kipa-apic.ch - 2 février 2006
Rome: Levée de l'excommunication contre les intégristes envisagée à Rome?
Le pape recevra en audience les chefs de dicastères de la curie
Rome, 2 février 2006 (Apic) Le pape Benoît XVI envisage de lever l'excommunication prononcée en 1988 par son prédécesseur Jean Paul II contre les évêques de la Fraternité Saint-Pie X, fondée par l'archevêque intégriste schismatique Marcel Lefebvre, écrit jeudi le quotidien de droite Il Giornale. Le quotidien ne cite pas ses sources mais passe pour être généralement bien informé sur les milieux intégristes.
Benoît XVI recevra en audience les chefs de dicastères de la curie romaine, le 13 février 2006, à 10h30. Une réflexion sur le sort de la Fraternité saint Pie X figurera notamment à l'ordre du jour, indique en outre le quotidien italien Il Giornale du 2 février.
Benoît XVI a convoqué une réunion des cardinaux responsables des 'ministères' du Saint-Siège afin de réfléchir avec eux sur différents sujets. Il s'agirait de la première consultation générale de l'ensemble des cardinaux de curie par le nouveau pape. Durant les congrégations générales de la période vacante du Siège apostolique, ceux-ci avaient exprimé leur désir d'avoir de telles réunions à une fréquence régulière.
Parmi les points abordés durant cette prochaine séance, figurera la question de l'évolution des relations du Saint-Siège avec la Fraternité Saint Pie X. Selon Il Giornale, - qui se fonde sur des informations venant de sites Internet intégristes mais aussi sur ses contacts directs avec les personnes concernées -, le pape voudrait discuter de la possibilité de retirer l'excommunication aux évêques ordonnés par Mgr Lefebvre sans la permission du Vatican, en 1988. Un point de tension qui existe depuis lors entre les intégristes qui se réclament de l'Eglise catholique et le Saint-Siège qui les considère comme schismatiques.
Benoît XVI, dans un geste concernant les traditionalistes en général, souhaiterait également parler, le 13 février, de l'élargissement de l'utilisation du Missel pré-conciliaire, souhaité par la Fraternité saint Pie X. Depuis 1984, les messes traditionalistes selon le rite saint Pie V sont permises, mais seulement dans les diocèses où l’évêque a donné son accord.
Silence pour l'instant du cardinal Hoyos
Si le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé et président de la Commission 'Ecclesia Dei', en charge du dossier intégriste, reste silencieux sur le sujet, une source proche du dossier a confirmé à I.Media, partenaire romain de l'Apic, qu'une réunion était prévue prochainement au Vatican pour parler de "l'éventuelle réconciliation de l'Eglise avec la Fraternité Saint Pie X".
"Les discussions (avec le Saint-Siège) sont longues, mais elles sont probablement les plus fructueuses de celles que nous avons eues jusqu’ici", avait pour sa part déclaré le supérieur général de la Fraternité, lors d'une conférence de presse tenue le 13 janvier 2006 à Paris. Mgr Bernard Fellay avait expliqué que l'on se dirigeait désormais "plus vers une 'régularisation' de la Fraternité", même s'il regrettait que reste en cause la question de la validité des ordinations épiscopales de 1988. Il s'était aussi réjoui du discours tenu par le pape aux membres de la curie, le 22 décembre 2005. "C’est un texte capital. On voit bien que le Saint-Père essaie de mettre le Concile dans une nouvelle lumière", avait-il estimé.
Dans son discours, Benoît XVI avait souligné que la bonne interprétation du Concile se trouvait dans "sa juste herméneutique", celle du Concile interprété à la lumière de la tradition. Il avait ainsi critiqué l'école "de la discontinuité et de la rupture" pour valoriser celle de "l'herméneutique de la réforme, du renouvellement dans la continuité".
Si, au Vatican, on parle de "rapprochement" entre la Fraternité saint Pie X et l'Eglise catholique, on ne mentionne pas pour autant de "grand changement". En effet, "il est encore trop tôt" pour parler de changement "décisif", estime-t-on. On admet qu'il y a des "signes positifs" venant de la Fraternité et que l'on parle de "décrispation intéressante" côté intégriste - des lettres sont régulièrement échangées entre la Fraternité et le Saint-Siège, le cardinal Castrillon Hoyos reçoit de temps en temps les responsables de la Fraternité saint Pie X, et Mgr Fellay a eu des "paroles positives" en janvier dernier -, mais on souligne qu'il y a encore "trop d'oppositions" au sein de la Fraternité, qui ne peuvent pas être surmontées "en quelques mois".
