Remous autour de la messe en latin |
31 octobre 2006 - Article de L'Est Républicain - Patrick Perotto |
Remous autour de la messe en latin Depuis l'annonce de la réintégration de l'abbé Laguérie et d'un décret du Vatican réhabilitant l'ancienne liturgie, le monde catholique français est en ébullition. NANCY. _ La prise de position sans équivoque des évêques de l'Est hier reste la plus forte de toutes celles qui ont été rendues publiques depuis l'annonce en septembre du retour de l'abbé Laguérie, l'ancien curé de Saint-Nicolas du Chardonnet à Paris, le fief des intégristes, et de la création à Bordeaux de l'Institut du Bon pasteur, chargé d'accueillir les prêtres pas si repentis que cela. De plus, en décembre, le Vatican a l'intention de publier un motu proprio, un décret, autorisant à nouveau dans toutes les paroisses la messe selon le rite Saint-Pie V, seulement célébrée aujourd'hui avec un indult, une autorisation spéciale, de l'évêque dans une seule église par diocèse. Très vite, le cardinal Ricard, président de la conférence épiscopale et archevêque de Bordeaux a demandé des explications au Vatican. Mgr Claude Dagens, évêque d'Angoulême, a quasiment tapé du poing sur la table tout comme celui de Lille, puis les évêques de Normandie et même jusqu'à Mgr Vingt-Trois, archevêque de Paris qui a appelé à l'unité liturgique la semaine dernière, se sont insurgés contre le retour de la messe en latin du rite du concile de Trente, à la fin du XVIe siècle après la Réforme. Parce qu'on l'oublie trop souvent, il existe aussi une messe en latin dans le rite Paul VI. « L'unité de l'Eglise » Derrière le rite, en effet, se cachent des enjeux autrement plus conséquents. Dans un sermon prononcé le 10 septembre à l'église Saint-Eloi à Bordeaux, l'abbé Laguérie n'a pas caché ses intentions : en finir avec le concile Vatican II. Autrement dit, il souhaite le retour à l'ancien rite qui développe une vision sacrificielle de la messe et non pas une théologie de la communion et telle qu'on la pratique aujourd'hui, mais s'oppose aussi à l'oecuménisme avec les protestants et les orthodoxes, au dialogue inter-religieux avec les religions non chrétiennes, ainsi qu'à la liberté religieuse. Avant le concile, la Vérité ne pouvait être que catholique ! La semaine dernière, Mgr Ricard et Mgr Vingt-Trois se sont rendus au Vatican pour faire part des remous provoqués par les décisions du Vatican. L'abbé Lagueyrie doit y aller, à son tour, dans les prochains jours. A Rome, l'Eglise de France est encore regardée avec méfiance : c'est dans notre pays qu'il y eut le plus d'expérimentations liturgiques, pas toujours heureuses, dans les années 70, sans compter une tradition de contestation qui a connu son apogée avec l'affaire Gaillot. L'enjeu a été défini par Mgr Pierre Raffin de Metz dans un texte de la revue d'éthique et de théologie morale : « Si elle devait s'installer durablement, cette coexistence (entre le rite Paul VI et le rite Pie V) finirait par nuire à l'unité de l'Eglise catholique ». Patrick PEROTTO |