SOURCE - Isabelle de Gaulmyn - La Croix - 7 octobre 2012
Le symbole est fort. Juste avant de fêter les cinquante ans de l’ouverture de Vatican II, jeudi prochain, on apprend que la réconciliation entre les intégristes de la Fraternité Saint- Pie-X et l’Eglise catholique a échoué. Sauf retournement de dernière minute hautement improbable, les intégristes ne reviendront jamais dans le giron de l’Eglise. Et c’est précisément sur Vatican II que les discussions ont finalement achoppé.
Le symbole est fort. Juste avant de fêter les cinquante ans de l’ouverture de Vatican II, jeudi prochain, on apprend que la réconciliation entre les intégristes de la Fraternité Saint- Pie-X et l’Eglise catholique a échoué. Sauf retournement de dernière minute hautement improbable, les intégristes ne reviendront jamais dans le giron de l’Eglise. Et c’est précisément sur Vatican II que les discussions ont finalement achoppé.
Le nouveau préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Mgr Gerhard Ludwig Müller, intervenant à une télévision allemande,
a en effet fait savoir samedi 6 octobre qu’il n’y aurait pas de
nouvelle discussion avec les lefebvristes. Ceux-ci continuent à refuser
de signer un document qui reconnait l’entière validité du magistère de
Vatican II. «Il ne peut y avoir d’amputation à la foi catholique,
surtout si il s’agit d’énoncés qui ont été validés par le Concile
Vatican II » affirme Mgr Müller.
A quelques jours du cinquantenaire, l’hypothèque est donc
définitivement levée, pour ceux qui en doutaient encore: le concile
Vatican II ne se négocie pas. « On ne peut geler l’autorité
magistérielle de l’Eglise à 1962 » avait écrit le pape, qui a fait du
concile la « boussole » de son pontificat.
Ces longues négociations aux multiples rebondissements, entamées
depuis la levée des excommunications des évêques intégristes en 2009,
auront eu un mérite : montrer que la rupture n’est pas seulement une
question de liturgie et de messe en latin, en obligeant la Fraternité
Saint-Pie-X à se prononcer sur les fondements de la foi. Les intégristes
ont été amené à dire clairement ce sur quoi ils n’étaient pas d’accord:
l’œcuménisme, le dialogue interreligieux, la liberté religieuse, et au
fond, une certaine conception de la vérité telle qu’elle apparaît à
travers les textes conciliaires.
Dérives et risques de radicalisation
Les intégristes n’ont pas le monopole de la tradition : Vatican II
fait désormais partie de la tradition de l’Eglise, et ne s’inscrit pas
en rupture. Mais il s’agit d’une tradition vivante, et non figée au XIXe
siècle, une tradition capable de se ressourcer à travers l’écoute de la
Parole, comme elle l’a fait durant le concile. C’était, déjà, la
conception développée par Benoît XVI lors de son grands discours sur
l’herméneutique de Vatican II, en 2005.
Certes, on peut se réjouir de cette rupture annoncée, en ce qu’elle
conforte l’enseignement conciliaire. Il n’empêche. Toute rupture est
amère, et celle-ci ne déroge pas à la règle. Jamais, sans doute, on
n’avait été aussi près d’aboutir. Jamais un pape n’avait passé autant
d’énergie à œuvrer pour la réconciliation. Lorsqu’il avait écrit aux évêques,
en 2009, après la levée de l’excommunication, Benoît XVI s’en était
justifié en pointant les risques de radicalisation de petits groupes
exclus de l’institution. Crainte légitime. Nul ne peut se réjouir, dans
l’Eglise, d’assister ainsi à la dérive d’une minorité vers
l’intolérance et la violence. Dimanche dernier la célébration de
l’anniversaire du concile à Notre Dame a ainsi été interrompue par une
poignée de jeunes militants anti-conciliaires. Et depuis quelques mois,
on ne compte plus les rencontres interreligieuses qu’ils tentent
d’empêcher, à travers toute la France…. La religion catholique, de ce
point de vue, n’est pas plus épargnée que les autres par un risque de
radicalisation en interne.
Isabelle de Gaulmyn