Double langage des intégristes
A Rome, on dénonce aussi un "double langage" de la part des supérieurs de la Fraternité qui semblent chercher à satisfaire 'la ligne dure' des intégristes autant que ceux favorables au rapprochement avec l'Eglise catholique.
Il Giornale du 2 février 2006 mentionne le fait que le cardinal Julian Herranz, président du Conseil pontifical pour les Textes législatifs, aurait prédit depuis longtemps une hypothèse "d'accord canonique prévoyant l'institution d'une administration apostolique" pour les intégristes. "Je suis presque sûr qu’on nous l’accordera", a pour sa part rapporté Mgr Fellay en janvier dernier. Tout en ajoutant: "Même si nous ne voulons pas être des catholiques à part : l’ancienne messe, nous ne la demandons pas pour nous, mais pour tous". Le 22 mars 2001, Jean Paul II avait reçu les cardinaux à ce sujet, mais avait estimé que "les temps n'étaient pas encore mûrs". En janvier 2002, un accord de ce type avait été signé mais seulement avec la communauté de Campos de Mgr Antonio de Castro Mayer, au Brésil, qui devint une administration apostolique personnelle. E
Rappelons que Benoît XVI a reçu en audience privée Mgr Fellay à Castel Gandolfo le 29 août 2005. Nous sommes arrivés à un consensus sur le fait "de procéder par étapes" dans la résolution des problèmes et "dans un délais raisonnable", a ensuite rapporté le directeur de la salle de presse du Saint-Siège. "Rome veut aller vite, mais nous ne sommes pas aussi sûrs de vouloir aller aussi vite !", a toutefois nuancé Mgr Fellay courant janvier 2006, estimant que "si nous signions aujourd’hui, tous nos fidèles ne nous suivraient pas".
Alors que les élections du nouveau responsable de la Fraternité saint Pie X approchent, celle-ci traverse une forte crise interne. Après l'abbé Christophe Héry, l'abbé Philippe Laguérie de la paroisse lefebvriste bordelaise de Saint-Eloi, s'est fait exclure de la fraternité schismatique pour avoir refusé sa mutation au Mexique. A l'instar d'une partie de la fraternité, il a en effet fortement critiqué en juillet 2004 la gestion des séminaires de la fraternité, condamnant une trop forte sélection des postulants. D'autre part, l'aile dure, menée par le britannique Mgr Richard Williamson, s'oppose à celle plus favorable, derrière Mgr Fellay, à un rapprochement avec Rome.
Basée à Menzingen, en Suisse, La Fraternité saint Pie X comptait, fin 2004, 441 prêtres, dont un tiers de Français, dans 59 pays, ainsi que 6 séminaires. Ces derniers accueillent une cinquantaine de séminaristes chaque année. La fraternité dit regrouper 200' 000 fidèles, dont 100 000 en France.
Tout tenter...
"Nous devons tout tenter en vue d'une réconciliation, autant qu'il est possible, et, pour cela, profiter de toutes les occasions", avait affirmé le cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, dans ses "Entretiens sur la foi" en 1985, à propos du mouvement de Mgr Lefebvre qui devait devenir schismatique trois ans plus tard. Il avait cependant affirmé qu'il ne voyait "aucun avenir pour une position de refus fondamental à l'égard de Vatican II, en soi illogique". "Le point de départ de ce courant est sans doute une fidélité stricte au magistère surtout de Pie IX et de Pie X, ainsi que - d'une manière encore plus fondamentale - au Concile Vatican I et à sa définition de la primauté du pape", avait-il constaté. "Mais pourquoi les papes jusqu'à Pie XII et non pas après? Serait-ce que l'obéissance au Saint-Siège varie au gré des années ou de la proximité entre un enseignement donné et certaines convictions personnelles ?", s'était-il interrogé.
La Congrégation pour la doctrine de la foi, dont dépend la Commission Ecclesia Dei en charge des intégristes, se réunira à Rome en assemblée plénière la semaine prochaine et pourrait alors aborder ce sujet. (apic/imedia/ar)
02.02.2006 - Apic
Rome: Levée de l'excommunication contre les intégristes envisagée à Rome?
