29 octobre 2012

[Paix Liturgique] Que la messe "de toujours" devienne la messe "de partout"

SOURCE - Paix Liturgique, lettre n°359 - 29 octobre 2012

C’est un joli titre, que nous faisons volontiers nôtre – en l’entendant bien sûr : partout où est célébré le rite romain, car nous n’avons aucunement l’intention d’éliminer les vénérables rites orientaux –, que le quotidien Présent a donné dans son édition du 25 octobre à la présentation du programme du pèlerinage Una cum Papa nostro s’ouvrant ce mercredi 31 octobre par les premières Vêpres de Toussaint en l’église de la Trinité des Pèlerins de Rome (19h15). Messe « de partout » ? On pourrait aussi parler de messe « POUR TOUS » en pensant aux 40 % des catholiques pratiquants français qui désireraient vivre leur foi catholique en Église dans LEUR PAROISSE au rythme de la forme extraordinaire. Comme le précise d’ailleurs dans Présent l’abbé Claude Barthe, aumônier du pèlerinage, « la spécificité de cet acte religieux, particulièrement avec la messe pontificale qui sera célébrée par le Préfet de la Congrégation pour le Culte divin dans la Basilique St-Pierre, est de réunir à Rome des représentants du monde entier des demandeurs de la messe en forme extraordinaire dans les paroisses et des représentants des prêtres qui peuvent désormais célébrer cette messe ». Nous revenons donc avec ferveur sur ce pèlerinage en vous donnant les dernières informations le concernant et en vous livrant les bonnes feuilles d’un entretien accordé par don Nicola Bux, ardent promoteur de " la réforme de la réforme " initiée par Benoît XVI, à l’édition italienne de notre lettre.

I - LE PROGRAMME OFFICIEL DU PÈLERINAGE
 
Mercredi 31 octobre
19h15 > Premières vêpres solennelles de la Toussaint, Église de la Trinité-des-Pèlerins 
Jeudi 1er novembre : Toussaint
10h30 > Messe pontificale célébrée par le cardinal Brandmüller, Église de la Trinité-des-Pèlerins
15h30 > Rosaire et Salut du Saint-Sacrement en la basilique des Saints-Apôtres
17h30 > Secondes vêpres de la Toussaint suivies des vêpres des défunts, Trinité-des-Pèlerins
Vendredi 2 novembre : Commémoration de tous les fidèles défunts
18h30 > Messe pontificale de Requiem célébrée par Mgr Sciacca, Secrétaire du Gouvernorat de l’État de la Cité du Vatican, Église de la Trinité-des-Pèlerins
Samedi 3 novembre : 1er samedi du mois
10h30 > Adoration eucharistique et accueil des pèlerins, Église San Salvatore in Lauro
12h > Angelus chanté par don Pietro Cantoni, fondateur de l’Opus Mariæ
13h15 > Procession vers Saint-Pierre de Rome
15h > Messe pontificale dans la Basilique Saint-Pierre, par le Cardinal Antonio Cañizares, Préfet de la Congrégation pour le Culte divin
17h30 > Conférence en l’honneur du cardinal Alfons Stickler et de M. Michael Davies, au Centre Russia Ecumenica (Centro Lepanto et FIUV)
Adresses
1/ Église San Salvatore in Lauro, Piazza di San Salvatore in Lauro (en face du Château Saint-Ange, sur l’autre rive)
2/ Église de la Trinité-des-Pèlerins, Piazza delle SS. Trinità dei Pelegrini, 100 m de Ponte Sisto
3/ Basilique des Saints-Apôtres, Piazza dei Santi Apostoli, 51 (au bout de la Via del Corso, près de la Piazza Venezia)
4/ Centre Russia Ecumenica, Borgo Pio, 141 (la "grand-rue" du quartier Borgo, parallèle à la via della Conciliazione)

II – À SAINT-PIERRE, UNE IMAGE VIVANTE DU MOTU PROPRIO

Unique rite romain : la célébration de la messe pontificale en forme extraordinaire dans Saint-Pierre de Rome, qu’a très paternellement accepté d’assurer le Préfet de la Congrégation pour le Culte divin, c'est-à-dire le « ministre de la liturgie du Pape », manifeste éminemment la banalisation – au bon sens du terme – de la célébration de la forme extraordinaire.

