Pour la Patronale à Wangs, il me semblait important de prêcher à ces jeunes hommes combien ils étaient importants pour l’avenir ! Car à dix ou quinze ans, on garde la bouche ouverte sur l’avenir et advienne que pourra ! Il semble que l’on doit leur dire que la vie n’est pas facile et qu’ils ont besoin d’avoir un cuir tanné pour supporter les aléas de la terre. Mais c’est surtout notre époque qui gémit du manque d’envergure des hommes : les hommelettes sont apprêtées à tous les goûts ; aussi c’est un peu une supplication envers ces jeunes qui sont dans une belle et bonne école, pour qu’ils ne passent pas à côté de tout ce qu’ils peuvent recevoir. On aimerait tant les préserver de la laideur et de l’avilissement pour les garder dans la beauté de la grâce. La nouvelle école au-dessous de la route en est aux finitions. Le personnel enseignant ainsi que les élèves vont retrouver un bâtiment flambant neuf à la rentrée, quasi un palace non pas pour se prélasser mais pour apprendre sans se lasser. Il faudra beaucoup d’anges gardiens pour préserver cet état d’esprit, et nous implorons le Ciel d’en détacher toute une cohorte pour la protection de ce qui pourrait tellement devenir un haut lieu de la régénération de notre pays.
Encart au journal de route
22 mai 2016
Le matin, à l’Oratoire Saint-Charles Borromée, l’abbé Wuilloud célèbre la fête de la Sainte Trinité permettant ainsi aux Lausannois de lui faire leurs adieux. Après la messe, la communauté de Lausanne se retrouve à Epalinges, non loin de l’Hôpital Sylvana, dans un cadre bucolique dominant le Léman, pour une grande journée paroissiale. Pendant le repas des enfants, les adultes prennent l’apéritif devant le splendide panorama.
Le Cours Notre-Dame-des-Champs a préparé un certain nombre de produits à la vente. La générosité des amis et bienfaiteurs de l’école est au rendez-vous. A la fin du repas des adultes qui suit celui des enfants, le desservant de Lausanne adresse quelques mots de remerciements à M. l’abbé Wuilloud pour ses douze années à la tête du district. Une enveloppe lui est remise au nom de tous les fidèles de Lausanne en vue de confectionner une soutane blanche. Les nouvelles mamans de la chapelle sont ensuite mises à l’honneur : les enfants apportent à chacune d’elles un panier garni de produits du Carmel sous les applaudissements nourris des convives.
Dans l’après-midi, une fois la salle réaménagée, les enfants de l’école offrent un beau spectacle sur le thème du Poverello d’Assise. Poésies, chorégraphies et saynètes se succèdent faisant goûter à l’assistance le charme de la simplicité évangélique. Devant un parterre d’une bonne centaine de personnes, les élèves témoignent de l’excellente instruction reçue dans leur école. Quelques jeunes familles extérieures à la communauté découvrent avec intérêt une œuvre scolaire promise à un bel avenir.
Avec une extrême délicatesse, la Providence retint toute la journée les gouttes de pluie qui menaçaient d’heure en heure jusqu’au moment où les derniers paroissiens restés pour le rangement quittèrent les lieux.j.d.l.
24 au 31 mai 2016
Long vol nocturne vers Johannesburg pour découvrir quelques parcelles d’un immense continent : l’Afrique ! Lorsqu’on est habitué aux proportions helvétiques, et que l’on reçoit pour quelques années la responsabilité d’un tel district, on se sent quelque peu décontenancé. Mais c’est ce qui est beau dans la Fraternité, le monde entier nous tend les bras et l’on peut toujours être appelé partout. Donc allons-y gaiement et sans trop de crainte d’être mangé par un crocodile affamé. La maison de district est spacieuse et surtout, cela va me changer, sous un ciel très bleu. C’est la propriété qui est fermée, avec du barbelé et des codes pour les portes. Lorsque vous sortez, vous attendez que la barrière se soit refermée, sinon quelqu’un pourrait encore se glisser à l’intérieur... Il semble bien qu’il va falloir changer certaines habitudes de vie, sinon… ! Chacun vit dans son périmètre et ne fait de rencontres qu’au travers de cercles de connaissances. Sans savoir l’anglais ou le zoulou, c’est pourtant ce qu’il faudra chercher à faire, sinon c’est tintin des missions ! Avec le Supérieur actuel, l’abbé Loïc Duverger, nous avons ainsi pu bien échanger sur les difficultés inhérentes à ces pays. Il m’a permis de découvrir nos deux prieurés, un peu en coup de vent, celui de Roodepoort avec sa grande école qui va bientôt dépasser les deux cents élèves et qui est en pleine expansion. Mais avant cela nous étions passé par Durban, au bord de l’océan Indien, et là, c’est une vieille connaissance que nous retrouvons : l’abbé Esposito qui fut supérieur d’Italie dans les années ’90. Je ne vous décrirai pas son apostolat mais juste le prieuré. Bien emménagé avec une jolie petite église, mais au pied d’un monstre ! C’est un affreux et immense bâtiment qui domine complètement le quartier du haut de ses 22 étages, et le petit prieuré est blotti à ses pieds. Il paraît que c’est assez mal famé dès que vous sortez dans les rues adjacentes. Je ne puis qu’admirer ces prêtres qui travaillent dans de telles conditions. Je reviens en Europe avec un fourmillement de questions, mais surtout avec la principale : par où commencer ? Faut-il stabiliser ce que nous avons déjà ? Faut-il missionner à Dieu vat ? Faut-il moissonner des pépètes pour proposer de véritables chapelles, car sinon on passe un peu pour une secte ? En passant en voiture au bord d’une entrée de l’autoroute, l’abbé Duverger m’a montré dans une prairie un groupe d’hommes en blanc... secte protestante, me dit-il, qui prêche en pleine air comme Jésus et refuse les églises ! Bien, voilà une solution pas trop onéreuse... à méditer !
