pas exempts de reproches. Chaque chrétien doit se reconnaître pécheur. Ses papes, ses cardinaux et tous ses membres peuvent se tromper, à titre personnel, et choquer par des propos ou des actes. Jean-Paul II embrassant le Coran, François et sa communication étonnante. On peut, sans tomber dans le relativisme ni l’hérésie, ne pas être d’accord avec le rigoureux formalisme des tradis ou avec certains propos iréniques à propos de l’immigration.
Mais l’Église est aussi divine. Elle est le corps du Christ. Elle réunit, et c’est là son mystère, cette nature divine – et sainte – et humaine – donc soumise au péché. Elle est le mystère de l’Incarnation. Dès lors, le chrétien a confiance en elle. Il se souvient des paroles de Jésus-Christ à Pierre : « Eh bien ! moi je te dis : tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne tiendront pas contre elle. » (Matt. 16, 18).
Soutenir que Rome n’est plus dans Rome est intenable.