3 octobre 2012

[Paix Liturgique] Dans le diocèse d'Evry, près d'un catholique sur deux aspire à bénéficier de la forme extraordinaire du rite romain, et pourtant...

SOURCE - Paix Liturgique, lettre n°355 -3 octobre 2012

Créé en 1966 par détachement du diocèse de Versailles, le diocèse d’Évry – Corbeil-Essonnes compte 700 000 baptisés et de 40 à 50 000 pratiquants selon son site internet. On y dénombre 250 clochers pour 108 paroisses organisées en 22 secteurs pastoraux.

À la demande de Paix liturgique, la société JLM Études, institut de sondage professionnel et indépendant, y a conduit en juin 2012 une étude dont nous vous présentons et commentons cette semaine les résultats. Comme dans la plupart des autres diocèses de France – en particulier ceux de la région parisienne où la densité de population rend l’apartheid liturgique encore plus visible – l’offre de célébrations selon la forme extraordinaire du rite romain demeure malheureusement inadaptée aussi bien à la demande exprimée par les fidèles qu’aux finalités du Motu Proprio Summorum Pontificum.

I – UN DIOCÈSE "VATICAN II"

Comme le proclame le site internet du diocèse d’ Évry – Corbeil-Essonnes, « sa pastorale est directement inspirée du Concile Vatican II ». Tenu de 1987 à 1990, un synode diocésain déboucha sur la promulgation des « orientations fondamentales » suivantes :

-  une Foi éclairée face aux questions de notre temps,
- une Église ouverte qui écoute, accueille et partage, vit et annonce l’Évangile dans le monde de l’Essonne,
-  une Église rassemblée dans le respect des différences.

Jeunes, scientifiques et habitants des quartiers populaires sont particulièrement visés par la pastorale diocésaine qui leur offre quatre services ainsi définis :
- l’accueil de tous les hommes, toutes les femmes, sans exclusive, dans leurs singularités et leurs attentes,
-  la communication qui commence par l’accueil et se poursuit par les témoignages,
-  la liturgie pour rendre à Dieu adoration et grâce dans la beauté des symboles,
- la formation permanente, s’informer, se former, se transformer, dans un monde en perpétuelle évolution.

Le diocèse compte 42 prêtres incardinés pour 32 prêtres retirés, renforcés de 29 prêtres venant d’autres diocèses, de 12 religieux et d’un prêtre en mission ouvrière. Un prêtre en activité sur deux est donc étranger au diocèse ce qui, comme ne manque pas de le relever le site diocésain (« Les prêtres et religieux frères »), entraîne une certaine « fragilité du Corps presbytéral essonnien puisque les autres diocèses comme les communautés peuvent appeler leurs prêtres à une autre mission que celle qui leur est confiée en Essonne ».

II – LA SITUATION DE LA FORME EXTRAORDINAIRE DANS LE DIOCÈSE

L’évêque du diocèse est, depuis l’an 2000, Mgr Michel Dubost, 70 ans, précédemment évêque aux Armées. Il a autorisé, en 2006, à Athis-Mons, la célébration d’une messe selon ce que l’on n’appelait pas encore à l’époque “ la forme extraordinaire du rite romain ”. En 2007, cette célébration a été déplacée à Juvisy avant de s’ancrer en 2009 en l’église Saint-Denis de Viry-Châtillon.

On peut apprécier que Mgr Dubost ait su anticiper l’application du Motu Proprio Summorum Pontificum dans son diocèse (18 ans après le Motu Proprio Ecclesia Dei de 1988 tout de même) en accordant la messe en 2006 mais on ne peut aussi que déplorer que, six ans plus tard, et cinq ans après Summorum Pontificum, cette célébration demeure toujours la seule pour le diocèse. C’est vraiment la seule et unique messe traditionnelle du diocèse, la Fraternité Saint-Pie X n’y ayant pas de lieu de culte.

Une messe pour 40 000 pratiquants répartis sur 1 800 km2, c’est peu. Cinq ans après l’entrée en vigueur du Motu Proprio, c'est un peu court. En soi, les conditions de la célébration de Viry-Châtillon sont satisfaisantes : la messe y est dominicale, hebdomadaire et à un horaire familial (10 heures). Le lieu de culte est digne puisqu’il s’agit d’une belle église médiévale. Le célébrant est de haute qualité pastorale.