Le pape recevra en audience les chefs de dicastères de la curie
Rome, 2 février 2006 (Apic) Le pape Benoît XVI envisage de lever l'excommunication prononcée en 1988 par son prédécesseur Jean Paul II contre les évêques de la Fraternité Saint-Pie X, fondée par l'archevêque intégriste schismatique Marcel Lefebvre, écrit jeudi le quotidien de droite Il Giornale. Le quotidien ne cite pas ses sources mais passe pour être généralement bien informé sur les milieux intégristes.
Benoît XVI recevra en audience les chefs de dicastères de la curie romaine, le 13 février 2006, à 10h30. Une réflexion sur le sort de la Fraternité saint Pie X figurera notamment à l'ordre du jour, indique en outre le quotidien italien Il Giornale du 2 février.
Benoît XVI a convoqué une réunion des cardinaux responsables des 'ministères' du Saint-Siège afin de réfléchir avec eux sur différents sujets. Il s'agirait de la première consultation générale de l'ensemble des cardinaux de curie par le nouveau pape. Durant les congrégations générales de la période vacante du Siège apostolique, ceux-ci avaient exprimé leur désir d'avoir de telles réunions à une fréquence régulière.
Parmi les points abordés durant cette prochaine séance, figurera la question de l'évolution des relations du Saint-Siège avec la Fraternité Saint Pie X. Selon Il Giornale, - qui se fonde sur des informations venant de sites Internet intégristes mais aussi sur ses contacts directs avec les personnes concernées -, le pape voudrait discuter de la possibilité de retirer l'excommunication aux évêques ordonnés par Mgr Lefebvre sans la permission du Vatican, en 1988. Un point de tension qui existe depuis lors entre les intégristes qui se réclament de l'Eglise catholique et le Saint-Siège qui les considère comme schismatiques.
Benoît XVI, dans un geste concernant les traditionalistes en général, souhaiterait également parler, le 13 février, de l'élargissement de l'utilisation du Missel pré-conciliaire, souhaité par la Fraternité saint Pie X. Depuis 1984, les messes traditionalistes selon le rite saint Pie V sont permises, mais seulement dans les diocèses où l’évêque a donné son accord.
Silence pour l'instant du cardinal Hoyos
Si le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé et président de la Commission 'Ecclesia Dei', en charge du dossier intégriste, reste silencieux sur le sujet, une source proche du dossier a confirmé à I.Media, partenaire romain de l'Apic, qu'une réunion était prévue prochainement au Vatican pour parler de "l'éventuelle réconciliation de l'Eglise avec la Fraternité Saint Pie X".
"Les discussions (avec le Saint-Siège) sont longues, mais elles sont probablement les plus fructueuses de celles que nous avons eues jusqu’ici", avait pour sa part déclaré le supérieur général de la Fraternité, lors d'une conférence de presse tenue le 13 janvier 2006 à Paris. Mgr Bernard Fellay avait expliqué que l'on se dirigeait désormais "plus vers une 'régularisation' de la Fraternité", même s'il regrettait que reste en cause la question de la validité des ordinations épiscopales de 1988. Il s'était aussi réjoui du discours tenu par le pape aux membres de la curie, le 22 décembre 2005. "C’est un texte capital. On voit bien que le Saint-Père essaie de mettre le Concile dans une nouvelle lumière", avait-il estimé.
Dans son discours, Benoît XVI avait souligné que la bonne interprétation du Concile se trouvait dans "sa juste herméneutique", celle du Concile interprété à la lumière de la tradition. Il avait ainsi critiqué l'école "de la discontinuité et de la rupture" pour valoriser celle de "l'herméneutique de la réforme, du renouvellement dans la continuité".
Si, au Vatican, on parle de "rapprochement" entre la Fraternité saint Pie X et l'Eglise catholique, on ne mentionne pas pour autant de "grand changement". En effet, "il est encore trop tôt" pour parler de changement "décisif", estime-t-on. On admet qu'il y a des "signes positifs" venant de la Fraternité et que l'on parle de "décrispation intéressante" côté intégriste - des lettres sont régulièrement échangées entre la Fraternité et le Saint-Siège, le cardinal Castrillon Hoyos reçoit de temps en temps les responsables de la Fraternité saint Pie X, et Mgr Fellay a eu des "paroles positives" en janvier dernier -, mais on souligne qu'il y a encore "trop d'oppositions" au sein de la Fraternité, qui ne peuvent pas être surmontées "en quelques mois".
