SOURCE - Disputationes Theologicae - 28 avril 2010
La rédaction de Disputationes theologicae, dans le cadre d’un approfondissement du débat sur la liturgie et sur ce qu’on nomme « réforme de la réforme » a choisi d’interroger l’un des plus célèbres liturgistes actuels, Mons. Nicola Bux.
Né en 1947, ordonné prêtre en 1975, il a effectué ses travaux de recherche à l’Ecumenical Institute, au Biblicum de Jérusalem et à l’Institut saint Anselme de Rome. Professeur de théologie sacramentaire à la faculté théologique de Bari, on le compte parmi les collaborateurs les plus estimés du pape Benoît XVI. Auteur de nombreuses publications en théologie dogmatique et en liturgie, il a récemment publié un ouvrage sur la doctrine liturgique du Saint Père, La réforme de Benoît XVI. Mons. Bux est aussi consulteur à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et à la Congrégation pour la Cause des Saints, en même temps que membre du Bureau pour les Célébrations Pontificales. Il est collaborateur de la revue Communio, et l’un des spécialistes reconnus des liturgies orientales.
Monseigneur, vous êtes professeur de théologie sacramentaire et en même temps l’un des experts en liturgie les plus proches du Pape : est-ce là un signe qu’il est impossible de parler de liturgie sans une doctrine théologique bien fondée ?
La liturgie appartient au dogme de l’Église : c’est à partir de la foi de l’Église qu’on parvient à la liturgie, et c’est par la prière qu’on parvient au dogme. Tout le monde connaît l’adage lex orandi, lex credendi : c’est à partir de notre façon de prier qu’on peut saisir en quoi nous croyons, mais réciproquement aussi c’est de notre façon de croire que découle notre façon de prier. C’est cette réciprocité qui a été exposée et sagement développée par l’encyclique Mediator Dei du vénérable Pie XII.
Désormais, même les plus tenaces partisans d’une « révolution permanente » en liturgie semblent céder devant les sages argumentations du Pape – comme vous l’exposez très clairement dans votre dernier ouvrage. Sommes-nous, à votre avis, devant une nouvelle (ou antique, si vous préférez) vision de la liturgie ?
La liturgie est par sa nature d’institution divine ; elle se fonde sur des éléments immuables déterminés par son divin fondateur. C’est précisément en raison d’un tel fondement qu’on peut affirmer que la liturgie est « de droit divin ». Ce n’est pas par hasard que les orientaux utilisent l’expression de « Divine liturgie », puisqu’elle est l’œuvre même de Dieu, l’opus Dei comme dit saint Benoît. La liturgie n’est donc pas une chose humaine. Dans le document conciliaire sur la liturgie, au n. 22 §3, il est clairement affirmé que personne, pas même le prêtre, ne peut en ajouter, retrancher ou modifier quoique ce soit. Pour quel motif ? Parce que la liturgie appartient au Seigneur. Pendant le carême nous avons lu les passages du Deutéronome dans lesquels Dieu lui-même établit jusqu’aux moindres objets du culte. Dans le Nouveau Testament, c’est Jésus lui-même qui enseigne aux disciples où et comment préparer la Cène. Dieu a le droit d’être adoré comme Il le veut et non pas comme nous le voulons nous-mêmes. Sinon l’on tombe dans un culte « idolâtrique », au sens propre du terme grec, à savoir un culte fabriqué à notre image. Lorsque la liturgie reflète les goûts et les tendances créatives du prêtre ou d’un groupe de laïcs, elle devient idolâtrique. Le culte catholique est un culte en esprit et en vérité, parce qu’il s’adresse au Père dans le Saint-Esprit, mais qu’il doit passer aussi par Jésus-Christ, il doit passer par la Vérité même. C’est pour cela qu’il faut redécouvrir que Dieu a le droit d’être adoré comme Lui-même l’a établi. Les formes rituelles ne sont pas quelque chose à « interpréter », puisqu’elles sont l’aboutissement de la foi méditée et devenue en un certain sens culture de l’Église. L’Église s’est toujours attachée à ce que les rites ne soient pas le produit de goûts subjectifs, mais précisément l’expression de l’Église entière, c’est-à-dire « catholique ». La liturgie est catholique, universelle. Donc même à l’occasion d’une célébration particulière ou en un lieu particulier, il est inimaginable de célébrer en contraste avec la physionomie « catholique » de la liturgie.
Il arrive qu’on rencontre aujourd’hui dans le clergé une attitude qui, bien que ne niant pas ouvertement leur efficacité, néglige cependant trop souvent l’aspect qu’on appelle “ex opere operato” du sacrement, qui est du coup ainsi réduit presque uniquement à un « symbole ». Une des causes de cette déviation n’est-elle pas la perte de la « ritualité » traditionnelle ?
