SOURCE - 16 juillet 2009
Telle une plaie nettoyée, la question doctrinale qui sépare le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X se trouve désormais devant nous. Pendant neuf ans, les hauts ecclésiastiques se sont attelés à la dégager de toutes les croûtes et pansements qui s’étaient accumulés autour d’elle : les sanctions pesant contre les hommes ont été levées, celles qui s’étaient abattues sur la liturgie ont été finalement dépassées. En chirurgien méticuleux, Benoît XVI a prouvé qu’il aspirait à résoudre une crise qui n’est pas tant celle du traditionalisme que celle de l’Église.
La situation qui a découlé des 21 janvier et 2 juillet 2009 n’a pas pour autant apaisé les esprits et fait taire les pronostiqueurs. Et chacun, regardant son voisin, se pose la question : De quel fil miraculeux le pape va-t-il se servir pour recoudre une telle blessure ? Comment donc va-t-on résoudre les discussions doctrinales entre Rome dont les porte-paroles rappellent le caractère incontournable du Concile et la Fraternité dont les dignitaires s’évertuent à en prouver les lacunes, voire les bavures ? Va-t-on voir Rome abolir Vatican II ou bien Écône mettre un terme à son combat anti-conciliaire ? Il y a de quoi laisser plus d’un esprit sceptique…
Aussi sont-ils nombreux ceux, à l’exception peut-être du pape Ratzinger et de l’évêque Fellay, qui affirment dans les médias que les discussions vont durer longtemps, très longtemps, comme si ces pourparlers devaient constituer un combat d’usure où on aboutirait à l’une ou l’autre de ces deux étonnantes issues. Dès lors, les deux parties s’engageraient-elles dans une impasse ? La solution se trouve peut-être dans un abandon non avoué des positions de l’une ou de l’autre.
Depuis plus de deux décennies, les sédévacantistes affirment que la Fraternité délaisse, sans véritablement l’avouer, ses combats d’antan. Autrefois, ils n’hésitaient pas à s’en prendre directement à Mgr Lefebvre. Aujourd’hui, ils essayent de semer la division en présentant les responsables actuels de cette société religieuse en rupture avec leur fondateur. A y bien regarder, de différence, il n’y en a guère sur le fond : à propos de la liberté religieuse, de l’œcuménisme ou de la collégialité, les évêques de la FSSPX affirmaient et affirment, comme leur prédécesseur, que, sans être hérétique, le Concile est rempli d’ambiguïtés et ses conséquences sont fâcheuses pour l’Église.
De l’autre côté, bon nombre de clercs et de fidèles, sans doute pour renforcer leurs espoirs, affirment que le pape restera intransigeant, disent qu’il n’a jamais changé. Cependant, un certain nombre d’entre eux, d’abord confiants en Benoît XVI, ont, depuis quatre ans, fini par s’exaspérer et par lui signifier leur agacement. La constance de l’ancien cardinal Ratzinger est-elle si évidente ? Lui qui affirmait que Gaudium et Spes jouait le rôle d'un « contre-Syllabus », qui a parlé à propos de Vatican II de « nouvelle définition de la relation entre la foi de l'Eglise et certains éléments essentiels de la pensée moderne », sait que le Concile a marqué une certaine rupture. Pour aplanir les différences, pour en rattraper peut-être les effets néfastes, il a employé le terme d’herméneutique. Une relativisation des ruptures qui ont été opérées entre 1962 et 1965 va donc s’engager. Prions pour que les altérations de la Foi soient dissipées à cette occasion.
Profitant de ce qu’il appelle une « réconciliation », Benoît XVI va donc s’atteler à ce qui constituait son programme de début de pontificat : réinterpréter le Concile. Tous les textes qui font couler de l’encre sous son règne dépendent de cette question : les traditionalistes et, à travers eux, l’appréhension du Concile. Avouons-le, Summorum Pontificum, Die Aufhebung der Exkommunikation ou Ecclesiae Unitatem ont un peu éclipsé Deus Caritas est, Spe salvi ou Caritas in veritate.
Sur le terrain liturgique, le pape a promu de manière positive la liturgie traditionnelle de l’Église. Ce faisant, il mettait à bas le monopole d’un rite ambigu. Quelques semaines auparavant, en février 2007, le supérieur général de la FSSPX avait alors parlé « d’étape nécessaire » sans pour autant se satisfaire de cet état transitoire. Dieu aidant et utilisant notre prière, les prochains mois pourraient voir se proclamer la doctrine traditionnelle de l’Église : l’unicité du salut dans le Christ, la primauté du successeur de Pierre, la liberté comme opposition à la licence, même en matière religieuse, bref, la foi catholique. Ce faisant, le pape porterait un coup fatal au monopole d’une doctrine ambigüe. C’est loin d’être impossible. Dans le contexte austro-allemand, le principe de la collégialité est particulièrement mis en péril. Par ailleurs, sous l’effet des reproches orthodoxes, des éclaircissements sur la liberté religieuse, prenant appui sur l’encyclique Libertas de Léon XIII, pourraient rappeler solennellement ce qui doit être cru par tout catholique. Ainsi écartelé, interprété de manière si abusive, le Concile risquerait de perdre toute crédibilité car il ne l’a tirée jusque là que dans la mesure où il avait apporté des nouveautés : liberté religieuse ou œcuménisme. L’affirmation de la vérité ne pourra que révéler son incohérence. Les distorsions causées avec les lignes d’un concile vieux de près d’un demi-siècle engageraient probablement sa relativisation au sein de l’histoire de l’Église, comme pour manifester une attitude nouvelle de la part des hommes d’Église. « Nous avons besoin de sortir – disait-il y a deux ans Mgr Guido Pozzo – de cette illusion optimiste, presque irénique, qui a caractérisé l’après Concile ».
