SOURCE - F. Louis-Marie, abbé du Barroux - Les Amis du Monastère - mars 2015
Un Père Abbé bénédictin me disait un jour qu’il n’avait jamais regretté un seul des chapitres conventuels. Le seul regret qu’il pouvait avoir à ce sujet était de n’avoir pas consulté sa communauté sur une affaire importante. Le chapitre conventuel tient une grande place dans la Règle bénédictine, la deuxième après l’Abbé. Au chapitre III, celle-ci en définit le déroulement : après avoir convoqué tous les frères, même les plus jeunes, l’Abbé expose l’affaire et prend l’avis de tous. Puis il délibère et choisit ce qu’il juge le plus opportun. Il est évident pour saint Benoît que les frères doivent jouir d’une grande liberté d’expression, liberté dont on parle à tort et à travers depuis les attentats islamiques de janvier dernier. Si la liberté d’expression de tous est importante chez saint Benoît, c’est que souvent Dieu révèle à un plus jeune ce qui est meilleur.
Un Père Abbé bénédictin me disait un jour qu’il n’avait jamais regretté un seul des chapitres conventuels. Le seul regret qu’il pouvait avoir à ce sujet était de n’avoir pas consulté sa communauté sur une affaire importante. Le chapitre conventuel tient une grande place dans la Règle bénédictine, la deuxième après l’Abbé. Au chapitre III, celle-ci en définit le déroulement : après avoir convoqué tous les frères, même les plus jeunes, l’Abbé expose l’affaire et prend l’avis de tous. Puis il délibère et choisit ce qu’il juge le plus opportun. Il est évident pour saint Benoît que les frères doivent jouir d’une grande liberté d’expression, liberté dont on parle à tort et à travers depuis les attentats islamiques de janvier dernier. Si la liberté d’expression de tous est importante chez saint Benoît, c’est que souvent Dieu révèle à un plus jeune ce qui est meilleur.
La liberté d’expression n’est donc pas une liberté absolue de dire n’importe quoi. Elle est déterminée par la noble capacité humaine d’être la voix de Dieu et ne doit jamais devenir une occasion donnée au diable de semer la bêtise et la haine. La liberté d’expression bénédictine est comparable à une semence que saint Benoît sème dans une bonne terre, riche d’éléments capables de faire fructifier de façon divine.
Le premier de ces éléments est l’écoute. Avant de parler, le moine doit apprendre à écouter. C’est d’ailleurs le premier mot de la Règle : « Ausculta, o fili. » Écoute, ô mon fils, les préceptes du Maître et non pas tes passions, tes opinions, tes sentiments passagers. Écoute la Sagesse avec l’oreille de ton cœur et de ta conscience. Apprends à te taire, apprends à faire silence avant de parler, car la parole est précieuse, elle a pour vocation d’être un écho du Verbe qui est auprès de Dieu, qui est tourné vers Dieu. La lectio divina, la méditation par le cœur de l’Écriture, des psaumes, de la prière de l’Église et de la Règle, en un mot la vérité enseignée, est la meilleure école au service de la liberté d’expression. Car l’homme n’est pas un dieu, il n’est que l’image de Dieu.
Le deuxième élément est la façon de s’exprimer. Les frères sont appelés à donner leur avis avec entière humilité et soumission, sans présomption ni effronterie. Ce qui vient de Dieu ne supporte pas en effet la bouffonnerie, les paroles oiseuses ou moqueuses et la contradiction systématique. À ce sujet, Dom Gérard disait joliment : « Pour lutter contre l’esprit de contradiction, entrer dans la pensée des autres pour la réconcilier avec la sienne. » Saint Benoît est très sévère sur le mauvais esprit : « Si quelqu’un avait cette témérité, il serait soumis à la correction régulière. » Mais exercée par l’autorité compétente, et non pas par n’importe qui, et sans Kalachnikov. De façon plus positive, les moines ont l’immense grâce d’être à l’école du chant grégorien, qui exprime des vérités vraies, belles et parfois terribles, mais avec une douceur qui donne aux passions leur juste mesure. Il paraît même que le chant grégorien, plus encore que la musique classique, rend intelligent. La politesse aussi, alors que le cynisme, même brillant, rend bête et méchant.
Le troisième élément est le jugement dernier. Saint Benoît rappelle souvent dans sa Règle que le Père Abbé devra rendre compte de toutes ses décisions. Et cela est vrai aussi pour chacun des frères pour toute parole. Comme le secrétaire du chapitre note toutes les interventions des frères au cours des chapitres, ainsi les anges transcrivent toute parole dans le grand livre du jugement dernier avec toutes les conséquences prévisibles. Car les paroles sont comme des allumettes qui, par une petite flamme, peuvent déclencher un incendie d’amour ou de scandale.
Que nos communautés et nos familles chrétiennes puissent devenir par la grâce du Saint Esprit des oasis de la vraie liberté d’expression!
+ F . Louis-Marie, o.s.b., abbé