SOURCE - Abbé Christian Bouchacourt - Lettre à Nos Frères Prêtres - Lettre trimestrielle de liaison de la Fraternité Saint-Pie X avec le clergé de France - n°68 - décembre 2015
L’Europe vient d’accueillir en quelques mois, bon gré mal gré, plus d’un million d’immigrants, en provenance principalement de pays islamiques. C’est un fait assez massif pour être au centre des conversations, de nombreux articles de presse, de déclarations politiques de tous bords. C’est pourquoi il m’a semblé utile qu’une courte synthèse doctrinale sur cette question de l’immigration soit réalisée pour cette Lettre, « Un regard chrétien sur l’immigration », occasion d’une réflexion à partir de la doctrine des papes et des théologiens.
D’autant que, depuis de longues années, la parole des évêques français sur ce sujet se réduit presque à répéter comme un leitmotiv la phrase de l’Évangile : « J’étais un étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25, 35). Il est incontestable que cette phrase représente un élément clé d’un regard chrétien sur l’immigration. Mais lorsqu’elle est considérée comme apte à exprimer seule l’essentiel d’une position supposée « chrétienne » sur l’immigration, il s’agit d’une erreur profonde. Le principe de « l’accueil inconditionnel de l’autre », qui constitue comme le « fond de sauce » de la doxa épiscopale française sur l’immigration, n’est en vérité absolument pas suffisant pour cela.
Au cœur de cette insuffisance de la doctrine épiscopale française, me semble-t-il, on trouve une absence de distinction entre la charité (ou la justice, selon les cas) individuelle et la charité politique. La première vise premièrement le bien de la personne (et, à travers elle, une part du bien commun), la seconde le bien commun (et, à travers lui, le bien de toutes les personnes).
Un exemple simple suffit à faire comprendre cette distinction. Si un malheureux mourant de faim se présente chez moi, je vais le nourrir ; si même il vole un pain dans ma réserve, je vais charitablement fermer les yeux : cela relève de la charité individuelle. Mais si 500 malheureux se présentent devant ma maison, je ne vais pas les nourrir ; s’ils commencent à piller ma réserve, je vais me défendre pour protéger ma vie et ma famille, je vais appeler la police, les autorités publiques interviendront pour mettre de l’ordre et trouver des solutions, etc. : charité politique.
La notion de « charité politique » est en réalité essentielle pour aborder une question comme l’immigration qui touche, non seulement aux relations entre les individus, mais directement au bien commun. Méconnaître que la charité politique soit la plus haute des charités, parce qu’elle s’adresse à plus d’hommes et leur fait un bien plus excellent, voilà sans doute l’une des principales carences du discours chrétien courant sur l’immigration.
Abbé Christian BOUCHACOURT
L’Europe vient d’accueillir en quelques mois, bon gré mal gré, plus d’un million d’immigrants, en provenance principalement de pays islamiques. C’est un fait assez massif pour être au centre des conversations, de nombreux articles de presse, de déclarations politiques de tous bords. C’est pourquoi il m’a semblé utile qu’une courte synthèse doctrinale sur cette question de l’immigration soit réalisée pour cette Lettre, « Un regard chrétien sur l’immigration », occasion d’une réflexion à partir de la doctrine des papes et des théologiens.
D’autant que, depuis de longues années, la parole des évêques français sur ce sujet se réduit presque à répéter comme un leitmotiv la phrase de l’Évangile : « J’étais un étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25, 35). Il est incontestable que cette phrase représente un élément clé d’un regard chrétien sur l’immigration. Mais lorsqu’elle est considérée comme apte à exprimer seule l’essentiel d’une position supposée « chrétienne » sur l’immigration, il s’agit d’une erreur profonde. Le principe de « l’accueil inconditionnel de l’autre », qui constitue comme le « fond de sauce » de la doxa épiscopale française sur l’immigration, n’est en vérité absolument pas suffisant pour cela.
Au cœur de cette insuffisance de la doctrine épiscopale française, me semble-t-il, on trouve une absence de distinction entre la charité (ou la justice, selon les cas) individuelle et la charité politique. La première vise premièrement le bien de la personne (et, à travers elle, une part du bien commun), la seconde le bien commun (et, à travers lui, le bien de toutes les personnes).
Un exemple simple suffit à faire comprendre cette distinction. Si un malheureux mourant de faim se présente chez moi, je vais le nourrir ; si même il vole un pain dans ma réserve, je vais charitablement fermer les yeux : cela relève de la charité individuelle. Mais si 500 malheureux se présentent devant ma maison, je ne vais pas les nourrir ; s’ils commencent à piller ma réserve, je vais me défendre pour protéger ma vie et ma famille, je vais appeler la police, les autorités publiques interviendront pour mettre de l’ordre et trouver des solutions, etc. : charité politique.
La notion de « charité politique » est en réalité essentielle pour aborder une question comme l’immigration qui touche, non seulement aux relations entre les individus, mais directement au bien commun. Méconnaître que la charité politique soit la plus haute des charités, parce qu’elle s’adresse à plus d’hommes et leur fait un bien plus excellent, voilà sans doute l’une des principales carences du discours chrétien courant sur l’immigration.
Abbé Christian BOUCHACOURT