La cause d’une telle dérive est avant tout l’oubli du fait que le culte est rendu non pas à un Dieu imaginaire, mais à un Dieu présent, un Dieu opérant : le Christ Jésus. Le n. 7 de Sacrosanctum Concilium nous explique, d’ailleurs, les modes de cette présence divine : cet article est repris presque mot pour mot de Mediator Dei, auquel il ajoute la présence dans la Parole de Dieu. Il y est clairement expliqué que la liturgie tient sa raison d’être de cette présence de Dieu ; sinon elle deviendrait autoréférentielle, elle serait vidée de son contenu.
L’oubli, la sous-évaluation de la présence du Christ – et tout particulièrement dans l’Eucharistie, où il est présent vraiment, réellement, substantiellement – est la cause du glissement dont vous parlez. Avec cette déformation, on aboutit à définir la liturgie comme un pur ensemble de symboles et de signes, comme on l’entend parfois dire aujourd’hui : dans une telle conception, il faut noter que « signe » est entendu exclusivement comme « ce qui renvoie à quelque chose d’autre », en oubliant que le signe fait un tout avec ce qu’il signifie. C’est pourtant ici qu’on entre dans le sacrement. Lorsqu’on évacue cet aspect, les sacrements sont réduits à de purs symboles, on oublie leur « efficacité » et les effets qu’ils produisent ; ce n’est plus alors le Christ qui « agit », qui « opère », par le moyen des sacrements. C’est là pourtant le sens de l’expression classique « ex opere operato », un peu étrange, mais qui signifie l’opérativité du sacrement à partir de Celui qui opère en lui. On peut donner l’exemple d’un médicament : en apparence on ne voit qu’une fiole ou une pastille ou un liquide ; or ce qui compte n’est pas seulement le symbole du remède que le médecin veut nous donner, puisque si nous les prenons ils nous guérissent, c'est-à-dire qu’on en constate les effets. Dans le sacrement, l’auteur de cet effet est le Seigneur présent et opérant dans le rite sacramentel. Saint Léon le Grand, cité dans le catéchisme de l’Eglise catholique, dit qu’après l’Ascension tout ce qui dans le Seigneur était visible sur terre est passé dans les sacrements. C’est de cette façon qu’aujourd’hui le Christ continue à être présent et visible pour nous. C’est à la lumière de ceci qu’il faut comprendre ce que saint Thomas veut dire lorsqu’il parle de « matière » du sacrement. Si on ne revient pas à ce genre de notion réaliste, il est impossible de comprendre les sacrements. La présence divine n’est pas seulement quelque chose qu’il faut envisager « symboliquement », mais elle est quelque chose qui touche l’homme par le moyen du sacrement, elle est quelque chose qui agit. Moi-même je peux attester, comme beaucoup d’autres prêtres, de la guérison de malades après qu’ils aient reçu l’Onction, et plus encore de la guérison d’une âme après la Confession ou grâce à la réception fréquente de l’Eucharistie. Les sacrements ont des effets, ils ont des conséquences en raison de la cause qui agit en eux. Ce sont les effets de la présence divine, qui est précisément ce qui opère dans la divine liturgie. Le Pape l’a exposé merveilleusement aux curés de Rome, cette année, en leur disant que le sacrement est l’introduction de notre être dans l’être du Christ, dans l’être divin lui-même.
Au-delà de l’opinion de certains utopistes, qui avec peu de sens pastoral voudraient une restauration immédiate de toutes choses, comment pourrait-on agir doucement, mais fermement, dans le but d’améliorer graduellement certains aspects de la liturgie ? Comment agir dans ce processus long mais nécessaire ? Comment s’adapter à la réalité sans mille compromis ?
Il faut avant tout tenir compte du moment historique que nous vivons, et qui inclut une crise générale de l’autorité, qu’elle soit l’autorité du père, de l’Etat, de l’Eglise (et dans l’Église). Comme nous disions tout à l’heure le risque est l’aboutir à une conception de « self-service » dans l’Église. Nous nous trouvons aujourd’hui dans une sorte d’anomie – une absence de loi – diffuse, même si en même temps tout le monde recourt aux lois quand ses propres droits sont mis à mal.
Les droits de Dieu sont systématiquement bafoués. Comment peut-on chercher à obtenir l’observation des règles liturgiques si nous n’avons pas d’abord expliqué ce qu’est le « ius divinum » de la liturgie ? Aujourd’hui personne ne le sait plus : il faut donc avant tout faire comprendre le sens des règles. C’est un peu comme en morale, la détermination d’une loi se fonde avant tout sur la compréhension des ses principes et il est évident que lorsqu’on parle de liturgie et des sacrements il y a bien des aspects moraux. En tout premier lieu, disais-je, il est donc nécessaire de faire comprendre que le sens des règles dérive de la conviction que la « première règle » est d’adorer Dieu – Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu n’auras pas d’autre Dieu que Moi. On ne peut pas fabriquer un culte à sa propre image, sinon c’est Dieu que l’on déforme. Or aujourd’hui non seulement on imagine un dieu et après on improvise un culte qui convienne à cette image, mais on va même jusqu’à imaginer d’abord un culte pour inventer ensuite le dieu qui lui correspond. L’idolâtrie signifie « idée déformée de Dieu » : c’est bien là la réalité qui nous entoure.