Double langage des intégristes
A Rome, on dénonce aussi un "double langage" de la part des supérieurs de la Fraternité qui semblent chercher à satisfaire 'la ligne dure' des intégristes autant que ceux favorables au rapprochement avec l'Eglise catholique.
Il Giornale du 2 février 2006 mentionne le fait que le cardinal Julian Herranz, président du Conseil pontifical pour les Textes législatifs, aurait prédit depuis longtemps une hypothèse "d'accord canonique prévoyant l'institution d'une administration apostolique" pour les intégristes. "Je suis presque sûr qu’on nous l’accordera", a pour sa part rapporté Mgr Fellay en janvier dernier. Tout en ajoutant: "Même si nous ne voulons pas être des catholiques à part : l’ancienne messe, nous ne la demandons pas pour nous, mais pour tous". Le 22 mars 2001, Jean Paul II avait reçu les cardinaux à ce sujet, mais avait estimé que "les temps n'étaient pas encore mûrs". En janvier 2002, un accord de ce type avait été signé mais seulement avec la communauté de Campos de Mgr Antonio de Castro Mayer, au Brésil, qui devint une administration apostolique personnelle. E
Rappelons que Benoît XVI a reçu en audience privée Mgr Fellay à Castel Gandolfo le 29 août 2005. Nous sommes arrivés à un consensus sur le fait "de procéder par étapes" dans la résolution des problèmes et "dans un délais raisonnable", a ensuite rapporté le directeur de la salle de presse du Saint-Siège. "Rome veut aller vite, mais nous ne sommes pas aussi sûrs de vouloir aller aussi vite !", a toutefois nuancé Mgr Fellay courant janvier 2006, estimant que "si nous signions aujourd’hui, tous nos fidèles ne nous suivraient pas".
Alors que les élections du nouveau responsable de la Fraternité saint Pie X approchent, celle-ci traverse une forte crise interne. Après l'abbé Christophe Héry, l'abbé Philippe Laguérie de la paroisse lefebvriste bordelaise de Saint-Eloi, s'est fait exclure de la fraternité schismatique pour avoir refusé sa mutation au Mexique. A l'instar d'une partie de la fraternité, il a en effet fortement critiqué en juillet 2004 la gestion des séminaires de la fraternité, condamnant une trop forte sélection des postulants. D'autre part, l'aile dure, menée par le britannique Mgr Richard Williamson, s'oppose à celle plus favorable, derrière Mgr Fellay, à un rapprochement avec Rome.
Basée à Menzingen, en Suisse, La Fraternité saint Pie X comptait, fin 2004, 441 prêtres, dont un tiers de Français, dans 59 pays, ainsi que 6 séminaires. Ces derniers accueillent une cinquantaine de séminaristes chaque année. La fraternité dit regrouper 200' 000 fidèles, dont 100 000 en France.
Tout tenter...
"Nous devons tout tenter en vue d'une réconciliation, autant qu'il est possible, et, pour cela, profiter de toutes les occasions", avait affirmé le cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, dans ses "Entretiens sur la foi" en 1985, à propos du mouvement de Mgr Lefebvre qui devait devenir schismatique trois ans plus tard. Il avait cependant affirmé qu'il ne voyait "aucun avenir pour une position de refus fondamental à l'égard de Vatican II, en soi illogique". "Le point de départ de ce courant est sans doute une fidélité stricte au magistère surtout de Pie IX et de Pie X, ainsi que - d'une manière encore plus fondamentale - au Concile Vatican I et à sa définition de la primauté du pape", avait-il constaté. "Mais pourquoi les papes jusqu'à Pie XII et non pas après? Serait-ce que l'obéissance au Saint-Siège varie au gré des années ou de la proximité entre un enseignement donné et certaines convictions personnelles ?", s'était-il interrogé.
La Congrégation pour la doctrine de la foi, dont dépend la Commission Ecclesia Dei en charge des intégristes, se réunira à Rome en assemblée plénière la semaine prochaine et pourrait alors aborder ce sujet. (apic/imedia/ar)
02.02.2006 - Apic