SOURCE - Jeanne Smits - Présent - 13 janvier 2010
Le curé de la petite ville normande de Thiberville (qui dessert les 14 clochers environnants), l’abbé Francis Michel, est sous le coup de ce que l’on pourrait appeler une « expulsion » et une « exclusion », décidées par l’évêque d’Evreux. « Jeune » évêque par l’ancienneté (nommé en 2005), Mgr Christian Nourrichard est de cette école en voie de disparition des curés de l’après-68. Inaugurateur de mosquée, « chanoine » de la cathédrale anglicane de Salisbury (diocèse « jumelé » avec Evreux) où il fut officiellement accueilli à ce poste honorifique lors de l’Evensong (office anglican du soir) le 13 octobre dernier. L’« évêque » de Salisbury s’était alors réjoui de recevoir son collègue duquel il espère beaucoup apprendre : il s’est dit « impatient » de tirer des leçons des « solutions imaginatives » mises en place à Evreux où l’on compte quatre fois moins de prêtres que Salisbury ne dispose de clergé pour une surface de même taille :
« En particulier, leur choix d’utiliser des laïcs aux postes de responsabilité et de direction est un modèle que j’aimerais nous voir explorer. »
C’est l’un des nœuds de cette affaire qui a incité les paroissiens de Thiberville et des autres paroisses – desservies avec toute l’énergie de l’apostolat convaincu par l’abbé Michel – à entrer en résistance contre leur évêque. Mgr Nourrichard tire argument de la désertification spirituelle de son diocèse pour reprocher à ces fidèles de vouloir conserver un curé pour 5 000 âmes. Comme beaucoup d’autres de son espèce, il préfère voir les laïcs faire du social et pousser la chansonnette plutôt que Jésus-Christ répandu et communiqué. Il veut en finir avec la paroisse de Thiberville pour l’inscrire dans un ensemble plus vaste, sous la lointaine responsabilité d’un super-curé, le père Jean Vivien, plus proche de son « modèle » sans prêtres et donc sans sacrements. Comme le note Alain Hasso dans le blog de Monde et Vie, un seul chiffre dit tout : en 2009, il y a eu 170 confirmations en tout et pour tout. Dont 40 à Thiberville…
L’autre nœud de l’affaire, c’est le caractère par trop papiste du curé de Thiberville. Conformément à l’appel de Benoît XVI, l’ayant même devancé de beaucoup, l’abbé Michel, arrivé il y a 22 ans à son poste qui est plus qu’un poste, le « foyer » où il exerce sa paternité spirituelle, y a vite instauré la célébration dans le rite Paul VI et dans le rite tridentin, le premier dans l’esprit de la « réforme de la réforme », le second parce qu’il existe de plein droit dans l’Eglise. Ses messes sont combles. Les églises restaurées et belles. Les enfants de chœur nombreux. Les mariages et les baptêmes aussi.
Mgr Nourrichard a tenté d’imposer le dimanche 3 janvier à Thiberville sa décision d’envoyer l’abbé Michel ailleurs faire le vicaire à Louviers, voire de l’envoyer nulle part : interpellé vigoureusement par des centaines de paroissiens, il a vu l’église se vider sous ses yeux pour aller assister ailleurs à la messe de leur curé. Doit-on s’offusquer de l’attitude des laïcs devant leur évêque ? Ils savent, ces laïcs, le caractère idéologique de la décision qui veut les priver de leur curé. Ils sont face à un Père qui refuse de leur donner le pain qu’ils demandent. Le pain de leurs âmes. Alors…
Le 8 janvier, Mgr Nourrichard l’a passé chez le nouveau nonce apostolique à Paris, Mgr Luigi Ventura. Il en est sorti une lettre à tous les catholiques d’Evreux où l’évêque (rêvant d’une « belle et dynamique » Eglise, de « communion » et de « Frères et Sœurs » apprennent « cette nouvelle manière de vivre en Eglise où il est demandé à des baptisés plus nombreux, davantage de collaboration avec leur curé et les autres prêtres au sein d’une paroisse qui est plus grande »), ne revient pas sur sa décision de le révoquer mais « l’autorise à continuer de célébrer la messe et à faire les inhumations ». Une marche arrière partielle que l’on doit aussi bien à la résistance des paroissiens, à la tranquille assurance de l’abbé Francis Michel appuyée sur les recommandations actuelles du Vatican sur la stabilité des curés de paroisse, au soutien des autorités municipales qui laissent à sa disposition presbytère et églises, et n’en doutons pas, au nonce. Mgr Nourrichard a d’ailleurs promis qu’il se soumettrait à la décision de Rome sur le recours de l’abbé Michel.
Cette affaire est un véritable test. Elle montre – outre les facteurs énumérés plus haut – le rôle aujourd’hui joué par internet qui permet une mobilisation immédiate, une information quasiment en direct (images et enregistrements à l’appui), une résonance qui dépasse largement les frontières de la France. Les blogs perepiscopus, celui d’Yves Daoudal, le Salon beige, e-deo et bien d’autres, le Forum catholique et un blog ad hoc, ont permis de faire connaître l’affaire en temps réel. De multiplier aussi le nombre de ceux qui prient pour cette cause. Il n’y a pas que des mauvaises nouvelles !