Le Pape Benoit XVI, dans la lettre aux évêques qui explique le sens de la révocation de l’excommunication des évêques consacrés par Mgr Lefebvre, voulait faire comprendre à ceux qui lui reprochaient de s’occuper de problèmes secondaires comme la liturgie, qu’à une époque où le sens de la foi et du sacré s’éteint partout, il est au contraire nécessaire que ce soit justement dans la liturgie que l’on trouve la façon privilégiée de rencontrer Dieu. La liturgie est et reste le lieu le plus approprié pour cette rencontre avec Dieu, et pour cela le Pape, lorsqu’il s’en préoccupe, ne traite pas de problèmes secondaires, mais bien de questions primordiales : si même la liturgie se met à parler le langage du monde, comme faire pour aider l’homme ? Quant aux utopistes, il faut leur rappeler qu’il est nécessaire de posséder ce que Benoit XVI appelle : « La patience de l’Amour ».
L’ancien offertoire parlait de Dieu à l’homme avec une éloquence remarquable sur la valeur sacrificielle et sur la nature de la Messe, comme sacrifice offert à Dieu. Pourrait-on penser à un correction dans ce sens du nouveau rite ?
Il est important que l’on connaisse de plus en plus l’ancienne Messe, dite aussi tridentine – mais qu’il serait en fait plus opportun d’appeler « de Saint Grégoire le Grand », comme l’a récemment exposé Martin Mosebach. En effet, elle a pris forme dès le Pape s. Damase et puis sous s. Grégoire le Grand, mais pas avec s. Pie V, qui n’a fait que réordonner et codifier ce qui existait déjà, en prenant acte des enrichissements des siècles précédents et en mettant de côté ce qui était tombé en désuétude. Ceci étant dit, il faut avant tout bien connaître cette Messe, dont l’offertoire est partie intégrante. Il y a eu nombre de travaux de recherche dans ce sens et beaucoup se sont interrogés sur l’opportunité de réintroduire l’ancien offertoire, auquel vous faites allusion. Cependant seul le Saint-Siège a autorité pour œuvrer en ce sens. Il est vrai cependant que la logique qui a dicté la réforme de la liturgie après le concile Vatican II a amené à simplifier l’offertoire, parce qu’on pensait qu’il y avait là plusieurs formule de prières offertoriales : c’est ainsi qu’on a introduit les deux formules de bénédiction de saveur judaïque ; la secrète – qui est devenue « prière sur les offrandes » – et l’ « orate fratres » ont été maintenus, mais on les a estimées plus que suffisantes. A vrai dire cette simplicité, entendue comme un retour à la pureté des origines, se heurte à la tradition liturgique romaine, comme avec la tradition byzantine et avec les autres liturgies orientales et occidentales. La structure de l’offertoire était vue par les grands commentateurs et théologiens du Moyen-âge comme l’entrée triomphale du Christ à Jérusalem, qui va s’immoler en offrande sacrificielle. C’est pour cette raison que les offrandes étaient déjà dites « saintes », et que l’offertoire possédait une telle importance. La simplification moderne que je viens de décrire, il est vrai, en amène aujourd’hui beaucoup à réclamer le retour des riches et belles prières du « suscipe sancte Pater » et du « suscipe Sancta Trinitas », pour n’en citer que quelques-unes.
Cependant ce ne sera que par une plus large diffusion de l’ancienne Messe que cette « contagion » de l’ancien sur le nouveau rite sera possible. C’est pour cela que réintroduire la Messe « classique », si vous me permettez l’expression, peut constituer un facteur de grand enrichissement. Il faut donc mettre en œuvre une célébration festive régulière de la Messe traditionnelle, au moins dans chaque Cathédrale du Monde, mais même dans chaque paroisse : cela aidera les fidèles à apprivoiser le latin et à se sentir membre de l’Église catholique ; cela leur permettra aussi en pratique de participer aux Messes internationales dans les grands sanctuaires. En même temps, je pense qu’il faut à tous prix éviter les réintroductions décontextualisées : je veux dire qu’il y a une ritualité qui est liée à chaque signification exprimée, et qui ne peut donc pas être réintroduite simplement en insérant une prière dans le missel. Il s’agit là d’un travail bien plus complexe.
La gestualité et l’orientation ont évidemment une grande importance, puisque ce que le fidèle voit est le reflet d’une réalité invisible : disposer la croix au centre de l’autel pourrait- être un moyen de rappeler à tous ce qu’est la Messe ?