Telle une plaie nettoyée, la question doctrinale qui sépare le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X se trouve désormais devant nous. Pendant neuf ans, les hauts ecclésiastiques se sont attelés à la dégager de toutes les croûtes et pansements qui s’étaient accumulés autour d’elle : les sanctions pesant contre les hommes ont été levées, celles qui s’étaient abattues sur la liturgie ont été finalement dépassées. En chirurgien méticuleux, Benoît XVI a prouvé qu’il aspirait à résoudre une crise qui n’est pas tant celle du traditionalisme que celle de l’Église.
La situation qui a découlé des 21 janvier et 2 juillet 2009 n’a pas pour autant apaisé les esprits et fait taire les pronostiqueurs. Et chacun, regardant son voisin, se pose la question : De quel fil miraculeux le pape va-t-il se servir pour recoudre une telle blessure ? Comment donc va-t-on résoudre les discussions doctrinales entre Rome dont les porte-paroles rappellent le caractère incontournable du Concile et la Fraternité dont les dignitaires s’évertuent à en prouver les lacunes, voire les bavures ? Va-t-on voir Rome abolir Vatican II ou bien Écône mettre un terme à son combat anti-conciliaire ? Il y a de quoi laisser plus d’un esprit sceptique…
Aussi sont-ils nombreux ceux, à l’exception peut-être du pape Ratzinger et de l’évêque Fellay, qui affirment dans les médias que les discussions vont durer longtemps, très longtemps, comme si ces pourparlers devaient constituer un combat d’usure où on aboutirait à l’une ou l’autre de ces deux étonnantes issues. Dès lors, les deux parties s’engageraient-elles dans une impasse ? La solution se trouve peut-être dans un abandon non avoué des positions de l’une ou de l’autre.
Depuis plus de deux décennies, les sédévacantistes affirment que la Fraternité délaisse, sans véritablement l’avouer, ses combats d’antan. Autrefois, ils n’hésitaient pas à s’en prendre directement à Mgr Lefebvre. Aujourd’hui, ils essayent de semer la division en présentant les responsables actuels de cette société religieuse en rupture avec leur fondateur. A y bien regarder, de différence, il n’y en a guère sur le fond : à propos de la liberté religieuse, de l’œcuménisme ou de la collégialité, les évêques de la FSSPX affirmaient et affirment, comme leur prédécesseur, que, sans être hérétique, le Concile est rempli d’ambiguïtés et ses conséquences sont fâcheuses pour l’Église.
De l’autre côté, bon nombre de clercs et de fidèles, sans doute pour renforcer leurs espoirs, affirment que le pape restera intransigeant, disent qu’il n’a jamais changé. Cependant, un certain nombre d’entre eux, d’abord confiants en Benoît XVI, ont, depuis quatre ans, fini par s’exaspérer et par lui signifier leur agacement. La constance de l’ancien cardinal Ratzinger est-elle si évidente ? Lui qui affirmait que Gaudium et Spes jouait le rôle d'un « contre-Syllabus », qui a parlé à propos de Vatican II de « nouvelle définition de la relation entre la foi de l'Eglise et certains éléments essentiels de la pensée moderne », sait que le Concile a marqué une certaine rupture. Pour aplanir les différences, pour en rattraper peut-être les effets néfastes, il a employé le terme d’herméneutique. Une relativisation des ruptures qui ont été opérées entre 1962 et 1965 va donc s’engager. Prions pour que les altérations de la Foi soient dissipées à cette occasion.
Profitant de ce qu’il appelle une « réconciliation », Benoît XVI va donc s’atteler à ce qui constituait son programme de début de pontificat : réinterpréter le Concile. Tous les textes qui font couler de l’encre sous son règne dépendent de cette question : les traditionalistes et, à travers eux, l’appréhension du Concile. Avouons-le, Summorum Pontificum, Die Aufhebung der Exkommunikation ou Ecclesiae Unitatem ont un peu éclipsé Deus Caritas est, Spe salvi ou Caritas in veritate.
Sur le terrain liturgique, le pape a promu de manière positive la liturgie traditionnelle de l’Église. Ce faisant, il mettait à bas le monopole d’un rite ambigu. Quelques semaines auparavant, en février 2007, le supérieur général de la FSSPX avait alors parlé « d’étape nécessaire » sans pour autant se satisfaire de cet état transitoire. Dieu aidant et utilisant notre prière, les prochains mois pourraient voir se proclamer la doctrine traditionnelle de l’Église : l’unicité du salut dans le Christ, la primauté du successeur de Pierre, la liberté comme opposition à la licence, même en matière religieuse, bref, la foi catholique. Ce faisant, le pape porterait un coup fatal au monopole d’une doctrine ambigüe. C’est loin d’être impossible. Dans le contexte austro-allemand, le principe de la collégialité est particulièrement mis en péril. Par ailleurs, sous l’effet des reproches orthodoxes, des éclaircissements sur la liberté religieuse, prenant appui sur l’encyclique Libertas de Léon XIII, pourraient rappeler solennellement ce qui doit être cru par tout catholique. Ainsi écartelé, interprété de manière si abusive, le Concile risquerait de perdre toute crédibilité car il ne l’a tirée jusque là que dans la mesure où il avait apporté des nouveautés : liberté religieuse ou œcuménisme. L’affirmation de la vérité ne pourra que révéler son incohérence. Les distorsions causées avec les lignes d’un concile vieux de près d’un demi-siècle engageraient probablement sa relativisation au sein de l’histoire de l’Église, comme pour manifester une attitude nouvelle de la part des hommes d’Église. « Nous avons besoin de sortir – disait-il y a deux ans Mgr Guido Pozzo – de cette illusion optimiste, presque irénique, qui a caractérisé l’après Concile ».