SOURCE - Paix Liturgique, lettre n°329 - 3 avril 2012
Comme l'a relevé notre confrère Riposte Catholique le 3 mars, “ les ordinations aux ordres mineurs et au sous-diaconat conférées le 11 février au séminaire européen de la Fraternité Saint-Pierre, à Wigratzbad, sont à marquer d'une pierre blanche en raison non seulement du nombre de clercs concernés mais aussi de la qualité ecclésiastique du célébrant ”.
C'est en effet la première fois, depuis le Motu Proprio Summorum Pontificum, qu'un membre de l'Opus Dei consacre selon les livres liturgiques en vigueur avant la réforme conciliaire. En l'occurrence, il s'agissait de l'évêque espagnol Mgr Juan Ignacio Arrieta Ochoa de Chinchetru.
Docteur en droit canonique, un des meilleurs spécialistes de cette matière dans une Prélature particulièrement « pointue » en droit de l’Église, il a été président de l'institut de droit canonique de l’Université pontificale de la Sainte-Croix. Âgé de 60 ans, Mgr Arrieta est depuis 2007 membre de la Curie où il a la charge de Secrétaire du Conseil Pontifical pour les Textes législatifs. Son intérêt pour la question traditionaliste est connu, de même que celui du Sous-Secrétaire du même Conseil, Mgr José Aparecido de Almeida. Ainsi, leur contribution à l'élaboration de solutions canoniques pour la reconnaissance de la Fraternité Saint-Pie-X n’est pas négligeable.
Au cours de la cérémonie du 11 février, 13 séminaristes ont reçu les ordres de portier et lecteur et 13 autres les ordres d'exorciste et d'acolyte. Enfin, 7 séminaristes ont été promus au sous-diaconat des mains de Mgr Arrieta. 20 Français étaient concernés par ces ordinations.
Nous vous proposons ci-dessous le récit de cette journée, traduit du site polonais tradicamp.pl, suivi de nos réflexions, tout en vous invitant vivement à consulter l'album photo de cette superbe journée.
I – L'ARTICLE DE TRADICAMP
a) Présentation de Tradicamp
Tradicamp est né à l'initiative d'un groupe de jeunes polonais s'étant formé en 2004 lors d'une visite au séminaire de la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre (FSSP) à Wigratzbad en Allemagne et ayant conforté ses liens au contact de nombreux autres jeunes fidèles attachés à la liturgie traditionnelle durant les JMJ de 2005 à Cologne. Conçu comme un temps de rencontre et d'intégration pour tous les fidèles (laïcs comme religieux, jeunes comme adultes), le premier Tradicamp, organisé à l'été 2010, suscita un grand intérêt. Parmi les participants on pouvait voir non seulement des jeunes mais aussi des familles, des enfants, des personnes âgées et des ecclésiastiques. Des prêtres et des séminaristes, venus de toute la Pologne mais aussi du Brésil et d'Allemagne, étaient aussi présents, certains pour découvrir la liturgie traditionnelle et d'autres pour partager leur expérience. Organisé la semaine du 7 juillet, pour commémorer le Motu Proprio de Benoît XVI, Tradicamp est devenu, en deux éditions, une occasion de concilier tradition, foi et repos, dans une compagnie agréable et un bel endroit situé à mi-chemin entre Czestochowa et Cracovie. Placé, à la demande des organisateurs, sous la tutelle de la FSSP, il a pour aumônier l'abbé Wojciech Grygiel. Célébrée dans la forme extraordinaire du rite romain, la liturgie est le facteur intégrant tous les membres de cette rencontre d'été Tradicamp. En 2011, trois messes étaient célébrées chaque jour, les fidèles étant invités à participer aussi aux offices du Chemin de la Croix, du Salut du Saint Sacrement et des Vêpres. Des célébrations que nombre d'entre eux n'ont pas toujours l'opportunité d'avoir dans leur lieu de culte. Grâce à l'amabilité de Mgr Stanisław Nowak, archevêque de Czestochowa, et au concours du curé, toutes les célébrations liturgiques ont eu lieu dans la belle église Saint Barthélémy Apôtre de Włodowice, ville voisine du lieu du rassemblement.
b) Le compte rendu de la journée du 11 février
LES ORDRES MINEURS CONFÉRÉS AU SÉMINAIRE DE WIGRATZBAD
Samedi dernier, 11 février 2011, le séminaire de la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre de Wigratzbad a célébré des cérémonies liées à l’administration des ordres ecclésiastiques mineurs et du diaconat à 33 séminaristes du monde entier.
