21 octobre 2012

[Candidus - Le Forum Catholique] La FSSPX sur sa crête

SOURCE - Candidus - Le Forum Catholique - 21 octobre 2012

La FSSPX s'est souvent présentée comme cheminant sur la crête escarpée du sédévacantisme et du ralliement qu'elle dénonçait comme deux solutions de facilité, dangereuses voire fatales pour la foi. Comme toutes réalités géophysiques les crêtes ont une fin : l'abîme ou un chemin plus ou moins praticable qui conduit vers la plaine où les hommes triment dans les larmes et la sueur...

La FSSPX est une oeuvre d'Eglise suscitée par la crise doctrinale et disciplinaire qui a frappé toutes les institutions hiérarchiques lors de la révolution culturelle des années 60-70.

A l'occasion de toutes les crises traversées par l'Eglise, des réformateurs aux destins différents ont émergé. Citons parmi eux François d'Assise, Dominique de Guzman, Reiner de Pérouse -fondateur d'une branche hétérodoxe de Flagellants-, Catherine de Sienne, Martin Luther, Vincent Ferrier, Cornelius Jansen, Ignace de Loyola, Mgr Colbert-Seignelay (fondateur involontaire de la Petite Eglise qui dénonçait les compromissions de Pie VII avec Napoléon) (*) et, peut-être derniers en date, Marcel Lefebvre et Antonio de Castro Mayer.

Tous ces réformateurs avaient en commun une conscience et une souffrance aiguës liées aux misères de l'Eglise de leur temps. Là où ils ont divergé c'est dans le remède qu'ils choisirent d'apporter à ces misères. Les uns se placèrent résolument dans le cadre légal d'une Eglise qu'ils concoururent à rénover (pensons à St François et à sa vision dans la chapelle de St Damien qui, mal interprétée, aurait pu conduire à une catastrophe) ; les autres, "rejetant le bébé avec l'eau du bain", voulant se protéger du foyer d'infection qu'exhalait l'Église (c'était du moins leur perception, leur "constat objectif"), choisirent une autre voie et fondèrent ou préparèrent la fondation d'une structure ecclésiale parallèle et concurrente, afin de se protéger des trahisons et compromissions qu'ils dénonçaient sous les traits d'une "Église officielle" bâtarde et infidèle au dépôt de la foi et aux vertus évangéliques.

Un réformateur augustin qui a mal fini a écrit :

"Si le pape agit contre l'Ecriture, nous avons le devoir de porter assistance à l'Ecriture et de le réprimander".

Remplaçons "l'Ecriture" par "la Tradition" et cette citation évoque une rhétorique bien actuelle...

Le cardinal Nicolas de Cuse avait répondu à ces deux discours "réformateurs" avant même qu'il fussent formulés (à croire que ceux-ci renvoient à une constante de toutes les réformes dévoyées). S'adressant aux Hussites, il leur écrivait : "Vous dites qu'il faut obéir d'abord au précepte du Christ, ensuite seulement à l'Eglise, et que si celle-ci enseigne d'autres préceptes que le Christ, ce n'est pas à l'Eglise mais au Christ qu'il faut obéir. Or c'est là précisément le commencement de toute présomption, lorsque les particuliers jugent leur opinion privée en ce qui concerne les commandements divins plus conforme à la volonté divine que l'opinion de l'Eglise universelle".

NNSS Lefebvre et Castro Mayer ont oscillé vers la fin de leur vie entre ces deux voies (vraie et fausse réformes) ; la mort les a empêchés de réaliser un choix clair et définitif. C'est à leurs héritiers qu'est échue la responsabilité de ce choix : la voie de la réforme AU SEIN d'un Eglise meurtrie mais toujours salvatrice où CONTRE cette Eglise trop éloignée de l'idéal que nous en avons tous et qui, soit dit en passant, ne s'est sans doute jamais vraiment incarné.

Les héritiers de Mgr de Castro Mayer ont déjà fait leur choix ; ceux de Mgr Lefebvre se rapprochent du moment fatidique où, bon gré, ils le feront ou, mal gré, on le fera pour eux...

(*) Pour comprendre le trouble des fidèles de la Petite Église et leurs sentiments à l'égard de Pie VII, imaginons Pie XII couronnant Staline "Tzar de toutes les Russies" pour mettre fin au schisme orthodoxe et bénéficier de la bienveillance du maître du Kremlin... Mutatis mutandis c'est ce qu'a fait Pie VII en couronnant celui qui disait : "La Révolution, c'est moi" et qui l'a démontré sans ambiguïté.