20 et 21 juin 2016
Le monastère d’Engelberg a semblé reprendre vie et jeunesse avec le passage de tant de soutanes. Les magnifiques bâtiments dans lesquels tant de générations de moines et d’étudiants ont été formées valent vraiment le détour. C’est le pendant alpin d’Einsiedeln, qui a nourri et même fabriqué l’élite catholique de notre pays. Cela nous fait espérer avec « humilité » que Wangs puisse un jour recevoir cette même consécration de l’histoire.
Comme cette revue a déjà reçu des commentaires de cette visite et donc pour ne pas radoter, je ne rappellerai que les splendides marqueteries du P. Colomban qui a eu la grâce de mourir juste avant la nouvelle messe en 1966, sinon aussi le plus grand orgue de Suisse avec ses 9097 tuyaux et ses 137 jeux, et dont nous avons pu entendre quelques aspects de son tutti ! Mieux encore, reste la Sainte Croix reliquaire du XIVe siècle (je crois ?) et qui est un magnifique chef-d’œuvre de l’orfèvrerie gothique. Il faut insister pour la voir, car les moines n’aiment pas trop nous introduire dans leur sacristie, mais cela vaut la peine.
Je ne vous ai pas dit ce que nous faisions là ! C’est la sortie annuelle des abbés et des frères ! Et puisque c’est ma dernière, certains ont inventé des nouvelles paroles aux classiques chants de veillée (mêlant par hasard la découverte de l’Afrique à la nostalgie des montagnes). Ce fut une joyeuse soirée entre nous, et comme nous n’avons pas facebook nous ne pourrons pas la partager ! Le lendemain, la pluie revient, mais cela n’empêche pas l’excursion projetée. Les différents groupes se forment selon les capacités, et les plus fous vont gravir la voie ferrée de Fürenalp. Vraiment sympathique, cela patinait un peu, mais à l’arrivée sur la terrasse du téléphérique (pour ne pas dire du bistrot) un duo de Schwyzörgeli nous attendait de manière inattendue ! C’est là qu’on a attendu ces paroles plus admirables qu’imitables : « D’chien, qu’il est beau mon pays ! »
24 au 27 juin 2016
Afin de réfléchir avec sérénité aux bouleversements actuels, Mgr Fellay a convoqué la trentaine de supérieurs sur les hauts de Sion, à Anzère précisément. Les faits se suivent dans l’Église mais ne se ressemblent pas : de la louange de la fidélité des concubins, on passe à l’autorisation de confesser pour la Fraternité ! Comme si vous preniez une direction avec votre voiture mais que vous ne cessiez de changer de sens. Est-ce pour brouiller les pistes ? Est-ce une forme de folie qui inspire un tel agir ?
Personne n’a trop envie de monter dans un tel véhicule, cela provoque une véritable crainte. La perspective d’accords avec les autorités romaines fait naître une réelle angoisse. Pourtant il est possible que la question se pose autrement, puisque Rome se montre disposée à nous fournir un autre véhicule pour tracer la route par nous-mêmes. Et là il est moins facile de refuser absolument. La grande et peut-être unique difficulté est de savoir si le Saint-Esprit veut que nous prenions ce moyen ou pas ! Car, c’est sûr, on peut continuer à pied, et si c’est plus lent c’est également moins dangereux. Mais tous ne peuvent pas utiliser leurs savates : tous ceux que la vie a rendus plus ou moins impotents.
Le but est clair pour tous : à tout prix nous voulons rester aux trésors de l’Église, mais on hésite donc à aller à pied ou à prendre le bus. Là, il est capital de saisir que c’est au chef qu’il revient de décider, car c’est lui qui pilote. S’il décide d’aller tranquillement à travers des bocages et des paysages, nous irons avec lui. S’il prend les commandes du bus, nous montons derrière lui.
Il me semble que cela peut être affirmé avec force, que le Saint-Esprit attend cela de nous tous : nous voir comme un seul homme derrière celui qu’Il a choisi pour conduire le combat de la Tradition. Si on ne croit plus en cela, je ne sais vraiment comment on va pouvoir s’en sortir.
Nous nous sommes resserrés derrière Mgr Fellay et avons écouté ses volontés de fixer la route sur le sacerdoce, tel que voulu par notre vénéré fondateur. La foi est notre étoile polaire, mais le sacerdoce reste ce qui donne la stabilité à notre marche en avant.
D’ailleurs vous avez pu entendre cela sur le pré d’Ecône dans le communiqué du Supérieur de la Fraternité le jour des ordinations.