Cependant, les fidèles n’ont droit qu’à la messe : l’accès aux sacrements est limité, le catéchisme est formellement interdit et il n’y a pas de scoutisme ou d’action pastorale autre que la messe. De fait, on est beaucoup plus proche de la « parenthèse miséricordieuse » du Motu Proprio de 1988 que de la proclamation solennelle du droit des fidèles à bénéficier de la forme extraordinaire du rite romain faite par le Motu Proprio de 2007.

De ce fait, de nombreuses familles du secteur demeurent attachées aux lieux de messe où leurs enfants ont leurs activités et ne vont donc qu’épisodiquement à Viry-Châtillon. De même, les familles des autres secteurs qui aimeraient bénéficier elles aussi de la messe traditionnelle dans leur paroisse ne se trouvent guère encouragées à renouveler leurs souhaits auprès de leurs curés.

L’histoire de la messe diocésaine est intéressante car c’est la constitution des fidèles en association qui a permis d’obtenir en 2006 l’application du Motu Proprio de 1988 qui reposait, rappelons-le, sur la seule autorité de l’évêque. En 2008, cette association,
baptisée Sanctus Corbinianus, a modifié son objet pour s’adapter à la nouvelle situation créée par le Motu Proprio de Benoît XVI. Elle entend désormais “ contribuer à la mise en œuvre des mesures répondant aux aspirations de tous ceux qui, dans le diocèse de l’Essonne, sont attachés à la tradition tridentine (forme extraordinaire du Motu Proprio Summorum Pontificum) ; promouvoir, soutenir et développer les activités d’ordre liturgique, spirituel, culturel, éducatif ou caritatif concourant à la vitalité de cette tradition et à la réalisation de sa vocation missionnaire ”.

La mobilisation de l’association et son souci constant de dialoguer avec l’évêché ont permis de faire face aux changements de lieu de célébration – d’Athis-Mons à Juvisy et de Juvisy à Viry-Châtillon – en maintenant la stabilité de la communauté et en obtenant de meilleures conditions de célébration, dont l’horaire passé de 9h30 à 10 heures et la désignation d’un prêtre référent, l’abbé Chanut, présenté comme “ en charge du rite extraordinaire ” sur le site diocésain. Site diocésain qui n’annonce cependant pas la messe de Viry-Châtillon, pas plus que ne le fait le site national de la Conférence épiscopale Église Info (ex-Messes Info).

En 2008, Sanctus Corbinianus est même parvenue à obtenir de Mgr Dubost un geste de grande portée symbolique puisqu’il invita Mgr Frikart, évêque auxiliaire émérite de Paris, à célébrer la messe de l’Ascension en l’église Notre-Dame-de-France de Juvisy. Mgr Dubost y prononça l’homélie devant plus de 200 fidèles, remerciant l’association Sanctus Corbinianus pour l’organisation de cette cérémonie.

III – LES RÉSULTATS DU SONDAGE JLM ÉTUDES

L’étude a été réalisée auprès d’un échantillon de 1 221 personnes représentatives de la population de 18 ans et plus du département de l’Essonne dont 442 seulement se sont déclarées catholiques, soit 36,2 %. Un résultat cohérent sur chacun des arrondissements du département (Palaiseau, Évry, Étampes) mais totalement déséquilibré en fonction des classes d’âge : on dénombre en effet un effrayant 16,2 % de catholiques déclarés chez les 18-29 ans, 32,2 % des 30-44 ans, 42,1 % des 45-59 ans et 52,4 % des plus de 60 ans. La passation des enquêtes a été effectuée par téléphone du 20 au 30 juin 2012. Les résultats qui suivent portent sur les 442 se déclarant catholiques.

a) Assistance à la messe

15,3 % des sondés déclarent assister à la messe chaque semaine ;
11,7 % une à deux fois par mois ;
19,3 % pour les grandes fêtes ;
38,8 % occasionnellement ;
14,5 % jamais ;
0,4 % ne répondent pas.
Dans les réponses suivantes, nous considérerons les 27 % de catholiques diocésains assistant à la messe au moins une fois par mois et que nous appellerons, comme le veulent les catégories sociologiques, les “ pratiquants ”.

b) Connaissance du Motu Proprio

64,5 % des catholiques pratiquants du diocèse disent connaître le Motu Proprio Summorum Pontificum contre 35,5 % qui n’en ont jamais entendu parler. C’est un taux qui n’est pas exceptionnel mais qui est dans la moyenne.

