SOURCE - Riposte Catholique - 15 décembre 2015
Depuis trois décennies, les fondations traditionalistes reçoivent des statuts romains. C’est normal et juste diront la plupart. Trahison et piège crieront les plus récalcitrants. Mais regardons honnêtement l’évolution. À la veille des sacres de juin 1988, Mgr Lefebvre regroupait sous son égide tout ce qu’on appelle le « traditionalisme », c’est-à-dire ceux qui sont attachés à la messe de saint Pie V et qui ont des boutons quand on leur parle d’un catéchisme non traditionnel, des expériences pastorales, des délires hollandais ou autre billevesée. À l’exception de l’Église officielle chinoise, qui conserva la liturgie traditionelle jusqu’en 1992, seule la Fraternité Saint-Pie X pérpetuait la forme extraordinaire du rite romain dans des conditions d’hostilité évidente de la part du milieu ecclésial. Aujourd’hui, la moitié du monde traditionnel se trouve régularisée. Il suffit de constater, à l’échelon des fréquentations de messes ou des choix de vocations, la porosité progressive des barrières au sein du milieu traditionnel. Par conséquent, que les supérieurs les plus éminents de la FSSPX, à l’instar de l’abbé Schmidberger, parlent en faveur d’une normalisation, qui commence, par ailleurs, à devenir évidente, n’est guère étonnant.
Depuis trois décennies, les fondations traditionalistes reçoivent des statuts romains. C’est normal et juste diront la plupart. Trahison et piège crieront les plus récalcitrants. Mais regardons honnêtement l’évolution. À la veille des sacres de juin 1988, Mgr Lefebvre regroupait sous son égide tout ce qu’on appelle le « traditionalisme », c’est-à-dire ceux qui sont attachés à la messe de saint Pie V et qui ont des boutons quand on leur parle d’un catéchisme non traditionnel, des expériences pastorales, des délires hollandais ou autre billevesée. À l’exception de l’Église officielle chinoise, qui conserva la liturgie traditionelle jusqu’en 1992, seule la Fraternité Saint-Pie X pérpetuait la forme extraordinaire du rite romain dans des conditions d’hostilité évidente de la part du milieu ecclésial. Aujourd’hui, la moitié du monde traditionnel se trouve régularisée. Il suffit de constater, à l’échelon des fréquentations de messes ou des choix de vocations, la porosité progressive des barrières au sein du milieu traditionnel. Par conséquent, que les supérieurs les plus éminents de la FSSPX, à l’instar de l’abbé Schmidberger, parlent en faveur d’une normalisation, qui commence, par ailleurs, à devenir évidente, n’est guère étonnant.
Nous ne sommes plus en 1988 et les arguments qui font dire de façon épidermique aux plus frondeurs que les milieux Ecclesia Dei ont lamentablement échoué sont assez éculés. Les sociétés régularisées ont des centaines de séminaristes, qui bénéficient a posteriori de l’action de Mgr Lefebvre, et les diocèses, à travers le monde, leur proposent des églises, nonobstant les obstacles rencontrés ici ou là ou bien le cas non généralisé des Franciscains de l’Immaculée, dont on s’aperçoit qu’il est plus l’exception qui confirme la règle que le grand retournement romain craint (le retour aux années de plomb des années 1990, voire 1970). Il va sans dire que la FSSPX, de par son fondateur et son histoire, a une liberté de ton qui sert à tout ce monde traditionnel, clercs et fidèles – régularisés ou non – compris. Reste la personnalité du pape, hautement déconcertante. Qui se dit attaché aux vérités catholiques peut difficilement se réjouir des graves ambiguïtés qui ont cours à Rome actuellement. Mais la dynamique du monde traditionnel est telle que même un pape progressiste se trouvera obligé de reconnaître la catholicité de tout traditionaliste. Des papes plus traditionnels que le pape actuel ont pu être plus « rudes » pour la FSSPX, y compris lorsqu’ils s’appuyaient sur une hérméneutique de la continuité (cas de Paul VI, avec Humanae Vitae). Quant à Jean-Paul II et Benoît XVI, les accords avec la FSSPX ont, en partie, butté sur la question doctrinale (Vatican II), qui n’est nullement le souci du pape François…
L’autre grave problème auquel est confronté le monde traditionnel est l’isolement, l’habitude qu’il y aurait à avoir d’oublier, purement et simplement, qu’il y a une hiérarchie dans l’Église (malgré les redoutables défauts de ses membres), que la grâce agit ailleurs que dans les chapelles traditionnelles, qu’il y a une nécessité de ne pas circonscrire l’apostolat dans de petits milieux fermés. Dans un récent commentaire sur le Novus Ordo, Mgr Richard Williamson lui-même se rendait compte des problèmes qu’il rencontrait chez les catholiques attachés à la Tradition. Perçoit-il les graves limites philosophiques et théologiques de ceux qui se sont réclamés de lui, toujours est-il que, dans un discours non dénué de contradictions, il rappelle que l’isolement sectaire et pharisaïque (ce sont ses termes) commence à devenir un danger mortel et que la pente savonneuse du schisme est à éviter. Il a va plus loin : il y a, en effet, un monde hors de la Tradition. Citation:
Le NOM et l’ensemble de l’Église Novus Ordo sont dangereux pour la Foi, et les Catholiques ont raison, eux qui se sont attachés à la Tradition pour éviter le danger. Mais comme ils ont eu à mettre une distance entre eux et l’Église officielle, ils se sont par là exposés au danger opposé de cet isolement qui peut mener à un esprit sectaire et même pharisaïque, déconnecté de la réalité. Il y a de véritables Sacrements dans le Novus Ordo et de véritables Catholiques dont Dieu s’occupe, et les « Traditionalistes » devraient s’en réjouir. Puisse l’isolement de ceux-ci ne pas leur faire sentir qu’ils doivent penser qu’il ne reste plus rien de catholique dans le Novus Ordo. Ce n’est pas raisonnable, et le pendule de la réalité finira par revenir, comme par exemple pour la direction actuelle de la FSSPX qui ne voit plus suffisamment clair le besoin qu’il y a toujours de s’isoler de l’Église néo-moderniste.
Aujourd’hui, Mgr Williamson refuserait-il une prélature personnelle sans condition, donnée par Rome (et bien sûr sans Mgr Fellay près de lui) ? Rien n’est moins certain.