Effectivement, la croix au centre de l’autel est le bon moyen de rappeler ce qu’est la Messe. Je ne parle pas d’une croix « minimale », mais d’une croix qui puisse être vue, c’est-à-dire dont les dimensions sont adaptées à l’espace ecclésial. Elle doit être replacée au centre, dans l’axe de l’autel, et elle doit pouvoir être vue par tous. Elle doit être le point de rencontre du regard des fidèles et du regard du prêtre, comme le dit Joseph Ratzinger dans son Introduction à l’esprit de la liturgie. Elle doit être placée au centre, indépendamment de la célébration, donc même si celle-ci est faite « vers le peuple ». J’insiste sur un croix bien visible : à quoi sert une image dont on ne peut pas profiter comme il faudrait ? Les images renvoient à leur original. Nous savons tous qu’il y a eu dans l’histoire des doctrines aniconiques, par exemple Épiphane de Salamine, ou encore les cisterciens, mais le culte des images a par la suite prévalu dans l’Église avec le concile de Nicée II en 787, sur la base de ce qui disait saint Jean Damascène : « L’image renvoie au prototype ». Cela vaut encore plus aujourd’hui dans ce que l’on appelle la civilisation de l’image. A une époque où la vision est devenue un instrument privilégié pour nos contemporains, on ne peut pas se contenter de mettre de côté une petite croix ou une esquisse illisible de la croix, mais il est nécessaire que la croix, avec le crucifix, soient bien visibles sur l’autel, quelque soit le lieu d’où on le regarde.
Face à la redécouverte des exigences dont vous nous avez parlé, il y a cependant l’étape difficile des choix pratiques. Comment faire ?
A mon avis la priorité est de faire comprendre le sens du divin. L’homme cherche Dieu, cherche le sacré et ce qui en est le signe ; dans son exigence naturelle de s’adresser à Dieu et de le vénérer, l’homme cherche à rencontrer Dieu dans les formes du rite. Si l’on déforme la véritable sacralité du culte chrétien, alors l’homme en est réduit à marcher à tâtons, et à avancer de travers, parce qu’il est lui-aussi comme perdu. Comment, alors, l’homme doit-il répondre correctement à cette exigence cultuelle envers Dieu ? Avant tout il doit pouvoir rencontrer dans l’Eglise ce qui est la définition par excellence du sacré : Jésus-Eucharistie. Le tabernacle doit donc revenir au centre des églises. Il est vrai qu’historiquement, dans les grandes basiliques ou dans les cathédrales, le tabernacle était placé dans une chapelle latérale. On sait aussi que la reforme tridentine a voulu remettre au centre le tabernacle pour s’opposer aux erreurs protestantes sur la présence véritable, réelle et substantielle du Seigneur. Mais il est vrai aussi qu’aujourd’hui la mentalité qui nous entoure conteste non seulement la présence réelle, mais la présence même du divin dans le Monde. Dans la religion, l’homme cherche naturellement la rencontre avec le divin. Mais cette présence du divin ne peut pas être réduite à quelque chose de purement spirituel : cette présence doit être « touchée » et cela ne se fait pas avec un livre. On ne peut pas parler de présence de Dieu uniquement dans les termes relatifs à la lecture des Saintes Ecritures. Certes quand la Parole de Dieu est proclamée on peut à juste titre parler de présence divine, mais il s’agit alors d’une présence spirituelle, et non pas de la présence vraie, réelle et substantielle de l’Eucharistie. D’où l’importance de revenir à la centralité du tabernacle et avec lui à la centralité du Corps du Christ présent. Ce qui occupe le centre ne peut pas être le siège du célébrant : ce n’est pas un homme qui est au centre de notre foi, mais c’est le Christ, dans l’Eucharistie. Sinon on aboutit à comparer l’église à une salle, à une tribune de ce monde, au centre duquel siège un homme. Le prêtre est le ministre, il ne peut pas être situé au centre de l’action liturgique : au centre du culte il y a le Christ-Eucharistie, il y a le tabernacle, il y a la croix. C’est de cela qu’il faut repartir, sinon on perd le sens du divin. Le tabernacle est ce qui doit attirer le regard comme ce qui est au cœur de chaque église.
Le Card. Castrillon dans son homélie du 24 septembre 2007 à Saint Eloi disait que l’Eglise a besoin d’instituts « spécialisés » dans la liturgie traditionnelle. Pensez-vous que les instituts aujourd’hui liés à la commission Ecclesia Dei peuvent avoir un rôle clef dans la formation des prêtres ou dans la redécouverte des richesses de la Tradition ?
Bien sûr! De tels instituts exercent un charisme propre, et un charisme est quelque chose qui est dans l’Église et au service de l’Église. Un diocèse peut tirer un avantage considérable du fait de se prévaloir de leur aide. L’ordre franciscain aurait-il joué le rôle qu’il a eu (en Italie, les franciscains sont à l’origine d’un grand nombre de paroisses, d’écoles et autres institutions dans tous les diocèses – NdT) si le Pape n’avait pas reconnu son importance et ne l’avait pas mis à disposition pour le bien de toute l’Eglise ?
