Des traditionalistes occupent l'église de Niafles pour maintenir la messe en latin LE MONDE | 02.06.07 | 14h33 • Mis à jour le 02.06.07 | 14h33
Niafles n'est pas Rome, mais la querelle qui agite depuis quelques semaines ce petit village de Mayenne est de celles qui pourraient se dénouer sous peu au Vatican. Une poignée de fidèles catholiques traditionalistes occupent depuis plusieurs jours l'église de ce bourg de 300 habitants, situé à 35 km de Laval, pour exiger le maintien de la messe en latin. Célébrée sur place selon ce rite depuis plus de quarante ans, sa tenue hebdomadaire vient d'être suspendue par l'évêque de Laval, Mgr Armand Maillard.
A l'origine de la crise, le décès, en mars, du prêtre "historique" de la paroisse, qui, avec l'accord des évêques successifs du diocèse, avait maintenu dans son église la célébration de la messe selon le rite tridentin : usage du latin et dos tourné à l'assemblée. Depuis, un jeune prêtre traditionaliste de la Fraternité Saint-Pierre, adoubé par le vieil abbé, avait pris la relève, à la satisfaction de la communauté de plusieurs dizaines de personnes, originaires de tout le département. Mais, fin mai, Mgr Maillard a décidé de mettre fin à cette exception diocésaine, au nom du "rapprochement" entre chrétiens de sensibilités différentes.
"MYSTÈRE PALPABLE"
"La meilleure solution pour le diocèse et la communauté était de proposer une messe en latin, à Laval, pour l'ensemble des paroissiens qui le souhaitent", fait-on valoir à l'évêché. La messe alternative, prévue dimanche 3 juin dans une église du centre-ville, devrait être peu suivie par les fidèles de Niafles.
"La décision de l'évêque de Laval relève d'une volonté de centralisation", juge Matthieu Mautin, un père de famille de 30 ans, fidèle de Niafles, qui, avec ses coreligionnaires, craint une "dislocation de la communauté" traditionaliste locale.
Fortement attachée au rite ancien, officiellement abandonné depuis le concile Vatican II, cette dernière plaide pour "l'installation durable" du jeune prêtre à Niafles. "Dimanche dernier, nous étions encore 130 communiants à l'église", assure M. Mautin adepte du rite tridentin depuis l'adolescence. "Ce rite représente vraiment un plus dans ma vie de foi et je souhaite que mes enfants puissent en profiter", explique ce jeune artisan, bien décidé à ne pas y renoncer. "Cette liturgie crée un univers qui rend le mystère palpable, explique-t-il, et met en avant l'action, les gestes de la messe avec les génuflexions, l'encensement ou l'aspersion d'eau bénite. Le fait que le prêtre soit tourné vers l'autel signifie pour nous qu'il précède le peuple de Dieu et qu'il est notre interprète auprès du Père."
A Niafles, comme ailleurs, le courant "tradi" de l'Eglise catholique attend avec impatience le motu proprio (décret) du pape visant à libéraliser la messe en latin. Cette décision personnelle de Benoit XVI, annoncée depuis plusieurs mois et destinée à ramener les intégristes de la Fraternité Saint-Pie X de Mgr Lefebvre dans le giron de Rome, permettrait aux curés de décider seuls de dire la messe en latin, alors qu'ils sont pour l'heure soumis à l'autorisation de leur évêque.
Stéphanie Le Bars Article paru dans l'édition du 03.06.07 |