c) Perception du Motu Proprio
52,7 % des sondés (base : catholiques pratiquants) trouvent normale la coexistence des deux formes du rite romain au sein de leur paroisse ;
18,6 % n’ont pas d’avis ;
28,7 % la trouvent anormale, ce qui est un taux de résistance élevé mais inférieur à celui mesuré à Lyon qui était de 32,1 %.

d) Participation à la forme extraordinaire

À la question « Si la messe était célébrée en latin et grégorien sous sa forme extraordinaire dans votre paroisse, sans se substituer à celle dite “ ordinaire ” en français, y assisteriez-vous ? »,
29,4 % des pratiquants déclarent vouloir y assister chaque semaine,
16,3 % à un rythme mensuel.
Soit 45,7 % des pratiquants actuels du diocèse d’Évry qui iraient au moins une fois par mois participer à une messe en latin et en grégorien selon le missel de 1962… si le texte du pape était appliqué dans leur propre paroisse. Quasiment un catholique sur deux, soit un résultat en ligne avec tous ceux mesurés jusqu’ici depuis plus de 10 ans.

IV – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE

1)
 Le 15 septembre 2009, lors d’un entretien audio accordé à La Croix, Mgr Dubost s’interrogeait sur “ comment faire une communauté chrétienne avec à peu près à la cathédrale 70 % de gens d’autres cultures ? ” La réponse est simple et nous pouvons la lui soumettre d'autant plus sereinement que, un peu plus tôt dans le même entretien, l'évêque d'Évry abordait la question de la messe du Bienheureux Jean XXIII dite dans son diocèse... C'est tout simplement en offrant la liturgie universelle immuable de l'Église – la forme extraordinaire du rite romain, célébrée en latin et en grégorien – que Mgr Dubost cimentera la communauté chrétienne disparate qui lui est confiée. Le latin, en effet, c'est comme l'uniforme à l'école : ça semble ringard mais c'est la seule réponse aux inégalités et particularismes modernes. D'après l'enquête JLM Études, près d'un catholique pratiquant sur deux du diocèse de Mgr Dubost y aspire, alors pourquoi ne pas la proposer en la cathédrale de la Résurrection d'Évry ?

2) “ Les gens, lorsqu’ils pensent paroisses pensent bâtiments or là nous pensons aux personnes. C’est toute une conversion de mentalité ” : ces paroles de Gérard Henry, diacre du diocèse d’Évry – Corbeil-Essonnes, prononcées à l’occasion de la création d’une paroisse personnelle destinée aux gens du voyage par Mgr Dubost l’an dernier, ne peuvent-elles s’appliquer aux fidèles attachés à la forme extraordinaire du rite romain ?

Non pas que nous considérions que l’application de Summorum Pontificum dans le diocèse d’Évry passe obligatoirement par une paroisse personnelle, mais il est impossible de ne pas entendre le désir des fidèles de Viry-Châtillon d’avoir facilement accès aux sacrements, et notamment les confirmations, selon la liturgie traditionnelle, tout comme leur aspiration à plus d’initiatives communautaires. En tout état de cause, paroisse personnelle ou non, les fidèles attachés à la forme extraordinaire du rite romain ne méritent pas moins d’attention que la communauté des gens du voyage ou que toute autre communauté particulière (Portugais, Antillais, etc.). Oui, il est temps de « convertir les mentalités » dans un diocèse où le Motu Proprio de Benoît XVI n’est dans la pratique pas le bienvenu et où dans le discours on qualifie de « normale » la forme ordinaire pour ne pas avoir besoin de dire qu’on trouve anormale la forme extraordinaire.

3) L’existence d’une messe à Viry-Châtillon ne saurait suffire à répondre à la demande latente mesurée par notre sondage, pas plus qu’elle ne répond aux demandes exprimées depuis 2007 dans le diocèse. Nous en connaissons au moins cinq :

- Montgeron, refus sec du curé puis de l’évêque considérant que “ ce n’était pas le moment ”,
- secteur de Montlhéry / Brétigny-sur-Orge avec un groupe stable de 18 familles représentant 65 personnes, contact de prime abord cordial avec le curé, l’église de Lina étant même envisagée comme lieu de culte, puis plus rien,
- Saulx-les-Chartreux où le refus a été net bien que la demande ait été faite auprès de l’abbé Rodde, par ailleurs chancelier du diocèse donc en principe garant de l’application du droit de l’Église et où existe depuis des décennies une sensibilité liturgique traditionnelle,
- Étampes,
- Dourdan (dont les fidèles rejetés ont tendance à pratiquer dans les Yvelines).