En sa forme extraordinaire : à quoi s’ajoutera, voulue avec beaucoup d’amabilité et de simplicité comme toute naturelle, la présence des représentants de l’organisme officiel chargée de cette forme extraordinaire : le Cœtus Internationalis Summorum Pontificum, organisateur de l’événement vient d’annoncer la présence, lors de la messe du 3 novembre, du nouveau " patron " de la Commission Ecclesia Dei, l’archevêque Augustine Di Noia (le cérémoniaire de la messe du cardinal Cañizares étant d’ailleurs l’abbé Almiro de Andrade, officiel de la même Commission). C’est un signe plein d’encourageante sympathie de la part de l’homme que le pape a choisi pour poursuivre les relations avec la Fraternité Saint-Pie X après l'impasse dans lequel se sont retrouvées les discussions menées jusqu’en juin dernier. Mgr Di Noia n’oublie pas qu’il a été le premier collaborateur du cardinal Cañizares jusqu’à cet été, et il montre aussi que le dossier Saint-Pie X s’intègre dans sa pensée, comme dans celle du Pape, à la préoccupation plus large de la pacification de l’Église avec elle-même en ce qui concerne sa tradition liturgique. Ce qui passe par le souci pastoral charitable des fidèles désireux de vivre, dans leur paroisse, leur foi au rythme de la forme extraordinaire du rite romain, eux aussi au centre de son attention.

Et ce qui manifeste très simplement et très concrètement que la Commission n’a pas seulement pour compétence les communautés ecclésiastiques et religieuses (qu’elles soient « internes »  : les communautés Ecclesia Dei, ou qu’elles soient « externes »  : la Fraternité Saint-Pie X et ses communautés amies), mais qu’elle considère comme relevant de sa sollicitude naturelle un pèlerinage dont l’initiative revient en quelque sorte aux coetus, aux groupes de demandeurs paroissiaux de la forme extraordinaire, qui se retrouvent pour cette occasion particulière – et surtout pas, précisent les organisateurs, à la manière d’une confédération – dans un coetus internationalis.

Nous voulons y voir, pour notre part, un encouragement bienveillant de Rome à ces groupes stables de fidèles assez souvent maltraités dans les diocèses. Et peut-être l’annonce d’une aide concrète pour les aider à trouver des solutions sur le terrain.

III - EN PROCESSION VERS SAINT-PIERRE

Pour préparer la messe de l’après-midi, les organisateurs du pèlerinage ont prévu en l’église de San Salvatore in Lauro, située aux abords du pont Saint-Ange, côté centre historique, une adoration eucharistique à partir de 10h30 le samedi 3 novembre.

À midi l’Angelus y sera chanté par don Pietro Cantoni, un de ces nombreux prêtres ordonnés par Mgr Lefebvre et qui œuvrent aujourd’hui dans les diocèses du monde, fondateur, en ce qui le concerne, de l’Opus Mariæ Matris Ecclesiæ, une association sacerdotale du diocèse de Massa-Carrara vouée à la Nouvelle Évangélisation notamment par la pratique et la diffusion des exercices spirituels de Saint Ignace.

Ensuite, vers 13h15, se formera la procession qui portera les clercs et les fidèles vers la basilique Saint-Pierre.

Le clergé passera directement les portes de la Basilique vaticane pour rejoindre la Sacristie et y recevoir le cardinal célébrant. Les fidèles bénéficieront d’un accès réservé, la gendarmerie pontificale ne pouvant pas dispenser des habituels contrôles de sécurité, mais faisant en sorte de les faciliter au maximum.

Les organisateurs du pèlerinage nous ont précisé qu’ils conseillent vivement aux pèlerins de se joindre à la procession, soit dès le départ à San Salvatore in Lauro soit en la rejoignant via della Conciliazione vers 14 heures, pour participer à cet acte religieux et aussi pour profiter de cette entrée dans la Basilique.

On oublie trop de nos jours, où le culte est par la force des choses renfermé dans les églises, que les processions ont toujours été une partie très importante de la liturgie telle qu’elle a été vécue par le clergé et le peuple chrétien dès les origines. Si donc le beau temps est de la partie, gageons que celle-ci sera un des temps religieux forts du pèlerinage, une belle manifestation de la gratitude du peuple Summorum Pontificum envers Benoît XVI pour les 5 ans du Motu Proprio.