JEANNE SMITS (Article extrait du n° 7008 du Mercredi 13 janvier 2010)
Le curé de la petite ville normande de Thiberville (qui dessert les 14 clochers environnants), l’abbé Francis Michel, est sous le coup de ce que l’on pourrait appeler une « expulsion » et une « exclusion », décidées par l’évêque d’Evreux. « Jeune » évêque par l’ancienneté (nommé en 2005), Mgr Christian Nourrichard est de cette école en voie de disparition des curés de l’après-68. Inaugurateur de mosquée, « chanoine » de la cathédrale anglicane de Salisbury (diocèse « jumelé » avec Evreux) où il fut officiellement accueilli à ce poste honorifique lors de l’Evensong (office anglican du soir) le 13 octobre dernier. L’« évêque » de Salisbury s’était alors réjoui de recevoir son collègue duquel il espère beaucoup apprendre : il s’est dit « impatient » de tirer des leçons des « solutions imaginatives » mises en place à Evreux où l’on compte quatre fois moins de prêtres que Salisbury ne dispose de clergé pour une surface de même taille :
« En particulier, leur choix d’utiliser des laïcs aux postes de responsabilité et de direction est un modèle que j’aimerais nous voir explorer. »
C’est l’un des nœuds de cette affaire qui a incité les paroissiens de Thiberville et des autres paroisses – desservies avec toute l’énergie de l’apostolat convaincu par l’abbé Michel – à entrer en résistance contre leur évêque. Mgr Nourrichard tire argument de la désertification spirituelle de son diocèse pour reprocher à ces fidèles de vouloir conserver un curé pour 5 000 âmes. Comme beaucoup d’autres de son espèce, il préfère voir les laïcs faire du social et pousser la chansonnette plutôt que Jésus-Christ répandu et communiqué. Il veut en finir avec la paroisse de Thiberville pour l’inscrire dans un ensemble plus vaste, sous la lointaine responsabilité d’un super-curé, le père Jean Vivien, plus proche de son « modèle » sans prêtres et donc sans sacrements. Comme le note Alain Hasso dans le blog de Monde et Vie, un seul chiffre dit tout : en 2009, il y a eu 170 confirmations en tout et pour tout. Dont 40 à Thiberville…
L’autre nœud de l’affaire, c’est le caractère par trop papiste du curé de Thiberville. Conformément à l’appel de Benoît XVI, l’ayant même devancé de beaucoup, l’abbé Michel, arrivé il y a 22 ans à son poste qui est plus qu’un poste, le « foyer » où il exerce sa paternité spirituelle, y a vite instauré la célébration dans le rite Paul VI et dans le rite tridentin, le premier dans l’esprit de la « réforme de la réforme », le second parce qu’il existe de plein droit dans l’Eglise. Ses messes sont combles. Les églises restaurées et belles. Les enfants de chœur nombreux. Les mariages et les baptêmes aussi.
Mgr Nourrichard a tenté d’imposer le dimanche 3 janvier à Thiberville sa décision d’envoyer l’abbé Michel ailleurs faire le vicaire à Louviers, voire de l’envoyer nulle part : interpellé vigoureusement par des centaines de paroissiens, il a vu l’église se vider sous ses yeux pour aller assister ailleurs à la messe de leur curé. Doit-on s’offusquer de l’attitude des laïcs devant leur évêque ? Ils savent, ces laïcs, le caractère idéologique de la décision qui veut les priver de leur curé. Ils sont face à un Père qui refuse de leur donner le pain qu’ils demandent. Le pain de leurs âmes. Alors…
Le 8 janvier, Mgr Nourrichard l’a passé chez le nouveau nonce apostolique à Paris, Mgr Luigi Ventura. Il en est sorti une lettre à tous les catholiques d’Evreux où l’évêque (rêvant d’une « belle et dynamique » Eglise, de « communion » et de « Frères et Sœurs » apprennent « cette nouvelle manière de vivre en Eglise où il est demandé à des baptisés plus nombreux, davantage de collaboration avec leur curé et les autres prêtres au sein d’une paroisse qui est plus grande »), ne revient pas sur sa décision de le révoquer mais « l’autorise à continuer de célébrer la messe et à faire les inhumations ». Une marche arrière partielle que l’on doit aussi bien à la résistance des paroissiens, à la tranquille assurance de l’abbé Francis Michel appuyée sur les recommandations actuelles du Vatican sur la stabilité des curés de paroisse, au soutien des autorités municipales qui laissent à sa disposition presbytère et églises, et n’en doutons pas, au nonce. Mgr Nourrichard a d’ailleurs promis qu’il se soumettrait à la décision de Rome sur le recours de l’abbé Michel.
Cette affaire est un véritable test. Elle montre – outre les facteurs énumérés plus haut – le rôle aujourd’hui joué par internet qui permet une mobilisation immédiate, une information quasiment en direct (images et enregistrements à l’appui), une résonance qui dépasse largement les frontières de la France. Les blogs perepiscopus, celui d’Yves Daoudal, le Salon beige, e-deo et bien d’autres, le Forum catholique et un blog ad hoc, ont permis de faire connaître l’affaire en temps réel. De multiplier aussi le nombre de ceux qui prient pour cette cause. Il n’y a pas que des mauvaises nouvelles !
JEANNE SMITS (Article extrait du n° 7008 du Mercredi 13 janvier 2010)