Unitatis Redintegratio de
Vatican II fut sage de se concentrer sur ce qui était positif: ce que l’Église
catholique et les autres corps ecclésiaux pouvaient dire avec confiance qu’ils
avaient en commun. (La même attitude fut adoptée envers les religions
non-chrétiennes).
Ceci
était plutôt comme regarder le verre de vin orthodoxe et s’exclamer: «Chouette!
Le verre est aux trois quarts (ou plus) plein.» Mais le dialogue entre le
Vatican et la FSSPX n’a été que marchandage à savoir si le verre de la FSSPX
était un milligramme de trop ou de moins d’être plein.
L’industrie
œcuménique moderne du Magistère catholique n’hurle pas aux orthodoxes: «vous
devez accepté chaque mot des décrets de Florence et tout le Magistère papal
post-florentin». Ou, s’il le fait, il le fait trop silencieusement pour que je
l’entende. Un officiel curial disait récemment concernant la FSSPX «qu’ils
doivent changer leur attitude et accepter les conditions de l’Église et du
Pontife suprême». Est-ce que le Vatican parle de cette façon des orthodoxes…ou
des méthodistes…?
Je
crois que la situation concernant la FSSPX est urgente. Même si Mgr Lefebvre a
judicieusement choisi de jeunes hommes pour les consacrer évêques, ces derniers
sont maintenant de 25 ans plus vieux qu’ils l’étaient. Le temps viendra où les
problèmes entourant la consécration de leurs successeurs devront être
confrontés. Devons-nous vraiment revisiter tous ces acariâtres
et interminables arguments sur l’état d’urgence et de nécessité et les
excommunications latae sententiate? Est-ce qu’il y a un autre corps
ecclésial auquel le Vatican ferait entrevoir une si lugubre possibilité comme
voie d’avenir pour une réconciliation? N’est-ce pas pour rien que Benoît XVI a
coupé ce nœud gordien particulier? Et, ce faisant, s’est attiré les calomnies
râleuses de l’ignorant et du mal disposé?
Le
Pape François a des critiques qui croient que son ouverture, son humilité, son
désir de réduire la bureaucratie, sa préférence pour une Église qui fait quelque
chose, même si elle commet des erreurs, n’est que relations publiques et
question de posture. Je ne crois pas que ces critiques aient raison. Je crois
qu’il est un homme de prières et de sincérité.
Mais
la crise à laquelle il fait face est plus grande qu’il ne paraît. Si Rome ne
peut parvenir à un accord, même avec la FSSPX, avec qui elle
partage toutes les définitions dogmatiques de tous les
Conciles œcuméniques et à la fois les définitions ex
cathedra des Pontifes romains; quelle possibilité réelle y a-t-il de jamais faire
du progrès avec des églises et des corps ecclésiaux plus éloignées
doctrinalement? La possibilité même de réconciliation, d’unitatis
redintegratio, est en jeu. Si Rome peut réussir à le
faire, alors tout peut arriver. Mais si-non…nous allons être tenus en haleine.
Je
peux penser à une raison, énorme, pourquoi François est l’homme qui
va conclure cet épisode. Si Benoît XVI avait résolu la question, tous les idiots
prévisibles dans les médias catholiques et non-catholiques auraient dit que
ceci confirme que Benoît XVI est archi-réactionnaire. François, s’il résout la
question, va créer une perplexité générale chez les idiots prévisibles, mais sa
réputation avec les médias l’aidera en quelque sorte à s’en tirer plutôt
aisément. Maintenant, tôt dans ce pontificat, est le moment, le kairos divin,
pour une telle action qui ne pourrait bien plus se reproduire. (Il y a des
éléments qui indiquent que les commentateurs les plus perspicaces des médias
libéraux commencent à voir à travers sa personnalité.)
Il
est possible pour le Saint Père de résoudre cette question en quelques jours.
Le Pontife romain accorde une audience, je crois les vendredi soirs, au Préfet
de la Congrégation pour la Foi. Vendredi prochain, il pourrait donner ses
ordres à Mgr Müller. Lors de la prochaine audience, il pourrait signer les
documents*. Le mercredi suivant, à son audience générale, entre embrasser un
bébé et donner un câlin à un infirme, il pourrait donner l’accolade à S. E. Mgr
Fellay et les autres révérends et monseigneurs de la FSSPX, devant les caméras
du monde et leurs journalistes se grattant la tête, perplexes. Et, tout comme
il a stupéfié le monde par son choix des pieds à être embrassés et lavés à son
premier Jeudi Saint, le Pape pourrait laver les pieds de douze jeunes prêtres
de la FSSPX lors de son deuxième pedilavium du Jeudi Saint. (Après
tout, Paul VI, lors des festivités entourant la rémission des excommunications
de 1054, avait littéralement plongé aux pieds du pauvre Métropolitain Meliton,
les embrassant…l’humilité…ça a du sens…)
Ensuite,
il pourrait faire un discours sur la réconciliation. Cela pourrait peut-être
inscrit dans les livres d’histoire comme son discours de la Barbe d’Aaron.
Ou
si le Saint Père n’est pas assez aventurier, ou pas suffisamment son propre
maître pour faire cela, la rémission de l’excommunication de Mgr Lefebvre
serait un premier geste affable.
Plus
que vous pensez que mes remarques sont ineptes et enfantines, plus je pense que
vous devriez arrêter de ricaner et plutôt confronter les questions que j’avais
posées dans mon premier
billet: y a-t-il un plan en place, outre le plan d’attendre des
décennies qui deviendront des siècles et que la brèche se cristallise? Et, est-celale modèle
d’œcuménisme de Vatican II?
Conclu.
*Comme
plusieurs observateurs du Vatican l’ont remarqué, la solution évidente est
«d’accorder» à la FSSPX précisément ce qu’elle possède de facto.
Cela éviterait au Saint Siège l’indignité de négocier et réduirait
considérablement le risque d’une scission au sein de la FSSPX. Il faudrait
seulement y inclure deux provisions, émanant d’Anglicanorum Coetibus:
(1) exiger de la FSSPX qu’elle consulte les hiérarchies/évêques locaux à propos
des développements dans leur mission sans toutefois donner aux
hiérarchies locales/évêques un droit de veto et (2) pourvoir au Conseil de la
FSSPX la faculté d’envoyer un terna à Rome pour toute vacance
épiscopale. Un substitut pourrait alors être nommé pour remplacer Mgr
Williamson.