Interview réalisée par Don Stefano Carusi
Traduction française par M. l'abbé Matthieu Raffray
La rédaction de Disputationes theologicae, dans le cadre d’un approfondissement du débat sur la liturgie et sur ce qu’on nomme « réforme de la réforme » a choisi d’interroger l’un des plus célèbres liturgistes actuels, Mons. Nicola Bux.
Né en 1947, ordonné prêtre en 1975, il a effectué ses travaux de recherche à l’Ecumenical Institute, au Biblicum de Jérusalem et à l’Institut saint Anselme de Rome. Professeur de théologie sacramentaire à la faculté théologique de Bari, on le compte parmi les collaborateurs les plus estimés du pape Benoît XVI. Auteur de nombreuses publications en théologie dogmatique et en liturgie, il a récemment publié un ouvrage sur la doctrine liturgique du Saint Père, La réforme de Benoît XVI. Mons. Bux est aussi consulteur à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et à la Congrégation pour la Cause des Saints, en même temps que membre du Bureau pour les Célébrations Pontificales. Il est collaborateur de la revue Communio, et l’un des spécialistes reconnus des liturgies orientales.
Monseigneur, vous êtes professeur de théologie sacramentaire et en même temps l’un des experts en liturgie les plus proches du Pape : est-ce là un signe qu’il est impossible de parler de liturgie sans une doctrine théologique bien fondée ?
La liturgie appartient au dogme de l’Église : c’est à partir de la foi de l’Église qu’on parvient à la liturgie, et c’est par la prière qu’on parvient au dogme. Tout le monde connaît l’adage lex orandi, lex credendi : c’est à partir de notre façon de prier qu’on peut saisir en quoi nous croyons, mais réciproquement aussi c’est de notre façon de croire que découle notre façon de prier. C’est cette réciprocité qui a été exposée et sagement développée par l’encyclique Mediator Dei du vénérable Pie XII.
Désormais, même les plus tenaces partisans d’une « révolution permanente » en liturgie semblent céder devant les sages argumentations du Pape – comme vous l’exposez très clairement dans votre dernier ouvrage. Sommes-nous, à votre avis, devant une nouvelle (ou antique, si vous préférez) vision de la liturgie ?
La liturgie est par sa nature d’institution divine ; elle se fonde sur des éléments immuables déterminés par son divin fondateur. C’est précisément en raison d’un tel fondement qu’on peut affirmer que la liturgie est « de droit divin ». Ce n’est pas par hasard que les orientaux utilisent l’expression de « Divine liturgie », puisqu’elle est l’œuvre même de Dieu, l’opus Dei comme dit saint Benoît. La liturgie n’est donc pas une chose humaine. Dans le document conciliaire sur la liturgie, au n. 22 §3, il est clairement affirmé que personne, pas même le prêtre, ne peut en ajouter, retrancher ou modifier quoique ce soit. Pour quel motif ? Parce que la liturgie appartient au Seigneur. Pendant le carême nous avons lu les passages du Deutéronome dans lesquels Dieu lui-même établit jusqu’aux moindres objets du culte. Dans le Nouveau Testament, c’est Jésus lui-même qui enseigne aux disciples où et comment préparer la Cène. Dieu a le droit d’être adoré comme Il le veut et non pas comme nous le voulons nous-mêmes. Sinon l’on tombe dans un culte « idolâtrique », au sens propre du terme grec, à savoir un culte fabriqué à notre image. Lorsque la liturgie reflète les goûts et les tendances créatives du prêtre ou d’un groupe de laïcs, elle devient idolâtrique. Le culte catholique est un culte en esprit et en vérité, parce qu’il s’adresse au Père dans le Saint-Esprit, mais qu’il doit passer aussi par Jésus-Christ, il doit passer par la Vérité même. C’est pour cela qu’il faut redécouvrir que Dieu a le droit d’être adoré comme Lui-même l’a établi. Les formes rituelles ne sont pas quelque chose à « interpréter », puisqu’elles sont l’aboutissement de la foi méditée et devenue en un certain sens culture de l’Église. L’Église s’est toujours attachée à ce que les rites ne soient pas le produit de goûts subjectifs, mais précisément l’expression de l’Église entière, c’est-à-dire « catholique ». La liturgie est catholique, universelle. Donc même à l’occasion d’une célébration particulière ou en un lieu particulier, il est inimaginable de célébrer en contraste avec la physionomie « catholique » de la liturgie.
Il arrive qu’on rencontre aujourd’hui dans le clergé une attitude qui, bien que ne niant pas ouvertement leur efficacité, néglige cependant trop souvent l’aspect qu’on appelle “ex opere operato” du sacrement, qui est du coup ainsi réduit presque uniquement à un « symbole ». Une des causes de cette déviation n’est-elle pas la perte de la « ritualité » traditionnelle ?