Une nouvelle occasion de fête commune s’est présentée au séminaire de Wigratzbad. La semaine dernière, de nouveaux séminaristes ont reçu les ordres de portier, d’exorciste, d’acolyte et de sous diacre. Parmi les acolytes et les exorcistes nouvellement ordonnés, il y avait Łukasz Joniak, un séminariste polonais habitué de Tradicamp, et Jean de Leon Gomez, un des participants étrangers au camp d’intégration estival Tradicamp 2011.
La messe solennelle a commencé à 9 heures du matin. L’ordinant était Mgr Juan Ignacio Arrieta, secrétaire du Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs de la Curie romaine, évêque titulaire de Civitate. C’était la première fois qu’il célébrait la Sainte Messe dans la forme extraordinaire du rite romain et, très impressionné par cette forme liturgique, il a, selon les témoignages des participants, exprimé sa volonté de le faire encore. Les fonctions de diacre ont été accomplies par l'abbé Jean-Laurent Lefèvre, celles de sous-diacre par l'abbé Stefan Reiner et celles de prêtre assistant par l'abbé Franz Karl Banauch, recteur du séminaire, l'abbé Christian Jäger assurant le service de cérémoniaire.
D’abord, les ordres de portier ont été conférés. Conformément au « Pontificale Romanum », l’évêque a remis aux futurs portiers les clés de l’église que chacun d’entre eux a touchées de sa main droite. Le rite a été accompagné des paroles suivantes de l’ordinant : « Agis ainsi avec la pensée que tu devras rendre compte à Dieu de tout ce qui est sous la garde de ces clés ». Après ce geste, les portiers ont été menés par l’archidiacre pour ouvrir et fermer symboliquement les portes de l’église. À partir de ce moment, ils deviennent non seulement gardiens de l’église visible, mais doivent également protéger le sanctuaire du Saint-Esprit dans les cœurs des gens, en les ouvrant à Dieu et en y refusant l’accès aux démons.
Les ordres d’acolyte et d’exorciste ont été conférés simultanément à Łukasz Joniak et à d’autres ordinands. La tâche des acolytes pendant la liturgie consiste notamment à entretenir la lumière des cierges pendant le chant de l’Évangile, mais aussi, comme l’indique saint Thomas d’Aquin dans sa Somme de théologie, à « remettre la matière du Sacrement ». Comme symboles de leurs devoirs, les acolytes ordonnés reçoivent des chandeliers avec des cierges et des burettes, qu’ils devront désormais remplir de vin et d’eau pour les présenter au sous-diacre lors de l’Offertoire. La réception de l'ordre d’exorciste autorise les ordinands à imposer les mains aux possédés pour les libérer de l’esprit du mal, tout en leur confiant, comme dans le cas des portiers, des charges importantes pour le fonctionnement de la communauté, notamment le soin de l’eau bénite.
La Fraternité Saint-Pierre a également accueilli dans ses rangs ce jour-là de nouveaux sous-diacres. Alors que les ordinands étaient prosternés face contre le sol du chœur du sanctuaire marial de Wigratzbad, la chorale du séminaire a chanté les Litanies des Saints en invoquant leur aide et leur intercession.
