Rabbi Yehuda Levin, le chef d’un groupe de 800 rabbins orthodoxes des États-Unis et du Canada, a également rejeté les accusations selon lesquelles le Saint-Siège n’a pas suffisamment pris de distance rapport aux déclarations faites sur l’Holocauste par l’évêque Richard Williamson, de la Fraternité Saint-Pie X. Il défend Benoît XVI en rappelant qu’il se trouvait derrière un grand nombre des démarches de réconciliation de son prédécesseur Jean-Paul II à l’égard des Juifs. Il estime que les dissidents et les mouvements progressistes de l’Eglise catholique au cours des quarante dernières années ont gravement sapé l’enseignement de l’Église catholique sur les enseignements moraux, la vie et la famille.
« Je soutiens cette démarche » de réconcilier cette faction traditionaliste de l’Eglise, a-t-il dit, « parce que je comprends la situation, qui est que l’Eglise catholique a un problème à régler. Il existe une forte aile progressiste dans l’Eglise qui fait des dommages incommensurables à la foi. »
Le rabbin Levin a dit qu’il comprend « parfaitement » pourquoi la réconciliation est indispensable, notamment dans la lutte contre l’avortement et contre l’homosexualité. « Je comprends qu’il est très important de remplir les bancs de l’Eglise catholique, et non pas avec les catholiques de culture progressiste qui contribuent à détruire l’Eglise catholique ou corrompre ses valeurs. Cette corruption a un effet de ruissellement sur chaque communauté religieuse dans le monde. »
« Qu’est-ce que le Pape fait ? Il essaie de faire revenir les traditionalistes, car ils peuvent sur de nombreux points contribuer à la communauté catholique (et à son évangélisation, ndlr). »
« Maintenant, si dans le processus, un personnage important du mouvement traditionaliste se met à dire des choses très étranges sur la Shoah, est-ce une raison pour jeter le bébé avec l’eau du bain et de commencer à condamner le Pape Benoît XVI ? Absolument pas ! »
Au cours d’une visite à Rome à la fin du mois de Janvier, le rabbin Levin a dit que la fureur des médias sur la levée des excommunications des quatre évêques de la Fraternité Saint Pie X était un faux-fuyant. Il a appelé « ridicules » les accusations selon lesquelles le pape Benoît VXI ou de l’Eglise catholique seraient antisémites. Il a décrit comme « très fortes » les déclarations de distanciation du Saint-Siège et de Benoît XVI à l’égard de Williamson.
Le rabbin Levin était à Rome pour la tenue de réunions avec de hauts responsables au Vatican afin de proposer ce qu’il appelle un « nouveau courant de pensée » pour l’Eglise sur le dialogue interreligieux, basé sur des enseignements moraux, en particulier sur le droit à la vie et la sainteté dans le mariage entre un homme et une femme.
« La question la plus importante », a-t-il dit, est le travail réalisé par l’Eglise « pour sauver les bébés de l’avortement, et sauver l’esprit des enfants et des jeunes, pour les aider à connaître le bien et le mal, sur la vie et la famille. C’est là que l’œcuménisme et le dialogue interreligieux a fort à faire. »
Bien que les chiffres soient difficiles à déterminer, il est estimé que la Fraternité Saint-Pie X a plus d’un million de fidèles dans le monde entier. Le mouvement traditionaliste de l’Eglise catholique est connu pour son orthodoxie doctrinale et son enthousiasme non seulement pour les anciennes pratiques de dévotion, mais aussi pour les enseignements moraux de l’Eglise et son opposition à la sécularisation post-moderne des mœurs. Les mouvements progressistes de l’Eglise, en particulier en Europe, se sont farouchement opposés à toutes les ouvertures vers la Fraternité Saint Pie X ou d’autres traditionalistes, en particulier avec la récente autorisation donné par le pape de faire revivre la traditionnelle messe en latin.
Le Vatican a annoncé en janvier la levée du décret d’excommunication visant la Fraternité Saint Pie X, dans le cadre des efforts déployés pour rapprocher les groupes intégristes séparés de Rome depuis 1988. Chronologiquement après cet évènement, une chaîne de télévision suédoise a diffusé une interview enregistrée en novembre 2008, dans laquelle Mgr Richard Williamson, l’un des quatre dirigeants de la Société, a déclaré qu’il ne croyait pas que six millions de Juifs ont été tués dans les camps de la mort nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale. À ce moment-là, les médias ont largement diffusé les protestations et les accusations selon lesquelles l’Eglise catholique et, en particulier, le pape Benoît XVI, seraient antisémites.
Le rabbin Levin a notamment défendu le pape Benoît XVI en disant qu’il était le génie derrière les démarches du précédent pape Jean-Paul II pour réconcilier l’Eglise avec la communauté juive. « Toute personne qui croit et suit l’histoire sait qu’au Vatican, au cours des trois dernières décennies, l’un des fondements moraux et intellectuels de la papauté de Jean-Paul II a été le cardinal Ratzinger. Et donc, beaucoup de choses que le pape Jean-Paul a réalisé vis-à-vis de l’Holocauste, Benoît XVI aurait pu le faire lui-même, comme la visite du pape à Auschwitz, aller parler dans une synagogue, ou encore demander pardon. »
« Un grand nombre de ces démarches sont directement imputables au cardinal Ratzinger. Celui qui ne comprend pas cela ne se rend pas compte que cet homme, le pape Benoît XVI, bénéficie de plusieurs décennies en matière de lutte contre le nazisme et de sympathie pour les Juifs. » |