SOURCE - FSSPX Actualités - 9 mai 2017
C’est l’idée que développe Mgr Schneider, évêque auxiliaire d’Astana dans un document publié le 4 mars 2017. Le prélat plaide en particulier pour l'établissement d’un « espace de réflexion » et d’un « état d’esprit », permettant une réécriture plus conforme à la Tradition de l'Église du texte conciliaire traitant de la collégialité épiscopale.
« La lumière reste encore à faire sur la question de la collégialité, telle que l’a exposée la Constitution Lumen Gentium ». C’est ce qu’écrit Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire d’Astana (Kazakhstan). Il explique que « dans la littérature théologique de l’après-concile, on a pu voir se développer une nouvelle thèse : celle de deux sujets suprêmes du pouvoir au sein de l'Eglise universelle, thèse qui ne correspond en rien à la Révélation divine qui puise sa source dans l’Ecriture sainte et la Tradition constante de l’Eglise. » Mgr Schneider insiste : « Une telle thèse est contraire à la structure divinement révélée d’une hiérarchie existant dans le corps visible de ce mystère qu’est l’Eglise. »
Cette affirmation n’est pas sans rappeler la position du fondateur de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, Mgr Marcel Lefebvre (1905-1991). Ainsi, en 1985, il proposait une analyse lucide des documents de Vatican II, à la discussion desquels il avait participé : « Ce n’est pas une modification bénigne ; cette doctrine du double pouvoir suprême est contraire à l’enseignement et à la pratique du magistère de l’Eglise. Elle s’oppose aux définitions du concile Vatican I et à l’encyclique de Léon XIII Satis cognitum. Seul le pape a le pouvoir suprême ; il ne le communique que dans la mesure où il le juge opportun, et dans des circonstances extraordinaires. Seul le pape a un pouvoir de juridiction s’étendant au monde entier », rappelait alors Mgr Lefebvre dans sa Lettre aux catholiques perplexes, parue aux éditions Albin Michel, rééditée récemment par Clovis.
Pour sa part, Mgr Schneider affirme que, si « de façon extraordinaire, le pape peut poser des actes collégiaux au sens propre, dans la mesure où il permet à l'ensemble du collège des évêques de participer à son ministère pétrinien - ministère d’essence personnelle monarchique et inaliénable dans le gouvernement de l'Eglise universelle - cela ne peut se réaliser de façon habituelle et traditionnelle que lors de la convocation des conciles œcuméniques ». Dans ces moments-là, rappelle le prélat, « le pape gouverne l'Eglise d'une manière collégiale avec l'ensemble du collège des évêques : cum Petro. Cela constitue un moyen extraordinaire et exceptionnel de gouverner l'Eglise universelle, selon un mode possible quoique non absolument nécessaire. »
Afin de préciser la nature du pouvoir dans l’Eglise catholique, Mgr Schneider écrit que « le pape gouverne de façon monarchique dans un sens figuré, selon la signification que le Christ a donnée, ce qui ne doit pas s’entendre dans le sens d’une royauté absolue ou d’une dictature politique. Ainsi, le pape ne pourrait pas dire, selon le mot prêté à Louis XIV : ‘l’Eglise, c’est moi !’ ».
L’évêque auxiliaire d’Astana n’évacue pas pour autant les difficultés soulevées par la Constitution Lumen Gentium, replaçant tout d’abord ce texte dans son contexte historique : « Après le premier concile du Vatican - rappelle-t-il - il restait encore à approfondir au niveau théologique la relation entre l’épiscopat et le Successeur de Pierre, ce qui n’a pu être fait étant donné la suspension des travaux. » En effet, l'invasion des Etats pontificaux par les troupes révolutionnaires italiennes mit fin en septembre 1870 aux travaux des Pères conciliaires.
Certes, poursuit le prélat, « la Constitution de Vatican II Lumen Gentium a tenté de remédier à cela, et de façon globale, ce document nous a donné une doctrine valable et traditionnelle sur l’Episcopat. » Cependant, souligne-t-il, « dans sa tentative d’explication du principe de la collégialité épiscopale dans sa relation avec le pape, le texte de Lumen Gentium n’est pas sans contenir certaines formulations qui restent à préciser et clarifier à un niveau doctrinal, ce qui a d’ailleurs poussé le pape Paul VI à publier la fameuse ‘Note explicative préliminaire’ (Nota Prævia) ».
La Fraternité Saint-Pie X, à la suite de son fondateur, s'engage plus avant dans l'analyse, estimant que ladite Nota Praevia , quoique manifestant une réelle volonté de clarification, n’écarte pas suffisamment les ambiguïtés relatives à l’unicité du sujet du pouvoir suprême dans l’Eglise, telle qu'elle fut définie par la Constitution Pastor aeternus du premier concile du Vatican. Mgr Schneider va d’ailleurs dans ce sens, lorsqu’il écrit que : « en dépit de la publication de cette note et d'autres textes du Saint-Siège à ce sujet, l'enseignement relatif à la collégialité épiscopale dans sa relation avec le pape manque de clarté théologique. »
Il convient enfin de signaler les esquisses de solutions concrètes énumérées par Mgr Schneider : « L'enseignement de Lumen Gentium sur la collégialité épiscopale dans sa relation avec le pape a besoin d’éclaircissements et d’une réflexion théologique approfondie, afin de constituer de façon plus visible un tout plus harmonieux avec la vérité révélée et la tradition constante de l’Eglise. » Et plus loin : « À cet effet, il conviendrait d’encourager et de créer un espace et un état d’esprit permettant les conditions d’un débat théologique apaisé, à l'exemple de la méthode critique choisie par saint Thomas d'Aquin, docteur de l'Eglise universelle. »
N’est-ce pas là une - parmi tant d’autres - des revendications fondamentales de Mgr Lefebvre, posées aujourd'hui encore par l’actuel Supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X ?
(Source : Chiesapostconcilio / FSSPX.Actualités - 10/05/17)