SOURCE - Dom Romain - cath.ch - 21 avril 2012
En cette semaine où nous venons de fêter l’anniversaire de l’élection pontificale de Benoît XVI, force est de constater que sa main de 85 ans tient fermement la barre qui conduit l’Eglise. Tous reconnaissent que l’ancien Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est l’acteur principal d’une réconciliation que beaucoup espèrent. Doux, humble, mais aussi ferme et décidé, le Pontife Romain conduit l’Eglise en traversant les courants et les idéologies qui la secouent, les yeux fixés sur le Christ. Comme le marin qui ne craint pas le gros vent et la tempête, même médiatique, car il sait que reviendra le temps calme et qu’il ne peut dévier de la route conduisant les passagers au port du salut. Plus d’un lui reproche sa façon de conduire l’Eglise. Ils ont un Souverain Pontife, mais se contenteraient d’un Souverain Poncif et même Passif!
Mais dans cette affaire l'on ne peut pas oublier Mgr Bernard Fellay, le supérieur général de la FSSPX. J’avais écrit dans un de mes premiers post qu’il était peut-être la chance de réconciliation entre sa Fraternité et l’Eglise Catholique: «On notera quand même le silence de Mgr Fellay, même si sa marge de manœuvre reste limitée, il semble vouloir prendre le temps pour arriver à un accord et il résiste aux sirènes de la rupture. Peut-être est-ce la chance de la Fraternité et du Vatican qu’il soit au gouvernail? » (cf. Mgr Fellay, en minorité dans sa propre Fraternité?).
Le supérieur de la FSSPX a conduit sa barque d’une autre façon, il s’est approché du Vaisseau Amiral en faisant tours et détours. Il voulait éviter à tout prix une mutinerie de son équipage, effrayé de devoir rendre les armes après avoir combattu, et s’assurer aussi que le charisme propre de la FSSPX soit respecté. Mgr Fellay a donc pris son temps. Une paroissienne nonagénaire me disait l’autre jour «J’ai entendu prêcher Mgr Fellay, mon Dieu ce qu’il parle lentement! Ça ne m’étonne pas qu’il lui ait fallu tant de temps pour donner sa réponse à Rome!! » Du temps certainement bien utilisé pour calmer les appréhensions ou, pour reprendre une image utilisée par l’un de mes interlocuteurs parfaitement intégré dans le Tradiland, «Mgr Fellay est un collectionneur qui possède 4 vases Ming, l’important pour lui est de pouvoir les proposer au conservateur du Musée sans en perdre aucun en route». A ce jour il semble bien que le fils de Mgr Lefebvre soit en passe de montrer qu’il a réussi, quoique… Toujours est-il qu’actuellement, tout est fait mais tout reste à faire.
C’est ce mercredi 25 avril, en la fête de Saint Marc - pour les deux formes du même rite latin - que se réuniront les experts de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (Cf. Le Figaro), pour examiner la réponse reçue et soumettre leurs conclusions au Saint-Père, à qui revient la décision finale. Si Rome est en mesure d’annoncer que la réponse est positive, alors vraiment tout sera fait et tout restera à faire.
Il est absolument évident que cette réconciliation ne signifie pas la fin des tensions, critiques et oppositions que nous voyons aujourd’hui. Il y aura encore, dans les semaines, mois et années à venir, des tempêtes et des dangers, des risques de ruptures et des périodes de froid, dans diverses parties de l’Eglise. Ce ne sera ni le retour du Fils Prodigue, ni le lavement des pieds, ces «moments bibliques» sont profonds et riches en miséricorde, mais ils sont trop brefs. Il me paraît plus approprié de parler d'une traversée du désert, ce lieu de purification où Dieu conduit son Peuple, afin que l’homme à la nuque raide puisse abandonner ses propres pensées et adhérer à celles du Seigneur. Il faudra certainement du temps, disons 40 ans… comme lors de la sortie d’Egypte, pour franchir le «passage» de cette réconciliation. 40 ans dans la bible, c’est une génération. Le temps que meurent au désert ceux qui n’avaient pas fait confiance au Seigneur alors qu’il les libérait de l’esclavage. Il faudra laisser mourir ceux à l’origine de tant de tensions liées au Concile Vatican II, soit pour le «diviniser» dans un «esprit» qui était le leur, soit pour le «diaboliser» dans une réaction faisant, elle aussi, bien plus place à leur esprit, qu’à Celui qui conduit l’Eglise.
Mais terminons sur une note plus joyeuse. Je pense que, si réconciliation il y a, Benoît XVI peut bien inviter Mgr Fellay à Rome et lui proposer de concélébrer avec lui à l’autel de la Confession, dans la basilique Saint-Pierre (… mais non Bernard, je plaisante!). Il y aura bien invitation et messe, mais c’est le pape qui célèbrera – pour la première fois en public – la messe dans la forme extraordinaire du rite Romain.
Pour le moment, l’heure est à l’attente de cette joie, dans l’espérance et la prière.
Dom Romain