SOURCE - Noémie Bertin et Jean-Marie Dumont - Famille Chrétienne - 29 avril 2015
La Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X a été reconnue comme faisant partie de l’Église catholique en Argentine.
La Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X a été reconnue comme faisant partie de l’Église catholique en Argentine.
Une association de droit diocésain : c’est le statut de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) en Argentine depuis le 9 avril dernier. Une décision du Secrétariat du culte, parue au Bulletin officiel du pays, qui l’inscrit sur le Registre des instituts de vie consacrée. Là, figurent les ordres et congrégations religieuses catholiques argentins.
Cette demande avait été officiellement adressée à l’administration par le cardinal Mario Aurelio Poli, archevêque de Buenos Aires – successeur du pape actuel. Ce dernier accompagnait une démarche initiée dès 2011 par les responsables de la Fraternité des apôtres de Jésus et Marie, autre nom de la FSSPX.
Dans ce pays d’Amérique latine, ses fidèles disposent de plusieurs prieurés, trois écoles, quelque vingt-cinq prêtres résidents et un séminaire formant une trentaine de séminaristes.
Quels sont les enjeux de ce statut nouvellement octroyé ? « Les lefebvristes sont réintégrés dans l’Église d’Argentine », titrait le grand quotidien argentin Clarin, le 12 avril. Comme d’autres médias, le journal a surinterprété la décision. Celle-ci vient en réalité avant tout répondre à des questions très pratiques. « Le principal souci était de donner un statut aux prêtres et religieux étrangers », explique l’abbé Christian Bouchacourt, supérieur de la Fraternité pour la France. De 2003 à 2014, le prélat a supervisé le district d’Amérique du Sud. « Ils étaient obligés de sortir du pays tous les trois mois, faute de se voir octroyer le statut de résident, complète-t-il. Pour l’obtenir, il leur fallait appartenir à l’Église catholique. »
Afin de sortir de l’impasse, une autre possibilité s’offrait à la FSSPX : être reconnu par l’État comme « Église lefebvriste ». « Mais, en Argentine, les sectes pullulent, précise l’abbé Bouchacourt. J’ai toujours refusé que nous soyons enregistrés comme une entité distincte de l’Église catholique. »
Fort de cette conviction, le supérieur du district raconte être « allé voir le nonce », qui l’a « renvoyé vers le cardinal Bergoglio ». « C’est lui qui a facilité les choses, affirme-t-il. Sans lui, cela aurait été impossible. Il nous a aidés auprès du gouvernement, en affirmant que nous étions catholiques. »
Un signe de confiance
Cette reconnaissance, inédite, est emblématique : la Fraternité Saint-Pie-X est ainsi présentée comme une œuvre appartenant à l’Église. Pourtant, tout n’est pourtant pas réglé : la décision du cardinal Poli n’a pas de visée canonique. « Comme le déclare l’archevêque lui-même dans sa lettre, la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X n’a pas encore trouvé de cadre juridique définitif dans l’Église universelle », rappelle Mgr Guido Pozzo, secrétaire de la Commission pontificale Ecclesia Dei, dicastère romain dialoguant avec les héritiers de Mgr Lefebvre. Ces derniers, par la voix de leur organe de communication officiel, Dici, ont également évoqué une « décision administrative de l’État argentin », rappelant que seule l’autorité romaine « peut régler le statut canonique de la Fraternité ». « Les négociations avec Rome sont de la responsabilité de notre supérieur général, Mgr Bernard Fellay », appuie l’abbé Christian Bouchacourt.
À Ecclesia Dei, Mgr Guido Pozzo se dit néanmoins « heureux » de ce « signe de bienveillance de la part de l’Église », qui « contribue à créer un climat constructif de confiance ». La reconnaissance canonique de la FSSPX reste encore à trouver, rappelle-t-il, la création d’une prélature personnelle, à la manière de l’Opus Dei est envisagée. Elle permettrait aux prêtres de la Fraternité d’exercer leur ministère en toute légitimité. « C’est à cette fin, détaille Mgr Pozzo, que se poursuit, par les relations qu’entretiennent la Commission Ecclesia Dei et la Fraternité Saint-Pie-X, le parcours de clarification et d’approfondissement de certaines questions doctrinales controversées ». Cher au cœur de Benoît XVI, ce travail d’unité se poursuit sous le pontificat du pape François. L’enjeu est de taille pour l’Église : la Fraternité Saint-Pie-X compte actuellement 586 prêtres, 203 séminaristes, 6 séminaires et exerce un apostolat dans 70 pays.
Noémie Bertin et Jean-Marie Dumont