Il est en outre fort probable qu’à Évry comme à Palaiseau, une célébration du missel de Jean XXIII trouverait bien des âmes à satisfaire. Car, comme l’a relevé en mai 2011, le père Patrick Zago, religieux assomptionniste qui fut l’un des célébrants désignés lorsque la messe traditionnelle fit escale à Juvisy : “ Beaucoup, parmi les jeunes foyers, s’attachent à cette messe, quel que soit leur milieu ” (La Croix). Oui, décidément, la forme extraordinaire, cela pourrait sembler ringard, mais c'est la seule réponse moderne aux inégalités et particularismes.

4) En dehors de l’abbé Chanut, au moins sept prêtres ont célébré la forme extraordinaire ces dernières années à la demande de l’évêché : les pères Ribalet, Salaün, Noël, Zago, Gatineau, Gandoulou et Maréchal. Cela prouve que le problème de la célébration limitée à Viry-Châtillon n’est pas une affaire de manque de prêtres capables de la célébrer mais bien de volonté diocésaine. N’oublions pas non plus les communautés Ecclesia Dei qui pourraient, le cas échéant, venir renforcer le corps presbytéral essonnien. C’est encore une possibilité expressément prévue par le Motu Proprio de Benoît XVI. Sans parler du fait que, dans le diocèse d’Évry, il est notoire que certains jeunes prêtres du diocèse ne demanderaient pas mieux que de participer à l’application du Motu Proprio de Benoît XVI...

5) Comme le rappelle justement Mgr. Dubost dans sa lettre aux prêtres du diocèse (voir ci-dessous), le pape explique que le Motu Proprio a pour but de construire la paix entre les fidèles. Il parle d’or. Mais cette paix n’existera que si les autorités du diocèse s’en donnent les moyens en écoutant les appels des nombreux fidèles qui attendent l’application du Motu Proprio et en répondant généreusement à ces demandes, qu’elles soient formulées ou non.

De même, au regard des sondages qui révèlent une réalité plus forte que les quelques demandes formelles timidement faites aux curés par les fidèles, l’évêque ne peut-il pas demander aux curés d’anticiper les demandes, répondant ainsi à l’attente silencieuse de près de la moitié des catholiques pratiquants de son diocèse ? Voici qui serait marcher sur le chemin de la paix entre les fidèles.

« Convertir les mentalités », « construire la paix entre chrétiens » sont des mots qui ont un sens n'est-ce pas ? Or ce n’est pas avec une vision restrictive et frileuse que l’on pourra construire la paix entre chrétiens. Plutôt que d’opposer les deux formes en en qualifiant une de « normale », plutôt que de mettre en avant des conditions à la célébration de la forme extraordinaire (« lorsqu’il n’y a pas de participation de fidèles », « s’il existe une demande stable », « de paroissiens suffisamment nombreux », « Seuls les prêtres et les fidèles qui reconnaissent la légitimité et la valeur de la messe de Paul VI peuvent être autorisés à… »), il serait temps, comme le rappelait ces derniers jours Benoît XVI aux évêques des provinces de l’Ouest de la France, de considérer les fidèles « qui méritent de faire l’objet d’une égale sollicitude pastorale » bien qu’ils « expriment légitimement des sensibilités différentes ».

Ecouter et suivre le pape, ce serait permettre à l’Église de retrouver la paix avec elle-même. Car l’Église ne peut pas se passer de son histoire, de sa liturgie antique, de la beauté du chant grégorien, du silence et du sacré,… bref de la messe qui l’a nourrie durant tant de siècles. L’Église a besoin de se réconcilier avec son passé pour construire son avenir. Car après tout, la forme extraordinaire, cela pourrait sembler ringard, mais…