La cause d’une telle dérive est avant tout l’oubli du fait que le culte est rendu non pas à un Dieu imaginaire, mais à un Dieu présent, un Dieu opérant : le Christ Jésus. Le n. 7 de Sacrosanctum Concilium nous explique, d’ailleurs, les modes de cette présence divine : cet article est repris presque mot pour mot de Mediator Dei, auquel il ajoute la présence dans la Parole de Dieu. Il y est clairement expliqué que la liturgie tient sa raison d’être de cette présence de Dieu ; sinon elle deviendrait autoréférentielle, elle serait vidée de son contenu.
L’oubli, la sous-évaluation de la présence du Christ – et tout particulièrement dans l’Eucharistie, où il est présent vraiment, réellement, substantiellement – est la cause du glissement dont vous parlez. Avec cette déformation, on aboutit à définir la liturgie comme un pur ensemble de symboles et de signes, comme on l’entend parfois dire aujourd’hui : dans une telle conception, il faut noter que « signe » est entendu exclusivement comme « ce qui renvoie à quelque chose d’autre », en oubliant que le signe fait un tout avec ce qu’il signifie. C’est pourtant ici qu’on entre dans le sacrement. Lorsqu’on évacue cet aspect, les sacrements sont réduits à de purs symboles, on oublie leur « efficacité » et les effets qu’ils produisent ; ce n’est plus alors le Christ qui « agit », qui « opère », par le moyen des sacrements. C’est là pourtant le sens de l’expression classique « ex opere operato », un peu étrange, mais qui signifie l’opérativité du sacrement à partir de Celui qui opère en lui. On peut donner l’exemple d’un médicament : en apparence on ne voit qu’une fiole ou une pastille ou un liquide ; or ce qui compte n’est pas seulement le symbole du remède que le médecin veut nous donner, puisque si nous les prenons ils nous guérissent, c'est-à-dire qu’on en constate les effets. Dans le sacrement, l’auteur de cet effet est le Seigneur présent et opérant dans le rite sacramentel. Saint Léon le Grand, cité dans le catéchisme de l’Eglise catholique, dit qu’après l’Ascension tout ce qui dans le Seigneur était visible sur terre est passé dans les sacrements. C’est de cette façon qu’aujourd’hui le Christ continue à être présent et visible pour nous. C’est à la lumière de ceci qu’il faut comprendre ce que saint Thomas veut dire lorsqu’il parle de « matière » du sacrement. Si on ne revient pas à ce genre de notion réaliste, il est impossible de comprendre les sacrements. La présence divine n’est pas seulement quelque chose qu’il faut envisager « symboliquement », mais elle est quelque chose qui touche l’homme par le moyen du sacrement, elle est quelque chose qui agit. Moi-même je peux attester, comme beaucoup d’autres prêtres, de la guérison de malades après qu’ils aient reçu l’Onction, et plus encore de la guérison d’une âme après la Confession ou grâce à la réception fréquente de l’Eucharistie. Les sacrements ont des effets, ils ont des conséquences en raison de la cause qui agit en eux. Ce sont les effets de la présence divine, qui est précisément ce qui opère dans la divine liturgie. Le Pape l’a exposé merveilleusement aux curés de Rome, cette année, en leur disant que le sacrement est l’introduction de notre être dans l’être du Christ, dans l’être divin lui-même.
Au-delà de l’opinion de certains utopistes, qui avec peu de sens pastoral voudraient une restauration immédiate de toutes choses, comment pourrait-on agir doucement, mais fermement, dans le but d’améliorer graduellement certains aspects de la liturgie ? Comment agir dans ce processus long mais nécessaire ? Comment s’adapter à la réalité sans mille compromis ?
Il faut avant tout tenir compte du moment historique que nous vivons, et qui inclut une crise générale de l’autorité, qu’elle soit l’autorité du père, de l’Etat, de l’Eglise (et dans l’Église). Comme nous disions tout à l’heure le risque est l’aboutir à une conception de « self-service » dans l’Église. Nous nous trouvons aujourd’hui dans une sorte d’anomie – une absence de loi – diffuse, même si en même temps tout le monde recourt aux lois quand ses propres droits sont mis à mal.
Les droits de Dieu sont systématiquement bafoués. Comment peut-on chercher à obtenir l’observation des règles liturgiques si nous n’avons pas d’abord expliqué ce qu’est le « ius divinum » de la liturgie ? Aujourd’hui personne ne le sait plus : il faut donc avant tout faire comprendre le sens des règles. C’est un peu comme en morale, la détermination d’une loi se fonde avant tout sur la compréhension des ses principes et il est évident que lorsqu’on parle de liturgie et des sacrements il y a bien des aspects moraux. En tout premier lieu, disais-je, il est donc nécessaire de faire comprendre que le sens des règles dérive de la conviction que la « première règle » est d’adorer Dieu – Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu n’auras pas d’autre Dieu que Moi. On ne peut pas fabriquer un culte à sa propre image, sinon c’est Dieu que l’on déforme. Or aujourd’hui non seulement on imagine un dieu et après on improvise un culte qui convienne à cette image, mais on va même jusqu’à imaginer d’abord un culte pour inventer ensuite le dieu qui lui correspond. L’idolâtrie signifie « idée déformée de Dieu » : c’est bien là la réalité qui nous entoure.