La cérémonie s’est déroulée comme d’habitude dans une ambiance communautaire magnifique, entretenue par les autorités du séminaire, les clercs et leurs invités, familles et amis des ordinands. Le supérieur général de la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre, l'abbé John Berg, ainsi que de nombreux prêtres et moines de diverses congrégations et communautés traditionnelles, assistaient à l’ordination. Parmi les invités polonais arrivés pour fêter l’ordination de Łukasz Joniak, il y avait de nombreux prêtres qui célèbrent régulièrement la messe dans la forme extraordinaire du rite romain dans leurs paroisses. Après la cérémonie, tous ont participé à un déjeuner offert traditionnellement à cette occasion par la direction du séminaire. L’évêque, Mgr Juan Ignacio Arrieta, accompagné du recteur du séminaire et du supérieur général de la Fraternité se sont personnellement rendus aux tables des ordinands pour parler un instant avec chacun d’eux et les bénir.
La Fondation « Inicjatywa Włodowicka », organisateur des camps d’intégration estivaux annuels Tradicamp, présente à tous les clercs nouvellement ordonnés, et à Łukasz et Jean en particulier, ses meilleurs vœux de protection maternelle de Notre-Dame et d’intercession de saint Joseph, et les assure de ses prières, tout en attendant d’autres cérémonies joyeuses d’ordination des clercs liés à ses activités.
II – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) La venue de Mgr Arrieta à Wigratzbad est avant tout pour Paix Liturgique l'occasion de saluer le labeur efficace et précieux accompli par la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre depuis sa fondation, et notamment par son supérieur depuis 2006, l'abbé John Berg. Le nombre de futurs prêtres concernés par la cérémonie du 11 février dernier donne la mesure des fruits produits par la FSSPX : 33 ! Auquel il convient d'ajouter les 23 ordinands du séminaire américain de la Fraternité en novembre 2011 et janvier dernier.
2) La venue d'un prélat de l'Opus Dei à Wigratzbad a en réalité un précédent : le 11 mai 2002, Mgr Klaus Küng, actuel évêque autrichien de Sankt Pölten et alors évêque de Feldkirch, y conférait les ordinations au diaconat. Mais cette première resta sans lendemain et, depuis la promulgation du Motu Proprio Summorum Pontificum par Benoît XVI, aucun membre de l'Opus Dei n'avait encore publiquement célébré la forme extraordinaire du rite romain.
3) Nous pouvons confirmer la satisfaction de célébrer la forme extraordinaire du rite romain exprimée par Mgr Arrieta lors de la cérémonie. Voici en effet ce qu'il a déclaré lors de son homélie : “ C'est vraiment avec plaisir que j'ai accepté d'être présent ici aujourd'hui pour conférer les ordres mineurs et le sous-diaconat à un groupe bien fourni de séminaristes. Je le fais vraiment avec joie et, comme prêtre, le fait d'avoir dû apprendre un peu le rite extraordinaire m'a aussi profité. ” Ces quelques mots témoignent tout autant des bienfaits que représente la célébration de la liturgie traditionnelle pour un prêtre habitué à célébrer, dignement, la forme ordinaire, que de l'humilité avec laquelle Mgr Arrieta a répondu à l'invitation de la FSSP.
4) Une hirondelle ne fait pas le printemps et nous n'affirmerons pas que l'Opus Dei a choisi de devenir purement et simplement bi-formaliste. Mais on n’ignore pas qu’un certain nombre de prêtres de la Sainte-Croix (la branche sacerdotale de la Prélature) ne répugnent pas à célébrer la messe en la forme extraordinaire. Le geste de Mgr Arrieta s'ajoute à d'autres petits signes enregistrés à Rome ces derniers mois : la célébration régulière de la liturgie traditionnelle à l’Université pontificale de la Sainte-Croix et la lente ouverture de la basilique Saint-Eugène à la forme extraordinaire, institutions toutes deux dirigées par l'Opus Dei. Rappelons que, même s'il avait accepté le missel de Paul VI pour son ordre, saint Josémaria Escrivá de Balaguer avait bénéficié du privilège de célébrer sa vie durant sa messe quotidienne selon la liturgie traditionnelle.