ANNEXE – DON NICOLA BUX  : UNE MESSE POUR « FAVORISER LA RENAISSANCE DU SACRÉ DANS LES CŒURS »

Dans son numéro 35, notre lettre mensuelle en italien a publié un entretien avec don Nicola Bux, l’un des meilleurs connaisseurs de la pensée liturgique du Saint-Père, auteur d’un livre essentiel sur le sujet  : La Réforme de Benoît XVI - La Liturgie entre Innovation et Tradition (éditions Tempora). Don Nicola Bux, qui a apporté son précieux concours dès l’origine de ce pèlerinage romain, a commenté pour nos lecteurs transalpins la distance qui persiste entre les orientations liturgiques données par le Souverain Pontife et la réalité des messes dominicales en paroisse :

« L’Église, nous apprend l’histoire, se développe par la réforme et non par la révolution. [...] Il en advient de même pour la sainte liturgie : elle se développe de façon quasi imperceptible à partir d’éléments préexistants. Si elle le fait en revanche de façon brusque, cela indique qu’il ne s’agit pas d’une simple mise à jour mais d’un changement d’une chose à l’autre de sorte que la norme de la prière (lex orandi) ne correspond plus à la norme du Credo (lex credendi). On tombe alors dans l’erreur voire dans l’hérésie. »
[...]
« La distance entre la liturgie pontificale et les liturgies locales doit nous faire réfléchir : nous sommes catholiques si nous reconnaissons le primat du successeur de Pierre, c’est-à-dire la responsabilité personnelle que le Seigneur lui donne sur l’Église universelle. S’il est vrai qu’il y a, dans l’Église universelle, divers rites, en l’espèce orientaux, gouvernés par des patriarches, il y a à la tête du rite romain l’évêque de Rome qui, qu’il célèbre à Saint-Pierre ou lors de ses voyages apostoliques, opère la sauvegarde de " l’unité substantielle du rite romain " dans " la diversité des assemblées, des régions, des peuples " (SC 38). De ce fait, la liturgie célébrée par l’évêque de Rome est non seulement exemplaire mais aussi typique, comprenez normative, dans la mesure où elle met en pratique les prescriptions des livres liturgiques comme les catholiques sont tous, et partout, tenus de le faire. »
[...]
« Le Saint-Père a remis en évidence le rite romain célébré jusqu’à Vatican II, en le définissant " forme extraordinaire " vis-à-vis de la forme ordinaire issue de la réforme postconciliaire. Il l’a fait en raison de ses études et de ses relations avec d’éminents liturgistes, dont quelques-uns des experts conciliaires, qui n’étaient pas plus satisfaits de la réforme que de la situation antérieure : il n’y a qu’à penser à Joseph Andreas Jungmann, l’auteur de Missarum Solemnia. On trouve là l’explication de l’enrichissement mutuel des deux formes du rite romain, à rechercher avec intelligence et patience, ce qui se fait là où elles sont célébrées l’une et l’autre comme cela arrive de plus en plus à travers le monde.

Il est inexact de dire que le pape ait publié le Motu Proprio pour faire plaisir à la Fraternité Saint-Pie X : ce n’est ni dans son style ni dans son esprit. Il est vrai en revanche qu’il doit apporter la paix dans toute l’Église après des décennies d’abus, de préceptes, de résistances et d’indults. La rencontre entre les deux formes survient tout simplement quand un même prêtre les célèbre l’une comme l’autre et les offre également aux fidèles. Mais il faut du temps pour y parvenir car de nombreux prêtres ne connaissent plus le latin. Les fidèles aussi doivent se préparer à l’application pleine et entière des articles 36 et 54 de la constitution Sacrosanctum Concilium qui prévoient la coexistence des langues vernaculaires et du latin, langue de l’unité de l’Église universelle. Dans un sanctuaire comme Lourdes, est-il plus avisé de célébrer une messe " internationale " en plusieurs langues, de sorte que chaque groupe n’en comprenne qu’un morceau, ou bien une liturgie en latin qui nous fait tous nous sentir membres de l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique ? Sans négliger, bien sûr, la nécessaire compréhension et intelligence des fidèles qui peut-être soutenu au moyens de livrets bilingues adaptés à tous les groupes linguistiques de fidèles présents. »
[...]
« Le geste du Préfet de la Congrégation pour le Culte divin entend démontrer une fois encore que nul n’est de trop dans l’Église, comme eut l’occasion de le dire le pape aux évêques de France lors de son voyage de 2008. [...] En ce sens, la messe selon la forme extraordinaire promue par le Cœtus Internationalis Summorum Pontificum représente un signe d’obéissance et de communion avec le pape. Sans la communion affective et effective avec le Souverain Pontife et les évêques unis à lui, on ne peut pas se dire catholique.

Nous demanderons instamment au Seigneur l’unité – être ensemble autour d’Un – et la paix, synonyme de la communion – qui vient de cum munera, ce qui signifie mettre ensemble les charismes de chacun – en espérant que cessent les rivalités et l’auto-affirmation et que soit promue la fraternité entre tous dans la charité du Christ. »