Le Pape Benoit XVI, dans la lettre aux évêques qui explique le sens de la révocation de l’excommunication des évêques consacrés par Mgr Lefebvre, voulait faire comprendre à ceux qui lui reprochaient de s’occuper de problèmes secondaires comme la liturgie, qu’à une époque où le sens de la foi et du sacré s’éteint partout, il est au contraire nécessaire que ce soit justement dans la liturgie que l’on trouve la façon privilégiée de rencontrer Dieu. La liturgie est et reste le lieu le plus approprié pour cette rencontre avec Dieu, et pour cela le Pape, lorsqu’il s’en préoccupe, ne traite pas de problèmes secondaires, mais bien de questions primordiales : si même la liturgie se met à parler le langage du monde, comme faire pour aider l’homme ? Quant aux utopistes, il faut leur rappeler qu’il est nécessaire de posséder ce que Benoit XVI appelle : « La patience de l’Amour ».
L’ancien offertoire parlait de Dieu à l’homme avec une éloquence remarquable sur la valeur sacrificielle et sur la nature de la Messe, comme sacrifice offert à Dieu. Pourrait-on penser à un correction dans ce sens du nouveau rite ?
Il est important que l’on connaisse de plus en plus l’ancienne Messe, dite aussi tridentine – mais qu’il serait en fait plus opportun d’appeler « de Saint Grégoire le Grand », comme l’a récemment exposé Martin Mosebach. En effet, elle a pris forme dès le Pape s. Damase et puis sous s. Grégoire le Grand, mais pas avec s. Pie V, qui n’a fait que réordonner et codifier ce qui existait déjà, en prenant acte des enrichissements des siècles précédents et en mettant de côté ce qui était tombé en désuétude. Ceci étant dit, il faut avant tout bien connaître cette Messe, dont l’offertoire est partie intégrante. Il y a eu nombre de travaux de recherche dans ce sens et beaucoup se sont interrogés sur l’opportunité de réintroduire l’ancien offertoire, auquel vous faites allusion. Cependant seul le Saint-Siège a autorité pour œuvrer en ce sens. Il est vrai cependant que la logique qui a dicté la réforme de la liturgie après le concile Vatican II a amené à simplifier l’offertoire, parce qu’on pensait qu’il y avait là plusieurs formule de prières offertoriales : c’est ainsi qu’on a introduit les deux formules de bénédiction de saveur judaïque ; la secrète – qui est devenue « prière sur les offrandes » – et l’ « orate fratres » ont été maintenus, mais on les a estimées plus que suffisantes. A vrai dire cette simplicité, entendue comme un retour à la pureté des origines, se heurte à la tradition liturgique romaine, comme avec la tradition byzantine et avec les autres liturgies orientales et occidentales. La structure de l’offertoire était vue par les grands commentateurs et théologiens du Moyen-âge comme l’entrée triomphale du Christ à Jérusalem, qui va s’immoler en offrande sacrificielle. C’est pour cette raison que les offrandes étaient déjà dites « saintes », et que l’offertoire possédait une telle importance. La simplification moderne que je viens de décrire, il est vrai, en amène aujourd’hui beaucoup à réclamer le retour des riches et belles prières du « suscipe sancte Pater » et du « suscipe Sancta Trinitas », pour n’en citer que quelques-unes.
Cependant ce ne sera que par une plus large diffusion de l’ancienne Messe que cette « contagion » de l’ancien sur le nouveau rite sera possible. C’est pour cela que réintroduire la Messe « classique », si vous me permettez l’expression, peut constituer un facteur de grand enrichissement. Il faut donc mettre en œuvre une célébration festive régulière de la Messe traditionnelle, au moins dans chaque Cathédrale du Monde, mais même dans chaque paroisse : cela aidera les fidèles à apprivoiser le latin et à se sentir membre de l’Église catholique ; cela leur permettra aussi en pratique de participer aux Messes internationales dans les grands sanctuaires. En même temps, je pense qu’il faut à tous prix éviter les réintroductions décontextualisées : je veux dire qu’il y a une ritualité qui est liée à chaque signification exprimée, et qui ne peut donc pas être réintroduite simplement en insérant une prière dans le missel. Il s’agit là d’un travail bien plus complexe.
La gestualité et l’orientation ont évidemment une grande importance, puisque ce que le fidèle voit est le reflet d’une réalité invisible : disposer la croix au centre de l’autel pourrait- être un moyen de rappeler à tous ce qu’est la Messe ?