V – ANNEXES

A)  Lettre de Mgr Dubost aux prêtres du diocèse Évry, le 06 juillet 2007

À tous les prêtres du diocèse

Le texte du « Motu Proprio » sur la messe dite de St Pie V vient de paraître. Il nous faut maintenant en assurer « la réception ». Nous y travaillerons au Conseil Presbytéral de la rentrée. En attendant il me semble important de situer ce texte pour notre diocèse. Le pape explique que ce texte a pour but de construire la paix entre chrétiens. Il convient de garder cet objectif. Il n’y a qu’une forme « ordinaire » et « normale » de célébrer la messe, celle du missel de Paul VI. La forme prescrite par le missel de 1962 demeure une forme « extraordinaire ». Cela dit, tous les prêtres, peuvent s’ils le désirent, lorsqu’il n’y a pas de participation de fidèles, célébrer avec le rituel « tridentin » et ils peuvent aussi célébrer ainsi s’il existe une demande stable de paroissiens suffisamment nombreux. Il en va de même pour la célébration des sacrements. Les mesures prendront effet le 14 septembre 2007. Seuls les prêtres et les fidèles qui reconnaissent la légitimité et la valeur de la messe de Paul VI peuvent être autorisés à utiliser le missel de 1962. A fortiori, ils doivent accepter le Concile Vatican II.

Dans notre diocèse, une messe est célébrée chaque dimanche à Viry-Châtillon avec le missel de 1962. Il est évident que la demande du pape nous invite à continuer les efforts déployés dans le diocèse pour améliorer la qualité de nos célébrations. Les équipes liturgiques doivent être soutenues et invitées à respecter les demandes de la présentation générale du missel de Paul VI.

Je sais que vous ferez pour le mieux… et je vous souhaite de bonnes vacances.
+ Michel Dubost
Évêque d’Évry – Corbeil-Essonnes

B)  Article du Parisien du 14 septembre 2007

Les férus de messe en latin veulent leur propre église
par Sandrine Binet

Il n’y aura pas de déferlante de messes en latin en Essonne. Malgré l’entrée en vigueur aujourd’hui du Motu Proprio, la lettre du pape qui demande aux évêques de « libéraliser la messe en latin », Mgr Dubost, l’évêque d’Évry, a décidé de ne pas multiplier ce type de rite. Les amateurs de messe à l’ancienne devront se contenter de l’unique célébration selon le rite tridentin, autorisée depuis deux ans dans le nord du département. Une déception pour les nostalgiques du latin et des chants grégoriens, qui réclament l’ouverture de nouveaux lieux de culte.

Pas pressé de ressusciter la liturgie traditionnelle, Mgr Dubost estime que « la demande n’est pas assez importante pour le moment ». « Le Motu Proprio stipule que, pour créer des messes en latin, il faut qu’il y ait une communauté stable. Ce n’est pas le cas en Essonne. » En clair, le diocèse d’Évry, qui manque de prêtres et d’argent, n’a pas franchement les moyens de multiplier les messes à la carte pour une minorité de fidèles. Seul changement depuis l’an dernier : la messe traditionnelle a déménagé. Depuis la rentrée, elle a quitté le plateau d’Athis-Mons pour une église plus proche de la gare, à Juvisy. Un lieu « plus central » et « plus accessible », assure le diocèse. Chaque dimanche matin, à 9h30, une centaine de personnes de tous âges et venues de tout le département s’y retrouvent. « Il y a beaucoup de couples avec de jeunes enfants, témoigne le père Noël, chargé par l’évêque de célébrer cette messe un peu particulière. Ce ne sont pas des gens rétrogrades ni fermés sur eux-mêmes. Ils ont le droit d’avoir une expression différente de leur foi. » Mais les traditionalistes ne cachent pas leur déception devant le choix de Notre-Dame-de-France, à Juvisy. Eux auraient préféré un lieu plus adapté à leur rite, avec un orgue à tuyaux, un maître autel et une table de communion. Surtout, ils rêvent de voir davantage d’églises leur ouvrir les portes.

« Le Motu Proprio stipule que nous devrions disposer d’une paroisse. L’évêque pourrait nous confier une église désaffectée, il y en a beaucoup en Essonne, revendique Jean-Michel Caufment, le fondateur de l’association Sanctus Corbinianus, qui fédère les amoureux de la messe en latin. Cela nous permettrait de célébrer notre culte tranquillement, sans être obligés de plier bagage à la hâte, pour laisser la place à la messe suivante. » L’association, basée à Savigny-sur-Orge, souhaiterait également disposer d’un créneau dans l’église de sa commune. D’autres demandes, confortées par le Motu Proprio, pourraient rapidement atterrir sur le bureau de l’évêque.