Messe en latin - Les raisons du choix de Benoît XVI |
19 octobre 2006 - Le Pèlerin - pelerin.info |
La messe en latin selon le rite de saint Pie V, dit rite tridentin, pourrait être prochainement réhabilitée… Qu'est-ce qui a conduit le pape à faire ce choix ? Favorable à plus de "générosité" envers les traditionnalistes La réahabilitation du rite tridentin par Benoît XVI ne constitue pas vraiment une surprise. Depuis plus d’un an, il était de notoriété publique que le pape réfléchissait à une réforme de la liturgie. Le cardinal Ratzinger était connu pour porter un regard très critique sur la manière dont avait été menée la réforme liturgique depuis Vatican II. Il s’était aussi déclaré « personnellement » favorable à plus de « générosité » envers les traditionalistes, n’y voyant aucun danger ni aucune source de scandale. Quelques mois après son élection, le pape avait d’ailleurs confié aux cardinaux son intention de se rapprocher des traditionalistes et de mettre fin au schisme provoqué par l’entêtement de Mgr Marcel Lefebvre. La création d'un Institut à Bordeaux Cette volonté de Benoît XVI a trouvé une première concrétisation avec la récente création de l’Institut du Bon Pasteur, une institution taillée sur mesure pour accueillir d’anciens membres de la Fraternité Saint-Pie X, en délicatesse avec cette dernière. Cette décision n’est pas sans susciter un trouble important, notamment parmi les fidèles du diocèse de Bordeaux. Chez Benoît XVI, il y a plus que le souci de faire revenir dans la pleine communion de l’Eglise les membres des mouvements traditionalistes ou intégristes. Ce qui est en cause, c’est la conception même que le pape actuel se fait de la liturgie. Vatican II, appliqué "au-delà la lettre" Dans son livre d’entretiens avec le journaliste Patrick Seewald, Le sel de la terre (1), celui qui n’était encore que le cardinal Ratzinger faisait valoir que la réforme liturgique avait été appliquée au-delà de la lettre, donnant lieu à des excès. Il ne disait pas autre chose dans la conférence qu’il avait prononcée en 1998 – il était alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi – devant des pèlerins venus à Rome pour les dix ans du motu proprio Ecclesia Dei Adflicta. Le Concile, rappelait-il, « a ordonné une réforme des livres liturgiques mais il n’a pas interdit les livres antérieurs ». "Le latin devrait être conservé" De même, « le latin devait être conservé, tout en donnant une place plus large à la langue maternelle ». Malheureusement, les innovations postconciliaires auraient parfois largement dépassé les directives du Concile : « La position du prêtre est réduite par quelques-uns à un pur aspect fonctionnel (…) Il existe aussi une tendance dangereuse à minimiser le caractère sacrificiel de la messe et à faire disparaître le mystère et le sacré, sous le prétexte, soi-disant impératif, de se faire comprendre plus facilement. Enfin, on constate la tendance à fragmenter la liturgie et à souligner unilatéralement son caractère communautaire, en donnant à l’assemblée le pouvoir de décider sur la célébration. » Plusieurs formes du rite latin ont toujours existé Pour autant, l’ancienne liturgie ne trouvait pas forcément grâce aux yeux du futur pape. « Elle s’était trop égarée dans le domaine de l’individualisme et du privé et (…) la communion entre prêtre et fidèle était insuffisante », écrivait-il. Il avait repris ces idées, en 2001, dans un livre personnel sur L’esprit de la liturgie (2). C’est donc un rééquilibrage que cherche Benoît XVI. Mais qui suscite de vives résistances... Dans sa conférence de 1998 évoquée plus haut, le pape répondait par avance à ses contradicteurs d’aujourd’hui, faisant valoir que plusieurs formes du rite latin ont toujours existé, et mettait en avant, entre autres, l’existence d’un rite propre aux dominicains (aujourd’hui aboli). A propos de la messe en latin, il assurait : « Des accents spirituels et théologiques différents ne seront pas comme deux manières opposées d’être chrétien mais plutôt comme des richesses qui appartiennent à une même et unique foi catholique. » Paula Boyer (1) Ed. Flammarion/Cerf ; 20 e. (2) Ed. Ad Solem, 2001 ; 18 e. |