Effectivement, la croix au centre de l’autel est le bon moyen de rappeler ce qu’est la Messe. Je ne parle pas d’une croix « minimale », mais d’une croix qui puisse être vue, c’est-à-dire dont les dimensions sont adaptées à l’espace ecclésial. Elle doit être replacée au centre, dans l’axe de l’autel, et elle doit pouvoir être vue par tous. Elle doit être le point de rencontre du regard des fidèles et du regard du prêtre, comme le dit Joseph Ratzinger dans son Introduction à l’esprit de la liturgie. Elle doit être placée au centre, indépendamment de la célébration, donc même si celle-ci est faite « vers le peuple ». J’insiste sur un croix bien visible : à quoi sert une image dont on ne peut pas profiter comme il faudrait ? Les images renvoient à leur original. Nous savons tous qu’il y a eu dans l’histoire des doctrines aniconiques, par exemple Épiphane de Salamine, ou encore les cisterciens, mais le culte des images a par la suite prévalu dans l’Église avec le concile de Nicée II en 787, sur la base de ce qui disait saint Jean Damascène : « L’image renvoie au prototype ». Cela vaut encore plus aujourd’hui dans ce que l’on appelle la civilisation de l’image. A une époque où la vision est devenue un instrument privilégié pour nos contemporains, on ne peut pas se contenter de mettre de côté une petite croix ou une esquisse illisible de la croix, mais il est nécessaire que la croix, avec le crucifix, soient bien visibles sur l’autel, quelque soit le lieu d’où on le regarde.
Face à la redécouverte des exigences dont vous nous avez parlé, il y a cependant l’étape difficile des choix pratiques. Comment faire ?
A mon avis la priorité est de faire comprendre le sens du divin. L’homme cherche Dieu, cherche le sacré et ce qui en est le signe ; dans son exigence naturelle de s’adresser à Dieu et de le vénérer, l’homme cherche à rencontrer Dieu dans les formes du rite. Si l’on déforme la véritable sacralité du culte chrétien, alors l’homme en est réduit à marcher à tâtons, et à avancer de travers, parce qu’il est lui-aussi comme perdu. Comment, alors, l’homme doit-il répondre correctement à cette exigence cultuelle envers Dieu ? Avant tout il doit pouvoir rencontrer dans l’Eglise ce qui est la définition par excellence du sacré : Jésus-Eucharistie. Le tabernacle doit donc revenir au centre des églises. Il est vrai qu’historiquement, dans les grandes basiliques ou dans les cathédrales, le tabernacle était placé dans une chapelle latérale. On sait aussi que la reforme tridentine a voulu remettre au centre le tabernacle pour s’opposer aux erreurs protestantes sur la présence véritable, réelle et substantielle du Seigneur. Mais il est vrai aussi qu’aujourd’hui la mentalité qui nous entoure conteste non seulement la présence réelle, mais la présence même du divin dans le Monde. Dans la religion, l’homme cherche naturellement la rencontre avec le divin. Mais cette présence du divin ne peut pas être réduite à quelque chose de purement spirituel : cette présence doit être « touchée » et cela ne se fait pas avec un livre. On ne peut pas parler de présence de Dieu uniquement dans les termes relatifs à la lecture des Saintes Ecritures. Certes quand la Parole de Dieu est proclamée on peut à juste titre parler de présence divine, mais il s’agit alors d’une présence spirituelle, et non pas de la présence vraie, réelle et substantielle de l’Eucharistie. D’où l’importance de revenir à la centralité du tabernacle et avec lui à la centralité du Corps du Christ présent. Ce qui occupe le centre ne peut pas être le siège du célébrant : ce n’est pas un homme qui est au centre de notre foi, mais c’est le Christ, dans l’Eucharistie. Sinon on aboutit à comparer l’église à une salle, à une tribune de ce monde, au centre duquel siège un homme. Le prêtre est le ministre, il ne peut pas être situé au centre de l’action liturgique : au centre du culte il y a le Christ-Eucharistie, il y a le tabernacle, il y a la croix. C’est de cela qu’il faut repartir, sinon on perd le sens du divin. Le tabernacle est ce qui doit attirer le regard comme ce qui est au cœur de chaque église.
Le Card. Castrillon dans son homélie du 24 septembre 2007 à Saint Eloi disait que l’Eglise a besoin d’instituts « spécialisés » dans la liturgie traditionnelle. Pensez-vous que les instituts aujourd’hui liés à la commission Ecclesia Dei peuvent avoir un rôle clef dans la formation des prêtres ou dans la redécouverte des richesses de la Tradition ?
Bien sûr! De tels instituts exercent un charisme propre, et un charisme est quelque chose qui est dans l’Église et au service de l’Église. Un diocèse peut tirer un avantage considérable du fait de se prévaloir de leur aide. L’ordre franciscain aurait-il joué le rôle qu’il a eu (en Italie, les franciscains sont à l’origine d’un grand nombre de paroisses, d’écoles et autres institutions dans tous les diocèses – NdT) si le Pape n’avait pas reconnu son importance et ne l’avait pas mis à disposition pour le bien de toute l’Eglise ?
Interview réalisée par Don Stefano Carusi
Traduction française par M. l'abbé Matthieu Raffray