Le Motu Proprio ‘Summorum pontificum’ pour la libéralisation de la messe selon le missel de 1962 sera publié le 7 juillet. La Lettre apostolique sous forme de Motu Proprio que Benoît XVI s’apprête à publier en vue de libéraliser l’usage de la messe et des livres liturgiques selon le rite préconciliaire de 1962 portera le nom de ‘Summorum pontificum’, a appris I.MEDIA de sources vaticanes. Ce document très attendu du côté des fidèles traditionalistes et craint par un certain nombre d’évêques sera publié le 7 juillet prochain.
‘Summorum pontificum cura’ (en français, ‘le soin des souverains pontifes’) est l’incipit (début du texte) du Motu Proprio de Benoît XVI libéralisant l’usage de la messe dite ‘de saint Pie V’, a appris I.MEDIA de sources vaticanes. Les deux premier mots de cette lettre apostolique donnent son nom au document pontifical qui sera rendu public par le Vatican le 7 juillet prochain. Le document sera accompagné d’une longue lettre du pape faisant part de ses motivations pour cette publication que certains évêques, en France particulièrement, voient d’un mauvais oeil.
Par ce texte, le pape entend étendre à l’Eglise tout entière la possibilité de célébrer la messe selon les livres liturgiques promulgués le 23 juin 1962, durant le pontificat de Jean XXIII, juste avant le Concile Vatican II et la réforme qui a suivi, en 1969 et 1970. Il fera de ce rite préconciliaire “une forme extraordinaire de l’unique rite romain“, celui postconciliaire dit ‘de Paul VI’.
Outre le rituel de la messe, le document devrait donc concerner également les sacrements du baptême, du mariage, de la confirmation et de l’onction des malades, ainsi que la célébration des obsèques. Si le latin est la langue d’usage du rite tridentin, l’utilisation de la langue vernaculaire devrait être autorisée pour les lectures liturgiques.
Le nouveau document mettra fin à l’exigence de requérir une dispense (appelée ‘indult’) à l’évêque diocésain en vue de pouvoir célébrer la messe selon le rite de 1962. Il devrait autoriser la célébration dans les paroisses diocésaines d’une seule messe selon la forme préconciliaire par dimanche et jour de fête, excepté durant le Triduum pascal. ‘Summorum pontificum’ devrait en outre encourager à la création de ‘paroisses personnelles’ dans les diocèses où seul le rite tridentin sera alors célébré.
L’évêque local ne devrait alors pouvoir intervenir qu’en cas de litige entre un de ses prêtres et un groupe de fidèles. Si nécessaire, il pourra aussi s’adresser à la commission pontificale Ecclesia Dei chargée de trancher en dernière instance.
Par conséquent, le nouveau Motu Proprio abrogera celui promulgué par Jean-Paul II en juillet 1988, Ecclesia Dei adflicta, ainsi que le document de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements d’octobre 1984, Quattuor abhinc annos, approuvé par le pape et accordant aux évêques diocésains la possibilité d’user d’un indult pour la célébration de la messe en rite tridentin.
Le pape devrait par ailleurs préciser qu’il ne s’agit pas d’un retour en arrière mais d’un geste généreux en vue de mettre à la disposition de l’ensemble des fidèles les immenses trésors spirituels, culturels et esthétiques liés à l’ancienne liturgie.
Benoît XVI semble ainsi accorder la priorité à ce dossier qu’il connaît sur le bout des doigts. Ainsi, dans son ouvrage Ma vie, souvenirs (Editions Fayard, 1998), le cardinal Joseph Ratzinger reconnaissait après coup avoir été “consterné de l’interdiction de l’ancien missel“. Dans Le sel de la terre (Editions du Cerf, 1999), il confiait que “l’on devrait accorder beaucoup plus généreusement à tous ceux qui le souhaitent le droit de conserver l’ancien rite“.
Dès 1986, une commission cardinalice à laquelle participait le cardinal Ratzinger avait souhaité faciliter la célébration de la messe selon le rite de 1962. En tant que préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal allemand - féru de liturgie depuis son plus jeune âge - avait suivi la genèse de la séparation des fidèles intégristes avec Rome. Le Saint-Siège avait alors tenté par tous les moyens de les garder dans le giron de l’Eglise catholique jusqu’à ce que Mgr Lefebvre commette un acte de désobéissance “grave“, le 30 juin 1988, en ordonnant quatre évêques sans l’approbation du pape. Ils avaient alors été excommuniés.
Le Motu Proprio Ecclesia Dei de Jean-Paul II du 2 juillet 1988 les déclarait schismatiques, mais ouvrait cependant la voie à la réintégration dans l’Eglise catholique des membres de la fraternité qui le souhaiteraient, encourageant les évêques à une utilisation “large et généreuse“ de l’indult. Une Commission du même nom fut aussi créée afin de faciliter la pleine communion ecclésiale “des prêtres, séminaristes, communautés religieuses ou religieux individuels ayant eu des liens avec la Fraternité fondée par Mgr Lefebvre et désirant rester unis au successeur de Pierre dans l’Eglise catholique en conservant leurs traditions spirituelles et liturgiques“.
Au début de son pontificat, en août 2005, Benoît XVI avait souhaité rencontrer Mgr Bernard Fellay, le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X fondée par Mgr Lefebvre. Puis, en février 2006, le pape avait convoqué au Vatican les chefs de dicastères de la curie romaine pour une réunion à huis clos essentiellement consacrée au sort de cette fraternité et des fidèles traditionalistes.
C’est au printemps 2006 qu’était clairement apparue la possibilité que le pape publie un décret visant à faciliter le retour vers l’Eglise catholique des fidèles intégristes s’inscrivant dans la lignée de Mgr Marcel Lefebvre. Le 8 septembre de la même année, le pape autorisait la création de l’Institut du Bon Pasteur pour réunir cinq prêtres issus de la Fraternité Saint-Pie X et quelques séminaristes.
Après l’autorisation élargie de la célébration dans le rite de saint Pie V, une des deux exigences du côté des intégristes demeurera : celle de la levée des excommunications de 1988. Ensuite, un dialogue théologique pourrait voir le jour sur un autre fossé qui sépare Rome et cette frange traditionaliste autour de certains ‘fruits’ du Concile Vatican II comme l’œcuménisme, le dialogue interreligieux et la liberté religieuse. Mais, du côté de Rome, ces ‘fruits’ ne sont pas négociables.
Cependant, ce nouveau document souhaite aller bien au-delà des seuls fidèles de la Fraternité Saint-Pie X. Il concerne les fidèles traditionalistes au sens large, ceux qui n’ont pas rejetés le Concile Vatican II mais restent attachés à la liturgie traditionnelle. AMI |